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Le ballon « Le Condor » - Nancy - 14 juillet 1908
 


Est-Républicain
14 juillet 1908

Le ballon

Cette année, l'aérostat qui devait s'élever dans les airs, vers la fin de l'après-midi de la Fête nationale, avait nom le « Condor » et cubait 1,500 mètres cubes. Il sortait des ateliers de M. Carton-Lachambre, de Paris.
Les opérations du gonflement, commencées vers dix heures du matin, se poursuivirent sans aucun incident jusque vers cinq heures de l'après-midi.
L'aérostat était à ce moment entièrement rempli de gaz et l'aéronaute, M. Carton, donnait l'ordre d'accrocher la nacelle au filet, manoeuvre qui fut accomplie parfaitement.
Auparavant, quelques ballons-sondes avaient été lâchés. Tous s'étaient élevés rapidement dans les airs et avaient pris la direction du Nord-Est.
A cinq heures, la place Stanislas est noire de monde, tous les regards sont portés vers la sphère remplie de gaz, qui, au moindre souffle de vent, se balance, retenue à terre par de nombreux sacs de
lest.

Les aéronautes. - Le lâchez tout

Quelques minutes se passent, pendant lesquelles les derniers préparatifs du départ se terminent.
MM. Jasson, architecte municipal ; de Brabois, Jean de Meixmoron, Kowalcsky et l'aéronaute, M. Carton, prennent place dans la nacelle.

L'aérostat heurte le Grand-Hôtel

Les sacs de lest sont enlevés successivement. Il est cinq heures huit minutes. Le « lâchez tout » est prononcé.
Une brusque saute de vent arrive et l'aérostat, probablement trop lourdement chargé, ne s'élève pas d'un bond, comme d'habitude, et se dirige en biais vers le bâtiment du Grand-Hôtel.
M. Carton voit le danger. Il vide plusieurs sacs de lest, mais cela ne suffit pas pour alléger suffisamment le ballon qui semble rester sur la place.
Le public est anxieux. On devine qu'un accident va se produire, car c'est à peine si l'énorme bulle de gaz est à la hauteur des bâtiments de la place.
En effet, malgré le lest qui s'écoule, on peut constater qu'il est impossible au ballon de franchir les toitures.
Tout à coup, on le voit buter contre le troisième groupe décoratif du bâtiment du Grand-Hôtel. L'étoffe, légère, se déchire. Le gaz s'échappe par la longue déchirure. La nacelle va buter contre le mur, à la hauteur des fenêtres du deuxième étage.
Un frisson d'épouvante parcourt la foule. On craint que les voyageurs aériens ne viennent tomber sur le trottoir, qui, en quelques minutes, est débarrassé de ses tables et de ses chaises, jetées pêle-mêle sur la chaussée.

Le sauvetage

Mais le personnel de l'hôtel a rapidement compris le danger. De la fenêtre d'angle, des domestiques jettent des draps aux aéronautes.
Ceux-ci les saisissent. L'on peut croire un instant que tous peuvent arriver à gagner les chambres du deuxième étage. Mais cela n'est point possible, la nacelle descend, arrive bientôt à la hauteur du premier.
A une fenêtre, sur le côté de la rue Sainte-Catherine, se tiennent plusieurs personnes. L'une d'elles, faisant preuve d'une grande initiative et d'une grande énergie, peut saisir d’une main le bord de la nacelle, tandis que l’autre tient fermement la main-courante du balcon. Avec force, elle maintient ainsi pendant quelques secondes la nacelle. Cela permet à plusieurs personnes et au personnel d’accourir.
La nacelle est amarrée. L'on tend les bras aux voyageurs aériens, qui peuvent ainsi sortir de leur position critique et gagner le salon, où ils se trouvent enfin en sûreté.
Le panier d'osier, hâlé à force de bras est à son tour placé dans le salon du premier étage, où il fait, comme on pense, l’office d'un meuble encombrant et disparate.

