1er janvier 1933
LEINTREY
Le renard derrière la cheminée.
L'autre jour, la fille de M. Chamley, le sympathique
maréchal-ferrant de Leintrey, apercevait, derrière la cheminée
de la forge paternelle, une boule de fourrure fauve d'où
émergeaient deux yeux perçants et une truffe luisante.
Mlle Chamley, surprise de cette découverte insolite, appela
immédiatement son père Celui-ci scruta du regard le derrière de
la cheminée. Evidemment, c'était une bête, quelque putois, sans
doute, mais une bête vivante qui s'était réfugiée là.
M. Chamley prévint alors un chasseur de Leintrey, M. Jacques
Camille, qui, arrivant avec son fusil, ajusta l'animal et fit
feu.
On retira alors l'animal de sa cachette. C'était un renard d'une
dizaine de livres, pourvu d'une magnifique fourrure.
Cette fourrure, confiée aux soins d'un naturaliste de Lunéville,
ornera bientôt les épaules de Mlle Chamley. 4 janvier 1933
DOMÊVRE-SUR-VEZOUZE
Trop vite. - En patrouille route nationale 4, territoire de
Domèvre, les gendarmes ont dressé contravention pour excès de
vitesse en automobile contre Vaégéle Jean, conducteur de travaux
publics à Nancy. 18 janvier 1933
BLAMONT
Service téléphonique. - Une association comprenant 37 abonnés du
réseau téléphonique de Blâmont s'est constituée en vue d'obtenir
l'autorisation d'utiliser le téléphone sans surtaxes avec tous
les bureaux ouverts les dimanches et jours fériés, de 11 heures
à 21 heures
L'autorisation sollicitée vient d'être accordée par
l'administration des postes.
Donc désormais le service téléphonique de Blâmont fonctionnera
les dimanches et jours fériés, de 8 heures à 21 heures, pour
tous les abonnés faisant partie de l'association. 10 mai 1933
CONSEIL GÉNÉRAL DE MEURTHE-ET-MOSELLE
[...] Un débat sur la concurrence du rail et de la route
M. Valentin rapporte la question de compression des dépenses de
la ligne de Lunéville à Blâmont et Badonviller et il propose de
fermer complètement la gare de Verdenal, dont le trafic est
insuffisant.
Cette question va soulever un long et délicat débat.
La situation des transports par rail et par route y est discutée
avec animation.
Le conseil étudie dans ses détails l'exploitation des chemins de
fer départementaux.
M. de Turckheim plaide la cause de la ligne de
Lunéville-Badonviller. MM. Dauphin et Chamvoux, celle de la
ligne Toul-Thiaucourt et en particulier de l'embranchement Essey-Thiaucourt.
MM. Roblot, Mazerand, Moreau, Fenal, Condé, Amidieu du Clos,
interviennent dans le débat.
Diverses solutions sont proposées. Des avis différents sont
formulés au sujet des avantages et des inconvénients du
transport par route et par rail.
Le conseil général se montre disposé à encourager la mise en
marche de « michelines », ce qui réduirait beaucoup les frais
d'exploitation des lignes secondaires.
Puis, après avoir entendu d'intéressantes explications de M.
Canel, ingénieur en chef des Ponts et Chaussées, M. Tourtel
propose de renvoyer la question à une session suivante.
Une proposition de M. Mazerand demandant à ce que
l'administration préfectorale présente une étude approfondie sur
la question du rail et de la route, est ensuite votée. 17 mai 1933
ANCERVILLER
Probité. - M. Lignon Henri a trouvé sur la route de Sainte-Pole
à Ancerviller un tricot d'enfant en laine blanche, ainsi qu'une
somme de 20 francs qu'il s'est empressé de remettre au
secrétariat de la mairie où le propriétaire pourra venir les
réclamer.
Félicitations à M. Lignon,
AVRICOURT
Dans les vignes. - Paul Stocq, manoeuvre, a été gratifié d'un
p.-v. pour ivresse publique et manifeste. 29 mai 1933
VAUCOURT
Décoration diocésaine. - L'évêque de Nancy a accordé la médaille
du Mérite diocésain à M. Charles Brancard, de Vaucourt. « A
rempli depuis plus de soixante-dix ans, avec une exactitude et
un désintéressement dignes d'éloges, les fonctions de chantre
dans sa paroisse. » 6 juin 1933
HARBOUEY
Quêtes à mariages. - La quête faite au mariage Zéler-Bazin a
produit la somme de 30 francs à répartir entre la caisse des
sapeurs-pompiers et la caisse des écoles.
