26 janvier 1889 - n° 1
- p. 71
Nécrologie.
Nous recommandons aux prières de nos lecteurs l'âme de M. l'abbé
GAVARD, décédé curé de Bernécourt, à l'âge de 65 ans.
Né à Beuvezin en 1824, ordonné prêtre en 1850, M. Gavard a été
vicaire à Badonviller, à Blâmont, à Vézelise, curé à Saulxerotte
et à Bernécourt où il vient de mourir.
M. Gavard était membre de l'Association de prières.
16 février 1889 - n°
7 - p. 127
NOUVELLES RELIGIEUSES.
Nécrologie.
On écrit d'Insming au Lorrain :
« La paroisse d'Insming est en deuil. Son excellent pasteur, M.
l'abbé Lux, est décédé hier,
dimanche, à l'âge de 57 ans; il a succombé aux suites d'une
longue et douloureuse maladie. Jusque dans ces derniers temps,
néanmoins, M. l'abbé Lux avait rempli vaillamment les fonctions
de son ministère. Prêtre dévoué, il savait trouver le chemin des
coeurs, et ses paroissiens perdent en lui un père et un guide
éprouvé; les pauvres et les malheureux pleurent la mort d'un
bienfaiteur qui leur prodiguait ses dons et ses consolations;
toute la commune déplore la perte d'un homme éclairé, dont les
conseils sages et désintéressés ont été dans bien des
circonstances écoutés pour le plus grand bien de tous. Et non
seulement à Insming, mais dans toute la contrée, où M. l'abbé
Lux était connu pour sa bonté, son excellent caractère et son
humeur joviale, qui le faisaient aimer de ceux qui professaient
un autre culte, la mort du curé d'lnsming aura un douloureux
retentissement.
Né à Langatte, M. l'abbé Lux fit ses études au collège -de
Fénétrange, au Petit Séminaire de Pont-à-Mousson et au Grand
Séminaire de Nancy, où il fut ordonné prêtre. Il fut d'abord
aumônier au collège de Blâmont, puis desservant de Betting et
succéda enfin, en 1867, à M. Heymès, son prédécesseur, à Insming,
qui fut placé à la tête du collège de Fénétrange.
M. Lux était membre de l'Association de prières de notre
diocèse. »
13 juin 1889 - n° 25
- p. 487
DIOCESE.
M. le Vicaire général Jambois,
est pieusement décédé mardi soir. Voici la circulaire par
laquelle Monseigneur l'Evêque de Nancy a fait part de cette
douloureuse nouvelle au clergé du diocèse :
MESSIEURS ET TRES CHERS COOPÉRATEURS,
Le diocèse de Nancy vient d'être douloureusement éprouvé.
Monsieur le Vicaire général Jambois a terminé hier soir, à huit
heures trois quarts, une vie pleine de mérites devant les hommes
et devant Dieu, après avoir sanctifié une longue maladie par sa
sereine et pieuse résignation.
Il n'est pas d'usage dans le diocèse de Nancy de prononcer
l'Eloge de MM. les Vicaires généraux dans la cérémonie de leurs
funérailles ; mais c'est pour nous une consolation de nous
conformer à la tradition de nos vénérés prédécesseurs et de
rappeler en quelques paroles la vie, les travaux et les vertus
sacerdotales du très regretté défunt.
Monsieur Jambois fut ordonné prêtre le 1er juillet 1838. Avant
son ordination au sacerdoce, il avait exercé les fonctions de
professeur au Petit Séminaire de Pont-à-Mousson et plus tard,
pendant quelques mois, au Collège de Blâmont.
Au mois de novembre 1839, il fut nommé vicaire à la Cathédrale
de Nancy et se montra l'auxiliaire dévoué de M. Michel et de M.
Poirot; il se concilia l'affection et la confiance de ces deux
vénérables curés et de la paroisse tout entière. Ce ministère de
quinze années a laissé dans la ville épiscopale des souvenirs
que le temps n'a point effacés et Monsieur Jambois lui-même
aimait à revenir, dans ses récits, à ces jours déjà éloignés.
Les personnes qu'il avait préparées alors à la première
Communion lui ont conservé la plus fidèle et la plus touchante
reconnaissance.
En 1855, Mgr Menjaud choisissait Monsieur l'abbé Jambois pour
son secrétaire particulier et il le nommait quelques mois plus
tard secrétaire général de l'Evêché. Aux travaux de
l'administration diocésaine, le zélé secrétaire unissait les
fonctions d'aumônier de l'hôpital militaire.
Vers la fin de 1859, Mgr Darboy donnait à Monsieur l'abbé
Jambois un témoignage de sa haute confiance, en l'appelant à
succéder comme vicaire général à M. Mirguet. Depuis lors,
pendant trente années, les Evêques, nos vénérés prédécesseurs
sur le siège de Nancy, ont eu comme nous dans ce prêtre
complètement consacré à ses devoirs un collaborateur
intelligent, qui unissait au respect et à la déférence pour ses
évêques une affection sincère et une parfaite loyauté.
Le caractère distinctif de Monsieur Jambois, dans les actes de
l'administration diocésaine, dans les oeuvres de son ministère
comme dans ses relations personnelles, était une grande bonté,
une bienveillance universelle. Il aurait voulu donner à tous
ceux qui s'adressaient à lui des réponses favorables, et
réaliser tous les désirs qui lui étaient exprimés.
Dès les premières années de son sacerdoce, il était devenu, et
il était resté le conseiller affectueux, l'ami d'un grand nombre
de familles ; il prenait part à toutes leurs joies et à toutes
leurs douleurs. Souvent, il dirigeait, vers les malades qui
réclamaient son ministère ou auxquels il s'intéressait
spécialement, sa promenade quotidienne et ne rencontrait dans
cette ville où il a passé un demi-siècle dans les travaux du
sacerdoce et de l'administration ecclésiastique, que les
sentiments d'une respectueuse sympathie.
