Mémoires de la
Société d'archéologie lorraine
1864
CHARLES III DE DUC DE
LORRAINE DANS LES AFFAIRES DE LA LIGUE EN CHAMPAGNE
(1562-1596),
PAR M. HENRY
Charles III fils de François
Ier de Lorraine et de Christine de Danemark, était cousin de
Mayenne et de tous les Guises, par son père ; par sa mère,
petit-neveu de Charles-Quint et arrière petit-fils de
Charles-le-Téméraire. Souverain à deux ans (1545) (1), sa longue
minorité fut troublée par de graves événements politiques,
marquant la fin des guerres d'Italie, aboutissant à la conquête
des Trois-Evêchés et à l'occupation momentanée de la Lorraine
par les Français. Conquis lui-même, emmené, élevé à la cour
d'Henri II, fiancé, marié à une des filles de ce prince,
l'aînée, la meilleure et plus aimée, le jeune duc se laissa
volontiers gagner par les moeurs et les idées françaises. Paris
et la cour devinrent sa seconde patrie, où, après son retour en
Lorraine, l'attiraient sans cesse et le retenaient les plaisirs,
les fêtes, les amis et les dames, le devoir, les affaires et
l'ambition.
Enfant, homme fait ou vieillard, Charles était le plus beau
prince de son siècle. « Dieu lui avait donné cette beauté et ce
bon air dignes de la puissance souveraine, et, quand il n'aurait
pas été souverain par sa naissance, il l'aurait paru par sa
bonne mine. »
Henri II le proposait pour modèle aux fils de France. « Une
infinité de personnes se rendaient à Paris ou en cour pour le
seul plaisir de le voir. Tous les princes de l'Europe voulaient
avoir son portrait, et Amurat III, empereur des Turcs, se le
faisait apporter tous les ans. »
Infatigable dans les travaux de la guerre, adroit dans tous les
exercices du corps, la lutte, la paume et les armes; chasseur et
joueur passionné, Charles III jouit d'une santé ferme et robuste
jusqu'à la fin de sa vie, qui fut longue. Blessé dans un tournoi
« d'un éclat de lance, qui entra bien profond dans la gorge, il
ne changea de couleur et ne témoigna la moindre frayeur. Il se
fit arracher le bois sans jeter un cri, soutenant, au contraire,
par sa fermeté et par ses discours tous les assistants alarmés.
»
« Les qualités de son coeur et de son esprit égalaient ou
surpassaient celles de son corps. Il savait les langues de
l'Europe, l'histoire, les familles, les généalogies, les belles
actions des hommes illustres anciens et modernes, les intérêts
des princes. Eclairé dans toutes les choses utiles à la vie,
comme les métaux, les médicaments, les météores, il n'ignorait
même pas ce qu'il n'avait pas appris exprès, et raisonnait juste
sur toutes choses. Se connaissant surtout en hommes et habile
physionomiste, il pénétrait jusque dans le fond de l'âme de ceux
qui l'approchaient. Magnanime, libéral, prudent, sage,
prévoyant, grand politique, il sut gouverner ses Etats avec la
bonté et la modération d'un père; il les rendit florissants par
sa prudence et son économie il y attira de toutes parts des
personnes habiles dans tous les arts par une politique sage et
éclairée, il les agrandit sans violences et sans effusion de
sang.
Ainsi parlaient les Lorrains du XVIe et du XVIIe siècles (2). Au
XVIIIe, Dom Calmet ne trouvait rien de mieux que de résumer et
de répéter ses devanciers. Pour nous, tout en imitant Dom Calmet,
nous nous empressons de faire nos réserves et de dire que, dans
une histoire de Charles III, à ces naïfs panégyriques nous
ajouterions peu et nous retrancherions beaucoup. Du reste,
laissons parler les événements et revenons à notre sujet, au
rôle joué par le duc de Lorraine dans les grandes luttes de la
réforme et de la Ligue (3).
Ce rôle était tout naturellement tracé. Par son éducation et ses
croyances, par les croyances, les traditions, les intérêts de sa
famille et de son pays notre prince devait être et fut
constamment un des défenseurs de l'église catholique un des
adversaires de l'église protestante. Dans ses Etats par l'emploi
des armes ordinaires de la contre-réforme, proscriptions,
supplices, confiscations exils, fondations pieuses et
littéraires (4), il parvint à préserver de l'hérésie la grande
majorité de ses sujets ou à ramener quelques Lorrains desvoyez.
A l'extérieur, ami, protecteur ou refuge de tous les
catholiques, peuples, princes et souverains, il donna asile aux
émigrés anglais (5), aux ligueurs proscrits ; intervint en
faveur des archevêques de Mayence et de Cologne ; maria ses
soeurs et sa fille aînée aux ducs de Brunswick, de Bavière et de
Toscane, l'un protestant revenu à l'orthodoxie, les autres
catholiques ardents. Le duc de Lorraine entra aussi
particulièrement dans l'alliance intime de l'Autriche, de
l'Espagne et de la France. Mais, au dedans comme au dehors, il
combattit toujours ses adversaires avec certains ménagements,
avec des intermittences politiques. Ne pouvant empêcher sans
crise violente l'exercice du culte réformé sur les terres de
quelques grands vassaux, il le toléra. Plus tolérant dans ses
relations extérieures, il demeura le bon voisin et amy de
l'électeur Palatin et de celui de Brandebourg, des ducs de
Wurtemberg et de Saxe. Il vendit volontiers le sel de ses
salines aux magnifics seigneurs de la principauté de Berne (6).
Longtemps, il resta neutre dans les guerres religieuses qui
ensanglantaient les Pays-Bas et la France, laissant passer et
repasser les armées contraires. En 1585, sérieusement engagé
dans la Ligue, ce prince ne fit pas aux protestants une guerre à
outrance; en la faisant, il négociait promettant la liberté
religieuse aux Sedanais si leur duchesse consentait à épouser le
comte de Vaudémont. Enfin, à la paix, malgré le pape, malgré les
Lorrains, il maria l'héritier de sa couronne à Catherine de
Béarn, une calviniste ardente et obstinée.
Cette politique contradictoire est, comme on le voit, le pendant
de la politique française. Elle coûta cher aux deux pays et aux
deux peuples cependant, elle était le résultat naturel, fatal de
la situation géographique de la Lorraine, du choc d'événements
et d'intérêts contraires. Que devait, que pouvait faire Charles
III ? Imiter servilement Philippe II et se perdre avec lui
rester dans une indifférence absolue renier les plus glorieuses
traditions de sa famille et de son pays Comment échapper à cette
cruelle alternative, à ce malheur, à cette honte également
irréparables ? - Par notre antique neutralité, par une
neutralité catholique et armée répondirent les vieux Lorrains. -
Charles les écouta comme autrefois sa mère les avait écoutés.
Mais quels furent les résultats de ce compromis ? Que vit-on en
Lorraine pendant les vingt-trois premières années des guerres
religieuses ? Ce qu'on avait vu pendant les dix-sept dernières
années des guerres d'Italie : des armées étrangères, demandant
libre passage avec promesse de se comporter doulcement ; assez
fortes pour se passer de la permission et se permettre
impunément toutes sortes de violences les chefs des armées
protestantes, un Louis de Condé, un Jean-Casimir cher chant à
s'établir dans les Trois-Evéchés, au coeur même de la Lorraine ;
deux grands rois catholiques caressant, conseillant,
pensionnant, et, bon gré, malgré, entraînant dans le cours de
leur politique un petit prince, leur intime allié, leur
beau-frère. En conséquence, dès le commencement de la lutte
(1562), Charles III pratique sa neutralité de la manière
suivante : sans cesse il contrarie les protestants dans leur
marche; ses garnisons leur ferment les places fortes et
passages, ses guides les empêchent de séjourner, ses armées les
suivent à distance ou les précèdent pour rompre les ponts,
mettre en sûreté les vivres et munitions. Les catholiques, au
contraire, sont avertis, appelés, conduits, logés, nourris
d'étape en étape, comblés de caresses et de présents (7). Les
Lorrains bravent impunément les défenses de servir à l'étranger,
ou bien le duc autorise des levées en faveur du roi d'Espagne et
du roi de France (8). Bien plus, non-seulement, il n'exige de ce
dernier ni rentes ni pensions constituées, mais il le laisse
puiser à discrétion dans les joyaux de la couronne ducale, quand
il faut payer la retraite des auxiliaires du protestantisme ou
de la royauté (9).
Ainsi, en quatorze années (1562-76), sans compter les bandes
détachées, les aventuriers et les traînards, 21 armées
régulières, françaises allemandes ou suisses (10), traversent la
Lorraine; elles la traversent en tous les sens les unes, venant
ou revenant de France, entrent par l'est et par le sud, par le
Luxembourg le Clermontois, le Barrois, le Bassigny, les
Trois-Evêchés; les autres, allant en France, pénètrent par les
cols des Vosges, Saverne, Sainte-Marie-aux-Mines et Bussang. Les
chefs des protestants, Dandelot, Portien, Louis et Henri de
Condé, Guillaume d'Orange, Wolfang de Bavière, Jean-Casimir, qui
parait deux fois, concentrent leurs forces au milieu du pays, à
Baccarat, Moyen, Vézelise, Haroué, Pont-à-Mousson, pour gagner
ensuite la Champagne méridionale ou la Bourgogne. Les chefs
catholiques les ducs d'Aumale, de Nemours, de Guise, de Saxe, le
marquis de Bade, Schomberg, Barby et Vesterbourg défendent les
cols des Vosges, harcèlent l'ennemi ou vont combattre en France.
A ces passages et séjours des étrangers, qu'on ajoute les
marches et contre-marches des compagnies lorraines levées pour
servir dans le pays même, ou en France, en Belgique, en
Allemagne (11) ; qu'on ajoute la guerre cardinale, la guerre de
Bitche et autres incidents causés par la réforme et la
contre-réforme, et on aura une idée des malheurs de la Lorraine,
chargée et foulée de soldats. Malgré leurs promesses, malgré
leurs chefs, ces sectaires et ces mercenaires commettent toutes
les violences possibles aux dépens des gens de village, des gens
d'église, des églises surtout. Les traces de leurs dévastations
et de leurs incendies furent longtemps visibles à Baccarat,
Hadonville, Harqueville, Francheville, Nyvernaumont (12),
Vaux-Moutiers, Dieulouard, Reynel, à l'abbaye de Saint-Sauveur
en Vosges. La population diminue partout, dans les villes comme
dans les villages : Einville, Gondreville, Hagéville (13)
perdent 17 conduits ; Lunéville, 15 et demi ; Epinal, 169.
Enfin, pour comble de malheur, la foudre et la grêle (14)
amènent la stérilité, la famine et la peste; la peste qui, en un
an, tue mille personnes à Saint-Mihiel. Toutes ces ruines,
constatées par une enquête officielle (15), prouvaient
surabondamment le vice de la prétendue neutralité lorraine,
capable de produire bien d'autres ruines dans les troubles
imminents que préparait le déchaînement de toutes les passions
humaines.
Une guerre franchement ouverte ne porterait pas des fruits plus
amers et pourrait donner quelques compensations le Sedanais, le
Luxembourg, les terres des Trois-Évêchés et la Champagne
orientale formant des enclaves très-capricieuses et fort
gênantes pour le commerce et l'administration, tout le bassin de
la Meuse et de la Moselle, toutes les anciennes dépendances du
royaume d'Austrasie, par leur position géographique, se
rattachent moins à la France qu'à la Lorraine. Et puis, Charles
III ne manque pas de droits sérieux sur la Provence, sur toute
la succession d'Anjou, même sur la couronne de France. En effet,
de Francus, fils du troyen Hector, descend en ligne directe
Salvius Brabon, premier duc de Brabant ; de Brabon et de Siniane,
soeur de César, vient Lother, qui a donné son nom à la Lorraine ;
de Lother, Clodion et les Mérovingiens des Mérovingiens, Pépin
et Charlemagne; de Charlemagne, Gérard d'Alsace et Godefroy de
Bouillon. Les Capétiens ne sont que des usurpateurs, et leurs
descendants, Valois et Bourbons, s'éteignent honteusement dans
l'impuissance et l'hérésie. Qu'on rende donc au duc de Lorraine
ce qui revient au duc de Lorraine, ou bien, si la longue
domination des Capétiens établit une sorte de prescription,
qu'on reconnaisse pour fils de France le marquis du Pont fils
aîné de la fille aînée d'Henri II; compromis naturel, légitime,
seul capable de prévenir une crise épouvantable dans la religion
et la politique. Enfin, qu'une intervention effective et résolue
en faveur des catholiques français ménage à la Lorraine
l'annexion de la France, de l'Austrasie ou de quelques épaves,
provinces et villes, ramassées pendant la tourmente. Tels
étaient les écrits de savants généalogistes (16), entichés des
fables troyennes et généreusement récompensés telles les
ambitieuses espérances de Charles III et de sa devise : Durat et
adhuc spes avorum ; telles les promesses secrètes et publiques
apportées de France, de la part d'un grand nombre de ligueurs.
Le duc de Lorraine se laissa facilement entraîner, car, s'il
était bien avec la cour de France, il était mieux avec celle de
Joinville. Bien plus, dès 1576, il parut négliger la première
pour la seconde. Bien plus encore, dès 1552, afin de mettre les
Guises à l'aise, il les réunit volontiers dans ses châteaux de
Saverne, de Blâmont, de Bar, de Nancy (17) ; où se préparaient
et se discutaient les manifestes et les plans de la Ligue.
Engagé peu à peu, moralement, puis matériellement, Charles III
devient, en 1585, l'associé du duc de Guise dans la lieutenance
générale du royaume en 1588, le pensionnaire de Philippe II.
Alors, il se jette dans la lutte avec une activité et une ardeur
extraordinaires. Ses diplomates et ses agents parcourent
l'Europe pour resserrer les antiques alliances et en former de
nouvelles ; pour distribuer habilement les libéralités et les
distinctions, ou contracter des emprunts (18) pour lever des
compagnies et des régiments.
De tous côtés, capitaines, ingénieurs, artilleurs, fantassins et
cavaliers répondirent à l'appel du prince. D'Italie et d'Albanie
vinrent Jérôme Sitoni, les deux Galéani, Nicolao Perliny da
Forly, Rinaldini, les deux Golesme, les deux Colli, Renesi,
Capucinadi, Cavalquini, Verdelle d'Espagne, Roderigo Narvais du
Guet le marquis d'Haurech ; d'Allemagne, Charles de Mansfeld,
Jacques de Bade, Rudolphe de Schenaw, de France, d'Amblise et
l'artificier Brichanteau Roussin. La Lorraine fournit Jean et
Paul de Salm, Jean de Beauvau, Affrican et Jean d'Haussonville,
Jean, Charles et Théodore de Lenoncourt, de Gournay, de
Montreuil, de Pouilly, de Saint-Baslemont, René de Florainville,
Antoine de Haraucourt, Jean de Chaligny, Nicolas MarchaI; en
sorte que par six levées annuelles (19) et successives, l'armée
lorraine s'éleva de quatre à vingt-cinq mille hommes.