Celle faite au mariage Jaxel-Denis a produit la somme de 38 fr.
10 au profit de la caisse des écoles.
Précédemment, au mariage Joly-Plauçon, la quête faite avait
produit la somme de 110 francs à répartir entre la caisse des
sapeurs-pompiers et celle des écoles.
Remerciements et voeux. 16 juin 1933
GOGNEY
Violation de domicile. - M. Triquet Joseph, 38 ans, demeurant à
Nancy, possède une maison à Gogney, à l'entrée du village.
Il y à un an environ, il avait vendu une motocyclette à M.
Dellou Raymond, actuellement manoeuvre à la maison Grouvé, de
Nancy. Or, dernièrement, ne voulant plus se servir de sa machine
et se trouvant gêné pour payer un garage à Nancy, il fut
convenu, avec M. Triquet, de la remiser dans la maison à Gogney,
Quelques jours plus tard, M. Dellou demanda la clé pour
reprendre sa motocyclette, mais le propriétaire refusa,
alléguant qu'il avait un compte à régler avec lui. La porte a
été trouvée ouverte et la machine a disparu. Plainte a été
portée pour violation de domicile.
Enquête de la gendarmerie.
VERDENAL
Insultes. - M. Berger Camille, 59 ans, garde particulier,
demeurant à Verdenal, a porté plainte contre M. Dussaulx, qui
l'a insulté en le traitant de « mouchard » 12 juillet 1933
Union des Femmes de France
Visite de la maison maternelle de Blâmont
La visite de la maison maternelle de Blâmont se fera, comme
annoncé, le samedi 22 courant. Départ à 1 h. 30. Retour vers 19
heures. Prix de la promenade : 15 francs et 10 francs pour les
infirmières et aide-auxiliaires.
Se faire inscrire avant le lundi 17 courant, chez Mme Mathieu,
7, rue I.epois, tél. 38-35.
Tous les membres du conseil d administration, toutes les
infirmières et toutes les personnes s'intéressant à cette oeuvre
de l'U.F.F. sont cordialement invités à participer à cette
promenade. 20 août 1933
BARBAS
Procès. - Procès-verbal à M. Malgras Gustave, demeurant à
Lunéville, qui a été rencontré circulant en automobile avec un
permis de conduire irrégulier et sans permis de circulation. 22 août 1933
DOMJEVIN
Police des étrangers. - Procès-verbal à Solenski Jean, sujet
polonais, ouvrier agricole chez M. Messager, à Domjevin, pour
n'avoir pas fait viser le récépissé de sa carte d'identité avant
son départ de Bouxières-aux-Chênes, où il était employé. 1er septembre 1933
BLAMONT
Mort du contre-amiral Lafrogne.
Le contre-amiral Lafrogne est mort le 31 août en son domicile à
Blâmont, à l'âge de 66 ans. Il était commandeur de la Légion
d'honneur, décoré de la croix de guerre américaine, ainsi que de
nombreux ordres étrangers. Souffrant depuis quelques mois, son
état de santé semblait s'améliorer, lorsqu'une nouvelle crise
survint, pour l'emporter rapidement. Il était né à Blâmont le 11
octobre 1867.
Après de brillantes études tant au collège de Blâmont qu'à
Stanislas à Paris, Henry Lafrogne fut admis dans les cadres de
la marine. Ce fut un chef distingué et, un savant. Nous nous
contenterons du reste de la déclaration d'un spécialiste de
notre marine nationale.
« Toute révérence gardée, écrit-il, le contre-amiral Lafrogne
peut être appelé l'homme-canon, ainsi disaient tous les marins
qui ont servi sous ses ordres.
Il est de ceux, entre les spécialistes contemporains français et
étrangers, qui s'adonnèrent le plus passionnément à la science
de l'artillerie. S'il est devenu marin, il est né artilleur ;
c'est la définition même de son existence.