Un autre caractère distinctif du vénérable défunt était la
régularité parfaite. Il était avant tout l'homme de la règle et
du devoir. Tout, dans ses fonctions, dans ses travaux, dans sa
vie elle-même, était prévu et réglé jusque dans les moindres
détails. Sa préoccupation constante était de ne jamais rien
laisser en retard. Il aurait même voulu qu'une affaire pût être
toujours décidée, dès qu'elle avait été clairement exposée. Mais
cette régularité qui est incontestablement pour tous et surtout
pour un administrateur une qualité précieuse, n'a-t-elle point
contribué à éprouver sa santé ? Combien de fois nous l'avons
sollicité de prendre un peu de repos hors de Nancy et du cercle
de ses occupations, dans lesquelles il s'absorbait, d'accepter
les invitations pressantes de quelques amis fidèles et d'aller
respirer pendant quelques semaines l'air de la campagne? Deux
fois il céda à ces sollicitations et pour quelques jours
seulement.
Monsieur Jambois avait célébré l'année dernière le cinquantième
anniversaire de son ordination au sacerdoce, mais il n'avait
voulu ni fête, ni manifestations extérieures. Ce n'est pas sans
difficulté que les personnes et les familles qui lui étaient
particulièrement dévouées purent lui faire accepter à cette
occasion un témoignage de leur reconnaissance.
Malgré son âge avancé, il avait conservé toute la perspicacité
et toute l'activité de son intelligence, il aurait pu remplir
pendant plusieurs années encore avec la même activité et la même
régularité qu'autrefois, les fonctions de vicaire général.
Il subissait depuis longtemps déjà les atteintes de la maladie à
laquelle il a succombé et sa forte constitution a résisté
au-delà de toutes les prévisions. Dieu lui a épargné pendant ses
dernières semaines les douleurs terribles que produit presque
toujours cette maladie, mais il souffrait beaucoup moralement de
ne pouvoir plus agir, travailler et se rendre utile. Sa volonté
avait gardé toute son énergie dans un corps qui ne lui obéissait
plus. Bien souvent, il nous a exprimé le désir que ses épreuves
fussent abrégées et cependant, ajoutait-il, « je me soumets à la
volonté de Dieu, mais je voudrais aller me reposer auprès de lui
: Desiderium habens dissolvi et esse cum Christo (Philipp., I,
23) ».
Les congrégations et les communautés religieuses dont il était
le supérieur ont offert pour lui leurs ferventes prières et les
soeurs de Saint-Charles auxquelles il était spécialement attaché,
lui ont prodigué pendant les derniers temps de sa vie les soins
de leur piété filiale.
Nous avons eu la consolation de réaliser ses désirs on lui
administrant, il y a trois semaines, les derniers sacrements, et
en récitant, samedi dernier, les prières des agonisants. Obligé
de nous rendre à Lunéville hier et avant-hier pour les
cérémonies de la Confirmation, nous sommes revenu le plus tôt
possible auprès de son lit de souffrance, et nous récitions de
nouveau les prières des agonisants quand il a rendu le dernier
soupir. Depuis deux jours, la paralysie, qui montait lentement,
a déterminé de bien douloureuses suffocations, et nous en étions
venu à demander pour lui la délivrance et le repos. Il a rendu
son âme à Dieu après avoir, une fois encore, baisé le crucifix
qui était constamment sous son regard.
Vous aurez, Messieurs et très chers Coopérateurs, un souvenir au
saint autel et dans vos prières de chaque jour, pour ce prêtre
qui a rendu tant de services au diocèse. La souffrance a
certainement purifié sa vie et multiplié ses mérites. Nous
demanderons à Dieu de le couronner dans la paix et dans la
gloire en lui adressant ces paroles qu'il a bien méritées :
Courage, bon et fidèle serviteur, entrez dans la gloire de votre
Maître : Euge serve bone et fidelis, intra in gaudium domini tui
(Math. XXV, 23).
Recevez, Messieurs et très chers Coopérateurs, l'assurance de
notre affectueux dévouement en Notre-Seigneur.
CHARLES-FRANÇOIS,
Evêque de Nancy et de Toul.
Les funérailles de M. Jambois, dont le corps est resté exposé
mercredi et jeudi dans la chambre mortuaire, et vendredi dans la
chapelle de l'évêché, auront lieu samedi, à 10 heures, en
l'église Cathédrale. Nous en rendrons compte dans notre prochain
numéro.
M. Jambois faisait partie de l'Association de prières.
13 juillet 1889 - n°
28 - p. 550
DIOCESE.
NOUVELLES RELIGIEUSES.
Ordination.
Dimanche prochain, Monseigneur fera, dans la chapelle du
Séminaire, une ordination à laquelle prendront part : 16
Tonsurés; 29 Minorés; 15 Sous-Diacres; 10 Diacres et 18 Prêtres
dont voici les noms :
[...] ; Constantin, de
Blâmont; [...]
31 août 1889 - n° 35
- p. 695
Nécrologie.
Nous recommandons aux prières de nos lecteurs, l'âme de M.
l'abbé A. S. ONION,
décédé le 25 Août 1889.
Voici les états de service de ce vénérable prêtre :
M. l'abbé ONION est né à Harbouey, le 10 Août 1807. Prêtre le 29
Juillet 1833. Il a été successivement curé de Dommartin-les-Toul,
en 1833 ; de Mailly, en 1843 ; de Saizerais, en 1850; de Jaulny,
en 1854 ; de Mont-l'Etroit, depuis le 28 Juillet 1872, où il
vient de mourir.
Il était membre de l'Association de prières.
7 septembre 1889 -
n° 36 - p. 704
DIOCESE.
ACTES OFFICIELS.
Nominations.
Par décision de Monseigneur l'Evêque, ont été nommés:
[...]
Curé à Harbouey, M. l'abbé JACQUES, précédemment curé de
Herbéviller ;
Curé de Herbéviller, M. l'abbé
THOUVENIN, précédemment vicaire à Baccarat;
[...]