En faisant ces préparatifs militaires, le duc de Lorraine
n'entendait point rompre officiellement la neutralité de ses
Etats ;il se disait forcé « par la malice du temps, une
apparence de guerre, troubles et esmotions, par les actes
d'hostilité de mal affectionnés entrés en ses pays, par la
félonie du duc de Bouillon par le zèle pour la religion
catholique, apostolique et romaine et la conservation de l'estat
ecclésiastique du royaume de France (20) » Mais, en réalité, ces
motifs étaient des prétextes : le prince remplissait ses
engagements de ligueur et ses soldats, avant-garde ou réserve
des grandes entreprises futures, rendaient déjà dans le présent
des services signalés.
Le plus grand nombre, séjournant en Lorraine, gardait ou
fortifiait les passages et les places fortes du pays, notamment
La Mothe et Lunéville. La démolition du faubourg Saint-Dizier,
la fondation de la ville neuve et l'établissement d'une enceinte
régulière faisaient de Nancy une véritable capitale d'un royaume
d'Austrasie (1587). Au dehors, tandis que Charles III envoyait
deux mille écus au duc de Guise, les sieurs de Lenoncourt, de
Seraucourt et de Tremblecourt, avec leurs, compagnies servaient
parmi les ligueurs en Champagne, puis en Guyenne (l585-86) ; des
canonniers lorrains allaient aider le duc de Mayenne à reprendre
Auxonne (1586); les sieurs de Saint-Baslemont, Balanjy, de
Château-Bréhain, d'Artigoty combattaient en Allemagne, au siège
de Bonn.
L'intervention armée des Lorrains ne se borna pas à ces
expéditions faciles. En 1587, leurs forces donnèrent presque
seules contre trente mille reitres protestants, commandés par le
duc de Bouillon et le burgrave de Dohna. Averti par la
reine-mère et les indiscrétions des étrangers, le duc de
Lorraine se hâta d'entraver et de suivre l'ennemi dans sa
marche. Des le 18 juillet, Haussonville et Lenoncourt, expédiés
sur la Sarre et la Moselle, doivent « s'impatroniser d'icelles,
empêcher que l'ennemy ne les puisse premier emparer visiter et
rompre gués, ponts, chemins, barques, bateaux, arbres lever les
fers des moulins, enclumes et soufflets des maréchaux ; abattre
les fours ; faire entrer en villes grains, meubles et joyaux ;
ce qui n'y pourra entrer sera envoyé ès grandes forêts,
montagnes et lieux inaccessibles et détournés, sans toutefois
rien précipiter sinon en l'extrémité (21). »
L'arrivée du duc de Guise et du marquis de Haurech (22), qui
porta l'armée catholique à vingt mille hommes (23) ne fit rien
modifier à ce plan. Les protestants, pris par la famine,
fatigués, harassés, acculés sans cesse, affaiblis par les
divisions des chefs et par l'indiscipline des soldats friands de
vin et de pillage, mirent un mois entier pour traverser la
Lorraine de Saverne à Lifol-le-Grand, marquant leur passage par
des ruines affreuses, à Lorquin, Baccarat Charmes, Blâmont (24),
Lunéville Belchamp, Bayon Haroué, Maizières et Viterne. Les
Lorrains furent battus dans plusieurs escarmouches devant Saint-Quirin,
Damelevières et La Mothe mais ils firent échouer toutes les
tentatives des reîtres sur les moindres bicoques et bravèrent
toutes leurs forces à Pont-Saint-Vincent. Le duc, heureux de la
délivrance de ses Etats, trouva dans cet exploit l'occasion de
frapper une médaille fastueuse : « Au droit, la victoire portée
sur un nuage tenant d'une main une palme et de l'autre une
couronne au-dessous, le bourg de Pont-Saint-Vincent et un pont
de trois arches défendu par deux tours, avec la légende : Ipsa
sibi pretium virtum. Au revers, l'écu de Lorraine timbré d'un
heaume couronné ayant pour cimier un aigle essorant, et, dans le
champ les écussons de Hongrie, Naples, Jérusalem, Aragon, Anjou,
Bar, Gueldres, six croix de Lorraine et le millésime -1587 (25).
Pendant ce temps, le duc de Guise et le marquis du Pont
prenaient de solides revanches d'abord à Auneau et à Vimory,
puis à travers les deux Bourgognes jusqu'au lac de Genève; au
retour, ils s'abattirent sur le comté de Montbéliard, massacrant
tout, même les chats, gâtant, par des mélanges de chaux, de
sable et d'excréments, le blé qu'ils ne purent emporter, se
faisant précéder ou suivre des fruits de leurs rapines (26).
Le duc de Lorraine aurait bien voulu faire lui-même ce voyage à
la place du marquis du Pont; sur l'invitation du roi, transmise
par Schomberg (27), il s'y était préparé et, au commencement
d'octobre, avec des forces nouvelles, il allait s'acheminer,
quand des ordres supérieurs l'arrêtèrent à Bar-le-Duc. Le
marquis du Pont lui-même n'était autorisé à s'avancer que
lorsque ses soldats auraient prêté serment au roi (28).
Henri III n'ignorait pas les menées de son beau-frère et, comme
lui, jouait double jeu. A l'occasion il réclamait son assistance
et sa médiation (29), mais plus souvent il lui faisait sentir
ses dissidences et son refroidissement. Les officiers royaux
faisaient mille avanies aux officiers et agents lorrains à Paris
et sur les frontières, les traitant avec indignité, rebutant
leurs affaires et créances. Quelques mois après la conspiration
de Salcède, une enquête s'ouvrit sur le livre de Rosières
l'auteur eut beau invoquer son caractère ecclésiastique,
déclarer qu'il n'avait fait que copier des auteurs bien connus,
sans instruction d'aucun, l'enquête, commencée à Toul (30), se
continua à la Bastille et aboutit à une proposition de peine
capitale. Les instances des deux reines obtinrent la grâce de
Rosières, mais il dut, devant le conseil en présence des ducs de
Guise et de Mayenne, demander pardon à genoux « d'avoir mal et
calomnieusement escrit plusieurs choses contre la vérité de
l'histoire, prenant Dieu à témoin qu'il avait en cela failli
plus par imprudence clue par malice (31) ». Il dut faire plus
encore, il laissa sans réponses les répliques injurieuses que
les écrivains royaux prodiguaient aux Lorrains.
Le duc de Lorraine, merveilleusement perplexe, s'empresse de
multiplier les assurances et les explications (32) : ses
armements, faits sans ambition, ny artifice, ny dessein, ne
tendent qu'à la défense de ses Etats, à l'honneur de Dieu, au
service du roi. Déjà, en refusant de traiter avec les reitres,
en les empêchant et retenant tout un mois, il a servi les
intérêts de la France. Son projet de voyage n'a pas d'autre but
: s'il s'arrête brusquement, l'Europe et la chrétienté le
regarderont comme suspect ou comme pusillanime l'accuseront de
perfidie ou de lâcheté. « Quelle contenance pourra-t-il avoir le
reste de sa vie, luy qui toujours a fait profession de l'honneur
et d'être veu et recongneu par tout le monde vray et fidel
serviteur de la couronne de France et amateur du repos de cest
Estat. » Congédier les troupes, c'est exposer la Lorraine,
peut-être la France, à une ruine certaine. Le marquis du Pont
est trop jeune pour avoir l'autorité et l'expérience nécessaires
; l'armée, qui a prêté serment au duc, le refusera peut-être au
roi. Des malveillants veulent mettre deux beaux-frères en
mauvais mesnage, « chose qui, si elle advenoit, serait au duc
plus dure et griève à supporter que la mort ». Qu'on le mette en
présence de ses hayneurs et calomniateurs, « en foi et parole de
prince, sur le salut de son âme et sur la perte de sa vie », il
promet de donner au roi entière satisfaction.
Henri III persévérant dans ses dissidences, le duc se plaignit
avec une certaine aigreur du dédain qu'on faisait de ses
services; il mit au départ de son fils des réserves qui
laissèrent à ses troupes une autonomie complète (33).
On le voit, le refroidissement empire et devient de
l'irritation. Les ligueurs s'emparent alors entièrement du
prince lorrain ; les Guises le décident à signer leur manifeste
de Nancy (34) ; Philippe II députe le commandeur Moreo qui lui
offre la toison d'or et une compagnie d'hommes d'armes, ou une
pension de 15 mille écus par mois (35). Ajournant la première
proposition, Charles III accueille aussitôt la seconde et, sans
tarder, envoie 400 lances à Paris, soutenir le roi des
barricades.
Ces troupes, commandées par de Rosne, étaient détachées des
sièges de Sedan et de Jametz, dans le duché de Bouillon. Ce
duché, antique asile des proscrits politiques, était devenu, dès
1550, le refuge des proscrits religieux. Les populations et les
princes se laissaient gagner par des doctrines qui semblaient
donner une nouvelle consécration à leur indépendance
augmentaient leurs forces et leurs richesses. En 1560, le jeune
duc Henri-Rohert de La Marck (36) et sa femme, Françoise de
Bourbon-Montpensier, faisant profession publique de la foi
protestante, proclamèrent la liberté de conscience. Peu après,
le séjour de quelques réformés illustres, polémistes et
capitaines, La Noue, de Bèze, Duplessis-Mornay, le zèle naturel
des sectaires, provoquèrent des actes d'intolérance et de
propagande de plus en plus accentués (37). De même que les
Lorrains s'engagent peu à peu dans la ligue catholique, par une
pente contraire les Sedanais s'engagent dans la ligue
protestante aux dépens de leurs compatriotes et de leurs voisins
(38). Les Verdunois, particulièrement vexés par les Schelandres
(39), gouverneurs de Jametz, implorent le secours des Lorrains
de Lorraine et de France, qui promettent de forcer les
provocateurs à mettre de l'eau dans leur vin (40).
Aussitôt après la prise d'armes de mars 1585, commencent des
incursions que la paix de Nemours force à suspendre, que la
surprise de Rocroy autorise à renouveler (41)., et qu'on suspend
de nouveau sur la Meuse pour lutter ailleurs (1587). Le duc de
Bouillon et son frère succombent à la fleur de l'âge (42),
laissant pour héritière leur soeur, Charlotte, encore mineure,
sous la tutelle de La Noue, que la libéralité lorraine avait
naguère délivré de la captivité où le retenaient les Espagnols.
Belle occasion de prendre l'héritage et l'héritière par force,
traité ou mariage ! Malgré le roi et ses menaces, Charles III,
assisté par de Rosne et quelque cavalerie française se charge
seul de cette importante affaire. Voulant punir la félonie d'un
vassal déchu de son fief et tirer une satisfaction condigne, il
mène de front les négociations et la guerre. D'une part, il
marchande les droits du comte de Maulevrier, un La Marck
collatéral, prétendant mâle à l'exclusion des femelles (43) ;
d'autre part, il entre en pourparlers avec Charlotte, sa bonne
cousine. « Suivant les ouvertures à lui faites par aucuns
bienveillants parents et amis (44) », quatre commissaires
portent à Sedan les propositions suivantes : 1° la duchesse
épousera le comte de Vaudémont, qui, de son autorité maritale,
commandera ès terres souveraines son intention n'étant pas d'y
mettre garnison, si ce n'est en cas de nécessité.
2° Les protestants auront liberté de conscience mais pour un
temps seulement au bout duquel ils retourneront à l'église
catholique ou s'expatrieront après avoir librement disposé de
leurs biens.
3° Comme dernière concession, le prince pourra promettre de
maintenir les gouverneurs qui sont en charge et accorder liberté
de culte privé aux bourgeois domiciliés depuis un an et un jour.
4° Le mariage sera conclu après la réception de la dispense du
pape, pour cause de parenté en attendant, on tâchera de
réconcilier Mademoiselle de Bouillon avec l'église catholique «
car ce serait par trop ignominieux qu'un prince recongneu
très-catholique par toute la chrétienté, se joignit par mariage
à une hérétique (45) ».
Le duc de Lorraine envoie aussi contre Jametz les meilleurs de
ses canons, l'élite de ses compagnies Haussonville, Lenoncourt,
Mathieu du Pont (46), ingénieur et maitre charpentier
napolitain, inventeur d'un pont à jeter sur les fossés puis
Florent Drouin, sculpteur, enfin le marquis du Pont.
Schelandre sut résister à tous ces assauts. Aux négociateurs il
répondit avec ses amis de Sedan le testament du dernier duc
oblige la duchesse, sous peine de déchéance, au maintien des
libertés politiques et religieuses du pays. Il répondit au
blocus et aux attaques des soldats par des sorties à leurs
stratagèmes par des stratagèmes. Soutenu par les encouragements
du duc de Montpensier et du roi de Navarre, par les diversions
des gouverneurs de Sedan et de Metz (47), par les travaux de
l'ingénieur Jean Erard, de Bar-le-Duc, il tint bon un an,
dix-huit mois, et ne capitula qu'à la dernière extrémité pièce à
pièce, livrant la ville d'abord, puis le château (48). Ses
braves obtinrent les conditions les plus honorables les
habitants conservèrent toutes leurs libertés. Mais le vainqueur
ne tarda pas à violer ces capitulations (49) dans les clauses
les plus essentielles, en rétablissant les gens d'Eglise dans
leurs biens et dignités, en persécutant les réformés, en
confisquant les biens des bourgeois qui se retirèrent à Sedan
(50).
Ces riches dépouilles couvrirent une partie des frais de la
générosité lorraine envers les capitaines, ingénieurs, soldats,
postillons (51), qui s'étaient signalés avant ou après la prise
du château de Jametz : elles grossirent les pourboires (52)
accordés à leur valeur, industrie, prudence et diligence. La
joie du prince était d'autant plus grande que ce petit succès
lui donnait une entière liberté d'action dans les affaires
générales et lui permettait de répondre aux instances des
ligueurs.
En effet, coup sur coup le 24 décembre 1588, à minuit, et le 7
janvier 1589, les Parisiens sollicitaient vivement
l'intervention du duc de Lorraine, et la duchesse de Montpensier
se chargeait d'aller elle-même stimuler le zèle de son parent.
Voici, à cette occasion, deux dépêches importantes expédiées par
la commune de Paris, l'une adressée à Madame de Montpensier,
l'autre à Charles III :
« Madame, pour ce qu'estant par-deçà, vous avez congneu
l'entière résolution que nous avons prise sur ce qui est advenu
à Bloys, recongnoissant que ce n'est que la continuation et
chemynement à la ruine entière des catholiques, qui jusques icy
se sont plus vertueusement employez à la deffense de leur
religion ; et que Dieu vous ayant si libéralement départie de
ses grâces, comme il a faict, vous pouvez grandement ayder en
cest endroict à tous les gens de bien qui en l'exécution de leur
unyon ne veulent aucunement vaciller ; nous vous supplions
très-humblement, Madame, estant près de Monsieur de Lorraine,
auquel nous escripvons pour le supplier de vous entendre de
nostre part favorablement, de luy desduire particulièrement nos
bonnes volontés et des autres bonnes villes unyes avec nous, à
ce qu'il luy plaise nous assister comme il en a les moyens
prenant en bonne part la hardiesse que nous donne en vostre
endroict le zèle affectionné que vous avez à une si sainte cause
de laquelle la poursuitte est méritoire envers Dieu et oblige
tous les gens de bien, nous particulièrement, qui vous debvons
et vous rendrons perpétuellement service....
