Le texte ci-dessous évoque
les formalités internationales pour le passage des véhicules
automobiles d'un territoire : « Tous les pays d'Europe
exigent la déclaration par l'importateur, le plombage du
véhicule et du moteur, la consignation des droits avec
remboursement à la sortie. ». M. de Diétrich demande à ce
titre que les postes des douanes avec l'Allemagne, situés sur
les petites routes soient munis des instruments nécessaires pour
procéder au plombage (pince et du plomb), ce qui n'est pas le
cas lorsque qu'on va de Blamont en Allemagne.
Ce débat initié en 1900, conduira la Fédération Internationale
de l'Automobile à créer en 1911 le Carnet de Passages en Douane,
ou CPD, document douanier international utilisé pour la première
fois en 1913 pour simplifier les formalités douanières des
touristes et voyageurs motorisés. Couvrant l'admission
temporaire de véhicules à moteur, le CPD est recommandé voire
obligatoire dans de nombreux pays du monde (hors Europe).
Aujourd'hui encore, les voyageurs peuvent obtenir un carnet chez
leur association automobile nationale, car de nombreux pays dans
le monde exigent une garantie telle que le CPD (obligatoire en
Égypte, Libye, Iran, Oman, Pakistan, Inde, Bangladesh,
Indonésie, Malaisie, Australie, Nouvelle-Zélande...). Grâce à ce
document, les administrations douanières évitent de recourir à
des dépôts en espèces (et leurs conditions de remboursement) et
simplifient les formalités.
C'est encore la même motivation qu'en 1900 : interdire, sous
prétexte de voyage, l'importation illégale de véhicules sans
frais de douanes. C'est pourquoi une caution doit être déposée
au nom du titulaire, calculée de manière à couvrir les droits de
douanes ou autres taxes des pays visités, avec des différences
importantes selon les pays : de 100% de la valeur vénale (cote
Argus) du véhicule (avec un minimum de 2.500 € pour un véhicule
dont la valeur ne dépasse pas 2.500 €), on atteint 150 % de la
valeur vénale du véhicule (avec un minimum de 3.500 €) en Iran,
Pakistan et Inde, et même 250 % de la valeur vénale (avec un
minimum de 4.000 €) pour l'Egypte, le Yémen et le Soudan.
Avec un CPD, il faut nécessairement obtenir le tampon des
douanes en sortant du pays visité, pour récupérer sa caution.
Congres
international d'automobilisme tenu en l'hôtel de
l'Automobile-club de France du 9 au 16 juillet 1900.
RAPPORT DE M. BAILLIF SUR les
Formalités internationales pour le passage des Automobiles d'un
Territoire sur un autre
M. LE PRÉSIDENT. - L'ordre du jour appelle la discussion sur le
rapport dont vous avez bien voulu me charger sur les formalités
internationales pour le passage des véhicules automobiles d'un
territoire sur un autre ou plus exactement, dit le programme,
sur l'unification de ces formalités. En fait, cette unification
existe déjà et c'est plutôt de simplification qu'il s'agit. Tous
les pays d'Europe exigent la déclaration par l'importateur, le
plombage du véhicule et du moteur, la consignation des droits
avec remboursement à la sortie. Voilà le régime uniformément
adopté en Europe et qu'on voudrait voir améliorer. Il faut bien
remarquer que le véritable ennui n'est pas dans la consignation
des droits à l'entrée; c'est là une formalité qui ne présente
pas de difficultés. Ce qui est moins facile, c'est la
restitution à la sortie et la constatation de cette sortie. Il
peut arriver, en effet, qu'on veuille sortir d'un pays étranger
un dimanche; les bureaux du service administratif des douanes
sont fermés, et les bureaux du service actif se refusent à
remplir les formalités de décharge et de remboursement. En
second lieu, il peut se faire qu'en semaine, le bureau par
lequel on veut sortir ne soit pas nanti des fonds suffisants. En
effet, une automobile d'une valeur de 10.000 francs - ce qui
n'est pas exorbitant - paye dans certains pays jusqu'à 1.500
francs de droits; il peut très bien se faire qu'un bureau n'ait
pas la somme nécessaire pour un remboursement de cette
importance - la chose s'est produite même pour des bicyclettes.
Il y a donc une double difficulté à laquelle on a proposé de
remédier en faisant revivre pour les automobiles le système qui
a fonctionné pendant un an ou deux pour les bicyclettes. Ce
système consiste en une feuille de papier en trois morceaux,
appelée tryptique. Le premier de ces morceaux porte la
description de l'objet introduit et il est remis au bureau; le
second reste entre les mains du voyageurs et le troisième doit
être remis au bureau de sortie. Ce troisième morceau court après
le premier et s'il le rencontre, la justification est parfaite.
[...]
S'il n'y a pas de discussion, j'ai l'honneur de vous proposer,
Messieurs, d'émettre le voeu suivant :
Le Congrès international d'Automobilisme, Adoptant les
conclusions du rapport présenté par M. Baillif, Emet le vœu :
« Que les formalités en douane pour les voitures automobiles
transportant les Voyageurs de passage en pays étranger, soient
réduites à leur plus simple expression ;
Il demande notamment :
1° Que les bureaux de douane situés sur les voies principales
ordinairement suivies par les voitures restent ouverts les
dimanches et jours fériés, du 1er avril au 15 octobre... »
J'ai indiqué cette limitation à M. le Directeur des douanes;
elle est d'ailleurs conforme à celle qui existe en Belgique où
il y a un précédent pour les bicyclettes.
«... Que ces bureaux soient nantis des fonds suffisants pour le
remboursement, à présentation, des droits consignés par les
voituristes à leur entrée dans le pays.
