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Dictionnaire statistique du Département de la Meurthe
M. E GROSSE
Tome I - 1836 - Compléments
(voir l'article
original)
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SAINT-JEAN, autre ferme assez importante qui dépend de Blâmont, à 2 kil. à l'est.
Sa position, au sommet d'un coteau, est très-agréable et offre des points de vue délicieux. St.-Jean était autrefois un ermitage habité par deux religieux, sous le patronage du chapitre de la collégiale; il ne reste rien de cet antique manoir : toutes les constructions qu'on y remarque ont une date récente.
Des renseignements plus étendus nous permettent de rectifier l'article que nous avons consacré à la ville de
Blâmont. La nombre des électeurs censitaires, qui votent au collège politique, ou qui font partie du jury, s'élève maintenant à vingt-cinq, sans compter quatre électeurs adjoints. La forge située sur la Vezouze, ne possède qu'un marteau, et son feu consume à peine 2000 stères de bois (voyez St.-Maurice). L'hôpital, bâti en 1726, a été placé, en 1760, sous la direction des soeurs de la doctrine chrétienne, ou Vatelotines; mais le curé, M. Rollin, y fit placer les soeurs de St.-Charles, qui étaient chargées en même temps de l'école des jeunes filles : aujourd'hui la tâche de chacun de ces ordres est délimitée; les soeurs de St.-Charles desservent l'hôpital, et celles de la doctrine chrétienne, au nombre de quatre, dirigent les écoles (1). Depuis le 1er décembre 1836, l'octroi de la ville est en exercice, et ses revenus dépassent toutes les prévisions. Le collège compte cinq professeurs; on y enseigne les langues anciennes, l'anglais, l'italien, l'allemand, les humanités et les arts d'agrément; il est en voie de prospérité. Les audiences de la justice-de-paix se tiennent aussi à l'Hôtel-de-Ville, dans une salle particulière, et ce bel édifice, qui orne la ville, est un des monuments les plus remarquables du pays.
Quelques érudits ont voulu contester au capitaine Klopstein le titre de gouverneur de Blâmont, et le représentent comme un chef de partisans, qui longtemps caché dans les montagnes, serait venu précipitamment se jeter dans la forteresse pour la sauver, au nom des ducs de Lorraine; mais cette version, qui a son côté poétique et romanesque, ne saurait tenir devant les détails précis de l'histoire contemporaine. On connaît l'origine de la famille si honorable de Klopstein : on sait qu'abandonnant les confins de la Hesse et de la Thuringe, où il avait acquis renom et richesse, le capitaine KIopstein s'attacha au duc Charles III de Lorraine, que son fils Alexandre fit prévôt et gouverneur à perpétuité de Marsal; tandis que son frère Mathias, honoré de la confiance du prince, fut envoyé à Blâmont en qualité de gouverneur. François Klopstein, fils d'Alexandre, sauva les titres et les papiers du duc de Lorraine, et les lui remit fidèlement avec d'autres secours, malgré les français qui s'étaient emparés de Marsal. Il perdit ses biens, fut persécuté : il eut même à craindre pour sa vie, mais n'en resta pas moins dévoué à Charles IV, son souverain. C'est ainsi, comme l'affirment nos historiens, que cette famille se distingua toujours par son attachement inviolable et par d'éminents services rendus au prince et à la patrie.
Dans le tableau rapide que nous avons tracé de la situation présente de l'ancien château, il faut supprimer le mot encore, dans cette phrase : le voyageur aperçoit encore, et le mot mouvante, qui ne présente aucun sens; c'est la pâle et mourante lumière du soleil, aux heures du soir, qui jette une teinte si mélancolique sur les nobles débris d'une forteresse, dont le temps disperse chaque jour la vieille poussière.
En disant que l'industrie s'est mise à la place des plus nobles souvenirs, nous n'avons jamais eu la pensée d'humilier les prodiges du travail devant les restes éteints d'un manoir seigneurial : les bienfaits qui découlent de l'activité, de l'intelligence et de l'industrie humaine, ont le même prix que les belles actions guerrières consignées dans les pages de l'histoire. Donner au peuple les ressources qui lui manquent, occuper les bras de l'ouvrier, c'est bien mériter de la patrie, comme le capitaine qui défend le sol natal, et c'est acquérir une gloire plus pure que celle de l'antique aristocratie qui dort paisiblement sur les parchemins de ses aïeux, et qui compte ses aumônes. En conséquence, il n'appartient qu'à une critique., dont la calomnie est la pâture, de rencontrer un blâme dans nos paroles ; ce serait tout au plus un regret d'artiste; mais nous protestons contre la malveillance qui trouverait dans notre pensée un sentiment qui n'y fût jamais; il est naturel de conserver ses titres de gloire, mais quand on les transmet à des hommes tels que ceux qui possèdent le château de Blâmont, on peut les quitter sans peine, parce qu'ils reposent en des mains dignes de les acquérir.