« De Paris le 7me de janvier 1589. »
« Monsieur, le malheureux acte commis en la ville de Bloys, la
détention des princes, seigneurs et autres personnes notables
qui soubs la foy publicque et pour le bien public, y avoient
esté convocqués, peuvent bien faire penser à tout bon jugement
que c'est là un achemynement à la ruyne conspirée contre les
catholiques et plus gens de bien de ce royaume et généralement
de tous ceux qui plus vertueusement se sont opposez à l'invasion
des héréticques ; ce qui nous a donné occasion de pourvoir à nos
affaires, résolus que nous sommes de n'y épargner nos vies ny
moyens quelconques que Dieu nous ait donnez, comme nous l'avons
fait entendre à Madame de Montpensier, estant par deçà laquelle
nous avons supplié nous faire tant d'honneur d'invocquer en cest
endroict vostre ayde et support, et vous représenter les moyens
que Dieu donne aux siens d'empescher l'oppression des gens de
bien, au moings telle que la voudroient bien entreprendre leurs
ennemys. Et pour ce que madicte dame vous déduira bien plus
pertinemment un tel discours que ne le pourroit porter le
papier, nous vous supplions Monsieur, entendre bénignement et
selon vostre bonté accoutumée ce qu'elle nous a promis vous
représenter de nostre part. Et puisqu'il va en ce faict de
l'honneur de Dieu, de la conservation des catholicques et
particulièrement de l'intérêt de toute votre maison, nous nous
asseurons que vous n'abandonnerez en ceste cause ceux qui ont si
grande expectation en vous....
« De Paris.... (53) ».
Ces lettres, interceptées par les habitants de Châlons, ne
parvinrent pas à leur adresse mais d'autres courriers furent
plus heureux. Les prières des Parisiens et du duc d'Aumale
franchirent la frontière, appuyées par les prières de Mayenne,
par celles des ligueurs toulois, verdunois et champenois, par
celles du colonel Saint-Paul (54), qui s'avança jusqu'à Verdun
et Commercy pour donner la main aux troupes lorraines.
D'un autre côté, le roi prie son beau-frère « de trouver
agréable ce qui a été faict à Bloys » et menace de le traiter en
ennemi s'il continue ses attaques contre Jametz (55) et ses
menées sur la frontière. Les Allemands recherchent aussi
l'alliance de la Lorraine et, dans le cas contraire annoncent
qu'ils y passeront par force.
Charles III se trouvait fort embarrassé. La mort des Guises lui
donnait subitement le second ou le premier rôle dans la grande
tragédie ; la mort de Catherine de Médicis le privait de son
plus ferme appui à la cour; il ne pouvait approuver les
assassinats de Blois il n'osait irriter ouvertement le
ressentiment royal. Le vieux système de neutralité apparente lui
servit de couverture. Restant aux escoutes comme un vrai rieur,
il laisse tomber la rosée. Ses condoléances s'adressent
également au roi et à Madame de Guise ; également, et le même
jour, il fait célébrer aux Cordeliers les services funèbres de
la reine-mère et des Guises. Au bout de six semaines, vers le
milieu de février, les succès des ligueurs déterminent le prince
à suivre la fortune. A l'intérieur, ses baillis et gouverneurs
multiplient les mesures défensives, comme en 1587, tandis que
ses commissaires défraient quatre mille reîtres (56) catholiques
qui se rendent en France. A l'extérieur, ses agents redoublent
d'activité, tandis que ses troupes disponibles observent le
Bassigny et prennent part à l'affaire de Saint-Juvin (57).
Le prince lorrain n'en fait pas moins bonne figure à sa Majesté
très-chrétienne qu'il a l'honneur d'attoucher de si près. Si le
roi se plaint de l'aide matérielle fournie aux ligueurs le duc
s'empresse de donner des explications. - Plusieurs compagnies
licenciées après la trêve de Jametz ont pris service où elles
ont voulu les unes sous Saubole, les autres sous Saint-Paul. «
Si j'avais voulu favoriser ce dernier, je ne les aurais laissé
avec mes cornettes, casaques et livrées (58) ». - Poynet
secrétaire du cardinal de Lorraine, revenant de Paris chargé de
pamphlets contre Henri III, a été arrêté à Châlons par d'lnteville
: « il a acheté lesdits livrets sans bien savoir ce qu'ils
contenaient et même sans plus y penser que par malice; il
recevra la réprimande qu'il mérite, et à une autre fois il y
regardera de plus près (59) ». - Artigoty a pris service près de
Monsieur du Maine : « je ne puis l'en empêcher : c'est le
privilège de mes vassaux de prendre tel party qu'ils veulent. »
Le roi et d'Inteville savent à quoi s'en tenir, mais leur
position critique les force à imiter le prince. D'Inteville
laisse ses troupes exercer quelques représailles en Lorraine ou
sur des Lorrains (60), puis il désavoue ces courses et procure
la liberté des prisonniers. Le roi continue à combler son
beau-frère, lui promettant des secours contre les Allemands,
favorisant le mariage de la princesse Christine avec le grand
duc de Toscane (61). Il lui demande aussi plusieurs fois de
moyenner une réconciliation avec les chefs de la Ligue (62). il
va jusqu'à lui communiquer des articles fort avantageux (63).
Dans ses réponses, Charles III varie selon le temps : en 1588 il
disait : la paix vaut mieux que la guerre ; la guerre pourrait
amener la ruine de l'Etat et du général, et par conséquent du
particulier. La paix empêchera plusieurs villes de France de se
quantonner. Je cherche à rendre traitable le duc de Guise. Pour
moi, rebuté, calomnié, injurié, je ne dois point, par ma
présence, augmenter le nombre de mes ennemis ; du reste, les
ravages et les menaces des protestants me retiennent. En 1589,
il prononce un mot déjà vieux et toujours nouveau : il est trop
tard. - Je voudrais pouvoir accueillir immédiatement les offres
qu'on me fait, mais je ne crois pas que les princes se veuillent
disjoindre de l'Union (64) - Toutefois, le duc de Lorraine ne
sortit officiellement de sa neutralité qu'à la mort d'Henri III.
Alors, entièrement dégagé, il dépêcha à Paris un gentilhomme
pour « faire entendre sa résolution ferme et arrêtée d'embrasser
la cause des catholiques (65) de tout son pouvoir et moyens ».
Cette intervention directe et publique dura cinq années, par les
armes et la diplomatie.
Charles III combat surtout dans les Trois-Evêchés et en
Champagne. C'était de ce côté que, depuis longtemps, il tournait
ses plus chères espérances ses meilleurs moyens d'influence et
de crédit. Après avoir rajeuni son vieux droit de patronage sur
Toul et Verdun, il prenait soin de s'attribuer une sorte de
droit de présentation aux siégés épiscopaux de ces villes et à
celui de Metz; il sollicitait ardemment, itérativement, pour son
fils ainé, le gouvernement de ces trois places et de quelques
annexes champenoises. Il prodiguait les visites, les honneurs,
les caresses, les présents, les pensions aux évêques, ses
créatures, ses parents ou serviteurs (66), aux gouverneurs, ses
bons voisins et amys (67). Ici, il jouait et perdait de grosses
sommes à la paume ; là, il tenait un enfant sur les fonts de
baptême (68). Il achetait volontiers chez les marchands de
Reims, d'Epernay, de Troyes, de Chalons, fines serviettes et
draps de soie, tentes et chevaux. Il honorait les écoles de
Reims en y envoyant son fils ainé et son neveu, en y choisissant
un précepteur et un secrétaire (69) pour le marquis du Pont.
Deux médecins, le messin Hanus Foës et le rémois La Framboisière
reçurent aussi du prince plus d'une marque de confiance et de
générosité (70). Les gens d'Eglise, les pauvres paysans
eux-mêmes ne furent pas oubliés, soit qu'il s'agit de la
réparation ou de l'achèvement de quelque édifice religieux; soit
qu'il fallût indemniser ceux qui avaient souffert des violences
des soldats lorrains (71) ; en sorte que les peuples et leurs
chefs s'habituaient, depuis quarante ans, à voir, à fêter, à
servir le duc de Lorraine, comme un fils de France, comme leur
avant-garde, comme leur auxiliaire naturel contre les
Bourguignons et les hérétiques.
Les princes des Trois-Evéchés faisaient particulièrement tous
leurs efforts pour le charger de la temporalité; « considérant
les grands troubles passés, invasions et extrêmes inconvénients
advenus par la nouvelle religion, l'accroissement des diverses
sectes, les incroyables peines, dépenses et dommages supportés,
l'impossibilité de résister sans s'exposer à tout perdre, la
distraction apportée au service divin par le soin des choses
terriennes (72) ». Charles III put recueillir quelques domaines
isolés : Hattonchâtel, Clermont et Varennes, Saint-Clément,
Réméréville, Albestroff et Hélimer (73). L'opposition de
l'empereur et du roi l'ayant fait échouer dans ses tentatives de
fusion complète, il prit alors et successivement trois autres
voies : il aida le duc de Guise dans sa campagne de 1585 et
contribua puissamment à l'occupation de Verdun et de Toul ; mais
l'entreprise sur Metz ayant échoué, l'affaire était manquée. Le
duc de Lorraine résolut de tourner la difficulté en demandant au
roi le gouvernement des Trois-Évêchés pour le marquis du Pont.
II confia cette mission délicate à Jean de Lenoncourt, bailli de
Saint-Mihiel, et, suivant ses instructions, cet habile diplomate
(74) fit valoir différents moyens :
1° Le marquis « a de l'âge, de la prudence et capacité
suffisante (75); il est souverain, peut disposer de luy-mesme
et, se l'attacher, c'est l'empescher de prendre party ailleurs.
La France luy est comme un pays naturel. Issu d'une soeur du roy,
qu'il a tant aymé, chéry et honoré, laquelle Sa Majesté aymoit
aussi unicquement, il désire servir la France par un devoir et
zèle de nature, non par ambition ny espoir de gain. »
2° « Aucuns mal affectionnés, pourront donner avis au roy de
faire la sourde oreille, attendu que la ville de Metz est de
très-grande importance et comme une clef de la France du costé
de l'Allemaigne, qui peust estre éclipsée par succession de
temps, si elle estoit mise ès mains d'un prince de ceste maison
pour estre icelle conjoincte, contiguë et enclavée au duché de
Lorraine. Mais, telles raisons ne sont considérables. Le devoir,
l'honneur, la reconnaissance obligeront le prince à la fidélité.
Du reste, la Guyenne est bien gouvernée de père en fils par les
princes de Béarn. Enfin, si le roi venait à décéder sans
enfants, « il seroit plus raisonnable que ceste ville demeurast
en ceste maison que de tomber ès mains du roy de Navarre ».
Les agents du duc d'Epernon, Saubole et Montcassin, confiants
dans la grande forteresse et assiette de Metz, méprisent
l'autorité du roi et celle du duc de Lorraine (76). Ils
secourent journellement ceux de Jametz et Sedan, donnent asile à
tous les réfugiés huguenots, et il y a grande apparence que Metz
ne dégénère en une Genève.
Ces propositions, rebutées d'abord, revinrent, dix mois ou un an
plus tard, accordées et amplifiées. Mais, quelques mois
auparavant, le président Jeannin avait dit au duc : Les princes
de l'Union veulent vous donner Metz, Toul et Verdun ; à Philippe
II ils promettent Cambray ; en attendant que leur intention
puisse s'accomplir à l'endroit de la dernière place, les trois
premières seront occupées par une garnison lorraine à la solde
de l'Espagne. De La Routte et de Maillane, gouverneurs de Marsal
et de Toul, donnèrent volontiers les mains à ce projet (77) ;
même succès à Verdun : l'évêque Nicolas Boucher chassa la
garnison française qu'il remplaça aussitôt par les compagnies de
Saint-Paul, puis par celles du baron d'Haussonville. Comme à
Toul, un traité en forme détermina le droit et les devoirs de
chacun (78) : « L'évêque, le chapitre, les habitants, sénat et
cité se voyant enveloppés de toute espèce d'affliction et de
troubles lamentables causés par les hérétiques, implorent la
protection du duc de Lorraine ; ils s'engagent à ne pas suivre
le parti contraire, à laisser au prince le gouvernement de la
ville, les clés et la puissance sur les murailles. Le duc
soutiendra à ses frais la garnison nécessaire, toute réserve
faite en faveur des libertés de la ville, des droits de l'Empire
et de la France. »
Aussitôt, Charles III visite lui-même sa nouvelle conquête et,
afin de prévenir toute fausse interprétation de la part du
gouvernement français, il s'empresse d'expliquer sa conduite
(79). - Depuis plus de trois cents ans, les traités et les
concordats, les serments et les redevances des villes occupées
lui imposent tous les devoirs de protecteur. Voyant les
bourgeois gagnés petit à petit par les hérétiques du voisinage,
craignant quelque malheur, à la prière des magistrats, il s'est
acheminé pour fléchir le coeur des mal affectionnés et confirmer
les bons. Les nouveaux traités ne renferment aucune légèreté et
ne contreviennent à aucun droit. Lesdites villes seront toujours
dédiées au service de la France, avec le surplus des moyens de
Son Altesse, qui ne respire que pour le bien, grandeur et
avancement des affaires de notre religion et de la France. »
Mayenne ne fit pas attendre ses lettres d'aveu, et Charles III
put confirmer ses lettres de protection, amplifiant les
privilèges accordés à Toul et à Verdun (80).
Metz, cette grande et puissante cité, manquait toujours à
l'appel, malgré les avances faites aux Treize de ville (81) et
au gouverneur (82). Près de ce dernier, le Lorrain affectait un
royalisme ardent. Quelques marchands de Metz ont été arrêtés à
la suite de Vandy ; Roquelaure et Magny avec des Sedanais. Les
uns seront élargis, car il y a méprise; les autres aussi, malgré
la mauvaise compagnie. - « J'ai mis garnison à Toul non pour le
desservice du roi, au contraire, par devoir comme protecteur,
afin de préserver cette ville du sac qui lui était préparé par
le sieur de Saint-Paul (83). »
Mais Saubole déclarant vouloir vivre et mourir au service du roi
repoussa également les très-grandes offres (84) du Balafré et de
Charles III. Bientôt, des renforts venus d'Allemagne et de
France, lui permirent de réprimer les menées des ligueurs
messins (85), d'augmenter la garnison des petites places sur la
Seille et la Moselle, de commencer la guerre afin de retenir
toutes les forces ducales en Lorraine. Alors, pendant plus d'une
année (86), Français et Lorrains, les deux Sauboles, des Réaux,
Loppes, le colonel Frantz, d'Ancerville (87), d'Esne, de
Maillane, de Tremblecourt, se signalent par mille courses,
pillages, incendies, meurtres et confiscations, par des prises
et reprises de châteaux forts (88).