Toutes ses facultés ont toujours été tendues vers l'amélioration
du tir naval ; il ne parle que de balistique, et s'il lui advint
de commander des torpilleurs, ce furent là des erreurs de
jeunesse au cours desquelles il cherche à démontrer
l'infériorité de l'engin sous-marin envers le canon.
La relation de cause à effet sera mise en évidence lorsqu'on
saura que le contre-amiral Lafrogne fut un mathématicien
remarquable. Séduit par les beautés de la théorie des
probabilités, il ne cessa de rechercher les secrets résidant en
l'utilisation des bouches à feu, et à rendre connexes pour elles
les qualités de justesse et de précision.
Il est des époques où les idées visant au progrès d'une science
sont débattues en divers milieux et sur le point d'aboutir ; il
appartient alors à un savant de les fixer. Le lieutenant de
vaisseau Lafrogne eut ainsi le talent de créer une nouvelle
méthode de tir. Le succès de la méthode fut universel ; son
inventeur, récompensé, fut considéré comme l'émule et l'égal du
commandant, anglais Percy Scott.
Capitaine de frégate à 43 ans, en 1911, il fut nommé chef
d'état-major du contre-amiral Cauchet. Cette collaboration fut
fructueuse au point de vue de l'entraînement de l'armée navale ;
elle eut à juste titre une autre suite. L'amiral devint le grand
maître de l'artillerie ; sa renommée lé désigna comme futur
généralissime. Son autorité incontestée devait dès lors servir à
la fortuné de son chef d'état-major. De fait, ce dernier, promu
capitaine de vaisseau en 1916, fut le capitaine de pavillon du
vice-amiral Gauchet, commandant la première escadre, et il le
suivit dans l'état-major de l'armée.
A l'Armistice, l'amiralissime, voulant rétablir le mode
d'instruction du personnel dans le cadre d'avant-guerre,
reconstitua la division des écoles. Il ne pouvait en confier le
commandement qu'au chef qu'il jugeait le plus digne, le
commandant Lafrogne. Cette désignation était une évidente
indication en vue de l'amiralat.
L'heure de la retraite ayant sonné, pour cet officier général,
l'exécution de quelques propositions de son testament fut
ajournée. Les candidats qui servirent rue Royale surent faire
valoir leurs titres ; certain qui avaient annoncé la promotion
du commandant Lafrogne reçurent les étoiles avant lui.
Un palier survenait ainsi dans la courbe régulièrement
ascendante de sa fortune. Le commandant supporta avec grande
sérénité ce délai supplémentaire qu'on jugea bon, en haut lieu,
de lui imposer, ainsi que cette autre épreuve qui lui valut de
rentrer dans le rang en cédant la division à un contre-amiral.
La récompense lui fut décernée an moment même où prenait fin sa
période de commandement.
Nous adressons à sa famille nos condoléances émues. 3 septembre 1933
Les obsèques du contre-amiral Lafrogne
Hier matin ont eu lieu à Blâmont (Meurthe-et-Moselle) les
obsèques de M. le contre-amiral Lafrogne, du cadre de réserve,
commandeur de la Légion d'honneur, décédé à l'âge de 66 ans.
Sur le cercueil avaient été posées la tunique noire rehaussée de
broderies d'or du défunt, son épée et son bicorne; les
nombreuses décorations dont l'amiral Lafrogne était titulaire
étaient épinglées sur un coussin porté par un sous-officier des
sapeurs-pompiers. Derrière la famille suivaient une délégation
d'officiers de plusieurs régiments de Lunéville en grande tenue,
un capitaine de vaisseau, la clique de la compagnie des
sapeurs-pompiers, une délégation de l'A.M.C. drapeau en tête, M.
le maire de Blâmont et son conseil municipal, et une nombreuse
assistance parmi laquelle nous avons remarqué la plupart des
personnalités de la région.
Au cimetière, M. Colin, maire de Blâmont, prit le premier la
parole et retraça dans une très belle allocution la vie toute de
droiture et de travail du savant et du marin qui honora avec
tant d'éclat sa ville natale.
M. le colonel d'Hausen apporta ensuite le salut de l'armée à
celui qui en fut une gloire, et dont la carrière peut être citée
en exemple aux jeunes.
Puis M. Labourel, au nom de l'A.M.C. de Blâmont, déposa sur le
cercueil de l'amiral Lafrogne la palme du souvenir.
