Dictionnaire minéralogique et
hydrologique de la France
Pierre-Joseph Buchoz
Ed. Paris, 1772
(même article dans son Dictionnaire des eaux
minérales de 1775)
DOMEVRE
DOMÈVRE est un petit village de la Lorraine situé à
un quart de lieue de l'Abbaye qui porte ce nom & à
cinq quarts de lieue de la ville de Blamont, on
trouve aux environs de ce village une fontaine
minérale qui étoit déjà connue depuis
très-long-tems, mais que M. Porriquet, Médecin
Stipendié de Blamont, a remis en faveur depuis plus
de vingt-quatre ans; cette fontaine coule à quelque
distance d'un petit bois très-agréable, où les
buveurs peuvent se promener pendant qu'ils en
prennent les eaux ; son bassin a quatre pieds & demi
de longueur, quatre de largeur & deux pieds de
profondeur, il est couvert d'une voute & entretenu
avec beaucoup de soin.
L'eau de la fontaine de Domèvre, quand on la boit,
laisse dans la bouche un goût d'âpreté qui ne
subsiste qu'un instant ; si on met de la noix de
galle dans cette eau, elle prend aussitôt une
couleur d'un rouge pourpre violet ; le syrop de
violettes la rend verte ; M. Kast, premier Médecin
de feu la Reine de Pologne, a fait évaporer de ces
eaux dans une terrine, il s'est formé à leur surface
une pellicule parsemée de petits corps blancs &
bríllans qui se condensoient, d'où il a conclu que
l'eau de cette fontaine étoit impregnée d'un sel
sélénitique.
La principale propriété des eaux de Domèvre est de
passer par les urines & par les selles,
principalement si on les prend à la source ; elles
conviennent conséquemment dans les pâles couleurs,
dans les chaleurs d'entrailles & dans les
constipations, elles amollissent & ouvrent les
obstructions du bas-ventre, & singulierement celles
du foie, de la rate & du mésentere : elles sont
très-bien indiquées dans les néphrétiques, elles
charroient des reins & de la vessie les graviers &
le sable qui peuvent s'y trouver. Les
Hypocondriaques, les mélancholiques & les
hystériques se trouvent très-bien de leur usage,
elles arrêtent insensiblement les pertes de sang &
les fleurs blanches ; on les dit aussi très-bonnes
contre la gravelle, tant en boisson qu'appliqués
extérieurement sur la peau avec des linges qu'on en
a imbibé. |