La lutte la plus sérieuse s'engage autour de Marsal : Fouquet de
La Routte (89), lieutenant de Saubole, s'étant déclaré lorrain,
les Messins l'attaquent, le tuent et reprennent sa place (90).
Peu après (juin 1590), arrivent les Lorrains, le marquis du Pont
et le duc lui-même. Ils nouent des intelligences avec la
garnison et les bourgeois (91), lâchent les écluses de l'étang
de Lindre, s'approchent par les marais, rendus praticables,
incendient le bois préparé pour la saline. Huit canons et
plusieurs couleuvrines ouvrent la brèche ; en sorte que les
tenants, malgré des saillies belles et hardies, désespérés de
secours, sont obligés de rendre Marsal (92). Théodore de
Lenoncourt y entre comme gouverneur, et Arnoult de La Tour de
Fléville comme lieutenant.
De Marsal, les Lorrains s'avancent vers Metz, où ils avaient
aussi des intelligences ; ils occupent quelques places du
voisinage, entr'autres Moulins et Gouin. Mais, loin de
s'obstiner à un siège impossible, ils entrent en pourparlers
avec Saubole (93). Une trêve, commençant le 1er octobre 1590, et
annuellement renouvelée permet au duc de Lorraine de soulager
ses peuples et lui laisse toute liberté d'action en Champagne.
Sur cette dernière entreprise, les archives lorraines et
champenoises (94) renferment des dépêches d'une haute
importance, datées de Nancy ou de Bar, huit, dix et quinze jours
après la mort d'Henri III. Toutes semblent rédigées sur deux
modèles, différents de ton et de manière, selon qu'elles
s'adressent aux habitants des villes fidèles au roi ou dévouées
à la Ligue. Le prince écrit aux ligueurs comme à de vieux amis
« Au corps de la ville et cité de Rheims sur les mutations et
changemens qui peuvent advenir par la mort du roys (95).
« Messieurs, je croy que, depuis les nouvelles de la mort du feu
roy, vous avés peu prévoir les grandes altérations et changemens
qui se dressent au faict de nostre religion, catholique,
apostolique et romaine, s'il n'y est pourveu avec le soing et
vigilance qui est requise en cest affaire, qui est des plus
sérieuses qui se présentera jamais. Nos ennemis communs, à ce
que j'entends, s'efforcent d'usurper la domination de cest Estat,
chose qui ne se peult faire sans la totalle ruyne de nostredicte
religion. je vous prie, de vostre part, continuer en la mesme
ferveur et dévotion dont aviés, avec beaucoup de louange, donné
preuve à toute la chrestienté, et n'admettre les héréticques ny
leurs fauteurs et adhérans dedans vostre ville,- qui mérite d'estre
conservée, pour l'importance d'icelle, plus que nulle autre de
France. Quant à moy, me resouvenant de l'obligation que je dois
à l'honneur et service de Dieu, à ma propre conscience et
réputation et au bien universel de la couronne de France, je me
suis résolu jà de longtemps et encore rescentement, depuis le
décès du roy, d'embrasser à bon escient la deffense et
conservation de ceste cause, ainsy que je l'ay jà faict entendre
par ung gentilhomme exprès à ceux du conseil de Paris et à
Monsieur du Maine. Je vous en ay bien voulu advertir par cestes,
et, par mesme moien, vous asseurer que mon fils, le marquis du
Pont, montera à cheval avec bonnes trouppes de gens, le XXe de
ce mois, pour y exposer non-seulement les moiens de mon Estat,
mais aussy sa propre personne et sa vie. Je vous invite,
Messieurs, à rendre tesmoignage à ung chacun de vostre ferveur
et constance au faict de nostre religion, qui a tousjours esté
recongneue grande et singulière en vous, et je vous promect que
je vous assisteray de tous les pouvoirs et moiens que Dieu m'a
donné en ce monde, et que je ne vous abandonneray aulcunement,
mais joindray ma fortune avec la vostre, pour estre une commune
cause, tendante à mesme fin de la conservation de l'honneur de
Dieu et de son Eglise et du bien général de la France, et de
laquelle mienne volonté je vous rendray telle preuve que les
effectz manifesteront à ung chacun la sincérité de mon courage
et affection en vostre endroict, et de tous les autres bons
catholiques du royaume. En cest vérité je prieray Dieu, ctc.
« De Nancy, le xj aoust 1589. »
« Aux habitans et gens du conseil de la ville de Chaumont (96).
« Messieurs, je ne saurois assez estimer la constante et bonne
affection que j'ay toujours rencontré en vous au sougténement de
nostre religion catholique, apostolique et romaine. Vous en avez
de tout temps rendu fidel tesmoignage, et singulièrement en ces
derniers troubles, dont en est revenu beaucoup de contentement
aux gens de bien, et à vous de la gloire et honneur qui durera
en vostre postérité. Maintenant, j'entends qu'il a pleu a Dieu
d'appeler le roy à luy, ce qui pourra apporter quelque mutation,
pour les prétentions qu'aucuns ennemis publics de nostre
religion diront avoir à la couronne. C'est une chose à quoy
toute la France doit bien prendre garde, et surtout éviter
qu'ils ne tombent soubs telle domination, parce que, sans aulcun
doubte, ilz n'en pourroient recevoir enfin qu'une totale
subvertion de l'Eglise de Dieu à quoy tous princes chrestiens,
principalement ceux qui sont voysins, alliés et confédérés à
cest Estat, ont un notable intérest. Et, pour ceste occasion, je
me suis proposé d'exposer tout ce de moyens que Dieu m'a donné
pour soulager et assister la cause des catholiques unis. De quoy
je vous ay bien voulu advertir et, par mesme moyen, vous prier
de demeurer fermes en la saincte résolution qu'avez pris de
vivre et mourir vrais serviteurs de Dieu et de son Eglise, sans
admettre ni favoriser les hérétiques, leurs fauteurs ou adhérens.
Et je vous assure que je ne vous abandonneray, cas advenant que
on voulust vous molester, mais vous assisteray et joindray ma
fortune avec la vostre pour repousser les injures et voies
d'hostilité que pourroient, à l'advenir, intenter contre vous
nos ennemis communs si tant est que la nécessité le veuille. Je
crois que vous serez suivis de la pluspart des villes de ce
royaume, qui, je m'asseure, estimeront à toutes choses et
accidens de ce monde le seul but de leur salut consister au
sougtènement de la gloire et honneur de Dieu. Pour mon regard,
j'ay résoult d'envoyer, dedans six jours, mon fils, le marquis
du Pont, pour, avec le plus de force qu'il pourra recouvrer,
aller secourir la ville de Paris et assister Monsieur de Mayenne
de sa vie et de ses moyens. De Nancy, le 10e aoust 1589. Vostre
bien bon amy CHARLES. »
Aux royalistes, le duc se donne comme un ami du roi :
« Au sieur de la Vielzville sur la mort du roy de France, en le
priant de joindre sa fortune avec les princes de l'Union (97).
« Monsieur de la Viéville, il y a quelque temps que j'ai esté
adverty des levées que vous faisiés pour le service du roy,
chose qui estoit digne de la fidélité que luy debviés maintenant
qu'il a pleu à Dieu l'appeler, et que je suis adverty que les
ennemis de nostre religion taschent d'usurper cest Estat, au
grand deshonneur, blasme et ruyne de tous les catholicques de la
France, j'ay estimé estre de mon debvoir et de la grande
obligation que j'ay au service de Dieu et son Eglise et au bien
de la couronne de France, d'y mectre la main à bon escient et
m'opposer de mes moiens à des desseings de sy pernitieuse et
misérable conséquence. A cest effet, j'espère, dedans le XXe de
ce mois, m'acheminer à Bar et mectre entre les mains de mon fils
tout ce de forces que promptement je pourray recouvrer, pour
assister les princes catholiques qui ont pris en main la
deffense de nostre cause. Je vous ay tousjours estimé, non
seulement pour la valleur et vertu qui est en vous, mais aussi
pour la dévotion et grande piété qu'avés tousjours apporté au
faict de nostre religion qui m'occasionne de vous prier par
cestes de vouloir joindre vostre fortune avec la mienne, du bien
de laquelle vous serez tousjours participant, et vous chériray
avec tout l'honneur qui est deu à ung gentilhomme de vostre
qualité et mérite vous priant croire que ceste mienne
délibération n'est accompagnée d'aucun dessein ny ambition
particulière, mais seullement, ce dont je prend Dieu en tesmoing,
sur la seulle considération de la conservation de nostre
religion et le bien universel du dict royaulme, sy beau et si
florissant que je ne sçaurois qu'avec ung incroyable regret
veoir tumbcr en une lamentable désolation ce qui adviendroit,
sans doubte, s'il estoit possédé et commandé par les héréticques.
Sur quoy attendant vostre responce, je ne vous feray cestes plus
longue, mais prieray Dieu, etc.
« De Nancy, le xj aoust 1589. »
« Aux habitans et gens du conseil de la ville de Chalons (98)
« Messieurs, je ne sçaurois représenter le deuil que j'ai receu
de voir la France tellement troublée et esmeue par ceste
dernière prise d'armes, qu'il semble que toutes choses se soient
disposées à sa ruyne. Touttesfois, en ceste fascherie, je me
consolois de la certitude que j'avois de la piété, de la ferveur
et dévotion du roy envers nostre religion catholique,
apostolique et romaine, au moyen de quoy j'espérois qu'enfin,
après tant de misères les choses pourroient se réunir et
comporter à la gloire et honneur de Dieu et à la conservation de
l'autorité de Sa Majesté. Maintenant qu'il a plu à Dieu
l'appeler, je me retrouve grandement perplex, pour la crainte
que j'ay qu'il ne doive advenir quelque notable et misérable
changement en nostre religion, et, par conséquent, une ruyne en
cest Estat. Et parce que les anciennes confédération alliance et
bienveillance que mes prédécesseurs et moy avons eu cest honneur
de recevoir de la couronne de France, ont engendré en moy tant
d'obligation et de bonne volonté de la servir et assister de mes
moyens, j'ay estimé estre de mon devoir de m'employer en ceste
affaire pour l'honneur et service de Dieu et le bien de cest
Estat à l'effect de quoy, je me suis résoult d'envoyer mon fils
le marquis du Pont, dedans cinq ou six jours, avec toutes les
forces qu'il pourra recouvrer, pour assister les catholiques en
une affaire sy urgente et ne suis poulsé de le faire d'autre
zèle que du service et honneur de Dieu, comme les effects le
feront paroistre à ung chacun.
« Je sçay que, de vostre part, vous avez toujours eu en
singulière et particulière recommandation le service du roy
deffunct, en quoy vous estes dignes de louange; mais aussy je
sçay que vous avez eu cest heur, de tous temps, d'estre
rocongneuz très-amateurs de la religion catholique, apostolique
et romaine, et que me respirez rien moins que la domination de
ceux qui se sont déclarez appertement ses ennemys publics.
« Ce de quoy je vous veulx prier présentement est que vous
continuiez en ceste saincte affection, et que vous ne receviez
en vostre ville aulcuns faulteurs ou adhérens des hérétiques ce
que faisant, vous ferez un service digne de vous, non seulement
à toute la France, mais à la chrestienté. Je vous en prie bien
fort, comme vostre bon voisin et bienveillant, vous priant
croire que je vous assisteray en ceste bonne résolution et de
mes moyens et de ma personne, que je n'épargneray pour vous
conserver contre ceux qui vouldroient attenter quelque chose
contre vostre repos et liberté En ceste vérité je prie Dieu...
« De Nancy, le 10e aoust 1589. »
Les royalistes ne répondant point à ces avances (99), le duc de
Lorraine cherche à fortifier ses raisons épistolaires par une
démonstration armée avec une partie de ses troupes, il vient
s'établir à Bar, et c'est de là qu'il fait la recharge suivante
aux habitants de Chàlons (100) :
« Messieurs,
« Depuis les nouvelles que j'ay eu du décès du feu roy, que Dieu
pardoint, je vous ay escript ce que j'ay pensé estre du bien
public et de la chrestienté, nommément ès quartiers de par-deçà
et province de Champaigne, et aussy ce qui estoit de vostre
particulier intérest et réputation. Et par cc que je congnois de
quelle grande importance est à toutte la France et pays
circonvoisins et aux catholiqucs la mutation des affaires
présentes je les ay embrassé par la seule considération du
service que je doibs à nostrc religion catholique, apostolique
et romaine et repos du royaume, et non pour aucun dessein
particulier. Et, à ceste fin, je mc suis achemyné en ce lieu,
avec partie de mes forces, en intention de secourir les vrays et
bons catholiques et de mes moyens et de ma personne où estant,
le me suis advisé de vous faire ceste recharge, pour vous prier
bien affectueusement, et en l'honneur de Dieu, d'avoir toutte
bonne correspondance pour le bien public de nostre religion avec
les villes de Troyes et Rheims et noblesse du pays, afin que,
par ce moyen, l'estat et repos de vostre ville et des provinces
de par-deçà demeurent en son entier en l'exercice et observation
de nostre vraye et ancienne foy. Que, sy vous avez affaire de
mon assistance et ayez quelque volonté d'entendre plus
particulièrement sur ce la sincérité de mon affection envers
vous, si le trouvez bon, je vous enverray un de mes serviteurs,
en lui donnant asseurance, pour plus amplement en conférer avec
vous. Sur quoy, en attendant vostre response.
« De Bar-le-Duc, ce XXle aoust 1589. »
Pour toute réponse, les royalistes continuent à multiplier leurs
actes d'hostilité. Un libraire de Ligny expose en vente des
libelles contre le duc de Lorraine (101) ; Saubole prend les
châteaux de la Seille ; le sieur de Vaubecourt, un lorrain,
passé à l'ennemi, occupe l'abbaye de Beaulieu ; Yvernaulmont et
Vandy attaquent la ville de Bar (102). Ces derniers, ayant pris
quelques Lorrains a leur service (103), entrent en intelligences
avec deux bourgeois, Nicolas Leschicault, orfèvre, et Jacques
Mauservé, avocat ; ils envoient à la file des fantassins dans
les villages voisins, puis font avancer 200 cuirassiers et
tentent l'escalade (6 septembre). Maitres de la ville haute, ils
s'établissent dans la maison du procureur général Bouvet et
attaquent une des portes menant au château. Mais bientôt, pris
entre le feu de la garnison, commandée par René de Florainville,
et celui des lansquenetz du capitaine Montsaugeon, arrivés la
veille dans la ville basse, les assaillants sont obligés de
fuir, laissant dix-huit morts, quelques prisonniers et bon
nombre de chevaux. Charles III s'empressa d'accourir pour
récompenser les braves et châtier les traitres. Nicolas Remy et
Cuny Boucher arrêtèrent plusieurs personnes. Leschicault et
Mauservé furent condamnés à la prison et à de grosses amendes
(104); on pendit un espion, Jean Merle; on écartela un soldat
prisonnier, le lorrain Jean Castel (105). D'un autre côté, le
duc se montra gracieux et libéral envers Hanus Langlebert,
gentilhomme du marquis de Bade et Henri Leclerc (106),
lieutenant du capitaine Mausaugeon, qui produisirent vertu et
bonzs effets, au péril de leur vie.