Nous renouvelons à MM. Joseph et Charles Lafrogne et à toute la
famille l'expression de nos vives condoléances 17 septembre 1933
BARBAS
Cantonnement. - Un détachement du 31e régiment de dragons,
composé de quinze officiers, vingt-six sous-officiers, cent dix
soldats et deux cent trente chevaux cantonnera à Barbas le 5
octobre.
HARBOUEY
Attention au mobilier. - Mme Blanchet, demeurant à Harbouey, en
instance de séparation de corps et de biens, a pris les devants,
pour déménager sur un camion le mobilier qui se trouvait dans le
logement commun aux époux.
Le mari, M. Blanchet Joseph, réclame un fusil de chasse, des
diplômes et décorations, ainsi que son carnet d'heures de
travail et des fiches d'assurance.
Enquête. 19 octobre 1933
COUR D'ASSISES DE MEURTHE-ET-MOSELLE
L'incendiaire de Blémerey
Pour quels motifs Robert Prudhomme, 24 ans, cultivateur à
Blémerey, incendia-t-il la meule de paille et de fourrage de M.
Nuss, dont il courtisait la fille ? Etait-il torturé par la
jalousie ? Avait-il le cafard ? S'était-il livré à des excès de
boisson ?
On pourrait s'étonner que cette pittoresque histoire de village
ait eu les honneurs d'une imposante audience de la Cour
d'assises. Le Tribunal correctionnel, certes, aurait pu en
quelques instants liquider un aussi modeste procès, mais la loi
exige que les incendiaires soient déférés au jury.
C'est pourquoi Robert Prudhomme, qui avait bénéficié d'une mise
en liberté provisoire, est venu s'asseoir mercredi après-midi au
banc des accusés.
Très grand, robuste, il a une large figure imberbe qui ne
respire pas l'intelligence.
Il tourne entre ses doigts une casquette jaune et garde un
silence embarrassé au cours de l'interrogatoire.
L'INTERROGATOIRE
M. le Président évoque les antécédents de Prudhomme qui perdit
son père à l'âge de 2 ans. Il fut élevé par ses grands parents à
Gélacourt, où il fréquenta l'école jusqu'à 14 ans. Il était noté
comme peu intelligent. Il travailla ensuite à Blémerey, chez son
beau-père.
M. le Président. - Vous étiez un bon ouvrier, mais vous buviez
beaucoup, surtout le dimanche.
De caractère sournois, renfermé, l'accusé ne devenait un peu
communicatif que lorsqu'il était sous l'influence de la boisson.
M. le président. - Vous n'aviez cependant jamais fait parler de
vous jusqu'au jour où vous avez volé un coq dans la basse-cour
de votre beau-père pour manger avec des amis.
Ou soupçonna diverses personnes et ce ne fut qu'après de
nombreuses démarches que les gendarmes interrogèrent Prudhomme
et recueillirent ses aveux. Le beau-père retira aussitôt sa
plainte
M. le président. - Vous aviez pour voisins à Blémerey, la
famille Nuss. Le père est un cultivateur estimé d'origine
alsacienne. Vous avez courtisé sa fille Marie.
Prudhomme, qui fréquentait beaucoup la maison Nuss, ébaucha des
projets de mariage avec la jeune fille. Les parents de celle-ci
donnèrent leur assentiment, mais la mère et le beau-père de
Prudhomme semblèrent s'y opposer pour diverses raisons.
Mlle Nuss s'abandonna aux sollicitations de Prudhomme avec
l'espoir que la naissance d'un enfant triompherait de la
résistance des parents de son ami.
Malheureusement elle fit une fausse-couche. Quand elle fut
rétablie, Prudhomme voulut reprendre ses assiduités près d'elle,
mais Mlle Marie Nuss déclara qu'elle n'écouterait plus ses
galants propos tant qu'il ne serait pas décidé à l'épouser.
Prudhomme fit, en effet, une nouvelle démarche près de ses
parents.
Sa mère, peut-être à contre coeur, sembla finalement décidée à
donner son consentement.
Tout semblait s'arranger, mais Prudhomme s'imagina bientôt que
Mlle Nuss ne tenait plus à lui. Il mit sa mère au courant de ses
inquiétudes. Elle fit une démarche près de la jeune fille et put
rapporter à son fils l'assurance que Mlle Nuss lui restait
fidèle.
