Les
ecclésiastiques de la Meurthe, martyrs et confesseurs de la foi
pendant la Révolution française
Eugène Mangenot
Ed. Nancy 1895
Quatre Frères des Ecoles chrétiennes de Nancy
La maison de force de
Maréville et les écoles chrétiennes de Nancy employaient un
nombreux personnel de Frères dits Ignorantins. Bien que la
fermeture du noviciat de Maréville et des écoles de Nancy ait
considérablement diminué le chiffre des Frères, restés en
Lorraine, quinze de ceux que renfermaient les prisons de Nancy,
étant insermentés et exempts d'infirmité, avaient été désignés
pour .la déportation au-delà des mers. Mais, nous l'avons déjà
dit, onze d'entre eux, impliqués dans le procès de l'incendie de
Maréville, furent retenus en détention jusqu'après le jugement
et échappèrent ainsi à la contagion des pontons. Des quatre, qui
furent déportés, un seul mourut, trois plus robustes survécurent
à leurs confrères, décimés par les privations et la maladie.
[...]
Le frère Jugon, de son nom de famille Jean-Pierre Melnotte,
était né le 18 décembre 1767, à Montreux (annexe actuelle de
Nonhigny). Fils légitime de Jean-Baptiste Melnotte et de
Charlotte Croisier (2), il entra dans l'Institut des Frères, le
30 août 1785. Quand survint la Révolution, il exerçait le
modeste, mais nécessaire office de cuisinier chez les Frères de
Nancy. Le 21 novembre 1792, comme il avait sept années de vie
religieuse, sa pension évaluée à raison de dix livres par année,
fut fixée à 70 livres 17 sous (3). Il habitait chez Madame Roguier, rue des Ponts, quand, le 17 mai 1793, le comité
révolutionnaire de Nancy le fit arrêter et interner aux
Carmélites. Le 4 juin, le frère Jugon demanda son élargissement.
Aucun motif pressant ne paraissant militer en faveur de la
pétition, elle fut repoussée par le Directoire du département,
le 6 juin. Il déclara qu'il n'avait jamais émis de voeux de
religion et qu'il ignorait les motifs de son arrestation. Privé
de ressources, il reçut le secours annuel de 400 livres, donné à
tous les détenus pauvres. Exempt d'infirmité, il était
déportable et il fut déporté (4). Sur le Bon-Homme-Richard, le
11 floréal an II, 30 avril 1794, on lui prit 6 livres en
numéraire et 7 livres 5 sous en assignats. Sa détention se passa
tout entière sur les Deux-Associés. Il vit se lever l'aurore de
jours meilleurs et fut libéré à Saintes (5). Désormais, nous
perdons totalement sa trace. Il vivait encore en 1829 et était
frère des Ecoles chrétiennes (6).
(2) Registres paroissiaux de Montreux,
(communication de M. Gaillard, curé de Nonhigny).
(3) Etat, etc. Arch. dép., H 2352.
(4) L 463, 1495, 3301 et 3314-3320.
(ô) Manseau, II, p. 379.
(6) Michel, Biographie, p. 370, note.
Congrès provincial
de la société bibliographique et des publications populaires
Session tenue à Nancy les 1, 2, 3 et 4 juin 1896
LES REGISTRES PAROISSIAUX DE
NANCY
[...] Nous avons retrouvé la trace d'un des déportés
ecclésiastiques, qui étaient partis des prisons de Nancy pour
les pontons de Rochefort. Le frère Jugon, selon le monde
Jean-Pierre Melnotte (2), était revenu à Nancy après sa
libération. Comme il n'avait émis aucun vœu de religion, il
contracta, le 23 août 1796, devant le père Fidry, ancien
jésuite, un mariage légitime avec Anne Vafflard, qui habitait la
rue Montesquieu. Le 21 juin de l'année suivante, le père Fidry
baptisait une fille, issue de cette union. Jean-Pierre Melnotte
avait repris ses anciennes fonctions de cuisinier (3).
(2) Les Ecclésiastiques de la Meurthe, p. 291.
(3) Premier recueil, n° 215 et 231.
NDLR :Le registre d'état
civil de Montreux confirme sa naissance le 18 décembre 1767, et
celui de Nancy, son mariage le 6 fructidor en IV (23 août 1796)
avec Marie-Anne Wafflard, acte où il est indiqué Cuisinier
domicilié à Nancy rue Montesquieu. Au 3 messidor an V (21
juin 1797), l'acte de naissance de sa fille Elisabeth Justine
l'indique Cuisinier domicilié à Nancy rue de l'orphelinat
[...] première section. |