La surprise de Bar, « ceste touche qui ne fit pas de plaie »,
irrita le Lorrain, qui n'hésita plus à faire une guerre ouverte
en Champagne. Depuis longtemps, les ligueurs l'y appelaient de
tous côtés, à la moindre occasion, coup sur coup. Le roi de
Navarre ou ses lieutenants, d'Aumont, Luxembourg, Nevers, d'Inteville,
Turenne nous menacent, nous attaquent (107) ; nous n'avons ni
sel, ni poudre, ni boulets, ni soldats ; venez nous « rédimer de
la tyrannie de l'ennemi qui court jusqu'à nos portes (108) ;
venez repurger ceste pauvre France tant affligée (109) » Tels
étaient, en substance, les messages des Champenois,
particulièrement des habitants de Chaumont, de Troyes, de Reims
et de Mézières.
Au sud de la Marne, l'intervention ducale commence en octobre
1589. Le sieur de Mélay (110), gouverneur de La Mothe, assisté
de La Barquerie et de Piépappe, vient aider les habitants de
Chaumont (111) à faire leurs vendanges. Hautefort, Guyonnelle,
de la Rochette, Belleguise lui prêtent main forte. On commence
le siège de Château-Villain, mais sans succès. L'arrivée des
Barons et du régiment de Couban forcent les ligueurs à la
retraite, avec une perte de 200 hommes. Le marquis de Reynel
complète cet échec en occupant La Fauche et Montéclair, d'où,
d'accord avec Vassy, il harcelle fort la frontière de Lorraine.
Chaumont riposte par des courses vers Langres et le siège de
Monsaugeon, puis, sentant son impuissance, traite avec les
ennemis des vendanges et du labour, et sans cesse fait appel aux
Lorrains. Le duc parait au commencement du mois de novembre
1590. Il prend d'abord Vassy, villette sans murailles, qu'il
traite rigoureusement, pour l'avoir forcé à employer le canon.
Il envoie un instant son armée vers Bar-sur-Aube mais les
attaques des Messins, les funérailles de sa mère, l'injure du
temps et les froidures de l'hiver le rappellent et le retiennent
à Nancy (112).
L'année suivante, après l'occupation de Reynel ou de La Vefve
(113), le seul fait d'armes un peu notable, c'est une entreprise
sur Langres (114). Brichanteau-Roussin, pétardier français,
devenu ligueur, se charge de l'affaire : dans la nuit du 29
août, on s'approche sans bruit on distribue aux soldats deux
pièces(115) de vin achetées à Chaumont ; Roussin fait jouer ses
pétards à la porte du marché. Il échoue. Accusé de trahison, il
retourne aux Français, puis, fait prisonnier deux ans plus tard,
il est pendu par les ligueurs.
Mais, en 1592, Langres eut la corde au cou et fut dans un piteux
état; les partisans du gouverneur et du maire excitaient des
riottes. Henri et François de Lorraine, aidés par Thomassin de
Châlons, domestique du feu duc de Guise, occupèrent les châteaux
de Blaise, Orges et Cirey; les places de Montéclair, La Fauche,
Montigny-le-Roi et Coiffy (116). D'Amblize marcha au secours
d'Autun avec quelques compagnies de cavalerie.
Le comte de Vaudémont, resté général en chef, concentra ses
forces à Andelot, puis tenta de nouveau le siège de
Château-Villain (117) (12 juin). Il fit prisonnier le capitaine
Gascon mais, le manque de munitions et l'arrivée du duc de
Nevers (118) à Mussy-l'Evêque, déterminèrent la retraite des
Lorrains (30 juin).
Le prince, qui avait d'abord rudoyé les Chaumontois en leur
réclamant des armes et des munitions (119), fit encore retomber
sur eux la cause de son échec, en disant : « Il n'y a rien de ma
faulte; elle vient d'ailleurs, comme au besoin je feray
paroistre; du reste, cest événement n'est premier parmi ceux de
ceste profession. » Les Lorrains promettent de se revancher et
se contentent d'envoyer quelques munitions à Troyes (120).
Les habitants de Chaumont, qui avaient porté presque tout le
poids des luttes précédentes, supportèrent seuls les
représailles des ennemis. « Lès deux principaux éléments leur
manquent, écrivait Roussat, la terre et l'eau. Ils ne se peuvent
retrancher ; le seul bruit du canon fera crever leurs citernes.
», Dans leur frayeur, ils s'estimèrent heureux de pouvoir
renouveler la trève du labour avec Langres et Château-Villain.
Mais les garnisons lorraines du voisinage restèrent encore
longtemps à leur charge. Charles III eut beau menacer, châtier
les coureurs et picoreurs, il fallut souvent se contenter de ses
promesses, de ses paroles de compassion pour la misère du pauvre
peuple, et d'indignation contre l'insolence des soldats, chose
familière et pour ce jourd'huy presque générale (121).
Dans la Champagne méridionale, les Lorrains combattirent presque
toujours seuls au nord, ils eurent très souvent Saint-Paul pour
auxiliaire. Dès sa première campagne, du vivant même d'Henri
III, Saint-Paul avait déjà plusieurs fois menacé Châlons et
Sainte-Menehould. Ainsi en mars 1589 après avoir inutilement
sommé la première de ces villes, il tourna subitement tête à la
seconde (122), qu'il invita à tenir pour les princes, «
dénonçant, dans le cas contraire, la guerre à feu et à sang ».
Jacques Bourcavanes remit une sommation analogue de la part des
habitants de Reims. Mondreville, retiré dans son château de Han,
ajoutait ses prières aux instances de ses alliés et faisait agir
les amis qu'il avait conservés dans la place (123).
Le sieur de Renneville convoque aussitôt ses concitoyens qui,
malgré la faiblesse de la ville et son peu de garnison, le
nombre des réfugiés et la disette, prennent de nouveau la
résolution « de rester bons Français, de vivre et mourir
serviteurs du roi ». Ils gardent comme otage le messager de
Reims et renvoient le trompette avec cette fière réponse « Si
Saint-Paul se présente, il trouvera son tombeau, et ses gens
leur cimetière dans le fossé. » l'arrivée inattendue de
Tourteron et de Landres, avec 60 cavaliers (124), releva encore
le courage des royalistes et « frustra l'ennemi de son espérance
». Par une grande virevolte, Saint-Paul reparut six semaines
plus tard (fin avril), sur les instances des Rémois et de
Mondreville (125). Près de Maffrecourt (1er mai), il surprit
Loppe, Lieudieu et Thomassin, leur donna la camisade et l'alarme
si chaude, qu'ils se mirent en fuite vers la ville; mais la
garnison (126) et les habitants « repoussèrent les ligueurs,
après un combat de deux heures proche la barrière, les portes
ouvertes. » D'Inteville et l'ingénieur Erard, déjà célèbre par
les fortifications de Jametz vinrent encore conforter ces braves
gens (127).
Saint-Paul n'abandonne point la partie : à la fin d'octobre, il
renouvelle ses attaques, d'accord avec les Lorrains. Ceux-ci,
conduits par Haussonville et Montreuil (128), prennent en
passant quelques châteaux de l'Argonne : Triaucourt, Soisy,
Beaulieu. Réunis à Saint-Paul, ils font mine d'assiéger
Sainte-Menehould et escarmouchent pendant trois semaines ; mais,
c'est à Châlons qu'ils en veulent ; ils se mettent en rapport
avec les catholiques malcontents. Georges et Jacques (129) de
Berlize deviennent les chefs d'une conspiration qui compte de
nombreux adhérents (130) ils promettent de donner entrée dans la
ville par les grilles et avenues.
Mais d'Inteville était sur ses gardes. Des mesures énergiques un
nouveau serment exigé de tous, de nouveaux soldats logés chez
les habitants un impôt extraordinaire sur le clergé (131),
l'emprisonnement et l'expulsion des suspects, l'exécution des
coupables, notamment de Jacques de Berlize, wuidèrent la ville
de l'humeur qui y pouvoit apporter altération, tandis que les
coureurs châlonnais s'avançaient jusqu'à Reims.
Cependant, le danger n'était pas encore entièrement conjuré ;
les Rémois éclataient en menaces : « Nous avons appris,
écrivaient-ils, que vous avez mis prisonniers plusieurs des
vôtres à raison de ce qu'ils tiennent la religion catholique,
qui est du tout contraire à votre déclaration d'être de ladite
religion. Nous vous prions qu'il vous plaise ne les traiter
rigoureusement, sous quelque prétexte que ce soit, autrement
ferons de même de ceux que nous tenons prisonniers comme
suspects. » En même temps, le geôlier de Bonne-Semaine reçoit
l'ordre de signifier à six prisonniers (132) châlonnais que, si
on fait quelque tort aux catholiques de Châlons, on leur fera de
même (133).
Les alliés, voyant la mesche esventée, se hâtaient néanmoins
d'intervenir tandis que Haussonville restait devant
Sainte-Menehould, Saint-Paul et Montreuil marchaient sur Châlons,
et, le 19 novembre, en plein midi, attaquaient le faubourg de la
maison des prés ; trois semaines d'assauts, de sorties et
d'escarmouches épuisent les assiégeants ; des pluies
continuelles, une invasion des reitres en Alsace les forcent à
opérer leur retraite, laissant des soldats et des canons dans
les châteaux d'Espance, de Cernay et de Han (134).
Les Lorrains ne reparurent plus devant Châlons, mais, trois fois
encore, ils essayèrent d'entrer dans Sainte-Menehould. En 1590
(135), cinq prisonniers de Verdun s'étant échappés à l'aide
d'une barque par les grilles du moulin, Haussonville acheta un
batelier et un sergent nommé La Charbonnière, qui promirent de
faire entrer des soldats déguisés. En 1592, le sieur de
Haraucourt, gouverneur et bailli de Clermont, profita d'une nuit
très-noire pour tenter une escalade mais les traitres furent
découverts et pendus ; les ennemis repoussés abandonnèrent leurs
échelles.
Le duc de Lorraine, en personne, ne put réussir (136) ;
cependant, il semblait avoir les meilleures chances. Son armée,
forte de sept mille hommes de pied et de douze cents chevaux,
venait d'emporter Marsal et Villefranche. Saint-Paul, avec ses
vieilles bandes, allait lui donner la main; en attendant, les
troupes ducales, commençant le siège, occupèrent Bras,
Verrières, la Neufville-au-Pont, Braux, Cernay, Han, tous les
villages environnants (137). Mais, les assiégeants commandés par
d'Inteville et Vandy, étaient gens de main et d'expérience : ils
repoussèrent toutes les attaques de l'ennemi et firent plusieurs
prisonniers (138). Découragé par ces échecs, apprenant que
Saint-Paul (139) venait d'être battu à Poix, et que Nevers
s'avançait vers Sainte-Menehould, Charles III jugea prudent
d'opérer sa retraite (140).
II fut plus heureux contre Villefranche, qu'il prit du premier
coup. Cette petite place avait pour gouverneur le sieur de
Flamanville, qui venait de supplanter Tremelet, son capitaine.
Menacé, en octobre 1589, par les armées alliées, il s'était
arrangé avec les Lorrains, qui payaient sa neutralité en
fournissant la solde de la garnison. D'Inteville sanctionna cet
étrange traité pour ne pas empirer la situation ; mais on disait
partout que Flamanville ne tarderait pas et faire le saut.
L'arrivée du duc de Lorraine précipita la crise (141). Après une
sommation sans effet, on dressa les batteries, on creusa des
tranchées qui tarirent quelques puits. Aussitôt, les soldats et
les habitants intimidés parlèrent de capitulation. Flamanville
et son lieutenant, Andevanne, étaient dans les mêmes
dispositions et firent savoir au duc de Nevers que, faute d'être
secourus dans trois jours, ils se rendraient forcément.
Nevers se hâte de rassurer le gouverneur et ses compagnons, leur
promettant une assistance suffisante et immédiate, stimulant
leur patriotisme et leur courage. « Villefranche, leur écrit-il,
fortifié contre Charles-Quint, peut bien résister au duc de
Lorraine. Tremelet et ceux qui la connaissent la jugent capable
de tenir trois semaines ou un mois. Si vos puits sont taris,
vous avez votre vin et l'eau de vos fossés, qui est toute de
fontaine : vous pouvez sacrifier partie de votre bétail plutôt
que partie de votre honneur. » En même temps, le gouverneur
général presse les secours des Sedanais et de tous les royaux du
voisinage lui-même, avec toutes les troupes qu'il peut réunir,
se transporte à Sainte-Menehould. Là, on ne jugea pas prudent
d'aller donner tête baissée contre les Lorrains. « Si
Flamanville est un traitre, disait-on, il fermera les portes au
nez du secours; s'il manque seulement de courage, quelques gens
de coeur l'empêcheront de commettre une lâcheté». D'Inteville
sollicita le commandement de ce poste d'honneur. Il partit le
dimanche, 7 octobre, dans la nuit mais, le lundi matin, à
Cernay, à trois lieues de Villefranche, apprenant que la place
parlementait et que d'Andevanne était déjà livré comme otage, il
s'empressa de revenir sur ses pas.
Charles III occupa sa conquête le mardi 9 octobre (142). D'Andevanne
se retira vers Sainte-Menehould, Flamanville à Sedan; c'est de
là qu'il écrivit la lettre suivante à son ancien lieutenant
« Monsieur, je suis party de Villefranche avec un extrême
regret, tant pour la perte de la ville que pour ne vous avoir
dit adieu. Vous sçavez comme tout s'est passé et qu'il n'y a
nullement de ma faute. Néanmoins, ceux qui ont haine contre moy
m'ont faict arrester prisonnier et sont allés voir M. de Nevers
pour me nuire en tout ce qu'ils pourront. Vous estes gentilhomme
d'honneur qui pouvez luy remonstrer le deffault qui estoit en la
place le peu de résistance qu'il y avoit aux habitants, je dis à
la pluspart, mesme à la plus grande partie des soldats comme l'ennemy
estoit préparé et logé, et les forces qu'il avoit. Je vous
supplie, à l'honneur de Dieu et du service que je vous ay voué
de ne rien oublier de ce que vous avez connu. Je m'asseure que,
le tout bien entendu, ceux qui m'en veulent seront marris.
Cependant, bon droict a bon besoing d'aide bien souvent.
Monsieur vostre fils sçait comme vous qu'il ne m'a jamais manqué
de résolution et que je ne redoutois le hasard de perdre la vie
pour la défense de la ville, comme vous. Mais je ne pouvois,
sans forces, armes et munitions faire seul, avec vous et ceux
que vous sçavez qui estoient résolus, ce qu'un nombre suffisant
eût peu faire. Vous sçavez combien de fois nous avons envoyé
sans avoir nouvelle de tout l'estat de la place. Je me reposeray
à vostre prudhomie, amityé et fidélité accoustumée et en la
créance que j'ay que vous vous employerez pour mon innocence et
eslargissement.
« NICOLAS BASAN FLAMANVILLE.
« De Sedan, ce 12me octobre 1590.
« A M. d'Andevanne là part où il sera (143) ».
