Annales des
ponts et chaussées
N° 162
19 novembre 1887
Décret qui approuve le traité
passé entre la Compagnie des chemins de fer de l’Est et
la Compagnie du chemin de fer d’intérêt local d’Avricourt
à Blamont et à Cirey pour l’exploiation de ce chemin de
fer par la Compagnie de l’Est.
Le Président de la République française,
Sur le rapport du ministre des travaux publics,
...
Le Conseil d’État entendu,
Décrète :
Art. 1er. - Est approuvé le traité passé, les 16 et 24
juin 1886, entre la Compagnie des chemins de fer de
l’Est et la Compagnie du chemin de fer d'intérêt local
d'Avricourt à Blamont et à Cirey, pour l'exploitation de
ce chemin par la Compagnie de l'Est.
Art. 2. - La présente approbation est donnée sous la
réserve que la Compagnie des chemins de fer de l'Est
établira, en un compte à part, les résultats de
l'exploitation faisant l'objet dudit traité.
Les pertes ou les bénéfices résultant de cette
exploitation ne pourront, en aucun cas, figurer dans les
comptes établis en vue de la garantie d'intérêts
accordée par l'État à la Compagnie ou du partage des
bénéfices.
...
TRAITÉ
Entre :
La compagnie des chemins de fer de l’Est, dont le siège
est à Paris, rue et place de Strasbourg, représentée par
MM. Charles-Edouard Gallois, ingénieur en chef des ponts
et chaussées, officier de la Légion d'honneur, et
Paul-Eugène-Marie de Boischevallier, administrateur de
ladite compagnie, agissant en vertu des pouvoirs qui
leur ont été conférés par une décision du conseil
d’administration, en date du 24 juin 1886,
D'une part;
Et la compagnie du chemin de fer d'Avricourt à Blamont
et à Cirey, représentée par M. Marie-Joseph-Émile Mathis
de Granseille, chevalier de la Légion d'honneur,
président du conseil d'administration, agissant en vertu
des pouvoirs qui lui ont été conférés par une décision
du conseil d'administration, en date du 16 juin 1886,
D'autre part;
Il a été exposé et arrêté ce qui suit :
La compagnie des chemins de fer de l'Est exploite
actuellement, pour le compte de la compagnie
concessionnaire, le chemin de fer d'intérêt local d'Avricourt
à Blamont et à Cirey, aux conditions fixées par un
traité en date du 1er juillet 1876 et qui expire le 1er
juillet prochain.
Le plan ci-joint, vérifié par les deux parties, donne la
situation actuelle des installations de la ligne de
Cirey dans la gare d'Avricourt, savoir :
Par une teinte vermillon, les voies appartenant
exclusivement à la société de Cirey;
Par une teinte verte, les installations qui servent au
trafic local de la gare d’Avricourt et au transbordement
des marchandises de la ligne de Cirey et dont la
compagnie d'intérêt local est propriétaire pour un
quart.
Le traité du 1er juillet 1876 devant expirer le 1er
juillet prochain, les deux compagnies se sont mises
d'accord pour le renouveler sur les mêmes bases, en
tenant compte de la modification consentie de part et
d'autre au cours de ce traité, concernant le surcroît de
délai pour la restitution des wagons envoyés sur la
ligne de Cirey ;
En conséquence :
Art. 1er - La compagnie de l’Est maintiendra le service
d'exploitation de la ligne de Cirey, tel qu'il est
organisé en ce moment.
Elle s'entendra avec la compagnie de Cirey pour
introduire dans ce service, conformément au cahier des
charges de cette société, les modifications qu'elle
jugerait utiles dans l'intérêt du trafic.
La compagnie de l'Est sera chargée, aux frais de la
société de Cirey, de toutes les dépenses d'entretien
courant, de grosses réparations, des terrassements,
ouvrages d'art et bâtiments, ainsi que les dépenses
d'entretien et de réfection des voies de la ligne de
Cirey, dépenses arrêtées conformément à l'usage établi
par le traité actuellement en vigueur, du 1er juillet
1876.
Art. 2. - En ce qui concerne la gare d'Avricourt, la
compagnie de Cirey n'aura à payer à la compagnie de
l'Est aucune redevance :
1° Pendant la durée de la concession de la compagnie de
l'Est, pour l'occupation des terrains sur lesquels sont
placées les voies et installations de la compagnie de
Cirey dans ladite gare d'Avricourt, ou sur lesquels des
installations nouvelles devraient être effectuées, en
raison des besoins du trafic de la ligne d'intérêt local
;
2° Pendant la durée du présent traité, pour l'usage qui
sera fait des autres parties de la gare pour les besoins
de l'exploitation de la ligne de Cirey.