7 septembre 1889 -
n° 36 - p. 708
Nécrologie
Nous recommandons aux prières de nos lecteurs l'âme de
M. BRÉGEAT, décédé
le 2 septembre, à l'âge de 47 ans.
Né a Flin en 1841, M. BRÉGEAT a été ordonné prêtre en 1866.
Après avoir été un an professeur à l'institution B. Pierre
Fourrier, M. BRÉGEAT devint vicaire de Saint-Jacques à
Lunéville.
En 1869, il fut nommé curé à Sexey-aux-Forges, à Saint-Pancré en
1885; à Chazelles où il est mort en 1888.
21 septembre 1889 -
n° 38 - p. 755
Pèlerinage lorrain à N.-D. de Lourdes.
Souscription en faveur des malades pauvres.
[...] Par M. le curé de Barbas, 10 fr. [...]
19 octobre 1889 - n°
42 - p. 825
DIOCESE.
ACTES OFFICIELS.
Nominations
Par décision de Monseigneur l'Evêque ont été nommés:
[...]
Curé de Chazelles, M. l'abbé
DUHAUT, précédemment, vicaire a Gerbéviller.
[...]
2 novembre 1889 - n°
44 - p. 866
NÉCROLOGIE.
Mgr Régnier.
Lundi matin Mgr
Régnier s'est doucement éteint et à pieusement rendu sa
belle âme à Dieu.
Depuis bientôt un an il s'était peu à peu affaibli, et sans
autre maladie que la vieillesse, il avait été forcé de rester
dans sa chambre où dans les derniers temps il ne reconnaissait
même plus ses meilleurs amis qui le visitaient. Le dimanche, Sa
Grandeur avait voulu encore le voir; il est très probable que
Mgr Régnier n'a pas pu jouir de la consolation que lui apportait
son évêque.
La physionomie de Mgr Régnier n'était point ordinaire et sa vie
pleine d'intérêt et d'édification mériterait une longue notice.
En tout cas on se souviendra longtemps à la Cathédrale de ce
Prélat à la démarche mesurée, de petite taille, aux traits
distingués, au regard doux et modeste qui passait des heures
entières devant le Saint-Sacrement, un énorme bréviaire entre
les mains et les plus ferventes prières sur les lèvres.
Longtemps on se souviendra de la joie rayonnante qui
l'accompagnait à l'autel et dans toutes les cérémonies
auxquelles il était si heureux de prendre part.
Né à Langres en 1808, il fit ses humanités à Dijon et à Issy où
il eut pour condisciple et ami, le P. Lacordaire. Après avoir
étudié le droit, il vint à Nancy où son père, ancien directeur
des Contributions directes, s'était retiré.
Bientôt après il fut nommé juge de paix du canton de Blâmont. En
s'éloignant de Nancy où il avait pris une place considérable
parmi les hommes qui alors travaillaient avec tant
d'intelligence et de zèle à la régénération religieuse, il ne
cessa pas de s'occuper des oeuvres. Il répondait avec
empressement à tous les appels du bien et de la charité ; à
toutes les nobles et pieuses entreprises, le bon Joseph
apportait volontiers et ses sages conseils et ses secours
toujours généreux.
Tout cela ne l'empêchait pas de remplir ses fonctions de
magistrat avec une conscience scrupuleuse. Ses justiciables
n'ont pas oublié ses spirituelles remontrances, ses vives
exhortations, ses saintes indignations quand il avait à juger
des atteintes à la morale et surtout à la religion.
Comment abandonna-t-il ce ministère pour entrer dans l'état
ecclésiastique ? Lui-même aimait à le raconter.
Après avoir longtemps hésité entre les propositions
d'établissement que lui faisaient ses amis et les sollicitations
qui le pressaient de se consacrer à Dieu dans le sacerdoce, un
jour qu'il venait de prier avec ferveur Notre-Dame de Bonsecours
et de lui demander un signe de la volonté du ciel, il fut arrêté
sur la porte même de la chapelle par quelqu'un qui lui offrit,
sans s'en douter, le signe qu'il avait demandé.
Aussitôt son parti est pris. Il sera prêtre. Il alla trouver Mgr
Gousset qui l'accueillit avec joie, l'aida à se préparer au
sacerdoce et lui conféra le sacrement de l'Ordre. C'était en
1858, Mgr Régnier avait 50 ans.
Une fois ordonné, M. l'abbé Régnier revint à Nancy, où il se
fixa définitivement comme prêtre habitué. Son âge, ses
habitudes, ses relations ne lui permirent pas d'exercer le
ministère dans un poste officiel. Mais les honneurs ne lui
manquèrent pas. Mgr Gousset le nomma chanoine de Reims ; Mgr
Caverot, un de ses plus intimes amis, le nomma chanoine de
Saint-Dié et lui obtint de Rome la prélature. Mgr Foulon le
nomma à son tour chanoine de Nancy.
Les exercices de piété pour lesquels il avait un attrait tout
particulier et auxquels il consacrait de longues heures, des
lectures sérieuses, des études sur des sujets qui lui étaient
chers et familiers remplissaient utilement ses journées. On
connait partout son ouvrage sur l'Orgue, ses Recueils de
musique, ses Etudes sur le Père Lacordaire. Il avait la plume
fine, délicate, alerte et piquante. Il rendait volontiers
service à ses confrères : présider à une cérémonie, adresser la
parole aux fidèles étaient pour lui une véritable fête. Ses
discours avaient un cachet d'originalité qui les faisait écouter
avec la plus grande attention, ils contrastaient absolument,
pour le fond et pour la forme avec l'éloquence accoutumée et
ordinaire de la chaire. Malheureusement il ne pouvait parler aux
grands auditoires ; sa voix douce et mélodieuse manquait de
force ; mais il était très agréable à entendre dans une chapelle
ou une petite église. S'il lui restait quelque loisir, il en
profitait pour visiter les pauvres et porter des secours aux
misères qui lui étaient recommandées.
