Bulletin des transports internationaux par chemins
de fer
v.3 1895
Voie à suivre.
Obligation pour le chemin de fer de choisir la plus
avantageuse à l'expéditeur.
(Jugement du tribunal de Lunéville, en matière
commerciale)
Le 12 septembre
1894 était remise a la gare de la Haye une
expédition de 610 paquets de cuirs salés, 20 000
kilogrammes, à destination de Blamont (France).
L'expéditeur n'avait pas indiqué la voie à suivre
dans la lettre de voiture. Le bureau de la Haye ne
se trouvant pas en relations directes avec la gare
destinataire, inscrivit l'envoi pour Givet en
service belge-néerlandais, et le bureau de Givet
dirigea l'envoi sur Blamont avec réinscription à
Avricourt. Le destinataire refusa de payer les frais
de transport calculés par l'itinéraire de Givet
réellement suivi et s'élevant à 815 francs. Il
prétendit que l'envoi aurait dû être dirigé sur
Blamont par Deutsch-Avricourt (via Winterswyk-Sarreguemines),
voie plus courte et moins coûteuse, adoptée pour de
nombreux envois antérieurs, et qu'il ne devait,
comme frais de transport que, 689 francs 75
centimes, soit une différence en moins de 125 francs
5 centimes.
Estimant qu'une faute grave ne pouvait lui être
imputée, parce que l'expéditeur avait omis
d'indiquer dans la lettre de voiture l'itinéraire à
suivre et les tarifs à appliquer, le chemin der fer
expéditeur, par l'entremise du dernier transporteur
fit assigner le destinataire en paiement de 815
francs, montant des frais de transport par la voie
réellement suivie. Le tribunal de Lunéville, jugeant
en matière commerciale, l'a débouté des fins de sa
demande, pour les motifs suivants :
« Considérant qu'aux termes de l'art. 6 de la
Convention internationale de Berne, les expéditeurs
sont tenus d'indiquer l'itinéraire a suivre par
leurs marchandises, ainsi que les stations où
doivent être faites les opérations de douane, mais
que le même article porte qu'en cas d'omission de
cette désignation, les compagnies sont tenues de
choisir la voie qui leur paraît la plus avantageuse
pour l'expéditeur et ne sont responsables des
conséquences résultant de ce choix qu'autant qu'il y
a eu faute grave de leur part; qu'il en résulte que,
clans la cause, la compagnie expéditrice était
tenue, puisque l'expéditeur n'avait pas indiqué la
voie à suivre, de faire prendre à la marchandise la
voie la plus courte, qu'elle devait supposer être la
plus avantageuse pour ce dernier; considérant que la
distance de la Haye à Blamont par Avricourt n'est
que de 568 kilomètres, tandis qu'elle est de 606
kilomètres par Givet; que la compagnie expéditrice a
donc commis, en faisant l'expédition par cette
dernière voie, une faute grave dont elle doit
supporter les conséquences; que la faute commise par
elle est d'autant plus grave qu'antérieurement elle
avait fait aux défendeurs de nombreuses expéditions
et que toujours elle les avait fait passer par Igney-Avricourt,
sur la demande des expéditeurs; que dans ces
conditions les offres des défendeurs doivent être
déclarées suffisantes, etc. » (Communication du
chemin de fer hollandais, en date du 23 octobre
1895.) |