Nous ne savons si d'Andevanne intervint en faveur de son ami
mais il est certain que Nevers donna raison aux ennemis du
prisonnier. Le Parlement de Chalons instruisit l'affaire et fit
pendre l'accusé. Cependant, il y a dans ce procès des faits qui
restent inexplicables et à la décharge du condamné. Si sa
capitulation fut une lâcheté et une poltronnerie (144), comment
appeler sa résistance, avec deux cents hommes, tant soldats que
bourgeois, et quatre pièces de canon, contre toute une armée et
une grosse artillerie tirée de Verdun et de Damvillers ? S'il a
consommé une trahison bien calculée et commencée dix-huit mois
auparavant, comment expliquer sa retraite volontaire à Sedan
Pourquoi ne le voyons-nous pas plutôt dans l'état-major du duc
de Lorraine ? Sans doute en l'absence des pièces du procès, il
est difficile d'établir la vérité, mais il ne parait pas
téméraire de conclure que cet acte de justice n'a été qu'un acte
de passion, pour servir d'exemple, selon l'expression d'un
mémoire royaliste.
Maitres de Villefranche, les Lorrains espéraient étendre leur
domination sur la Meuse. En 1591 pendant l'hiver, le comte de
Chaligny et le Voué de Condé (145) occupèrent quelques châteaux,
brûlèrent plusieurs villages (146), battirent les troupes
commandées par le baron d'Aix et le marquis de Mirebeaux (147).
Pendant l'été Charles III et le marquis du Pont, assistés du
prince d'Ascoli, de Saint-Paul de Mayenne et de Montemartiano,
essayèrent de tirer avantage de ces petits succès et de
s'opposer au passage des Allemands (148). En 1592, le maréchal
d'Amblize poursuivit l'élite des garnisons sedanaises et les
battit complètement dans la plaine d'Aoust (17 mai) (149). Les
royaux (150) prirent leur revanche sur Clermont et les places
voisines. Le vicomte de Turenne, après avoir bravé les Lorrains
en traversant leur pays, les brava encore devant Villefranche et
devant Verdun, leur enleva Beaulieu, Han, Courtault, Cernay,
Senuc, enfin Stenay.
Stenay, défendu par le sieur de Boulain (151), avait déjà
résisté à deux attaques sérieuses (152). Comptant trop sur ses
succès antérieurs et sur de nouvelles fortifications le
gouverneur se laissa surprendre. Tandis qu'on croyait Turenne
occupé à s'esjouir, le soir même de ses espousailles avec la
duchesse de Bouillon (15 octobre 1591) ses troupes firent jouer
les pétards et donnèrent l'escalade. Ils prirent la place malgré
la merveilleuse défense des Lorrains (153), et la gardèrent,
malgré leur merveilleuse attaque dans un siège de six semaines,
dirigé par le duc (154) en personne. Dès ce moment, les
garnisons sedanaises de la Meuse et les garnisons royales de
Thiérache (155) ne cessèrent, jusqu'à la paix, de faire une
guerre impitoyable marquée par de constants ravages, par la mort
de d'Amblize à Beaumont (156), par la prise de Dun et de presque
tous les châteaux ligueurs de l'Argonne (157).
Les Lorrains n'avaient pas été plus heureux dans le pays rémois.
Leur armée, si souvent annoncée, si impatiemment attendue arriva
sans être commandée par Charles Ill, et trop tard pour sauver
Epernay (158).Tous ces mécomptes et tous ces échecs, la misère
affreuse des paysans et des marchands déterminèrent les
Champenois et les Lorrains à négocier une trêve de commerce et
labour, longuement discutée aux conférences de Sainte-Menehould
(159), reprise et conclue à celles d'Avenay, confirmée par la
trêve générale du mois d'août 1593. Avant ces trêves et tandis
que le duc de Lorraine guerroyait en Champagne, aucuns
bienveillants le priaient de pénétrer plus loin dans les terres
de France. M. du Pelouz l'appelait en Dauphiné la comtesse de
Saulx en Provence, les Sorbonnistes à Paris; mais le duc n'osait
quitter ses Etats, et ne pouvait non plus multiplier ses forces
pourtant, il ne se ménagea point. S'il se laissa devancer sur le
Rhône par les Savoyards il envoya devant Arques, Paris et Rouen,
trois corps d'élite commandés par trois princes de sa famille
(160), et lui-même repoussa au- delà du Rhin une invasion
allemande.
Charles III quitta Nancy (161) le 29 novembre 1589, ayant sous
ses ordres Saint-Paul et quelques compagnies champenoises, le
comte de Vaudémont, le marquis d'Haurech, le marquis de Bade
(162) et cinq ou six mille hommes. Le 6 décembre, son armée,
avec l'assistance de l'évêque de Strasbourg (4) et du cardinal
d'Autriche gouverneur de l'Alsace, franchit l'Ill et pénétra
dans la plaine d'Aussay. Les compagnies ennemies des colonels
Frantz, Dommartin Wambach et Lanty y étaient en nombre égal mais
n'avaient pas encore opéré leur réunion. La lutte ne fut pas
sérieuse. Deux mille cinq cents Allemands se rendirent sans
combattre et passèrent au service du prince lorrain ; d'autres
se dispersèrent dans les bois laissant leurs armes et chariots
par les chemins; quelques milliers seulement résistèrent et
furent mis en déroute ; trois cents se noyèrent dans l'Ill,
gonflée par une fonte subite de neige. La masse des fuyards se
dirigea vers la Suisse. Les Lorrains les poursuivirent jusqu'au
territoire de Bâle, mais là ils s'arrêtèrent « dans la crainte
de s'attirer l'inimitié des cantons (163) ».
En résumé tous ces faits d'armes n'avaient pas une grande portée
et n'aboutirent qu'à de petits résultats. Cependant selon
l'habitude du temps et de tous les temps, on les transforma en
grandes victoires : on fit tracer et graver les plans des sièges
et des villes prises (164); on rédigea et imprima (165) des
discours véritables, c'est-à-dire des bulletins peu véridiques :
les huguenots ont été défaits, leurs pertes énormes, celles des
Lorrains insignifiantes. Contre les premiers, les fleuves se
gonflent soudainement et miraculeusement. Pour les seconds, les
obstacles s'aplanissent : voilà l'oeuvre de Dieu, qui a choisi
pour les instruments de sa vengeance le pieux duc de Lorraine,
Africain d'Amblize, troisième Africain ! voilà l'oeuvre de
quelques divins intercesseurs ! La bataille d'Aoust a été gagnée
le jour de la Pentecôte, grâce au Saint-Esprit. Saint Nicolas,
patron de la Lorraine saint Ambroise, un des piliers de la foi,
Notre-Dame, mère universelle de l'Eglise, ont combattu en Aussay
pendant qu'on célébrait leurs fêtes solennelles les 6, 7 et 8
décembre (166).
Ces bulletins n'ont pas seulement pour but de rassurer, éblouir,
enthousiasmer les amis mais d'inquiéter, ébranler, convertir
ceux qui tiennent le party contre l'unyon sainte. A l'adresse
particulière de ces derniers, on accompagnait souvent la prose
de ces manifestes historiques par quelques sonnets poétiques
dans le goût du temps :
Faut-il fouler aux pieds de Dieu l'honneur ?
Pour se donner à un si mauvais homme,
Qui ne sçauroit vous préserver en somme,
Que ne tombiez en triste déshonneur.
Vous délaissez le zèle et la grandeur
De vos aieulx, pour un morceau de pomme.
Venez à nous, et ne mourrez pas comme
Chiens enragés : délaissez ce mocqueur.
Vos bons amis, vos femmes, vos enfants,
Crient après vous : les heureux triomphants
Pleurent de deuil, des peines si cruelles
Qu'endurez cy pour un homme mortel
Et détruisant l'honneur de l'éternel
Dont encourez les peines éternelles.
La diplomatie (167) lorraine s'évertue aussi sur différents
théâtres. Le secrétaire Louis Henry, par l'intermédiaire du duc
de Bavière et sous bonne hypothèque (168) négocie un emprunt de
200,000 florins près des Fugger, banquiers allemands.
Le sieur de Romain va conférer avec le duc de Savoie. Lenoncourt,
bailli de Saint-Mihiel, visite les princes du nord de l'Italie
en conduisant la princesse Christine à son mari le grand duc de
Toscane. Ce grand duc au lieu de recevoir toute la dot convenue,
devient le créancier de son beau-père. La nouvelle grande
duchesse reçoit la mission diplomatique de gagner à l'Union le
colonel Alphonse Corse (169), le maréchal de Montmorency et
d'agir près de la cour romaine (170). L'évêque de Metz,
troisième cardinal de Lorraine, se rend lui-même à Rome afin de
remercier le Saint-Père et d'exploiter sa bienveillance. Antoine
Fournier, primicier de Metz, va à Paris complimenter le légat
Gaëtan. Charles III comble d'honneurs et de présents le même
légat, retournant à Rome, le nonce Landriano se rendant à Reims,
et le comte Hercule de Montemartiano, neveu du pape envoyé au
secours des catholiques.
C'est surtout au roi d'Espagne, à. sa grande autorité, à sa
bénigne et favorable inclination que s'adresse le duc de
Lorraine.
En janvier 1589, il demande indirectement la toison d'or et la
compagnie naguère offerte par Moréo (171). A la date du 11 août
1589, il écrit la lettre suivante :
« Monseigneur, je ne fais doubte que Vostre Majesté ne soit
maintenant assez advertie du décès du feu roy très-chrestien,
que Dieu pardoint, et de l'estat auquel se retrouvent
présentement les affaires de France, qui semblent estre fort
disposées à une mutation et changement de religion sy, avec bons
moyens et la diligence requise, il n'y est pourveu promptement.
Le prince de Béarn se veut, à ce que j'entends, attribuer la
couronne et domination de cest Estat et, par la voye de la force
et des armes qu'il a entre les mains, tascher de se faire
recongnoistre pour roy ; auquel cas il est aysé à présumer qu'il
n'en peul t revenir que lamentable affliction à la chrestienté
par la perte, ruyne et dissipation de nostre religion catholique
et du royaume.
« J'ay pensé Monseigneur, que, pour l'obligation que j'ay au
service de Dieu et à ma propre conscience, je debvois me mouvoir
à ung si grand et sérieux affaire et, pour cest occasion, j'ay
faict avancer mon fils avec quelques forces dedans la France, du
costé de la Champagne, pour tascher, si possible est, d'empescher
les pernitieux desseings des héréticques et secourir les princes
de l'Union, avec lesquels, pour plusieurs bons respects, mais
principalement pour la considération du service de Dieu et de
son Eglise, je me suis, de long temps, résould de joindre ma
fortune, comme de ce j'en ay par cy-devant donné advis à Vostre
Majesté.
« En la nécessité de ces affaires si importans, Vostre Majesté
peult considérer combien est requise son autorité, son
assistance et moiens, à quoy je m'asseure que par sa grande
prudence et piété, elle sçaura très-bien pourveoir, et que,
considérant la proximité de sang et alliance dont nous
appartenions au deffunct roy, elle jugera et aura pour agréable
la résolution que j'ay prins ; ce dont je la supplye
très-humblement. J'espère, dedans quelques jours, envoyer à
Vostre Majesté ung de mes serviteurs pour luy faire entendre
plus particulièrement l'estat des affaires affin de, sur ce,
recevoir ses bom advis et commandements lesquels j'accompliray
tousjours de tel zèle et dévotion (172)...
Avant et après cette dépêche, des résidents des envoyés
spéciaux, des ambassadeurs extraordinaires, Baretty, le marquis
d'Haurech, de Maillane, Chastenoy et Bardin munis de longues
instructions vont insister sur les détails. Ils rappellent, sur
tous les tons et à toutes les pages, que, grâce aux promesses de
l'Espagne, la Lorraine est sortie de sa neutralité et s'est mis
tous les protestants sur les espolles; que, néanmoins, ces
promesses sont toujours restées sans effet, ce qui a déjà
entravé plusieurs affaires d'importance. Ils exposent
minutieusement les énormes sacrifices de leur maitre,
l'épuisement de ses finances, les dangers, la ruine et la
dépopulation de son Etat (173), la nécessité d'un secours de
quarante mille écus par mois, sans compter cinq, six ou sept
cent mille d'arriéré, Ils n'oublient pas, en passant, de parler
des offres les plus avantageuses faites par l'ennemi ; mais
insistent « sur un accroissement de grandeur du côté de la
France ». Ce point délicat, si contraire aux prétentions
espagnoles, est mis en avant avec toutes sortes de précautions
habiles. Comme tous les petits enfants de Henri II ont des
droits identiques sur une partie du royaume, ils doivent unir
leurs moyens de revendication. Quant au royaume entier, « la
pluspart des François, particulièrement le corps de la Sorbonne
et les ecclésiastiques, veulent élire pour roy » le duc de
Lorraine ; mais ce prince n'y consentira jamais sans l'agrément
du roi calholique (174).
A ces avances intéressées, à ces réclamations quelquefois peu
dignes, que répondait le duc de Parme, que répondait Philippe II
? Ils se disaient non attiédés, renouvelaient leurs promesses,
envoyaient quelques compagnies de lances (175) sur la Meuse ou
payaient quelques a-comptes (176), car les desseins du roi
d'Espagne, les exigences de ses autres pensionnaires, et ses
embarras financiers ne lui permettaient pas d'aller plus loin.
Ce refus de concours de l'ambition espagnole gênait beaucoup
l'ambition lorraine, tout en lui rendant son entière liberté
d'action à Paris. Dans cette ville, dès 1592, le duc fit rédiger
un mémoire « des prétentions de Son Altesse et de ses enfants
sur plusieurs provinces du royaume de France (177) », tandis que
Thierry Alix, président de la Chambre des comptes composait à
Nancy un long manifeste « Les droits du duc de Lorraine ou du
marquis du Pont, son fils aisné, au choix ou à l'élection des
Estats de France (178) ». Le second mémoire renferme les
conclusions du premier ; de plus, s'appuyant sur les faits
avancés par Rosières et autres généalogistes, il les résume en
36 articles, qu'on peut ramener aux suivants
1° Droits dynastiques.
Le duc de Lorraine est héritier en droite ligne de Pépin, de
Charlemagne, du dernier des Carlovingiens, dépossédé par Hugues
Capet, « à la force des armes, sans convocation publique et
consentement des trois-Etats du royaume ».
2° Droits religieux.
La race de Lorraine, comme Godefroy de Bouillon, son illustre
ancêtre, a toujours combattu les hérétiques et les Turcs. Elle
est « saine, nette, impollué et immaculée d'aucune hérésie sans
exception ».
5° Services et alliances.
Les ducs de Lorraine ont secouru par les armes les rois de
France. Ils se sont souvent alliés à la maison royale de France
et à plusieurs princes souverains étrangers.
4° Avantages territoriaux.