Il fit le plus charitable usage des revenus qui lui assuraient
une modeste aisance. Il sut aussi trouver le temps de remplir
ses devoirs de société. Quelle grâce, quelle affabilité, quelle
bonté il mettait dans ses relations, ses nombreux amis ne
l'oublieront pas. Mais ce qui domina toujours dans toute sa vie,
c'est une foi ardente, une piété tendre, une dévotion touchante.
Sa plus grande peine, lorsque ses forces l'abandonnèrent fut de
renoncer à la célébration du Saint-Sacrifice. Aidé par un des
bons Frères de la sacristie, il monta à l'autel jusqu'au jour où
il ne lui fut plus permis de quitter sa chambre. Alors il se
résigna et termina dans la patience, la piété et la paix, une
vie dont le Seigneur aujourd'hui a voulu sans doute le
récompenser.
Ses obsèques ont été célébrées mercredi à la Cathédrale. Des
prêtres et des laïques en grand nombre se firent un devoir d'y
assister. M. le curé de la Cathédrale a chanté la messe. M. le
vicaire général Voinot a fait l'absoute.
Mgr J. Régnier était membre de l'association des prières.
23 novembre 1889 -
n° 47 - p. 938
Nécrologie.
Nous recommandons aux prières de nos lecteurs l'âme de
M. E. FRIANT, chanoine
titulaire, pieusement décédé le mercredi 19 novembre, à
l'hospice Saint-Julien de Nancy.
Né à Maizières-les-Vic en 1810, M. Friant a été ordonné prêtre
en 1836.
Après avoir été vicaire à Saint-Epvre de Nancy, il devint
principal du collège de Blâmont.
En 1838 il était curé de Frolois, de Maxéville en 1839,
directeur du pensionnat de Vézelise en 1850, curé de
Marainviller en 1853, de Norroy en 1859, de Pulligny en 1868,
chanoine prébendé en 1883, enfin chanoine titulaire en 1888.
Les obsèques du vénérable chanoine, sur la vie duquel nous
espérons revenir, ont eu lieu jeudi à 9 heures à l'office
canonial.
M. Friant était membre de l'Association des prières pour les
prêtres défunts.
30 novembre 1889 -
n° 48 - p. 948
Monsieur le chanoine Friant
Les obsèques de M. le chanoine
Friant, auxquelles Monseigneur, retenu au Séminaire par la
fête de la Présentation, a regretté de ne pouvoir assister, ont
eu lieu le jeudi 21 novembre.
Un premier service a été célébré dans la chapelle de l'hospice
Saint-Julien. Tous les vieillards ont voulu y assister et prier
pour le repos de l'âme du vénérable prêtre qui depuis quelques
mois les avait tant édifiés.
Après la messe, M. le curé de la cathédrale en tête du Chapitre
fit la levée du corps, et le cortège se rendit aussitôt à la
cathédrale. Dans l'assistance nous avons remarqué MM. les curés
et quelques habitants des paroisses administrées par M. Friant.
Nous n'en avons pas été surpris. Dans les nombreux postes qu'il
a occupes M. Friant a laissé quelques souvenirs. Si son zèle
ardent et son caractère inflexible lui ont créé des difficultés,
sa régularité, sa piété solide, sa vie austère lui ont partout
conquis l'estime même de ceux qui l'ont poursuivi avec le plus
d'acharnement. M. Friant avait d'ailleurs deux qualités
précieuses qui chez les prêtres surtout favorisent
singulièrement le ministère pastoral et finissent presque
toujours par triompher des plus opiniâtres résistances. Il
aimait à rendre service et sa générosité était grande.
Si nous l'avons vu quelquefois manifester sa joie et son
contentement, c'est lorsqu'il avait eu l'occasion de faire
plaisir à quelqu'un: Le froid, la chaleur, la fatigue, rien ne
l'arrêtait quand il s'agissait d'aider un confrère. Avec le
bonheur d'être utile et agréable à tous il sut se procurer celui
de donner et de donner avec intelligence.
Ses ressources n'étaient pas très considérables, mais comme son
genre de vie lui occasionnait peu de dépenses, il trouva le
moyen avec ses économies, d'aider aux oeuvres les plus
importantes de notre temps. M. Friant comptera parmi les
bienfaiteurs du diocèse.
Arrivé à un âge où il était difficile de l'envoyer dans une
nouvelle paroisse, il fut appelé à Nancy comme chanoine
prébendé.
Là comme partout, M. Friant se montra plein de zèle et
d'empressement dans l'accomplissement de ses devoirs. A tous les
offices du Chapitre et de la paroisse, il édifiait par sa vive
piété. Ses amis étaient-ils indisposés, malades, il accourait
pour les remplacer et les plus beaux jours de sa retraite ont
certainement été ceux où il a pu rendre service à ceux qui
l'appelaient à remplir quelques fonctions à l'église. Chez lui,
il se livrait a l'étude avec une ardeur toute juvénile. Il
lisait beaucoup : la philosophie et les questions scientifiques
l'intéressaient grandement. Mais c'est surtout à l'étude de la
sainte Ecriture et des Pères de l'Eglise qu'il consacrait son
temps. Chaque semaine, comme au temps où il était curé, il
écrivait entièrement une homélie, un sermon sur l'évangile du
dimanche, sur le mystère et la fête du jour.
Il n'abandonna ces habitudes que le jour où en cherchant un
volume dans sa bibliothèque, il fit une chute qui le priva
pendant plusieurs mois de tout mouvement. Ce repos forcé,
aggrava la douloureuse maladie à laquelle il a succombé. Retiré
à l'hospice Saint-Julien, il y reçut les soins les plus dévoués
des excellentes Soeurs de Saint-Charles. Enfin après avoir enduré
avec une admirable patience les souffrances les plus cruelles il
rendit pieusement son âme à Dieu, et alla rejoindre dans l'autre
monde le bon Mgr Régnier qu'il avait si souvent visité, aidé et
consolé dans sa maladie.
7 décembre 1889 - n°
49 - p. 973
NÉCROLOGIE.