La question que nous avons faite en demandant comment des enfants pouvaient se dessaisir de leurs titres, etc., n'exprime également qu'un regret, inspiré peut-être par un enthousiasme irréfléchi, mais dont la pensée ne fut jamais celle de l'injure ou du reproche. La famille de M. de Klopstein réunit assez de titres à la considération, à l'estime et à la reconnaissance du pays, pour abandonner, sans amertume, les pierres moussues dont la garde lui était inutile. Les services de ses ancêtres vivent dans les annales de la Lorraine; les siens propres ne sont pas oubliés des coeurs reconnaissants, et, d'ailleurs, en se retirant à Châtillon, vieux domaine de leurs aïeux, les descendants des braves Klopstein, veillent encore du haut de leur rocher sur les ruines de Blâmont : il n'ont besoin que d'un coup-d'oeil devant leurs fenêtres pour apercevoir les tours défendues par leurs pères, et pour juger si aucune injure ne leur est faite : ils reproduisent les vertus de leur famille, et c'est là le plus bel héritage à garder.
Le faubourg de Blâmont, aujourd'hui rue de Domèvre, se nommait aussi Giraumé, ou Giromeille : c'est que l'église paroissiale fut brûlée en 1636, et rebâtie en 1666. Dans le couvent des capucins on comptait sept religieux prêtres, et trois
frères lais. Les religieux eurent beaucoup de peine à s'établir à
Blâmont, mais à la fin du dernier siècle, leur communauté était nombreuse. L'abbé de Haute-Seille nommait à la cure, après le
concours, et l'évêque de St.-Diez obtint les revenus du chapitre collégial.
Parmi les hommes distingués que cette ville a vu naître, nous mentionnerons encore Alexandre d'Hangest, chanoine régulier, prêtre laborieux et instruit, qui fonda un pensionnat pour enseigner le latin aux jeunes gens, et dirigea le monastère des religieuses de Blâmont. Il s'acquit une grande réputation par son savoir et son zèle ; et, à sa mort, il ne trouva pas même une place au cimetière, parce qu'il était soupçonné de jansénisme : les capucins lui donnèrent la sépulture chez eux. Il est auteur de plusieurs ouvrages utiles, entr'autres, d'un Cours de leçons pour les études de
la jeunesse, d'un Manuel de la
piété chrétienne, et de l'Année du chrétien, en 8 vol. in-8°. Il a publié aussi l'esprit de B. P. Fourier. A. d'Hangest était né à Haguenau, mais la plus grande partie de sa vie s'écoula dans la ville de
Blâmont. François-Claude d'Hangest, son frère, mort en 1781, obtint une triste célébrité par son attachement au jansénisme : on lui ôta ses emplois et il mourut à Domèvre. On a de lui une oraison funèbre du P. Dom
Bexon, abbé de Domèvre. Thomas de Blâmont, évêque de Verdun, issu des comtes de cette ville; il est connu par un traité avec le roi Philippe-le-Bel, en 1304. Il fut regardé comme un pontife adroit, pénétrant, zélé pour les intérêts de son diocèse et pour ceux de l'église. Il mourut à Verdun, en 1305, et on voit son tombeau dans la chapelle St-Martin, à droite ; Lottinger, savant médecin, né en 1720; il était membre de plusieurs académies, et envoya un grand, nombre d'observations précieuses, sur les oiseaux, au célèbre naturaliste Buffon. Il mourut à Sarrebourg, en 1795, après avoir été rniire de cette ville. Lottinger, né en 1724, avocat à Nancy; il passa en Toscane et devint conseiller et intendant-général des postes, dans la Lombardie autrichienne; Rollin, curé de Blâmont, docteur en théologie, mort dans les premières années de ce siècle : sa charité et la supériorité de ses connaissances lui gagnèrent les coeurs et les esprits : il ne rencontra d'opposition que chez les sots qu'il bernait avec une causticité trop mordante. Ce fut un orateur véhément et un excellent catéchiste; M. Lahalle, médecin distingué, n'est point originaire de Blâmont, maïs d'un petit village des Vosges, nommé Ste.-Hélène. En rendant hommage à son mérite, nous n'avons prétendu parler que de la variété de ses connaissances, indépendamment de sa réputation d'habile praticien ; mais le mot sciences, au pluriel, est inutile dans la note que nous lui avons consacrée, et nous croyons qu'il est également superflu de constater son existence.