L'avènement du duc de Lorraine assurerait un grand avantage à la
France et porterait ses limites jusques au Rhin ou à peu près,
même au-delà car, outre son duché, le duc a des droits de
propriété sur le duché de Gueldres, le comté de Zutphen, les
royaumes de Jérusalem et de Sicile. La France lui doit de
grosses sommes d'argent ; il a des prétentions sur un tiers de
son territoire. Une élection éteindrait les dettes et les
réclamations fondées sur la Provence, l'Auvergne, le Lauraguais,
le Bourbonnais et Forez, le Beaugeolais, la Bourgogne, Auxerre
et Nevers, l'Anjou, le Maine, Blois et Dreux, la Bretagne et
Montfort-l'Amaury, les comtés de Soissons et de Coucy, le
Valois, la Champagne et la Brie.
5° Déchéance des Bourbons
Après cinq cents ans, lorsque l'Etat est sur le déclin et
décadence, soit de la piété et religion, soit de la justice et
des subsides populaires, une famille royale est naturellement
déchue. En conséquence, sont déchus les Bourbons, qui tous sont
ou hérétiques, ou fils d'hérétiques, ou portant les armes pour
les hérétiques.
6° Droits des fils dit dite de Lorraine.
La loi salique n'exclut les femmes que si elles sont en pareil
degré que les mâles. Cette loi s'applique aux Bourbons éloignés
du dernier Valois jusques au 20e degré, tandis que les fils de
Charles III sont neveu dudit roi.
Charles III chargea Bassompierre de porter ce manifeste à Paris,
de le remettre aux Etats et de le faire appuyer par des députés
amis lui-même se rendit aux conférences de Reims (179), pour en
faire autant près des Guises.
Chacun sait où aboutirent ces propositions et le choc de toutes
les prétentions lorraines, espagnoles ou savoyardes : au réveil
de l'esprit national, à la conversion du Béarnais, à sa
reconnaissance par tous les prétendants. Le duc de Lorraine ne
fut pas le dernier à accepter cet heureux dénoûment. Comme tous
les ligueurs, il signa la trève générale du mois de mai 1593
(180) et, pour son compte, la fit renouveler de trois en trois
mois jusqu'en 1594. Alors, accueillant les ouvertures et
pourparlers de réconciliation faites par M. de Sancy (181), il
fut compris dans le traité de Saint-Germain et dans celui de
Folembray (182). Le 12 mars 1596, il publia sa ratification, en
ces termes :
« Les anciennes alliances, confédérations, amitié et bonne
voisinance, de tous temps contractées et religieusement
maintenues entre les très-chrestiens roys de France et nos
prédécesseurs, ont esté par nous jugées utiles et nécessaires :
les voyant altérées à nostre grand regret, nous avons faict le
voeu de paix, aussitôt que nous y avons veu les affaires mieux
préparées et disposées par la très-désirée et encore plus
heureuse conversion du roy à nostre sainte foy catholique, pour
la conservation de laquelle nous nous estions armés sans nul
autre dessein. »
Ce préambule est suivi des articles du traité :
1° Le duc restitue toutes les places françaises.
2° Le roi abandonne tout droit sur Dun et Stenay. Il confirme
aussi l'échange par lequel Marsal reste à la Lorraine (183).
3° Le marquis du Pont (ou, à son défaut, le comte de Vaudémont)
est mis en possession du gouvernement général de Toul, Verdun,
Coiffy, Montigny, Montéclair.
4° Le roi promet justice aux enfants de Lorraine pour la
succession de leur aïeule Catherine de Médicis sans préjudice de
leurs droits sur la Bretagne, l'Anjou, la Provence, Blois et
Coucy.
5° Le roi garantit la dot de Claude de France, payable par
préférence à toutes autres rentes.
6° Le roi s'engage à payer au duc neuf cent mille écus, tant
pour rentes arriérées que pour indemnités (184).
Postérieurement à ces conventions, le roi confirma la vente de
Jametz, faite au duc de Lorraine par le due de Montpensier. Le
Parlement moins généreux que le roi réduisit à un tiers les
indemnités et raya les réserves territoriales. Mais les
modifications apportées au traité de 1596 (185) n'empêchèrent
pas le prince de rester fidèle au roi, qui devint le beau-frère
du marquis du Pont ; cette alliance nouvelle ne l'empêcha pas
non plus de rester fidèle à ses anciens amis d'offrir un asile
honorable aux jésuites proscrits, aux ligueurs exilés (186).
Cependant, que nous sommes loin du manifeste de 1593 ! Deux
bicoques et 700,000 francs d'indemnité pour 10 ou 12 millions de
dépenses et de ruine, pour des milliers de morts voilà les seuls
résultats apparents de dix années de guerre ! Mais, à l'honneur
de Charles III, au-dessus, bien au-dessus de ces effets
matériels, n'oublions pas de placer les résultats moraux : le
maintien et le développement de l'influence lorraine entre
toutes les puissances de second ordre, et une part glorieuse
dans la confirmation de nos traditions religieuses et
nationales.
(1) Né le 23
février 1543, proclamé le 12 juin 1545.
(2) Voy. Encomium et Caroli III... Makarismos, imprimés à
Pont-à-Mousson, en 1609; Benoît Picart, Dom Calmet, etc.
(3) Dans tout le cours de cette étude, nous avons
particulièrement consulté et suivi : 1° les archives du
département de la Meurthe (registres du trésorier général et des
lettres patentes), celles des villes de Reims et Châlons ; 2°
Histoire de Lorraine, par Digot, t. IV ; Jametz et ses
seigneurs, par Buvignier ; Lettres et instructions de Charles
III, duc de Lorraine, relatives aux affaires de la Ligue,
publiées par H. Lepage, Nancy, 1864. Cette dernière publication
est du plus bout intérêt, comme recueil de pièces authentiques
et inédites.
(4) Exercices de dévotion, prédication, enseignement et presse.
(5) Ecoliers et docteurs anglais, écossais et irlandais à
l'Université de Pont-à-Mousson; intervention de Marie Stuart et
du pape Grégoire XIII.
(6) 1578.
(7) Des médailles, des jambons.
(8) 1567. Pour reprendre Valenciennes (24 mars).
(9) 1568-69-76.
(10) Fantassins, lansquenets, arquebusiers à cheval, reîtres.
(11) Expédition d'Erfurt et de Gotha (1564-71), au secours de
l'archevêque de Mayence.
(12) Cense à l'abbaye de l'Isle en-Barrois (1567).
(13) Prévôté de Prény.
(14) En 1576.
(15) Faite contradictoirement par des magistrats lorrains, le
procureur général et René Olry, commis aux enquêtes, et des
commissaires impériaux réunis à Vic (1577).
(16) Emond du Boulay, héraut d'armes (1540-50); Richard de
Wassebourg (1560), les deux d'Aulcy, mais surtout François de
Rosières (Stemmata Lotharingiae, 1580).
(17) 1562, Saverne; 1562-76, Blâmont; 1564, Bar et Nancy;
1584-1588, Nancy; décembre 1584, janvier 1585, Joinville; à
Joinville, l'ambassadeur d'Espagne, les sieurs de Rosne et
Bassompière jouaient gros jeu. La troupe de Châteauviel
représentait devant eux farces et tragédies. En 1580, à Nancy,
où se trouvait le duc Casimir, six ou sept colonels allemands,
beaucoup de la religion, et Charles de III Roche-Guyon, de
Chantelou, de Rosne, d'Inteville (mss. Sorbonne).
(18) 1587. 30,000 écus à différents particuliers de Paris.
(19) De 1585 à 1590. Les plus considérables sont celles de 1585,
1589, et 1590.
(20) Trésor des Charles, reg. des lettres patentes, mars 1585,
mai et septembre 1587.
(21) Lettres patentes, 18 et 21 juillet 1587.
(22) Envoyé par le duc de Parme avec 1500 lances (en 12
compagnies).
(23) Plus de dix mille servaient le duc de Lorraine (8 régiments
d'infanterie, 18 compagnies de cavalerie).
(24) Blâmont était défendu par le capitaine Poignant (des
Poignantes) et Mathias de Klopstein (escarmouche du moulin
Bertrand).
(25) Digot, Histoire de Lorraine, t. IV, p. 247.
(26) Le marquis rentre à Nancy le 3 janvier 1588 et, avec lui,
le capitaine La Barguerie, Jean Tognart, médecin, Antoine Henry,
apothicaire, Christin Clorat, prieur des Augustins-de Bar,
aumônier.
(27) Mission de La Bastide à Gien paroles de Schomberg étant à
Neufchâteau (Lettres de Charles III).
(28) Lettres du roi et de la reine-mère; messages des sieurs de
Liancourt et de Rieux (Lettres de Charles III).
(29) Pour négocier la paix d'Epernay et l'édit de Nemours.
(30) Le 29 janvier 1583, par Viart, président à. Metz, et
Nicolas Brulart de Sillery, conseiller au Parlement de Paris.
(31) 26 avril 1583.
(32) Par ses réponses au roi et par un ambassadeur
extraordinaire (Lenoncourt, bailli de Saint-Mihiel).
(33) Le marquis du Pout en devait rester seul chef sous
l'autorité du roi. Le duc pouvait les rappeler s'il lui
survenait quelques affaires sur les bras (Lettres de Charles
III).
(34) Février 1588.
(35) D'abord 23 mille écus (mai 1588).
(36) Il avait 21 ans.
(37) Particulièrement en 1584, pendant la régence de Françoise
de Bourbon.
(38) Champenois, Liégeois, Lorrains, Verdunois.
(39) Jean et Robert, qui se succèdent de père en fils
(1560-1584); ils sont assistés par le sieur de Wuide-Bourse,
second fils de Jean.
(40) Lettre du duc de Guise (1578).
(41) De novembre 1586 à mai 1587.
(42) Le premier à Genève (janvier 1588), le second à Strasbourg
(15 décembre 1587).
(43) Lettres de Charles III.
(44) Mme d'Aremberg, et peut-être La Noue.
(45) Lettres de Charles III lettres patentes. Les commissaires
étaient Messieurs d'Haussonville, de Lenoncourt, Cl. Bardin, J.
Hennezon (16 janvier 1589).
(46) De La Mouillye Haussonville, Lenoncourt Orpheo Galeani,
Rongnac, Esne, Narvais, Renesi, Crespé, Sitoni, Perliny,
Pinault, Mathieu du Pont, en tout de huit à dix mille hommes. En
juin 1588, 1,700 lansquenets remplacent quelques compagnies
conduites à Paris par de Rosne.
(47) La Noue, Estivault, Saubole, Montessin qui font des
incursions dans le Clermontois et le Barrois, même jusqu'a
Pont-à-Mousson, Hombourg et Boulay.
(48) 24 et29 décembre 1588, 23 juillet 1589.
(49) Un article des capitulations autorisait les émigrations et
accordait un délai raisonnable pour le transport des meubles et
la vente des biens.
(50) Escoffier (Discours sur la prise de Jametz), Buvignier (Jametz
et ses seigneurs), trésorier des guerres, lettres patentes.
(51) Didier Hornier, postillon, qui, le premier, apporta la
nouvelle de la prise du château (trésorier général).
(52) Vin, bière argent, chaînes d'Or. La chaîne donnée à Mathieu
du Pont coûte 2,493 francs.
(53) Archives de Châlons (lettres interceptées).
(54) En février et en mai. En mai Saint-Paul, d'accord avec
l'évêque, remplace la garnison royale de Verdun par des soldats
ligueurs.
(55) « L'héritière, dit-il, n'est coupable des faits antérieurs,
et ses places estant soubs ma protection, entreprendre contre
elle, c'est entreprendre contre moy. » (Lettres de Charles III.)
(56) Le duc de Lorraine leur fournit soixante mille écus. Leurs
chef, étaient le colonel Bassompierre, le duc de Brunswick, le
comte de Mansfell ainé, de Retz, Saint-Mauris, commissaire
général.
(57) Sous les capitaines Verdelle, Artigoty et Urban. Ils ne
prirent pas même la précaution de quitter l'uniforme lorrain :
on les reconnut à leurs livrées, drapeaux, casaques et croix de
Jérusalem
(58) Lettres de Charles III.
(59) Lettres du duc et du cardinal de Lorraine à d'Inteville et
à Messieurs de Châlons (3 avril 1589). Archives de Châlons.
(60) Courses et pillages sur la frontière, dans les villages d'Aureville
et de Neuvilly; Albanais dévalisés; arrestation d'un écolier de
Lunéville, d'un marchand, du secrétaire Poynet.
(61) Cette alliance fit rompre un mariage presque conclu avec le
duc de Nemours.
(62) Mission de Bellièvre et de la Guiche mars 1588.
Propositions faites après les barricades et les événements de
Blois (1588-1589).
(63) Henri III lui offrait le commandeures des étrangers à la
solde de la France et le gouvernement des Trois-Evêchés.
(64) Lettres de Charles III, mai et juillet 1588-1589.
(65) 10 août. Lettres de Charles III.
(66) Metz: Jean cardinal de Lorraine ; Robert de Lenoncourt,
Charles I, cardinal de Lorraine; Louis I, cardinal de Guise;
Charles II, cardinal de Lorraine ; Antoine Fournier, primicier,
évêque d'Archidral. - Toul : Jean, cardinal ; Toussaint d'Hocédy,
Charles, cardinal de Vaudémont ; P. du Chastelet, président du
conseil de Lorraine; François de Rosières, grand archidiacre. -
Verdun: Charles I, Nicolas Psaume, Nicolas Boucher.
(67) Saubole, Maillanne, Guito, de Rosne, Mondreville, du
Chastellet, Guyonnelle, Flamanville (gouverneurs de Metz, Toul,
Verdun, Châlons, Sainte-Menehould, Langres, Chaumont,
Villefranche).
(68) L'enfant du sieur de Maillanne, du sieur de Quarquey, du
sieur de Rosne.
(69) Le docteur Nicolas Boucher, qui accompagna le prince à
Pont-à-Mousson et mourut évêque de Verdun; son neveu, Nicolas
Millet.
(70) Le premier fut appelé pendant la maladie de la duchesse
Claude ; le second fut médecin ordinaire du comte de Vaudémont.
(71) Dons à l'église d'Avenay, à Saint-Pierre de Reims pour
l'achèvement des vitraux; indemnité à des paysans maltraités par
la garde ducale.
(72) 1563. Préambule d'une ordonnance de l'évêque de Verdun. Ces
négociations dataient de 1542 (première invasion française dans
le Luxembourg).
(73) Les trois premiers villages sont détachés de Verdun avec
ceux de Sienne, Trognon Mussey-sous-Longuyon. Les quatre
derniers, relevant de Metz, étaient fiefs des salines de
Moyenvic et de Marsal. L'évêque de Metz accorda aussi au duc
Moivron, Hoéville et Courbessaux; 300 francs de rentes sur la
saline de Moyenvic; suppression du passage de Bertrichamps.
(74) Instructions du 4 juin 1538 (Lettres de Charles III).
(75) Huit mois auparavant, le duc parlait tout autrement de son
fils. Selon la nécessité de sa politique il le représente comme
un jeune homme sans expérience, puis comme un homme prudent et
capable.
(76) Contravention aux traités et accords de Nomeny; occupation
de Panges ; défense aux Lorrains de trafiquer à Metz ;
arrestation de marchands allant aux foires d'Allemagne; défense
aux ecclésiastiques du pays messin de contribuer au décime de
guerre pour les biens qu'ils ont en Lorraine; empêchement
apporté à la reconnaissance de l'évêque de Metz comme abbé de
Saint-Vincent; pillages des troupes venant à Metz et Marsal ou
sortant de ces villes.
