Le retour des réfugiés dans les cantons libérés de
Blâmont, Cirey et Badonviller est soumis fin 1918,
par un
arrêté ministériel
du 5 décembre, à une demande préalable
d'autorisation. Ainsi, seul le préfet de
Meurthe-et-Moselle a qualité pour accorder les
autorisations de retour : les réfugiés doivent
rédiger une demande, remettre cette demande au maire
de leur résidence de refuge, qui la transmet au
préfet du département de refuge, qui la fait ensuite
parvenir pour décision au préfet de
Meurthe-et-Moselle. Si la décision est favorable,
les frais de transport sont gratuits pour les
personnes et les bagages : 80 kilogrammes par adulte
et 70 kilogrammes par enfant de trois à sept ans
(maximum de 300 kilogrammes par famille).
On ne dispose pas de chiffres officiels sur le
nombre de réfugiés durant la guerre : selon les
estimations de l'Union des Comité Centraux des
réfugiés des départements envahis, et de
l'Inspection générale, il y aurait eu environ 1 800
000 réfugiés bénéficiant d'une allocation à la fin
de la guerre, et 500 000 réfugiés non-assistés. Le
retour des réfugiés, encouragé par le gouvernement,
pose cependant des difficultés pour assurer
logement, ravitaillement et travail des rapatriés,
au point qu'en septembre 1919, les préfectures
demandent la suspension des retours.
A la demande des comités départementaux d'assistance
aux réfugiés, divers arrêtés d'autorisation générale
de retour sont reportés pour ne
pas supprimer les allocations de secours aux
réfugiés, toujours au nombre de 460 000 en janvier
1920 ; en effet, les réfugiés bénéficiaires de
l'allocation peuvent continuer à recevoir ces
allocations dans la commune où ils sont rentrés, et
cela jusqu'à uniquement trois mois après la date de
l'autorisation générale de retour (voir
réponse
ministérielle ci-dessous). |
Le monde illustré -14 avril 1923. Note : Le chiffre
imposant (et étrangement précis) de 4690183
habitants des régions libérées cumule l'exode
spontané, les évacuations, les personnes déplacées,
les habitants des régions envahies rapatriés,...
|
Les arrêtés d'autorisation générale de retour
sont des arrêtés préfectoraux. La loi sur la réparations des
dommages causés par les faits de guerre du 17 avril 1919
(JO du 18 avril - p ; 4050) prévoit (art. 5 § 8)
la notion de « zone dévastée
» ; un arrêté du 12 août 1919
(JO du 13 août - p. 8648) fixe la
délimitation de ces zones dévastées, et il appartient au préfet
de classer les communes parmi ces zones, en 1ere
catégorie, qui permet un arrêté préfectoral de retour général,
ou en 2ème catégorie (cette seconde catégorie ne
donnera donc jamais lieu à un arrêté général de retour).
Journal officiel de la République française
6 décembre 1918 - p. 10519
PRESIDENCE DU CONSEIL
Le président du conseil, ministre de la guerre et le
ministre de l'intérieur,
Vu le décret du 18 juillet 1918 réglementant la
circulation sur le territoire français;
Vu le décret du 6 septembre 1918, et spécialement
l'article 2 de ce décret qui dispose que :
« les modifications qu'il serait nécessaire
ultérieurement d'apporter au tableau annexé au
décret du 18 juillet 1918 seront réalisées par
arrêté des ministres de la guerre et de l'intérieur
» ;
Vu les arrêtés des 28 octobre, 22 novembre et 1er
décembre 1918 ;
Vu le décret du 20 mars 1918, relatif à la vente, à
la circulation, à l'emploi du pétrole et de
l'essence, ainsi qu'à la circulation des véhicules
automobiles ;
Considérant que le retour des habitants dans les
régions libérées ne peut. être autorisé que dans la
mesure où le permet la situation des communes, au
point de vue, tant de leur facilité matérielle
d'accès et de ravitaillement que de leurs conditions
d'hygiène, de sécurité et d'habitabilité ;
Sur la proposition du commissaire général à la
sûreté nationale,
Arrêtent:
Art. 1er. - Les citoyens français résidant dans la
zone de l'intérieur doivent être munis d'une
autorisation délivrée par le préfet du département
destinataire, pour se rendre dans la partie de la 2e
section de la zone des armées, délimitées comme suit
:
Département du Nord : partie de l'arrondissement
d'Hazebrouck, située à l'est de la voie ferrée
passant par Poperinghe, Hazebrouck, Merville, la
Gorgue ; arrondissement de Lille, Douai,
Valenciennes, Cambrai, Avesnes.