La compagnie de Cirey aura à payer, pour l'usage de la
gare d'Avricourt :
1° La totalité des frais d'entretien et de grosses
réparations des installations, teintées en vermillon au
plan ci-annexé, à l'exception pourtant de la partie de
la voie principale de Cirey, comprise entre les
aiguilles 41 et 44, pour tenir compte de l'usure du
matériel des voies due aux manœuvres que la compagnie de
l'Est fera pour son propre service sur les voies de la
compagnie de Cirey ;
2° Le quart des frais d'entretien et de grosses
réparations des installations, teintées en vert sur le
plan ci-annexé, et qui servent au service local et au
transbordement des marchandises de la ligne de Cirey.
Les autres frais d'entretien de la gare d'Avricourt
demeurent à la charge exclttsiTe de la compagnie de
l'Est.
Si les deux compagnies reconnaissent l'utilité, pour les
besoins du trafic, d'augmenter ou de modifier, pendant
la durée du présent traité, les installations indiquées
en vert au plan ci-annexé, les dépenses qui seront
nécessitées par ces travaux seront partagées dans la
proportion de trois quarts pour la compagnie de l'Est et
d'un quart pour la compagnie de Cirey.
Art. 3. - La compagnie de Cirey fournira les machines
locomotives accompagnées de leur tenders, les voitures à
voyageurs et fourgons à freins, nécessaires à
l’exploitation de sa ligne.
Dans le cas où ces voitures ne seraient pas en nombre
suffisant, la compagnie de l’£st livrera, aux conditions
ci-après stipulées, le supplément de voitures et de
fourgons que réclamera le service.
En cas de besoin, la compagnie de l’Est prêtera aussi
des locomotives de secours à la compagnie de Cirey, à la
condition, bien entendu, que la voie sera en état de
supporter ces machines.
Art. 4. - La compagnie de l'Est voulant rester étrangère
aux chances de l’entreprise de la compagnie du chemin de
fer d’Avricourt à Cirey, ne prétendre à aucun bénéfice,
ni encourir aucune perte, mais tenant à s’assurer le
remboursement intégral de ses dépenses, il sera, à cet
effet, ouvert sur ses livres, à la ligne de Cirey, un
compte d’exploitation, d'entretien, de réparation de
toute sorte et de fourniture de matériel roulant.
Les dépenses de toute nature, spécialement afférentes à
la ligne de Cirey, seront portées au débit de ce compte.
Ces dépenses n'ayant pu être déterminées au préalable et
résumées sous forme d'un tarif d'exploitation, il est
entendu que la compagnie de l'Est les comptera de
manière à rentrer uniquement dans ses déboursés, en
s'interdisant tout bénéfice.
On entend par déboursés, non seulement les sommes
réellement payées pour l'exploitation, salaires,
matières et frais généraux, mais encore les redevances
ci-après stipulées pour la fourniture éventuelle ou
permanente, par la compagnie de l'Est du matériel
roulant.
Art. 5. - Si la compagnie de l'Est a à prêter à la
compagnie de Cirey des machines de secours, l'emploi de
chaque machine donnera lieu à une redevance de 0f,30 par
kilomètre, représentant l'intérêt et l'amortissement du
capital consacré à la construction de cette machine.
Les frais de conduite et d'entretien et les dépenses de
ces machines seront comptés comme les frais de conduites
et les dépenses des machines appartenant à la compagnie
de Cirey.
Art. 6. - La compagnie de l'Est fera faire dans ses
ateliers l'entretien et les réparations des machines,
tenders et voitures appartenant à la compagnie de Cirey.
Les dépenses faites pour cet objet comprendront :
1* Leur part de frais généraux ;
2° Une taxe kilométrique, décomptée à l'allée et au
retour, et calculée à raison de :
0f,04 par véhicule pour chaque voiture ou fourgon ;
0f,06 par tonne pour chaque machine envoyée en
réparation sur un atelier quelconque de la compagnie de
l'Est.
Ces dépenses seront portées au débit du compte «
Exploitation » de la ligne de Cirey.
Art. 7. - Seront également portées au débit du même
compte les redevances ci-après :
0f,04 par kilomètre, pour chaque voiture à voyageur
envoyée sur la ligne de Cirey;
0f,02 par kilomètre, pour chaque wagon à marchandises
français ;
0f,025 à 0f,03 par kilomètre, pour chaque wagon à
marchandises étranger, la compagnie de l’Est ne
demandant que le montant des redevances qu'elle paye
elle-même.
Les parcours de ces véhicules seront comptés tant à
plein qu'à vide.
Tout wagon envoyé par la compagnie de l’Est sur la ligne
de Cirey devra être restitué dans un délai de
soixante-douze heures, y compris le temps du voyage
aller et retour.
Ce délai sera réduit à quarante-huit heures pour les
wagons qui n'appartiendraient pas à la compagnie de
l’Est.
Dans le cas où les délais fixés par l’administration
supérieure pour l’enlèvement des marchandises
viendraient à être diminués, les délais ci-dessus
stipulés seraient réduits de la même quantité.
Ces délais seront augmentés de vingt-quatre heures si le
wagon est rendu chargé.
Ces délais courront à partir de l’heure de départ du
premier train qui emportera les wagons livrés à la
compagnie de Cirey.
