14 janvier 1901 - n° 2
- p. 33
M. le chanoine
Prosper
Grand-Eury
La Semaine Religieuse prêle volontiers quelques pages aux
notices courtes, rédigées suivant toutes les exigences de
l'esprit ecclésiastique, où l'amitié et la reconnaissance
veulent fixer le souvenir de nos frères dans le sacerdoce
lorsque Dieu les a rappelés à lui. Elle attendait sur M. le
chanoine Grand-Eury une biographie qui s'est finalement refusée
à venir par crainte d'être incomplète; mais elle ne se résigne
pas à laisser disparaître une physionomie édifiante sans la
signaler autrement que par la courte note publiée sur la
cérémonie des funérailles à Moyen.
Celui qui se décide, à défaut de tout autre mieux qualifié comme
contemporain ou comme ami, à écrire ces lignes, ne connaît rien
et par conséquent ne dira rien de précis sur l'enfance,
l'éducation première, les études, au petit et au grand
Séminaire, de M. l'abbé Grand-Eury, pas plus que sur son
vicariat à Saint-Epvre, son ministère à Frémonville et à Moyen.
Un contemporain seul ou un ami aurait pu recueillir et révéler
sur sa jeunesse et ses débuts dans le ministère, des détails
exacts et intéressants.
Nous ne l'avons connu qu'à Champigneulles et surtout depuis
qu'il habitait Nancy, comme chanoine titulaire de la Cathédrale.
Partout où il passa, il laissa la réputation d'un prêtre
excellent, pieux, régulier dans l'accomplissement de tous ses
devoirs, attaché à son ministère et à ses paroissiens.
En même temps qu'un tempérament robuste qui lui permit
d'accepter à un âge déjà avancé la charge de la paroisse de
Champigneulles, qui compte plus de trois mille habitants, dont
une nombreuse population ouvrière, Dieu lui avait accordé une
nature heureuse, toujours calme, dont la quiétude planait
au-dessus de toutes les difficultés, enthousiaste parfois
jusqu'à l'excès, grâce à une imagination qui colorait de rose
les situations les plus noires, et à un coeur dévoué, généreux,
si foncièrement bon qu'il trouvait moyen de donner raison aux
hommes et aux choses les plus contraires. Sa vie, toute
laborieuse et active qu'elle fût, s'écoula comme un fleuve
bienfaisant entre des berges toujours fleuries, tournant les
rochers, sans écume et sans bruit, toujours tranquille et
limpide.
Une large aisance le mit en mesure de satisfaire son zèle pour
la maison de Dieu. A Frémonville, il restaura l'église et
l'embellit de peintures. A Champigneulles, il consacra de ses
propres deniers une somme considérable à établir des orgues, à
leur donner une place dans le choeur dont il fallut dégager une
travée, et à faire exécuter sur les voûtes et sur les murailles
de ce choeur des peintures dont la conception n'était peut-être
pas saisissable au premier coup d'oeil, mais qui témoignaient
(car deux d'entre elles ont dû succomber aux travaux
d'agrandissement de l'église, accomplis par le zèle de M. l'abbé
Aubry, son premier successeur) son esprit de foi et ses
généreuses intentions.
Il surveilla dans les jeunes gens qu'il dirigeait les signes de
vocation sacerdotale et il eut la joie de conduire plusieurs de
ses élèves au saint autel.
Écoles libres de Champigneulles, orphelinat de Moyen,
communautés religieuses, malades et pauvres dans la détresse, il
secourut généreusement tout ce qu'il jugeait digne d'intérêt.
Aimable et gracieux dans ses relations, il était hospitalier et
se plaisait lui-même dans les réunions fraternelles auxquelles
ses nombreux récits, historiques ou non, mais toujours
intéressants, ne manquaient pas d'apporter un large contingent
de plaisir. Ses voyages à Rome, l'accueil bienveillant de Pie
IX, ses multiples relations, ses longues années de ministère
étaient autant d'inépuisables sujets de conversation.
En 1895, Monseigneur lui offrit, et il accepta avec
reconnaissance, une stalle de chanoine titulaire à la
cathédrale. Quelques mois plus tard il subissait une dure
épreuve par la mort de son frère, l'excellent curé de Maxéville,
épreuve qu'il supporta vaillamment en prêtre plein de foi et
d'espérance surnaturelles,
Dès son arrivée à Nancy, fidèle aux habitudes de toute sa vie
sacerdotale, il édifia par sa piété, sa régularité, sa
simplicité, les paroissiens de la Cathédrale qui pouvaient le
voir chaque matin accomplir à l'église, avant et après sa messe,
de longs exercices de dévotion.
Il avait pris la résolution de rendre son repos fécond: aussi
tous les jours le trouvait-on près de son confessionnal
attendant avec patience et accueillant avec bonté tous ceux qui
recouraient à son ministère.
Il aimait la grande fonction de la prédication et donnait avec
empressement son concours à tous les curés qui le désiraient. «
Je veux travailler jusqu'au bout », disait-il souvent. Et
quoiqu'il fût atteint depuis longtemps d'une de ces maladies que
les médecins déclarent n'être pas mortelles par elles- mêmes
mais que la moindre complication rend subitement fatales, il
travaillait toujours, rendant partout des services et traitant
par le mépris ce qui aurait exigé les plus grandes précautions.