Département du Pas-de-Calais : parties des
arrondissements de Béthune et d'Arras situées à
l'est de la voie ferrée de la Gorgue à Béthune, de
la route nationale n° 37 de Béthune à Arras, de la
voie ferrée d'Arras à Albert.
Département de la Somme : parties des
arrondissements de Péronne, d'Amiens et de
Montdidier situées à l'est des voies ferrées passant
par Arras, Albert, Corbie, Amiens, Moreuil,
Montdidier jusqu'à la limite de l'Oise.
Département de l'Oise : parties des arrondissements
de Clermont et de Compiègne situées à l'est et au
nord des voies ferrées passant depuis la limite de
la Somme, par Estrées Saint-Denis, Compiègne,
Villers-Cotterets.
Département de l'Aisne : parties des arrondissements
de Soissons et de Château-Thierry situées à l'est et
au nord des voies ferrées passant par Compiègne
Villers-Cotterets, Troesnes, Coincy, Château-Thierry
jusqu'à la limite de la Marne ; arrondissement de
Laon Saint-Quentin, Vervins.
Département des Ardennes : en entier.
Département de la Marne : partie du canton de
Dormans située au nord de la voie ferrée ;
arrondissement de Reims à l'exception du canton d'Ay
; cantons de Suippe, Ville-sur-Tourbe,
Sainte-Menehould.
Département de la Meuse : canton de Vaubecourt et de
Triaucourt ; cantons de Vigneulles et de
Saint-Mihiel ; arrondissements de Verdun et de
Montmedy.
Département de Meurthe-et-Moselle : cantons de
Domèvre-en-Haye et de Thiaucourt ; arrondissement de
Briey ; cantons de Pont-à-Mousson et Nomeny ;
parties des cantons de Nancy, de
Saint-Nicolas-du-Port et de Lunéville, situées à
l'est et au nord de la voie ferrée de Nancy à
Lunéville ; cantons de Blamont, Cirey, Badonvillers.
Art. 2. - Les demandes d'autorisation sont adressées
au préfet du département de résidence du demandeur
(département de refuge pour les réfugiés), et remise
par les intéressés aux maires des communes de
résidence ou de refuge qui les transmettent au
préfet. Ce dernier les fait parvenir au Préfet du
département destinataire, qui statue.
Art. 3. - Le commissaire général à la sûreté
nationale est chargé de l'exécution du présent
arrêté.
Fait à Paris, le 5 décembre 1918.
Le président du conseil, ministre de la guerre,
GEORGES CLEMENCEAU.
Le ministre de l'intérieur,
J. PAMS.
Journal officiel de la République française. Débats
parlementaires. Chambre des députés
p. 652 - Chambre des députés - 2e séance du 14 février 1919
RÉGIONS LIBÉRÉES
26321. - M. Maurice Braibant, député, demande à M. le ministre
de l'intérieur si les réfugiés retournant dans leur département
d'origine ont encore droit à bénéficier de l'allocation
quotidienne des réfugiés et, dans la cas de l'affirmative, quel
est le laps de temps pendant lequel ils peuvent la percevoir.
(Question du 21 janvier 1919.)
Réponse. - Les réfugiés qui reçoivent les allocations de
réfugiés dans leur lieu de refuge et qui sont autorisés à
rentrer dans leur commune d'origine peuvent continuer à recevoir
les secours de réfugiés dans la commune où ils sont rentrés, et
cela jusqu'à la date de l'autorisation générale de retour dans
la commune (autorisation générale qui n'interviendra
qu'ultérieurement) et pendant trois mois à partir de cette date.