« Ces mesures ne seront prises par le gouvernement français qu'à
l'égard des pays qui accorderont la réciprocité. »
M. LE SECRÉTAIRE GÉNÉRAL. - Les dates que vous indiquez sont
très sages au point de vue de la Belgique et de l'Allemagne,
mais, en ce qui concerne l'Italie, étant donné qu'il y aura des
voituristes qui s'y rendront en hiver - de même qu'en Espagne, -
il y aurait peut-être lieu de modifier le texte à ce point de
vue.
M. LE PRÉSIDENT. - C'est parfaitement juste et nous tiendrons
compte de cette observation.
M. BISCARETTI. - Si vous me le permettez, Messieurs, je vous
donnerai une indication à ce sujet. Il y a en Italie, et
particulièrement dans la montagne, des bureaux de douanes qui
n'ont pas de fonds suffisants pour rembourser les fonds aux
voituristes qui rentrent en Italie mais dans ce cas le voyageur
a la patience d'attendre son remboursement et de le faire
effectuer un peu plus loin, au lieu de se faire payer
immédiatement à l'entrée. Par exemple, je connais des voitures
qui sont rentrées par la Suisse, par le mont Cenis, par des
bureaux qui n'avaient pas de fonds; ces voitures descendaient
vers Suze, Turin, Milan, et c'est dans ces villes seulement que
les droits ont été remboursés. Je crois que ce système
permettrait de simplifier les formalités gênantes dont on
demande la suppression.
M. LE PRÉSIDENT. - Cela n'infirme pas le vœu qui ne vise, lui,
que les bureaux principaux.
M. BISCARETTI. - Au contraire, et je m'associe complètement à
votre voeu, Monsieur le Président.
M. DE STERN. - Quant à l'Italie, j'ai constaté que les
sociétaires du Touring Club italien entrent dans ce pays sans
verser de droits, même pour les automobiles.
M. LE PRÉSIDENT. - Il est très curieux que le Touring-Club
italien ait pris cette responsabilité.
M. DE STERN. - Je désirerais en outre que le Congrès émît le vœu
qu'un formulaire fût établi pour la description de la
consignation, afin qu'il n'arrivât pas à un voyageur ce qui
m'est arrivé à la frontière française, il y a quelques jours,
lorsqu'un douanier a écrit, sur la déclaration de ma voiture : «
couleur rouge ». Vous comprenez, Messieurs, que la couleur est
une chose tout à fait insignifiante et qu'une fois en France je
pourrais faire peindre ma voiture d'une autre couleur ce qui
m'empêcherait dès lors de faire sortir ma voiture du pays.
M. LE PRÉSIDENT. - Parfaitement; nous pourrons signaler ce point
en passant.
M. DE STERN. - De plus, Messieurs, comme ce Congrès est
international, je voudrais qu'il émît le vœu international
suivant:
« Que le système des plombs soit éliminé par les différents
gouvernements. »
Ce n'est pas en France que l'on se sert de ce système, mais
c'est dans les autres pays, et vous savez qu'il n'y a rien de
plus ridicule qu'un plomb sur une voiture automobile d'où l'on
peut le séparer en le divisant (l'orateur tire de sa poche un
portefeuille d'où il sort un plomb) ... et vous voyez que je
porte mon plomb autrichien dans mon portefeuille, afin de ne pas
le perdre ! (Hilarité.) C'est ridicule et je crois que nous
pourrions émettre un voeu dans ce sens.
M. LE PRÉSIDENT. - Il y a là une question de principe.
Seriez-vous d'avis, Messieurs, de joindre ces deux questions,
qui me paraissent toucher des points de détail, à l'ordre du
jour, ou ne pensez-vous pas, au contraire, qu'elles pourraient
faire l'objet d'une communication particulière à M. le directeur
des douanes. -
L'observation qui concerne la couleur peut être signalée à
l'Administration, en la priant de donner à ses agents des
instructions afin qu'ils ne donnent plus d'indications de cette
nature.
Quant aux plombs, la question est plus délicate, car c'est une
question de principe, parce que le plombage s'applique à toutes
les marchandises, quelles qu'elles soient. Je doute, en
conséquence, qu'il soit fait exception pour les automobiles,
car, dans ces cas, l'exception entraînerait la règle. C'est un
peu délicat...
M. DE DIÉTRICH. - En ce qui concerne les plombs, je demanderai
que l'on insère au procès-verbal le désir qu'en Allemagne, les
postes des douanes situés sur les petites routes par lesquelles
on entre dans ce pays, soient munis des instruments nécessaires
pour procéder au plombage. C'est bien peu de chose, il me
semble, puisqu'il suffit d'avoir une pince et du plomb. C'est
ainsi que le poste situé sur la route qui va de France en
Allemagne par Blamont est incapable de donner quoi que ce soit.
M. LE PRÉSIDENT. - Vous avez peut-être un tort, mon cher
collègue, c'est de demander quelque chose; faites donc comme
certains de nos collègues et entrez sans rien demander !
M. DE DIÉTRICH. - Cela peut avoir un inconvénient: si vous ne
demandez rien le douanier peut vous signaler par dépêche et
votre voiture peut être confisquée.
M. LOHNER. - Au sujet de la question des plombs, je suis,
Messieurs, de l'avis de M. le Président et je ferai remarquer à
notre collègue que l'argument principal ne peut pas être formulé
dans notre lettre au Gouvernement c'est pourquoi je pense que le
plombage est inévitable.
M. LE PRÉSIDENT. - Sous le bénéfice de ces observations, je mets
aux voix le vœu dont j'ai donné lecture.
Le vœu est adopté. |