Notre-Dame de
France ou Histoire du culte de la Sainte Vierge en France
Par M. le Curé de Saint-Sulpice
1866
Le canton de Blamont compte
trois pèlerinages de Marie. Le premier est à Domjevin, près
d'une fontaine qui porte le nom de Notre-Dame-sous-la-Croix ou
la Bonne-Fontaine, et qui, depuis des siècles, attire de
nombreux pèlerins. De 1789 a 1803, à cette époque où l'impiété
triomphait presque partout, le bruit d'apparitions qu'y faisait,
disait-on, la sainte Vierge, y attira des pèlerinages et des
processions en plus grand nombre qu'aux meilleurs jours. La
révolution s'en émut; elle envoya vingt-cinq cavaliers en
garnison pour empêcher ces manifestations religieuses; les
pèlerins ne vinrent pas moins à la sainte fontaine. L'autorité
supérieure enjoignit de la remplir d'immondices; la municipalité
de Domjevin sut éluder cet ordre, en couvrant la fontaine de
planches chargées de fumier; et, les mauvais jours passés, elle
rendit à la foi des populations leur fontaine chérie.
Témoin de tant de piété, le curé de Blamont éleva, à côté de la
fontaine, une charmante chapelle sous le titre de Notre-Dame de
la Croix ou de la Bonne-Fontaine, et ce sanctuaire fut accueilli
avec tant de faveur par tout le pays, que plus de quatre mille
personnes assistèrent à sa bénédiction. Depuis lors, toutes les
fêtes de la sainte Vierge y attirent un concours extraordinaire.
La foule commence dès la veille au soir; toute la nuit et tout
le jour, on y voit des pèlerins en prières, et de récentes
guérisons justifient et accroissent, chaque jour, la dévotion
des peuples.
Dans le même canton, se trouvent deux autres pèlerinages : l'un
est Notre-Dame de Lorette à Saint-Martin, détruite en 93,
rebâtie depuis par les habitants, et aujourd'hui rendez-vous des
pèlerins, surtout des enfants après la première communion (1) ;
l'autre est Notre-Dame de Bon-Succès à Fricourt, autrefois
église d'un prieuré dépendant de l'abbaye de Senones, profanée
pendant la révolution, restaurée et rendue au culte depuis 1833;
accessible les vendredis et les quatre grandes fêtes de la
Vierge, fermée au public les autres jours, à moins d'une
autorisation spéciale du curé de la paroisse. Devenue propriété
particulière, elle subit la volonté du propriétaire.
[...]
L'arrondissement de Sarrebourg compte jusqu'à quinze églises
sous le patronage de Marie (2), et se glorifie en outre de
plusieurs sanctuaires qui sont ou ont été lieux de pèlerinage.
Le premier était Notre-Dame de Broudergarten, en français,
Jardin du frère, sous la garde d'un ermite, et ayant pour fête
patronale la Visitation. Le second était Notre-Dame des Ermites,
a Avricourt. En 1749, un homme allait périr sous le coup des
assassins, lorsqu'il fit voeu de bâtir cette chapelle. A peine
avait-il fait ce voeu, que les assassins se retirèrent, le
laissant pour mort. En exécution de sa promesse, il éleva cette
chapelle, et on y vint prier. Prise par l'État en 93 et
transformée en fabrique de salpêtre, elle fut vendue, en 1811, à
un homme de bien qui la fit restaurer et rendre au culte.
Notre-Dame des Ermites redevint ainsi l'objet de la vénération
générale.
(1) Statistique de la Meurthe, par Henri le Page, p. 512.
(2) Ce sont : Rhodes, Walscheid,
Schneckenbuch, Angviller, Riekenholtz, Tanconville, Raon-les-Bois,
Voyer, Turquestein, Wasperviller, métairies de Saint-Quirin,
Phalsbourg, les Trois-Maisons, Guntzviller et Arondange.
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