Pour être admis à cette prolongation d'assistance, il suffit aux
réfugiés allocataires, lorsqu'ils s'adressent au préfet de leur
département de refuge leur demande de moyens de transport
gratuit ou d'autorisation de retour, de mentionner qu'ils
désirent continuer à recevoir l'allocation de réfugiés dans la
commune de retour. Il a été décidé, d'autre part, que le
secours, une fois donné de vingt francs institué par l'article
34 ou l'instruction sur les réfugiés, pour être remis à ces
derniers au moment où ils arrivent dans leur lieu de refuge,
serait également alloué aux habitants réintégrés, au moment où
ils rentrent dans leur commune d'origine. Il en est de même du
secours de loyer.
Arrêté fixant la délimitation de la zone dévastée pour
l'application de l'article 5, paragraphe 8 de la loi du 17 avril
1919 relative à la réparation des dommages de guerre :
Journal Officiel du 13 août - p. 8648
MINISTERES DES REGIONS LIBEREES
Le ministre des régions libérées,
Vu le paragraphe 8 de l'article 5 de la loi du 17 avril 1919,
aux termes duquel : « le remploi a lieu en immeubles ayant la
même destination que les immeubles détruits, ou une destination
immobilière, industrielle, commerciale ou agricole, dans la
commune du dommage ou dans un rayon de 50 kilomètres, sans
sortir de la zone dévastée. Toutefois, dans le cas
d'expropriation ou de rachat des terres par l'Etat, le remploi, pourra être effectué, en matière agricole, dans l'étendue des
régions dévastées.
Considérant qu'il est de toute nécessité, pour l'application de
ce paragraphe, de définir les limites de la zone dévastée, de
manière à permettre aux sinistrés de prendre en pleine
connaissance de cause les décisions qu'il leur appartient de
prendre, en ce qui concerne le remploi de leurs indemnités de
dommages;
Considérant que la loi n'a pas désigné expressément l'autorité à
laquelle il appartient de statuer sur ce point, mais qu'elle a
remis, d'une façon générale, à l'autorité administrative,
réserve faite des recours de droit commun contre les décisions à
intervenir, l'appréciation des questions relatives au remploi;
Considérant que la zone dévastée à l'intérieur de laquelle le
remploi doit pouvoir être effectué, conformément à l'article 5,
paragraphe 8, semble devoir comprendre :
1° Toute l'étendue des territoires envahis et occupés
temporairement par l'ennemi en forces, d'une manière assez
prolongée pour qu'il ait pu se livrer au pillage et à la
destruction et cela tant au cours de la première avance des
Allemands en 1914, que de leur dernière offensive de 1918;
2° Les régions situées au voisinage plus ou moins immédiat du
front, qui ont dû être évacuées par la population civile sous la
pression des événements de guerre, et dans l'étendue desquelles
les bombardements de l'ennemi, les mesures défensives et la
situation de fait due aux événements ont causé des destructions
de biens mobiliers ou immobiliers et des dégâts de tous ordres;
3° Enfin les régions contigües aux précédentes, qui sans avoir
été envahies ni évacuées ont été, d'une façon générale,
atteintes par les événements de guerre.
Arrête :
Article 1er. - La zone dévastée visée au paragraphe 8 de
l'article 5 de la loi du 17 avril 1919 comprend toutes les
parties du territoire français situées à l'est ou au nord d'une
ligne passant par : les limites maritimes des départements du
Nord, du Pas-de-Calais et de la Somme; les limites sud de ce
dernier département; les limites ouest et sud du département de
l'Oise et, des arrondissements de Meaux, Coulommiers et Provins
(Seine-et-Marne) ; les limites sud du département de la Marne et
des communes de Semoine, Mailly-le-Camp et Poivres (Aube); les
limites sud du département de la Meuse; les limites ouest et sud
du département de Meurthe-et-Moselle; les limites ouest et sud
des arrondissements d'Epinal et de Remiremont (Vosges); les
limites ouest et sud du territoire de Belfort jusqu'à la Suisse.
Art. 2. - MM. les préfets du Nord, du Pas-de-Calais, de la
Somme, de l'Oise, de Seine-et-Marne, de l'Aisne, des Ardennes,
de la Marne, de l'Aube, de la Meuse, de Meurthe-et-Moselle et
des Vosges et l'administrateur du territoire de Belfort sont
chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'application du
présent arrêté.
Fait à Paris, le 12 août 1919.
A. LEBRUN
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