(77) Février et mai 1589.
(78) 23 août. Haussonville eut pour lieutenant le sieur de
Rarecourt.
(79) Lettres de Charles III. Mission de Bardin vers Mayenne et
le conseil de l'Union, 26 août 1589.
(80) Particulièrement la liberté de mariage en Lorraine, tant
que durerait le traité (Lettres de Charles III, 28 septembre et
23 octobre 1589).
(81) Les Treize de ville, officiers municipaux.
(82) Roger de Comminges sieur de Saubole ; son lieutenant était
le sieur de Montcassin.
(83) Lettres de Charles III (12, 20, 27 mai 1589).
(84) Du camp d'Etain (1585).
(85) Arrestations exécutions d'un chanoine et de quelques
bourgeois. Refus d'entrée à Metz au secrétaire Terrel ;
entreprise du capitaine Paul sur Hombourg ; pillage de la
chartreuse de Rethel près de Sierck.
(86) D'août 1589 à octobre 1590.
(87) Bailli d'Allemagne.
(88) Gouin, Segon, Felin (Phlin), Alailly, Rosey, Ars-la-Quenexey,
Sarry, Boulay, Sierck, Norroy-devant-le-Pont, Bouxières-sous-Froidmont,
Louvigny, Mardigny, Ponthoy, Moyenvic, Château-Salins,
Bouconville. Moulins, Pont-à-Moulin, Ancerville, Raucourt près
Nomeny, Hombourg.
(89) Originaire du Dauphiné, il se déclara en février 1589 ; il
fut surpris et tué par trahison le 27 avril suivant (trahison du
sergent du Halte).
(90) Saubole jeune en devint gouverneur avec 500 hommes de
garnison..
(91) Notamment avec le capitaine Poinclos.
(92) Le 20 juin, Charles III était à Moyenvic. Le siège dura
vingt jours le duc en fit faire une taille douce.
(93) Le duc se rend aux bains de Spa, le 6 août, et revient par
Saint-Mihiel à Verdun.
(94) Nancy, Châlons, Chaumont, Reims
(95) Lettres de Charles III.
(96) Archives de Chaumont.
(97) Lettres de Charles III.
(98) Archives de Châlons.
(99) Le 13 août, les habitants de Châlons envoient au roi copies
des lettres qu'ils viennent de recevoir.
(100) Archives de Châlons.
(101) Lettres de Charles III.
(102) Déjà, en 1585, Bettancourt et Nettancourt, assistés de
Jean Nomnaudin, dit le Cormissy, avaient fait une tentative sur
Bar; ils avaient essayé d'enivrer les soldats qui étaient de
garde aux portes (Archives de la Meurthe, trésorier général).
(103) Entre autres, Lecamus et Lafontaine, habitants de Ligny,
et Jean Castel.
(104) Ils furent enfermés à Châtel-sur-Moselle et payèrent, l'un
250 et l'autre 500 francs d'amende.
(105) Exécuté publiquement à Bar, par J. Warnier, prévôt de
camp. 3.
(106) Chacun d'eux reçut une pension de 200 francs.
(107) 1589, août et septembre. Lettres de Chaumont et du sieur
de Guyonnelle, apportées par le lieutenant particulier de
Langres ; lettres de Johannes, gouverneur de Vitry; d'Henriette
de Clèves et de Catherine de Montpensier, réfugiées à
Saint-Dizier (Archives de Chaumont).
(108) 1592, juin-août, messages des Troyens, Leroux et Le
Boucherut, au camp devant Château-Villain; message du sieur de
Lantages, recommandé par le prince de Joinville.
(109) Lettres de Reims apportées par le doyen Frison
recommandées par Mme de Saint-Pierre, par le maréchal Saint-Paul
et par le légat, cardinal de Plaisance (1592).
(110) Avec 1600 arquebusiers (sept compagnies), 700 à 800
reîtres et deux compagnies de lances. Le duc, pour plus
d'assurance, prie les Chaumontois de loger ses commissaires el
trésoriers.
(111) Chaumont s'était déclaré dès février 1589, et faisait la
guerre aux barons de Saint-Remy d'Anglure, et de Saint-Amand,
enfermés dans Château-Villain.
(112) Pendant cet hiver et le printemps suivant, le duc, ses
fils et les principaux officiers écrivent lettre sur lettre à
Chaumont, promettant de prompts secours.
(113) La prise de ces deux bicoques coûta 65 mille francs.
(114) Le maire Roussat conserva Langres aux rois Henri III et
Henri IV, malgré le sieur du Chapelet, gouverneur de la ville,
et malgré les gens d'Eglise. A la mort de Henri III, un jacobin,
J. de Mergey, dit publiquement qu'il connaissait les
instigateurs du crime. Il fut arrêté comme complice et exécuté
trois années plus tard (16 septembre 1592).
(115) Payées 180 francs.
(116) Sur Belan, lieutenant de Saint-Amand, gouverneur de Cirey.
De Lanques, gouverneur de Coiffy, paya une rançon de 45,000
francs, partagée entre Orféo et de Villers (10 et 12 avril
1592).
(117) Défendu par Beaujeu et d'Anglure-Triconville.
(118) D'Inteville y fit entrer des renforts (la compagnie de
Saint-Estienne, les sieurs de Chaltray et de Mesmy).
(119) Poudre, balles, mèches, hoyaux, piques, leviers de fer
(lettres des 25, 27 et 28 juin, Archives de Chaumont).
(120) Déjà Charles III avait établi pour les Troyens un magasin
de sel blanc à Bar-le-Duc, à 40 francs le muid (achat de Jacques
Lallemand).
(121) Lettres aux gens de Chaumont, aux deux Galeani, au
capitaine Antoine, à M. de Bourbonne, à M. de Mélay (Archives de
Chaumont, 1592-93).
(122) 8 et 9 mars, après l'affaire de Bisseuil.
(123) Le 9 mars, sur les 10 heures du matin.
(124) Dans la nuit du 9 au 10.
(125) Mondreville continua ses menées dans la place et avertit
sans cesse Reims et Saint-Paul de l'occasion favorable. Le 22
avril, l'avis parait si grave que le conseil de Reims en envoie
copie à Saint-Paul, à Mayenne, au conseil de l'Union, et en
communique avec Mme de Saint- Pierre.
(126) Tourteron, Cernay, Renneville, Bettancourt, Netancourt.
(127) Ravelins, boulevards. Les gentilshommes et damoiselles
portent la hotte.
(128) L'un maréchal da Barrois, l'autre bailli de Bar.
(129) Ce denier était hostellain (maitre d'hôtel).
(130) J. Puppin et J. Robillard, son gendre; J. de Vertus, Jac.
de Lollain Jac. Lefils, Nic. Lefèvre P. Dea, apothicaire; Didier
Pélu, Louis Coullon, J. Collebert, Denis Augenoust, P.
Hennequin, J. Waryn, Ch. Morel, dit Boucquin; Jac. Nostry, P.
Larson, Nic. Gobert.
(131) Mille écus.
(132) P. Dieu, J. et Jacques de Châtillon, les capitaines
Contet, de La Salle et Lefebvre.
(133) Délibération du 5 novembre.
(134) Le capitaine La Rose à Espance ; Mondreville et le
capitaine du Bois à Han ; La Verdure à Marcheville; Montreuil et
Saint-Paul vont rejoindre le duc à Nancy.
(135) La garnison est en alarmes continuelles des Lorrains
(lettres au duc de Nevers, août 1590).
(136) 1590.
(137) En particulier, le vallage de Champagne.
(138) Nicolas Bellaste, dit le sergent La Rosière ; P. Marjolin
et P. Holet.
(139) Hommes secrets envoyés vers Nevers et Saint-Paul (Claudin
Grand-Claude, Nicolas Hacquinot, capitaine Beauvais).
(140) Arrivé devant Sainte-Menehould, le 17 octobre 1590, il se
retira, le 29 du même mois, par Nettancourt, Arquenzolles, Bar
et Vassy.
(141) Le duc vint, avec 7 ou 8,000 hommes, par Jametz, Stenay,
Triaucourt; à Jametz, un soldat allemand, Balthazar Schenech lui
offrit des livres écrits de sa main.
(142) A ce siège, quelques soldats lorrains furent blessés :
Michel du Pasquier, Philibert Treza. Jean Baptiste, piqueur
d'écurie fut fait prisonnier.
(143) Mémoires du duc de Nevers, t. II.
(144) Lettres missives d'Henri IV, le duc de Nevers au roi.
(145) Claude Bardin.
(146) Le château de Navart, le village de Florenne.
(147) Le sieur de Mandres qui, le premier, apporta la nouvelle,
reçut une gratification de 237 francs. Méry, lieutenant
d'Estivaut, était prisonnier à Nancy.
(148) Démolition du faubourg Saint-Dizier de Nancy ;
fortification des places de Marsal, Sierck, l'Avantgarde, Dun,
Villefranche, Stenay eu atres.
(149) Sous ses ordres combattaient les capitaines Maulcourt, La
Tour, d'Artigoty, de Tilly, d'Esne, Romain, Vaucher, Lélio,
Roullon, La Roche, Poulourini.
(150) Les troupes de Nevers, celles des Barons, celles du
capitaine Borusse.
(151) Mousay, sieur de Boulain et de la Neufville.
(152) 1588-1590.
(153) Parmi les prisonniers on remarque les capitaines
Saint-Claude, Geoffroy, Doliniau, des Masures, Hédouville.
(154) Du novembre à la fin de décembre 1591. Pendant le siège,
Estienne Leroy, liseur des cordeliers de Chalons vint visiter le
duc de Lorraine. Les ingénieurs lorrains qui dirigèrent ce siège
étaient Brusley et Halluy.
(155) Cernay, Estivault, Rumesnil gouverneurs de Stenay, Sedan
Alaubert, assistés de Lambrecy, Loppes, Villemor Laperrière,
Latour, Boquillet, Pouilly, Remilly, du Gast, d'Arson,
Granimont, Fleur, Girondel, Pavillon, Carbon, Raville, Aideron.
(156) 14 Octobre 1592.
(157) lrault, Lamothe Fleurant ; le premier, défendu par
Mauljouy, endura 280 coups de canon. Dun fut pris le 6 décembre
1592. En revenant de Fleurant (1593), les fantassins de
Sainte-Menehould étaient si bien montés que les simples goujats
étaient devenus cavaliers.
(158) D'Amblize arriva à Reims le 9 août 1592, le jour même de
la capitulation d'Epernay.
(159) Commencées dès le mois de novembre t 590, à la demande du
due de Nevers désirant remédier aux bruslemens des gens de
guerre.
Les négociateurs français étaient le duc de Luxembourg et les
délégués du Parlement de Châlons. Haussonville et un maître des
requêtes représentaient la Lorraine.
(160) 1589-90-91. Ces petits corps d'armée se composaient de 3 à
4,000 hommes. D'Amblize, Bardin, de Maillane dirigeaient les
jeunes princes, qui ne partaient pas sans une maison complète,
sans un attirail de chasse. Les soldats remplacèrent alors la
croix de France sur satin bleu par la croix de Jérusalem sur
satin jaune. Ce petit changement coûta 9,711 fr. (trésorier
général).
(161) Le prince était à Bar au commencement de novembre, et ses
troupes engagées en Champagne sous Saint-Paul..
(162) Narvais d'Esne de Cirey et de Tallanges. L'armée s'avance
par Saint-Nicolas, Blâmont, Phalsbourg, Saverne et Marmoutier.
La ville de Strasbourg fournit des armes et des munitions à ses
coreligionnaires.
(163) Lettres de Charles III.
(164) J. de Wayemberg et A. Vallée ont, le premier, tracé à la
plume; le second, mis en taille douce les sièges de Marsal et de
Villefranche.
(165) A Pont-à-Mousson, chez Marchand; à Paris, chez Chaudières.
(166) La grande défaite des Huguenots de Champaigne. Paris 1592
(communication due à l'obligeance de M. le bibliothécaire
d'Amiens).
(167) Les jésuites de tous les pays notamment les pères Mathieu
et La Rue, courriers de la Ligue.
(168) Phalsbourg, qui avait coûté 400,000 florins (Lettres de
Charles III).
(169) Alphonse d'Ornano, dit Alphonse Corse.
(170) Elle demande pour l'évêque de Metz, son frère le chapeau
de cardinal et l'abbaye de Saint-Vincent-lès-Metz; pour Eric de
Lorraine, abbé de Beaulieu, l'abbaye, de Moyenmoutier, puis
l'évêché de Verdun.
(171) Mission du marquis Haurech : « En la négociation n'entamer
ce propos qu'avec discrétion et comme s'il n'en avoit charge. »
(Lettres de Charles III.)
(172) Lettres de Charles III.
(173) Pour l'entretien de ses troupes le duc dépense 75,000 écus
par mois. En janvier 1591, il dit avoir déjà dépensé trois
millions d'or.
(174) Instructions données à Chastenoy et à Bardin (septembre
1589, janvier 1591). imprimées à la suite des lettres de Charles
III.
(175) En juin 1589, 500 lances sous Camille Capizucco, don Juan
de Cordova, le marquis d'Haurech, le prince de Chimay, Horatio
et Jean de Namur, commissaires généraux de Gourroy et de
Winclay, lieutenants; en décembre, le comte de Mansfeld garde la
Sarre, tandis que le duc marche en Alsace.
(176) Secours au marquis du Pont ; cent mille écus remis à
Bardin.
(177) Par Fr. Bardin, maitre aux requêtes, et le sieur Chopin,
avocat à Paris.
(178) Publié pour la première fois par M. Digot (Recueil de
Documents sur l'histoire de Lorraine, t. I).
(179) Aux deux conférences de Reims, en septembre 1592 et en
avril 1593. Il fit son entrée le 28 avril, avec cinquante
archers de sa garde. Mayenne prétend qu'à cette dernière
conférence les princes lorrains furent complètement d'accord.
(180) Bassompierre négocie la trève à Saint-Denis, le 2 août
1594. Le duc la ratifie le 11 du même mois.
(181) Premier maître d'hôtel du roi, par l'intermédiaire de
Christophe de Bassompierre.
(182) 16 Décembre 1594 avec le duc de Guise ; décembre 1595,
avec Mayenne.
(183) 1594. Par acte passé entre le duc et le cardinal de
Lorraine. Le premier donne à l'évêché de Metz, Rambervillers,
Velaines, Erbéviller, Buissoncourt, Saint-Clément, La Ronxe,
Chenevières et 800 francs de rente sur les salines de Moyenvic;
le second abandonne Marsal.
(184) Les articles accordés ont été imprimés à Nancy chez Jean
Janson.
(185) Le traité fut enregistré en 1601.
(186) Les jésuites après l'attentat de Chatel ; réception
honorable faite au père Commellet; Rémois retirés à Verdun,
Moët, Frison ; Morus à Nancy, puis à Saint-Dié, ou il devient
doyen du chapitre. |