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14 juillet 1969 - De Gaulle... et petits pois de Frémonville
 


«  Visite du général de Gaulle à l'ex-gouvernante de la Boisserie
LUNEVILLE. - Le général et Mme de Gaulle ont rendu visite à l'ex-gouvernante de leur demeure de la Boisserie, qui depuis deux ans, vit retirée dans son village natal de Frémonville (Meurthe-et-Moselle).
Etonnés par cette visite impromptu de l'ancien chef de l'Etat, les habitants du village ont pu voir Mme de Gaulle et Mlle Camaille se rendre dans le jardin pour cueillir des petits pois, le général, lui, s'est reposé à l'intérieur de la maison »

[Le Confédéré quotidien - 16 juillet 1969]

«  En France toujours, mais sur un tout autre plan, le général et Mme de Gaulle ont rendu visite à l'ex-gouvernante de leur demeure de la Boisserie qui depuis deux ans vit retirée dans son village natal de Frémonville (Meurthe et Moselle) . Etonnés par cette visite impromptu de l'ancien chef de l'Etat, les habitants du village qui, à l'occasion du 14 juillet, se livraient aux jeux organisés sur la Place de la Mairie, ont pu voir Mme de Gaulle et Mlle Camaille se rendre dans le jardin pour cueillir des petits pois. Le général, lui, s'est reposé à l'intérieur de la maison. Vers 16 h., salués par les enfants du village, l'ancien président et sa femme ont repris la direction de Colombey-les- deux-Eglises. (afp) »
[L'Impartial - 16 juillet 1969]

 

 

Lorsque le 28 avril 1969, le général De Gaulle renonce à exercer la présidence de la République après l'échec du référendum, il se retire à Colombey les Deux Eglises (Haute-Marne), dans sa propriété de la Boisserie pour y écrire ses mémoires.
Charles et Yvonne de Gaulle avaient acheté la Boisserie en viager en 1934, et ce n'est qu'après la première guerre mondiale qu'ils y firent apporter diverses transformations (dont la construction de la tour hexagonale) : vers fin mai 1946, ils quittent Marly et s'y installent.
Au delà des fonctionnaires publics affectés (tel le chauffeur Emile Deforge), le personnel domestique privé de la Boisserie est dès cette époque constitué, de «  deux vieilles filles d'âge canonique : la lorraine Louise Camaille et l'alsacienne Philomène Ziegler » (Mémoires accessoires 1946-1982, tome 2 - Philippe de Gaulle)

L'anecdote la plus marquante se déroule lors de la visite du chancelier allemand Conrad Adenauer, les 14 et 15 septembre 1958. De Gaulle, alors président du conseil, le loge à la Boisserie. Yvonne de Gaulle, bien que trouvant Adenauer «  sympathique », ne peut s'empêcher de faire à son fils Philippe le remarque «  Evidemment, c'est un Allemand ». Mais c'est surtout Louise Camaille, qui refuse de mettre les pieds dans la salle à manger : «  Je ne servirai jamais un Allemand ! ». Et pour ce diner qui comporte néanmoins 14 convives (dont trois allemands), Louis Camaille restera affairée à la cuisine, laissant le service à Philomène Zieger.
Certaines sources affirment qu'au départ d'Adenauer, Louise aurait cependant déclaré au général : «  Lui, c'est un allemand pas comme les autres »...

En mai 1966, Louise avait souhaité prendre se retraite. Ce n'est donc pas elle qui assista au décès du général le 9 novembre 1970, mais Charlotte Marchal, cuisinière, jardinière et femme de chambre, que Louise Camaille, sa lointaine cousine, avait fait embaucher dix ans auparavant.

Le 14 juillet 1969, la visite de De Gaulle à Frémonville fut son dernier passage en Meurthe-et-Moselle (le 11 novembre 1969, il était avec son épouse à Metz, Verdun et Bar-le-Duc, en enfin à Dabo le 24 août 1970).
L'anecdote du 14 juillet 1969 restera cependant un entrefilet d'une dépêche de l'Agence France-Presse : car les médias ont alors le regard tourné vers Cap Kennedy (Canaveral) d'où le 16 juillet s'élance la mission Apollo 11 ; et si De Gaulle a foulé la terre de Frémonville le 14 juillet, c'est Neil Armstrong qui foule celle de la lune le 20 juillet 1969.


Mourir à Colombey
Jacques Chapus
Ed. La Table Ronde - 1974

[...] Vers 14 heures tout est replié, rangé; on repart. A Frémonville la voiture braque dans la grande rue pour grimper vers les hauts du village. La devant une maison simplette on stoppe à nouveau. De Gaulle descend. Une vieille femme apparait sur le pas de la porte : « Oh! par exemple, mon général. » De Gaulle, en ce 14 juillet 1969, rend visite à son ancienne cuisinière Mlle Camaille. Elle a été à leur service des années durant. Elle a connu et soigné Anne. De Gaulle, qui fuit le monde et les hommes, va passer une quinzaine de minutes dans la cuisine de son ancienne servante, assis les mains posées sur une toile cirée où est peint un coq gaulois; il y boit une tasse de café.
En bas dans le village, il y a un grand rassemblement pour l’arrivée d’une course cycliste. Un voisin de Mlle Camaille qui a aperçu Charles de Gaulle décide d’aller prévenir le maire... et comme il ne peut garder sa langue, il répéte à qui veut l’entendre « y’a le général de Gaulle chez la Camaille... » L’arrivée de la course se fera sans spectateur. Quand de Gaulle ressort, il est interloqué; la foule d’antan l’applaudit : « Oh! que de monde, dit-il... merci. » Il monte dans la voiture qui démarre sèchement et traverse à vitesse soutenue Lunéville, Toul... Devant la grille de la Boisserie, quelque trois cents personnes attendent le retour de de Gaulle. Aucun de ces curieux ne supposera que le général, ce jour-la, comme eux, a pique-niqué dans une forêt, tranquillement, sans souci.

 

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