Ces adjonctions ne doivent point être imputées a l'auteur de l'article.
(1) Cet établissement a été cimenté par lettres patentes de Stanislas.
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SAINT-MAURICE, petit village situe sur la Blette, dans une vallée, à 13 kil. au N. E. de Baccarat, chef-lieu du canton, à 29 au S. E. de Lunéville, chef-lieu de l'arrond., et à 59 au s. E. de Nancy. Pop. : 275 ind.. 26 élect. comm., 10 cons. municip., 58 feux et 56 habitations. Terril. : 245 hect., dont 170 en labours, 51 en prés et 24 en bois. Mes. de Nancy ; les lettres viennent par Badonviller.
SI.-Maurice est une des localités les plus remarquables de la Meurthe par ses établissements industriels. On y voit une forge composée d'un feu d'affïnerie et d'un feu de martinet, d'un gros marteau et d'un martinet, qui consument environ 5,000 stères de bois : il y a également un moulin à grains. L'importance de l'usine de St.-Maurice; se mesure moins sur le nombre des produits, que sur la rareté de pareilles fabrications dans la contrée. En effet, le département de la Meurthe, qui occupe le cinquième rang dans l'ordre décroissant de la superficie forestière, comparée à la population, ne compte cependant que trois petits feux d'affinerie, St.-Maurlce, Abreschwiller et Blâmont; tandis que la Haute-Marne a 58 hauts fourneaux, 74 feux d'affinerie, avec 873 hectares de bois pour 1000 habitants : la Meuse a 28 hauts fourneaux, 37 feux d'affinerie, et 567 hectares de bois pour 1000 habitants : les Vosges, 8 hauts fourneaux, 51 feux d'affinerie, et 526 hectares, etc.; la Moselle, 11 hauts fourneaux, 44 feux d'affinerie, sur 309 hectares par 1000 habitants : le Haut-Rhin, 5 hauts fourneaux, 17 feux d'affinerie, sur 357 hectares de forêts, etc.; le Bas-Rhin, 3 hauts fourneaux, 11 feux d'affinerie, sur 278 hectares ; la Meurthe, au contraire, n'a pas un seul haut fourneau, et seulement 3 feux d'affinerie, avec 516 hectares de forêts pour 1 000 habitants. On voit combien nous sommes au-dessous de nos voisins, sous le rapport de l'industrie, au moins en ce qui regarde la fabrication et le commerce des fers. Nous devons ajouter, néanmoins, que les salines de Dieuze, les verreries, gobletteries, cristalleries et manufactures de glaces, qui couvrent le sol du département, offrent une masse de richesses et un foyer d'activité qui l'emportent sur les hauts fourneaux; ces établissements exigent aussi une consommation de combustibles, au moins égale à celle des fabriques de nos départements limitrophes (Voyez Salines, verrerie et article Cirey). : mais il n'en est pas moins vrai que l'industrie des fers a pris chez nos voisins un développement qu'elle n'a pas encore obtenue parmi nous, malgré nos ressources territoriales. Il est question de créer un haut fourneau à Chavigny, dans le voisinage de Nancy, mais il faudrait, qu'eu favorisant les propriétaires de ces belles manufactures, le gouvernement arrêtât l'avide spéculation des particuliers qui font tomber nos forêts sous le marteau destructeur et ne laisseront bientôt plus qu'une terre aride et dépouillée.
Quant au village de St.-Maurice, il a une origine qui remonte à trois siècles : les seigneurs de
Herbeviller-Lannoy y exerçaient quelques droits, ainsi que le duc de Lorraine; il était compris dans le bailliage de Lunéville, généralité et parlement de Nancy, avec les coutumes de la province. Pour le spirituel, le village était annexé à la paroisse de Ste.-Pôle, comme il l'est encore aujourd'hui. La forge y a été établie dans le dernier siècle, par un riche propriétaire, M.
Bathelot,
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