M. l'abbé Molé.
Nous recommandons aux prières de nos lecteurs l'âme de M. l'abbé
Charles MOLÉ, décédé à Lenoncourt le 30 novembre.
Né en 1844, M. Molé a été ordonné en 1868.
Il a été successivement professeur à Lunéville, vicaire à
Saint-Vincent et Saint-Fiacre, curé de Blémerey et de Lenoncourt
où il est mort après avoir pieusement supporté les souffrances
d'une longue et cruelle maladie.
M. Molé était membre de l'Association des prières pour les
prêtres défunts. Nous publierons dans notre prochain numéro, une
intéressante notice sur le regretté curé de Lenoncourt.
14 décembre 1889 -
n° 50 - p. 987
M. l'abbé Molé.
Le mardi, 3 décembre, la paroisse tout entière de Lenoncourt
faisait les funérailles de son cher pasteur, M. l'abbé Charles
Molé. Le deuil était conduit par M. l'abbé Alfred Molé, curé
d'Art-sur-Meurthe ; les confrères du voisinage et divers amis du
défunt ou de son digne frère, avaient apporté à l'un le
témoignage de leur sympathie et à l'autre l'humble suffrage de
leurs prières. La municipalité en corps suivit le cercueil porté
processionnellement à travers les rues de la localité. Après le
service le corps de M. Molé a été transféré à Art-sur-Meurthe,
où le défunt avait voulu reposer auprès de ses parents
bien-aimés.
M. le Doyen de Saint-Nicolas-du-Port étant empêché, la levée du
corps a été présidée par M. le Doyen de Saint-Pierre de Nancy;
M. l'abbé Rouyer, curé de Cercueil, a offert le Saint-Sacrifice
pour celui qu'il avait tant de fois visité et fortifié pendant
sa maladie ; l'absoute a été fuite par M. le curé de Saint-Maur, ancien collègue du défunt.
M. le curé de Varangéville a prononcé une allocution très
édifiante qui a produit sur l'assistance des émotions profondes
et salutaires.
M. l'abbé Charles Molé avait débuté dans l'enseignement, à
l'Institution du B. P. Fourrier, à Lunéville ; il y était
dit-on, fort apprécié, et son départ fut vivement regretté de M.
l'abbé Husson, Supérieur de l'Etablissement. En novembre 1870,
il était appelé aux fonctions de vicaire à Nancy, dans la
paroisse Saint-Vincent-Saint-Fiacre, où il a laissé de très bons
souvenirs.
Il aborda, en 1875, le ministère pastoral et ne fit que passer à
Blémerey, où il sut faire aimer, dans sa personne, la religion
dont il était le ministre, Désireux de l'avoir auprès de lui,
son frère obtenait, en 1878, sa nomination à la paroisse de
Lenoncourt.
Là, son ministère a été fécond. Et il devait en être ainsi : M.
Molé avait en effet les qualités d'esprit et de coeur qui gagnent
les âmes : une bonté généreuse qui se faisait un plaisir
d'obliger et qui entourait d'une prédilection spéciale les
malades et les pauvres; un caractère franc et loyal qui l'eût
porté, même s'il avait puni un enfant par erreur, à réparer
cette erreur le plus tôt possible ; une discrétion délicate et
se gardant de s'imposer jamais ; enfin, un zèle sage, qui ne
sacrifie pas l'avenir au présent et préfère les succès durables
aux succès brillants. Avec les dons d'intelligence, M. Molé
possédait les vertus d'un excellent prêtre; mais son corps était
déjà aux prises avec la maladie et ce pauvre corps paralysait
les ardeurs généreuses de son âme. Il lutta longtemps avec
courage, puis il dut s'étendre sur sa couche et commencer une
période de souffrances aiguës où l'âme et le corps eurent à
subir l'un et l'autre un terrible supplice. Il fut loin
cependant de se laisser abattre car c'était lui qui, consolant
les siens et leur rappelant les espérances de l'autre vie,
déployait ce courage chrétien que l'orateur a eu bien raison de
proposer à l'imitation de l'assistance. En tout cas, son
sacrifice a été agréé de Dieu, si l'on en juge par cette joie
céleste qui a répandu sur ses derniers moments une si douce
sérénité, et surtout par cet entretien mystérieux qu'il semblait
avoir avec le Ciel, considérant affectueusement le crucifix que
sa mère bien-aimée avait autrefois pressé dans ses mains
défaillantes.
Après une vie si méritoire et une mort si édifiante, elles
reviennent tout naturellement sur les lèvres ces précieuses
paroles que l'orateur prononçait en commençant : Oui ! il est
heureux, celui que le Seigneur a choisi et qu'il a pris pour son
ministre ; celui-là habitera près de son divin Maître, dans son
palais éternel. » X
28 décembre 1889 -
n° 52 - p. 1026
M. Bridey.
Mercredi, 18 décembre, à l heure du matin, est mort après
une courte maladie, à l'âge de près de 70 ans, celui qu'on peut
appeler le Père du clergé de ce diocèse, qu'il a formé pendant
43 ans, comme professeur, comme directeur et comme supérieur du
Grand-Séminaire.
En écrivant cette notice sur le regretté Monsieur Louis Bridey,
je n'apprendrai rien à mes Confrères dans le sacerdoce. Jeunes
ou âgés, à quelque époque de sa vie qu'ils l'aient connu, ils
l'ont connu tel qu'il était ; et tel qu'ils l'ont connu, tel il
est resté, toujours égal, toujours semblable à lui-même. Je veux
seulement, pour la consolation de ma piété et de la leur, réunir
et fixer ici les traits de cette figure vénérable que la mort
vient de faire disparaître. Ces souvenirs feront du bien à nos
coeurs.
Louis Bridey naquit le 27 février 1820, au village de
Saint-Georges qui appartenait alors au diocèse de Nancy, de
Jean-Claude Bridey et de Catherine Jacquot, et fut baptisé le
lendemain. Son père avait une soeur, Marguerite, mariée à
Dominique Maslats, frère de l'excellent abbé Maslats, directeur
des Soeurs de Saint-Charles. Cette parenté de Messieurs Bridey et
Maslats explique les rapports intimes qui existèrent plus tard
entre ces deux saints prêtres.