Fin octobre, Prudhomme ayant refusé d'accompagner Mlle Nuss à la
fête d'Harbouey, la jeune fille s'y rendit quand même. Cet acte
d'indépendance enflamma la jalousie de Prudhomme.
Le lundi 14 novembre, en revenant de la fête de Saint-Martin, il
décida, en arrivant à proximité d'une grosse meule de paille
appartenant à M. Nuss, d'y mettre le feu pour se venger.
Il frotta deux allumettes et les jeta sur la meule qui fut
bientôt dévorée par les flammes.
Le préjudice causé à M. Nuss fut évalué à plusieurs milliers de
francs.
Les gendarmes de Blâmont ouvrirent une enquête qui ne semblait
devoir donner aucun résultat, quand ils apprirent que Mlle Nuss
était brouillée avec son fiancé.
Ils allèrent alors interroger Prudhomme.
Après avoir tout d'abord protesté de son innocence, celui-ci
passa finalement aux aveux. Il prétendit qu'un jeune homme qu'il
ne connaissait pas lui aurait révélé dans un bal qu'il était son
rival. Dès ce moment, il aurait eu des doutes sur la sincérité
de sa fiancée, et la jalousie l'aurait torturé.
M. le Président. - On a fait une enquête pour retrouver ce jeune
homme.
On a été obligé de conclure qu'il n'existait que dans votre
imagination.
Prudhomme ne répond pas.
M. le Président. - Vous avez prétendu également que vous aviez
bu plus que de raison à la fête de Saint-Martin, le 14 novembre.
Or, tous les témoins entendus ont dit que vous n'étiez pas ivre
ce soir-là.
Pourquoi Prudhomme incendia-t-il la meule de paille et de foin
de M. Nuss ?
- Si je n'avais pas été ivre, je ne l'aurais pas fait,
déclara-t-il au cours de l'instruction.
M. le Président. - On peut se demander si vous n'étiez pas
irrité parce que Mlle Marie Nuss ne voulait plus être votre
maîtresse tant que vous ne seriez pas décidé à l'épouser ?
Prudhomme ne répond pas.
M. le Président. - Quoi qu'il en soit, vous avez incendié les
récoltes d'un homme qui vous recevait chez vous et qui ne
demandait qu'à vous donner sa fille en mariage !
En terminant l'interrogatoire. M le Président signale que
l'accusé n'a pu indemniser M. Nuss, bien qu'il ne soit flatté
d'avoir 15.000 fr. en banque.
- Vous n'avez rien voulu lâcher, lui dit-il.
LES TEMOINS
M. le docteur Aubry, de l'Asile de Maréville, a examiné
Prudhomme au point de vue mental. Il a pu constater que celui-ci
était presque illettré et peu intelligent. Il porte évidemment
le poids d'une lourde hérédité alcoolique, mais il se rend
compte de ses actes, et sa responsabilité doit être retenue dans
une mesure atténuée.
M. Nuss, cultivateur, énumère longuement les quantités de
fourrage et de paille que sa meule pouvait contenir.
Il fut stupéfait qu'on l'ait incendiée, car il ne se connaissait
pas d'ennemis.
- J'ai été encore plus en colère en apprenant que c'était
Prudhomme, car il était toujours bien reçu à la maison,
ajoute-t-il.
Mlle Marie Nuss, 22 ans, confirme à la barre qu'elle était
disposée à se marier avec Prudhomme, mais c'est lui au contraire
qui cherchait à l'éviter. Depuis, elle habite Strasbourg.
M. Charles Claudun, 48 ans, débitant à Saint-Martin, met
l'auditoire en gaité par ses déclarations joviales.
- Vous jurez de dire toute la vérité ? lui demande M. le
Président en lui faisant prêter le serment d'usage.
- Oh ! je n'ai jamais fait que cela ! s'écrie M. Claudun.
Il assure ensuite que l'accusé n'avait bu chez lui que deux
cannettes de bière le soir du 14 novembre.
- Alors, il n'était pas excité par la boisson ?
- Oh ! non ! il aurait été bien plus rigolo, répond M. Claudin,
en homme qui s'y connaît.