Tout séjour des wagons, au delà des délais indiqués
ci-dessus, donnera lieu à une perception de 3 francs par
fraction indivisible de vingt-quatre heures.
Art. 8. - Le montant des dépenses mentionnées aux
articles précédents sera prélevé par la compagnie de
l'Est sur les recettes centralisées à cet effet dans sa
caisse.
La différence entre ces recettes et ces dépenses donnera
lieu à une bonification d'intérêts dont la compagnie de
l'Est tiendra compte à la compagnie de Cirey, au taux
annuel de 0f,75 p. 100.
En cas d'insuffisance de recettes pour couvrir le
montant du compte des frais d'exploitation, d'entretien
et de redevance du matériel roulant, la compagnie de
l’Est sera couverte de cette insuffisance par la
compagnie de Cirey, dans le délai d'un mois après la
remise des compte de chaque exercice.
Art. 9. - La compagnie de l'Est accorde à la compagnie
de Cirey la faculté d'établir ces tarifs au départ
d'Avricourt-frontière, et afin de tenir compte à la
compagnie de l’Est du parcours de 435 mètres, qui existe
entre la gare d'Avricourt et la partie française située
vers Deutsch-Avricourt, la compagnie de Cirey payera à
la compagnie de l'Est une redevance de 0f,10 par tonne
de marchandises allant de la ligne de Cirey en
Allemagne, et réciproquement.
Art. 10. - La compagnie de l'Est portera au crédit du
compte d'exploitation et d'entretien du chemin de fer de
Cirey la totalité des recettes effectuées surtout le
parcourt d'Avricourt à Cirey, sans y comprendre, dans
aucun cas, celles relatives à la manutention des
marchandises dans la gare d'Avricourt, ni les autres
recettes accessoires de cette gare, lesquelles
appartiendront en propre à la compagnie de l'Est,
qu'elles soient afférentes an parcours faits sur le
chemin de l'Est ou au parcours effectué sur le chemin de
Cirey.
Moyennant la perception de ces frais accessoires, la
compagnie de l'Est ne portera au compte « Exploitation »
de la ligne de Cirey aucune dépense pour le personnel de
l’exploitation, les frais de chauffage et d*éclairage de
la gare â Avricourt.
Art. 11. - La compagnie de Cirey déclare, à l'égard de
la constatation du chiffre des recettes effectuées, s’en
rapporter entièrement aux écritures tenues par la
compagnie de l’Est, conformément aux prescriptions de
l’administration supérieure, écritures dont la compagnie
de Cirey pourra faire prendre connaissance par ses
représentants.
Art. 12. - La compagnie de l'Est fera, tous les six
mois, le règlement provisoire des recettes et des
dépenses et mettra le solde de ce règlement à la
disposition de la compagnie de Cirey qui pourra, soit
retirer les fonds disponibles» soit les laisser dans la
caisse de la compagnie au taux mentionné en l’article 8.
Mais c'est seulement après l’apurement des comptes de
chaque exercice, que la compagnie arrêtera le solde
définitif, soit de la recette nette qu'elle aura à
verser à la compagnie de Cirey, soit du déficit qu'elle
aura à lui réclamer.
Art. 13. - Les dépenses d'entretien courant devront se
borner au strict nécessaire. Les dépenses pour les
modifications et les agrandissements que le
développement du trafic nécessitera dans les
installations des gares et stations de la ligne ne
pourront être entreprises qu'autant que l'utilité en
aura été reconnue par les délégués de la compagnie
concessionnaire. Il est entendu, d'ailleurs, que ces
modifications et agrandissements resteront entièrement à
la charge de la compagnie de Cirey.
Art. 14. - La durée du présent traité est fixée k dix
années qui prendront cours à partir du 1er juillet 1886.
Art. 15. - Les contestations qui pourraient survenir
entre les parties contractantes pour l'exécution des
clauses du présent traité seront jugées par trois
arbitres qui jugeront ensemble et au même titre, comme
amiables compositeurs, souverainement et sans appel, ni
réserve.
Les parties s'entendront pour la nomination de ces
arbitres, et, en cas de contestations, ils seront nommés
par le tribunal de commerce de la Seine.
Art. 16. - Les frais d'enregistrement du présent traité
seront à la charge de celles des parties qui y aura
donné lieu.
Art. 17. - La présente convention ne sera définitive
qu'après :
1° L'approbation de l'assemblée des actionnaires de la
compagnie de l'Est;
2° L'approbation du ministre des travaux publics.
Fait double à Paris, les 16 et 24 juin 1886.
Approuvé : Signé : de Boischevallier.
Approuvé : Signé : Gallois.
Approuvé : Signé : Mathis de Grandseille.
Approuvé par le conseil d'administration de la compagnie
du chemin de fer d'Avricourt à Blâmont et à Cirey, dans
sa séance du 16 janvier 1886.
Approuvé par le conseil d'administration de la compagnie
des chemins de fer de l'Est, dans sa séance du 24 juin
1886.
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