Sa mère, femme de grande vertu, lui inspira dès l'enfance les
sentiments d'une tendre et forte piété; et il y répondit si bien
que sur ses sept enfants, elle l'aima toujours d'un amour
singulier; elle ne fit rien plus tard sans consulter le
professeur, et elle le choisit même pour confesseur. Tout jeune,
il alla en classe au village voisin, à Ibigny, portant dans un
sac que son père, alors bourrelier, lui avait fait, ses cahiers
et ses quelques livres. Sa dévotion envers la Très Sainte Vierge
était déjà très grande : c'est à elle qu'il attribua sa
vocation. Après sa première Communion, faite en février 1833, il
entra en avril au collège de Blâmont et y resta un an et demi
sous la direction de Monsieur Georges. Puis il vint en novembre
1834 continuer ses études à Nancy, dans la maison Saint-Pierre,
plus tard maison Marin d'où il passa, à la rentrée de 1836 au
Petit-Séminaire de Pont-à-Mousson, sous l'abbé Jandel, qui
devint plus tard Maître général de l'Ordre de saint Dominique et
qui resta l'ami de toute sa vie. Il entra au Grand-Séminaire de
Nancy en novembre 1839, et il en sortit prêtre le 21 mars 1844
pour aller remplir les fonctions de vicaire à Lunéville, près du
respectable M. Renard. Il quitta ces fonctions au bout de 7
mois, pour celles de professeur de Quatrième à Pont-à-Mousson.
Trois ans plus tard, il fut nommé au Grand-Séminaire, ou il
succéda au vénéré Monsieur Chevallier, d'abord comme professeur
de Philosophie, à la rentrée de 1847, puis comme professeur de
Dogme, en 1851. Il passa ensuite, en 1855, à l'enseignement de
la Morale, qu'il quitta à la rentrée de 1865 pour prendre la
direction du Séminaire de Philosophie. Enfin, au bout d'un an et
quatre mois, il devint supérieur du Grand-Séminaire, en
remplacement de Monsieur Noël, et il remplit cette haute et
difficile mission jusqu'à sa mort.
Dans toutes ces positions, Monsieur Louis Bridey fut
certainement un homme à part. Je crois pouvoir le définir en
disant qu'il eut avant tout un grand esprit de foi, et que cet
esprit de foi, lui inspira de mener en tout et toujours une vie
vraiment ecclésiastique, d'être pour les séminaristes et le
clergé un exemple vivant de régularité et de fidélité au devoir,
de n'agir, dans la part qu'il prit aux fonctions
administratives, qu'avec un parfait oubli de lui-même et d'après
sa conscience, enfin de livrer tout son temps et tout son coeur
aux âmes qui se mettaient sous sa direction.
Le principe inspirateur de toute la conduite privée et publique
de Monsieur Bridey fut un grand esprit de foi. Dans ses rapports
avec Dieu, ce n'était pas un homme de hautes spéculations
spirituelles; ce n'était non pas plus un homme de sensibilité.
C'était un homme de foi : de cette foi qui lui faisait voir Dieu
comme présent, ainsi qu'on le devinait à la piété avec laquelle
il faisait la méditation; à l'air tout pénétré avec lequel il
officiait; aux profonds soupirs et aux aspirations humbles et
convaincues qu'il laissait échapper dans sa stalle ou dans les
corridors quand il se croyait seul. Cet esprit de foi le faisait
penser, parler et agir en tout d'après les exemples et les
principes de Jésus-Christ, c'est ce que révélaient en
particulier les conseils qu'il donnait aux séminaristes.
1° Il s'appliqua à devenir un homme intérieur, un homme
n'agissant qu'après réflexion, un homme d'ordre et de détails.
Il devint par là-même un homme d'une régularité imperturbable,
que ne semblaient même pas influencer les attraits ou les
répugnances de la nature, mais qui allait au devoir droitement
et simplement, comme s'il n'y avait pour lui rien de plus
naturel. Cette inflexibilité dans le devoir apparaissait surtout
quand il lui fallait souffrir ou de l'intempérie des saisons, ou
de la longueur d'une pénible séance, ou d'un surcroît
d'occupations. Dans toutes ces circonstances, jamais il ne se
donnait la consolation de parler des difficultés et des épreuves
qu'il subissait: sa marche un peu plus traînante, quelques
soupirs poussés vers Dieu, ou, s'il s'agissait de souffrances
morales, son adoration prolongée devant le saint tabernacle, le
trahissaient seuls. Il en était venu à se posséder si bien que
jamais on ne le vit se fâcher. Devant les peines et les
contrariétés qui l'atteignaient ou qui atteignaient ceux qui se
confiaient en lui, d'abord il se taisait pour prendre le temps
d'accepter les peines et les contrariétés et de les offrir à
Dieu, et faire ainsi entendre qu'il fallait comme lui les
accepter et les offrir; puis il avisait aux moyens de les
adoucir; et quand il n'y pouvait rien, il se contentait de
gémir: dans aucun cas il ne s'emportait contre les auteurs du
mal fait à lui ou aux siens, Dans ce même esprit, jamais il ne
faisait de critiques ou ne les encourageait. Jamais non plus il
ne soulevait de discussions pénibles ou n'y entrait; et c'est
sans doute pour éviter ces critiques et ces discussions qu'il se
tenait volontiers à l'écart de l'entrain général, ou n'y
apportait que des réflexions, des anecdotes tout à fait
inoffensives. Sa discrétion parfaite était connue. Non seulement
il était censé ignorer ce qu'il ne devait pas dire, mais tout en
s'instruisant de ce qu'il devait savoir, il avait le rare talent
de ne pas laisser soupçonner aux uns sur qui il prenait des
informations, aux autres près de qui il les avait prises. En
preuve de tout ceci je ne cite pas de faits; tous les actes de
sa vie sont marqués à cette empreinte. D'ailleurs son héroïsme,
à lui, n'est pas dans quelques rares actions d'éclat; il est
dans l'étonnante et presque décourageante fidélité à agir
suivant la foi dans les plus petites choses.