L'épave du ballon

L'aérostat-, projeté- sur le toit du bâtiment, couvre entièrement les vases et les statues qui ornent la balustrade. Le filet s’est accroché à tous les motifs de ces sculptures. Un groupe, poussé trop fortement, a viré sur sa base et le col du vase s'est brisé. Un amour a eu les jambes cassées et l'une d'elles est venue s'abattre sur le trottoir.
L'on craint pour tous les autres motifs. Des agents de police, les domestiques de l'hôtel, plusieurs employés de la ville, ayant participé au gonflement, montent sur le toit pour aider au sauvetage de l’aérostat.
M. Friant, l'artiste peintre, qui, on le sait, connaît à fond la science aérostatique, est présent et donne des conseils utiles.
Les pompiers ayant été avertis sont accourus. Le lieutenant Collignon, voyant que l'un des vases peut choir sur la place, le fait attacher solidement, avec des cordes contre une cheminée ; puis il ses met en devoir de couper les cordelettes du filet. Le ballon est à ce moment dégonflé et pend en loque immense le long du bâtiment.
Petit à petit on dégage, vases et statues de l'enveloppe de soie, que l'on rejette sur la place, et qui tombe sur la grille de la rue Suinte-Catherine, décapitant le vase fleuri du pilastre.
Les mailles du filet s'accrochent à toutes les aspérités de la façade. Il faut que les pompiers, à l'aide de l'échelle Gugumus, aillent faire tomber toutes ces cordelettes.
Ce travail, long et difficile, se fait lentement, car il est sept heures que l'enveloppe de soie est encore pendante le long de la façade.
Ce n'est qu'à sept heures et demie et à un moment où la pluie tombe, que le ballon peut être remisé par M. Carton.
Le « Condor », par ses grandes dimensions, était un aérostat d'une valeur approximative de 5,000 francs. Il peut être considéré comme perdu, car il semble très difficilement réparable.

D'après les renseignements que nous avons recueillis, la jeune personne qui, par son initiative intelligente, a pu permettre aux aéronautes de sortir de la nacelle, est Mlle Raimbaud, qui, avec sa famille, était arrivée le jour même, à midi, de Vittel. Nous lui adressons toutes nos sincères félicitations.


L'Éclair de l'Est
14/15 juillet 1908

Le lancement du ballon
Coup de vent imprévu. - Catastrophe évitée. - Moment d‛angoisse. - Le sauvetage