M. Claudin quitte la barre en faisant le salut militaire.
Un autre témoin de Saint-Martin confirme que Prudhomme n'était
pas ivre le soir où il fit flamber la meule
LES PLAIDOIRIES
Me Mougin, du barreau de Lunéville, se porte partie civile pour
M. Nuss. Il évalue à 5.000 fr. la valeur de la meule détruite
par Prudhomme et celui-ci offrit seulement 200 francs à M. Nuss,
en dédommagement
Recherchant à quels mobiles Prudhomme avait obéi en incendiant
la meule, Me Mougin estime qu'il a voulu se venger de Mlle Marie
Nuss, qu'il aurait bien voulu conserver comme maîtresse, mais
qu'il ne voulait pas épouser.
M. l'avocat général Ducasse demande aux jurés de rapporter un
verdict de culpabilité qui permettra une application modérée de
la loi.
Me Nicolas, du barreau de Lunéville, présentant la défense de
l'accusé, fait ressortir que seuls les aveux de celui-ci ont
permis d'établir sa culpabilité.
Pourquoi a-t-il brûlé la meule de M. Nuss ?
« Pour toute explication, il m'a dit qu'il avait le cafard ce
soir-là », déclare Me Nicolas II ne faut pas, croit-il,
rechercher des mobiles plus compliqués, car Prudhomme, fils
d'alcoolique et alcoolique lui-même, n'a qu'une intelligence et
une responsabilité très limitées.
Me Nicolas, après avoir indiqué pour quels motifs les parents de
l'accusé s'étaient tout d'abord opposés au mariage projeté,
ajoute que M. Nuss aurait déjà été désintéressé s'il avait
demandé une indemnité plus raisonnable.
Les jurés ayant rapporté un verdict de culpabilité mitigé par
les circonstances atténuantes, Prudhomme est condamné à 2 ans de
prison avec sursis et à 5.000 francs de dommages-intérêts envers
la partie civile. 16 novembre 1933
A un passage à niveau près de Bénaménil une automobile est
fauchée par le train départemental L.B.B.
DEUX MORTS, UN BLESSE
Lunéville, le 15 novembre. - Aujourd'hui, à 17 heures, un
terrible accident s'est produit sur la route nationale
Paris-Strasbourg, à 800 mètres au delà de Bénaménil, au passage
à niveau se trouvant à l'intersection de la route nationale et
de la route de Domjevin, lieu dit La Justice,
Une grosse voiture 6 cylindres venant de Lunéville et se
dirigeant vers Strasbourg est entrée en collision avec la
machine d'un convoi du train départemental L. B. B.
Il est à présumer que le chauffeur de l'automobile a confondu
les lanternes de la locomotive avec les phares d'une voiture
venant de Domjevin. Lorsqu'il s'aperçut de sa méprise, il était
trop tard, la lourde machine avait tamponné de flanc
l'automobile. Celle-ci était occupée par trois personnes : M.
Albert Gerig, entrepreneur de travaux publics à Strasbourg, qui
s'occupe actuellement de la réfection des voies urbaines à
Lunéville ; M. Richert, maire de Brumath, chevalier de la Légion
d'honneur, et le chauffeur de M. Gérig, Franck Frédéric.
Ces trois personnes furent projetées hors de la voiture, dans le
fossé en bordure de la route. M. Gérig et M. Richert furent tués
sur le coup. L'un d'eux était entièrement scalpé et la matière
cérébrale s'échappait de l'horrible blessure.
L'autre avait également le crâne ouvert et en outre une jambe
arrachée.
Le chauffeur, étendu sans connaissance dans un champ, a été
relevé et transporté à l'hôpital de Lunéville par un autocar. Il
a une clavicule brisée et porte de multiples blessures sur tout
le corps. Son état est très grave.
Lorsque nous sommes arrives sur les lieux de L'accident, la
carrosserie de la voiture tamponnée finissait de se consumer.
D'autre part, le tram L. B. B., sous la violence du choc, avait
déraillé et s'était arrêté après avoir roulé sur le ballast sur
une longueur de 60 mètres.
Une demi-heure après l'accident, M. Jacques Henry, sous-préfet,
arrivait et organisait sur la grand'route avec les gendarmes, un
service d'ordre. Il fit placer les cadavres sur une voiture et
pria M. Rizzi, maire de Bénaménil, de les faire transporter dans
un local décent de cette localité.