2° Ce grand esprit de foi lui inspira, comme professeur,
directeur et supérieur du Grand-Séminaire, d'être pour ses
séminaristes et le clergé un exemple de régularité et de
fidélité au devoir.
Dieu sait jusqu'à quel point, j'allais dire jusqu'à quel excès
(car nos coeurs ont souvent souffert de le voir si peu se
ménager) il a été fidèle à cette résolution. Ainsi le vit-on
toujours dès cinq heures et demie du matin à la chapelle
assister à la méditation, puis dire la messe à la Communautés
faire chaque soir la lecture spirituelle, présider toutes les
sabbatines, n'accepter aucun repas hors de la maison à moins
qu'il n'y fut absolument obligé, n'aller qu'a de rares
intervalles jusque Richardménil se reposer quelques heures dans
le calme et dans l'amitié près de son frère. Quand des devoirs
supérieurs le contraignaient à s'absenter il lui fallait la
certitude que quelqu'un le remplaçait et que l'ordre général
n'en serait pas troublé.
Telle fut sa régularité, et il y persévéra si bien que quand, sa
vue s'affaiblissant, ses pas devenant de plus en plus
chancelants, il ne lui fut plus possible de dire la messe de
communauté et qu'il dût être aidé dans l'administration du
Séminaire, il n'en continua pas moins à se trouver à la
méditation commune, à prévoir et à préparer dans les moindres
détails ce qui devait être proposé ou exécuté, à présider les
sabbatines. C'est au sortir de la sabbatine du cours de Dogme,
le jeudi 12 décembre, qu'on l'obligea à se mettre au lit, d'où
il ne sortit, cinq jours après, que pour aller se reposer au
ciel.
A l'exemple de la régularité la plus parfaite, il joignait les
recommandations les plus pressantes de cette régularité
elle-même et de l'énergie nécessaire pour l'observer, tellement
que ses jeunes disciples comme ceux de saint Jean, purent lui
dire plus d'une fois : « Maître, pourquoi nous répétez-vous
toujours la même chose ? » - « Ah! pouvait-il lui aussi leur
répondre, c'est que pour de futurs prêtres, c'est le précepte du
Maître : et que s'il est accompli, il suffit. »
Enfin, à l'exemple et à la recommandation de la régularité et de
l'énergie, il unit la prière. Cette prière pour ses
séminaristes, il la demandait aux communautés et aux personnes
qu'il dirigeait. Il la demandait, mais surtout il la donnait: il
la donnait à tous, fervente et abondante, plus fervente et plus
abondante encore à ses pénitents. Certes, on peut dire de lui
qu'après s'être oublié lui-même pendant sa vie pour ne penser
qu'au bien spirituel et temporel des autres, il s'oublia encore
davantage dans ses derniers moments, pour ne penser qu'au bien
de ceux qui l'approchaient. Résigné et prêt à mourir dès qu'on
lui eût dit son état, comme depuis quelque temps il était
résigné à devenir complètement aveugle, à l'un il demandait des
nouvelles d'une légère indisposition; à l'autre il souhaitait de
passer une bonne nuit, à tous il donnait volontiers sa
bénédiction, ses avis, l'assurance de ses prières. Mais on peut,
on doit dire qu'il s'oublia surtout pour ses séminaristes. Oui,
ses dernières pensées, ses dernières affections, ses dernières
angoisses, ses dernières prières furent pour ses chers
séminaristes, dont il entrevoyait l'avenir sous des couleurs
bien sombres. Nous le vîmes un instant, le soir, veille de sa
mort. Aussitôt qu'il nous aperçut, il nous remercia avec
effusion du dévoûment que nous apportions à l'oeuvre du
Séminaire. Quelques heures plus tard, Monseigneur l'Evêque vint,
suivi de tous les directeurs, de quelques prêtres, et de la
communauté, lui apporter les derniers sacrements. Dans la courte
action de grâces qu'il fit entre la réception du Saint Viatique
et celle de l'Extrême-Onction, après avoir appelé sur son Evêque
toutes les bénédictions du Ciel, son coeur, comme celui de Jésus
à la cène, déborda en une prière à Dieu pour ses séminaristes.
Puis il conjura une dernière fois les séminaristes, de bien
répondre à leur vocation; de s'appliquer à acquérir les vertus
de leur état, en particulier l'humilité, le dévouement et la
simplicité ... voilà comment il les aimait! Ecce quomodo amabat,
A sa haute position de Supérieur du Grand-Séminaire étaient
naturellement attachées certaines charges, certains honneurs,
une part dans l'administration générale du diocèse, comme dans
la direction particulière de plusieurs communautés. Ce qu'on
peut dire de lui sur ce nouveau terrain, c'est que rien de tout
cela ne l'a changé et qu'il est resté aussi humble, aussi
simple, aussi facile à aborder. Il avait écrit a sa mère et a
son frère de ne pas se prévaloir de ses fonctions et de ne rien
attendre de lui: il aimait mieux encourager ses amis à être
vertueux et désintéressés comme lui que de leur être utile
humainement; il préférait encourager, éclairer, au besoin
supporter l'initiative d'autrui, que d'imposer la sienne.
Enfin son grand esprit de foi lui inspira de livrer tout son
temps et tout son coeur aux âmes qui se mettaient sous sa
conduite.
Toujours il eut un goût particulier pour ce genre de ministère.