Il se soignait bien quelque peu, mais à sa manière et en dépit
de ses fréquentes théories médicales, on peut croire que son
principal remède était l'énergie de sa volonté.
Le dimanche 2 décembre dernier, après avoir célébré la messe
paroissiale de 8 heures à la Cathédrale, M. le chanoine
Grand-Eury se rendait à la gare pour aller à Bouxières-aux-Dames
où il avait promis d'adresser la parole à la corporation des
mineurs qui fêtait ce jour-là sainte Barbe. Le premier train
manqué, il en attendit un autre. Mais le temps pressait
lorsqu'il descendit à Champigneulles et sa marche devint
tellement une course qu'on disait en voyant ce vieillard tout en
sueur entrer à Bouxières: « Mais il va se faire mourir ! » Il
prêcha néanmoins, et sans trop de fatigue apparente, et il parla
longtemps. En terminant, il évoqua la pensée de l'éternité, qui
est plus proche de nous que nous ne le croyons, et les radieuses
révélations du grand jour. Nous serons alors comme des mineurs
au sortir de leurs galeries obscures et les yeux de notre âme
s'ouvriront à une lumière incomparable.
En quittant la chaire, il rentra à la sacristie pour s'y reposer
un instant. Le besoin d'air se fit sentir: il sortit par une
porte ouvrant sur le cimetière. Quelques instants après on le
vit, à genoux devant un monument funèbre, s'affaisser
subitement: il était mort. M. le curé et un docteur présent
aussitôt appelés ne purent que constater le décès.
L'impression produite sur l'assistance et sur toute la paroisse
par celle mort si subitement arrivée en une pareille
circonstance, est impossible à décrire. Pendant tout
l'après-midi, les habitants de Bouxières et les paroissiens de
Champigneulles vinrent au presbytère prier auprès du défunt.
Le mardi à 8 heures du matin, un service fut célébré. Plusieurs
prêtres amis du vénérable chanoine, un bon nombre des
paroissiens de Bouxières et de Champigneulles y assistaient.
Avant l'absoute, M. le curé de Bouxières, dans un langage dont
l'émotion était facile à comprendre, passant en revue les
principaux traits de la vie de M. Grand-Eury, mit en relief ce
qui caractérise en lui le vrai prêtre et après l'avoir montré
vaillant jusqu'au bout, mourant au travail, comme un soldat au
champ d'honneur, il lui adressa un adieu tout pénétré de ses
regrets et de sa reconnaissance, ainsi que de la reconnaissance
de ses paroissiens.
M. le curé de Champigneulles donna ensuite l'absoute, puis le
cortège funèbre accompagna la dépouille du chanoine jusqu'au
pont de Bouxières, où un autre cortège venu de Champigneulles le
reçut pour l'accompagner à travers son ancienne paroisse qui lui
donna au passage un salut respectueux, des regrets et des
prières reconnaissantes.
A 10 heures, M. Grand-Eury pénétrait pour la dernière fois dans
la Cathédrale et recevait de ses collègues du Chapitre
profondément attristés du double deuil qui les avait frappés à
trois jours d'intervalle, un adieu suprême et des suffrages
fraternels. Un bon nombre d'ecclésiastiques et de fidèles, amis
du défunt, assistaient au service. Monseigneur l'Evêque donna
l'absoute.
A 11 heures, M. le chanoine Grand-Eury était transporté à Moyen
où le lendemain, ainsi que la Semaine religieuse l'a raconté, la
paroisse entière lui fit des funérailles dignes de sa vie de
prêtre bon, dévoué, édifiant, généreux.
Nous avons la certitude et le regret, en terminant ces pages, de
n'avoir point fait une biographie. Si incomplète pourtant que
soit cette notice, elle suffira peut-être à marquer dans notre
nécrologe la place que méritait M. le chanoine Grand-Eury, et à
provoquer encore, de la part de nos lecteurs, une prière pour le
repos de son âme.
H. B.
23 février 1901 - n°
38 - p. 163
Licence en théologie
M. l'abbé
Demoyen, curé de Vaucourt, a subi avec succès, devant la
Faculté catholique de Lyon, les épreuves de la licence en
théologie.
6 juillet 1901 - n°
27 - p. 587
CHRONIQUE DIOCÉSAINE
Ordination.
Demain, Monseigneur l'Evêque fera, dans la chapelle du Grand
Séminaire, une ordination à laquelle prendront part 20 tonsurés,
25 minorés, 12 sous-diacres, 16 diacres et 16 prêtres : MM.
[...] Chatton, d'Ogéviller ; [...] Steiner, de Blémerey; [...]
10 août 1901 - n° 32
- p. 691
ACTES OFFICIELS
Nominations.
Par décision de Monseigneur l'Evèque, ont été nommés :
[...] Curé de Vého, M. l'abbé
Meyer, précédemment vicaire à Baccarat ;
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