Les constatations légales furent faites par le médecin d'Ogéviller.
A 19 heures, M. Desjardins, procureur de la République, arrivait
sur les lieux et entendait M. Charnel, directeur du L. B. B. et
lui donnait des indications sur les causes probables et les
circonstances de ce terrible accident.
Ajoutons que M. Gérig et M. Richert avait passé une partie de
l'après-midi dans le cabinet de M. Marchal, directeur des
travaux de Lunéville, à discuter sur les travaux en cours dont
M. Gérig avait la charge. 28 novembre 1933
Mlle HURÉ auteur de la substitution des vitraux de Fécamp
L'affaire des vitraux de l'église abbatiale de Fécamp, qui
semblait devoir rester longtemps encore très obscure, vient
d'être totalement éclaircie par les aveux sans réticence du
principal auteur de la substitution.
On sait que ces chefs-d'oeuvre de l'art religieux du XIVe siècle
avaient été confiés, au cours de l'année 1928, pour être
restaurés, à Mlle Marguerite Huré, maître-verrier à
Boulogne-sur-Seine. Celle-ci agissait pour le compte de
l'administration des Beaux-Arts.
Or, quelques années plus tard, une dénonciation provoqua une
enquête, qui démontra qu'une partie des précieux vitraux avaient
été remplacés par d'adroites copies.
M. Fougery, juge d'instruction, saisi par le parquet d'un
réquisitoire pour escroquerie, abus de confiance et complicité
contre X..., s'empressa, avec l'aide de M. Verrier, inspecteur
général des monuments historiques, d'ouvrir une enquête et de
procéder à un certain nombre de perquisitions.
L'enquête devait promptement aboutir. Aujourd'hui, le nom du
coupable vient d'être publié dans la presse. Il s'agit de Mlle
Marguerite Huré, maître-verrier, à Boulogne-sur-Seine. Après
avoir commencé à nier, Mlle Huré a avoué être l'auteur de la
substitution des copies de vitraux, exécutées par elle-même.
Mlle Huré est connue dans notre arrondissement. Maître-verrier
d'indiscutable talent, c'est elle qui a exécuté les verrières du
choeur de l'église de Domèvre-sur-Vezouze. Ces verrières,
conçues dans un art tout moderne, imitent des dessins de
Primitifs. Ils ne donnaient pas, d'ailleurs, satisfaction à M.
le chanoine Renault, curé de Saint-Pierre de Nancy, curé de
Domèvre-sur-Vezouze en 1924, époque à laquelle les vitraux
furent exécutes et posés. Ils ne répondaient point, à son avis,
aux nécessités de compréhension du symbole et de renseignement
du catéchisme.
Dans son livre sur l'arrondissement de Lunéville, le regretté
docteur Delorme consacre à ces vitraux une note brève et dénuée
de bienveillance.
Mlle Marguerite Huré était, en 1924, une jeune femme de 25 ans,
très masculine d'allures. Elle séjourna pendant trois semaines à
Domèvre, pendant toute la, durée des travaux de pose de ses
vitraux. Beaucoup d'habitants de Domèvre se rappellent la
pittoresque physionomie de cette jeune femme, souple et
garçonnière, et qui fumait la pipe comme un garde champêtre.
OGÉVILLER
Auto contre un arbre. - Le 22 courant, le brigadier Percher, de
la 20e compagnie du train, qui avait conduit une voiture
sanitaire à Saverne, regagnait sa résidence, accompagné du
soldat Crochet Louis-André. Il pilotait une camionnette
lorsqu'arrivé entre Ogéviller et Bénaménil, il voulut dépasser
une automobile.
Ayant obliqué fortement à gauche, sa voiture heurta un arbre, en
bordure de la route.
Le choc fut si violent que le radiateur fut défoncé et les
vitres volèrent en éclats.
Le brigadier Percher fut sérieusement blessé et conduit, par un
automobiliste, à Bénaménil, où il reçut les premiers soins.
II fut ensuite transporté à l'hôpital militaire de Lunéville.
Quant au soldat Crochet, il est sorti indemne de l'accident.
Dégâts matériels importants. Enquête.
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