Il avait accompli seulement pendant sept mois le ministère
paroissial, il avait acquis par l'observation, par la réflexion,
par l'étude des casuistes, par son propre enseignement plus
pratique et solide que spéculatif et brillant, une expérience
sûre et variée qu'il mettait volontiers au service et à la
portée de tous ses pénitents. Il ne leur faisait pas de grandes
théories, il ne s'élevait pas avec eux à de hautes
considérations. Non, il les écoutait doucement, gravement et
patiemment lui dire leurs fautes, leurs difficultés, leurs
scrupules; et quand ils avaient fini, ou même dans l'intervalle,
sans jamais les brusquer, il les encourageait, prenait part à
leurs peines, leur parlait de Notre-Seigneur, pour l'amour de
qui on devait tout souffrir, leur montrait le ciel auquel on
arriverait bientôt, leur proposait le culte et l'imitation de la
sainte Famille, les faisait ressouvenir des âmes du purgatoire,
en particulier de celles des saints prêtres que lui et eux
avaient connus et qu'il fallait imiter. En dehors de la
Confession, il s'intéressait volontiers à ses pénitents, ce qui
les disposait à lui demander conseil en toutes choses; et ses
conseils étaient toujours précédés de réflexion et accompagnés
de prudence. Quand ses pénitents étaient malades, il les
visitait très souvent, tous les jours même s'ils étaient en
danger, quelle que fut d'ailleurs la distance. Il s'asseyait
près d'eux, leur parlait doucement sans les fatiguer, et puis se
retirait, les laissant embaumés du parfum de sa bonté, de sa
mansuétude et de sa simplicité. C'est à cet intérêt tout
paternel, qu'on reconnaissait bien vite quand on ne se laissait
pas arrêter par l'apparence un peu froide de sa physionomie et
de sa parole, ainsi qu'à sa sainteté connue, qu'il faut
attribuer l'estime et l'affection dont il était l'objet de la
part de ses pénitents.
Depuis le moment du décès jusqu'à celui de l'enterrement, quatre
séminaristes en surplis se sont succédé près du corps,
psalmodiant l'Office des morts. C'est dans la chapelle du
Grand-Séminaire, l'ancienne église Saint-Pierre, qu'à eu lieu le
service funèbre avec l'imposante solennité que lui donnaient le
caractère du défunt, la beauté sévère des décorations, la
composition et les sentiments de l'assistance. Près de trois
cents prêtres séculiers et réguliers venus des différentes
parties du diocèse et du pays annexé, les représentants des
diocèses de Metz et de Saint-Dié, d'imposantes députations des
Congrégations et Maisons religieuses de la ville, ainsi qu'un
nombre considérable de laïques s'y pressaient.
La levée du corps a été faite par M. l'abbé Dufour, curé-doyen
de Saint-Pierre. Les différentes administrations auxquelles
Monsieur Bridey s'était trouvé mêlé avaient leur représentant de
chaque côté du catafalque : l'administration diocésaine, M. le
Vicaire-général Didierjean; le Chapitre, son doyen, M. le
chanoine Lorrain ; le ministère paroissial, M. l'abbé Geoffroy,
curé de la Cathédrale ; le Séminaire de Pont-à-Mousson, M.
l'abbé Martin, son supérieur; les maisons ecclésiastiques, M.
l'abbé Vanson, supérieur de la Malgrange; le Grand-Séminaire de
Nancy, M. l'abbé Simoutre, le plus ancien de ses professeurs. La
Messe a été chantée par M. le Vicaire-général Voinot, Sa
Grandeur Monseigneur l'Evêque y assistait pontificalement, ayant
à ses côtés deux anciens professeurs du Grand-Séminaire, M. le
chanoine Doyotte et M. Parisot, supérieur des Prêtres
auxiliaires.
La messe terminée, Monseigneur a dit, en quelques mots émus,
qu'il ne voulait pas faire l' éloge funèbre du vénéré défunt :
que la vie et les principes de Monsieur Bridey, d'accord avec
ceux de son Evêque s'y opposaient, mais que sous le coup de si
grands deuils qui l'atteignaient lui-même en frappant son
clergé, il ne pouvait s'empêcher de demander en faveur du cher
Supérieur un souvenir fidèle, le témoignage de la
reconnaissance, la puissance des prières. - Un souvenir fidèle :
car le défunt fut le premier fidèle en tout et à tous. - Le
témoignage de la reconnaissance. Monsieur Bridey a dépensé 43
ans de sa vie à former des prêtres ; et il y a mis tout son.
esprit et tout son coeur, toutes ses forces jusqu'au dernier
instant. En est-il beaucoup ici qui n'aient reçu de lui des
lumières sur leur vocation, des encouragements pour leur
ministère ? Former de bons prêtres fut le travail de sa vie : ce
fut la pensée de sa mort. En priant Dieu de bénir son évêque, il
demandait que ses séminaristes, fussent tous de bons
séminaristes, et devinssent un jour de saints prêtres.
La puissance des prières. Sans doute on peut avoir confiance que
le regretté défunt est au ciel. Mais quelle lourde
responsabilité que celle de former des prêtres! M. Bridey le
comprenait: aussi quand son évêque lui proposa les derniers
sacrements, il lui dit qu'il le voulait bien, qu'il devait à
Dieu de grandes actions de grâces, mais qu'il avait aussi un
compte redoutable à lui rendre. Comme conclusion: que
séminaristes et prêtres, suivant le désir du défunt, s'
efforcent d'être de bons séminaristes et de saints prêtres.
Monseigneur a fait ensuite l'absoute ; puis le cortège funèbre,
conduit par M. le chanoine Barnage, un des anciens confrères de
Monsieur le Supérieur, s'est lentement mis en marche vers
Bon-Secours, au milieu des chants graves des séminaristes.
Le corps de Monsieur Louis Bridey repose maintenant à l'entrée
de l'église de Richardménil, près de ceux de son père et de sa
mère, sous la garde pieuse de son bien-aimé frère, Monsieur le
curé de Richardménil. C'est là que, quelquefois, dans leurs
promenades les séminaristes iront prier sur la tombe du vénéré
supérieur, se rappeler cette vie pieuse et dévouée qui a été
pendant quarante-trois ans un modèle pour les séminaristes et
les prêtres du diocèse, et méditer cette belle parole que M.
Bridey avait choisie pour devise : « Souffrir et mourir sans
faiblir ! »
Un professeur du Grand-Séminaire.
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