Dès trois heures et demie, la foule s’augmentait, de minute en minute sur la place Stanislas et lentement le ballon se gonflait.
A quatre heures et 'demie, la masse du Condor se balance imposante et majestueuse. Le ballon est gonflé. Et, pendant qu’on accroche la nacelle, la .foule .admire les voitures et les automobiles fleuries qui reviennent de la fête des fleurs et, passent en théorie charmante sur les côtés de la place pour aller s’engouffrer sous les ombres de l’Arc de Triomphe.
A cinq heures la nacelle est accrochée...
M.M. Friant, le peintre nancéien si connu, MM. Jasson, architecte de la ville, de Meixmoron de Dombasle, Louis de Brabois et Kowalesky viennent de prendre place dans la « barque aérienne ».
- Cinq personnes, dit quelqu’un assis près de moi à un des balcons de la place, c’est trop.
A ce moment les aéronautes lancent du lest.
Près de moi, la même personne répond :
« Ils n’ont pas lancé assez de lest ! »
Cependant le ballon s’est élevé.
Il est visible qu’il ne monte pas « droit », il oscille,, il oblique, il se dirige vers le Grand-Hôtel.
Soudain, une poussée de vent, une « saute » imprévue, le pousse plus près du Grand-Hôtel, et le ballon s’accroche à l’une des statues et aux vases sculptés qui ornent la corniche du monument.
Un bruit strident, comme de la soie qui se déchire, se laisse nettement percevoir.
Le ballon est arrêté et... déchiré.
La nacelle penche en avant, on dirait qu’elle va « faire panache ».
Un cri d’angoisse s’échappe de: milliers de poitrines.
Il y a un moment de stupeur et d’effroi.
Cependant le ballon est immobile. Il est « ancré-» . Par une des fenêtres du deuxième étage quelqu’un lance un drap roulé aux aéronautes.
Mais ceux-ci ont compris le danger. Si un d’entre eux sorti, le ballon, lesté, peut bondir et qu’arrivera-t-il des quatre autres aéronautes ?
Ils gardent le drap et en jettent l’autre bout à des gens accourus à une des fenêtres du premier étage.
Ils tirent le ballon et approchent, du balcon du premier étage, la nacelle.
Les aéronautes sont sauvés. Un à un ils quittent la nacelle et sautent dans les appartements du Grand-Hôtel.
Mais tout danger n'est pas conjuré. Le ballon accroché peut, par son poids, faire écrouler la corniche et les sculptures et causer, outre un accident de personne, un malheur artistique.
Mais on a prévenu les pompiers.
Bientôt on aperçoit sur le toit et la corniche nos braves sapeurs, le lieutenant Collignon et M. Jasson, qui, sauvé de la nacelle, songe maintenant à sauver les merveilles de la ville.
Par la fenêtre qui a vu; passer les aéronautes, on fait aussi passer la nacelle.
Et pendant ce temps, lentement, avec d’infinies précautions, les pompiers détachent le ballon qui, maintenant déployé, pend, comme une immense draperie jaune, à l’angle du Grand-Hôtel.
A six heures et demie, la foule regarde encore les dernières opérations de nos habiles sapeurs ; mais une averse survient qui fait fuir les plus curieux, et chacun s‘en va faisant dé multiplies réflexions sur un, événement, qui ne fut; grâce à Dieu,
qu’un incident, mais qui aurait pu être une vraie catastrophe et coûté la vie à cinq personnes.
Le grand coupable c’est le vent qui n’avait pas cru prévenir qu’il allait « virer de bord ».
Il va sans dire que les photographes ont braqué leurs appareils sur le Grand-Hôtel et que les marchands de cartes postales nous vendront bientôt : « L’accident du Condor ».

Les impressions d’un rescapé

Nous avons pu interviewer M. Kowalesky, l’un des heureux rescapés de ce naufrage aérien.
Tout d’abord il nous dit :
« Nous avions emporté 4 bouteilles de champagne qui nous avaient, d’ailleurs,
été gracieusement offertes. A quels pauvres pourrions-nous les offrir ?
Et, comme nous lui laissions le choix, , désireux de savoir surtout ses impressions au moment critique, il nous dit :
« J’ai eu tout simplement l’impression que nous allions tomber sur le pavé. On nous tendait bien des draps mais ils étaient trop courts, ou plutôt nous étions trop bas déjà, au-dessous de la fenêtre. Enfin, tout est bien qui finit bien et je vous quitte, car je ne sais pas où est passé mon pardessus. »


Est-Républicain
16 juillet 1908

La fête nationale à Nancy
Le ballon s’accroche au Grand-Hôtel

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Nouveaux détails
On a lu, dans un précédent numéro, le grave accident arrivé au ballon.
Nous disions que ce ballon était probablement trop chargé. En. Effet, les passagers étaient trop nombreux. : cinq.
Dans le premier moment, afin de ne pas porter un jugement prématuré, nous n'avons pas dit, mais cela est trop certain, que si, le capitaine s'était rendu compte de la direction du vent, l'accident eût été facilement évité.
Le vent portait manifestement le ballon à droite, c'est-à-dire qu'il le conduisait fatalement à se heurter - de suite - contre le Grand-Hôtel.
II aurait suffi de ramener le ballon plus près du milieu de la place, et à l'aide de cordages - de maintenir l'aérostat dans ce milieu, afin qu'il pût s'élever au-dessus des édifices environnants.

Un certain nombre de journaux parisiens racontent d'une façon fort originale le sauvetage des cinq aéronautes du ballon le « Condor », resté accroché, comme on sait, à la toiture du Grand-Hôtel.
Ils impriment sérieusement que ces cinq naufragés de l'air furent sauvés à l'aide d'un autre ballon. Il est à croire que ce second ballon est tout simplement celui monté à ces journaux par leurs correspondants facétieux..



 

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