Cahier de
doléances - 1789 - Mignéville
Cahiers de
doléances des bailliages des généralités de Metz et de
Nancy pour les Etats généraux de 1789
Charles Etienne
Ed. 1907
Baillage de Vic
MIGNEVILLE
« Procès-verbal de l'assemblée municipale de la
communauté de Mignéville. »
« 21 mars 1789, sont comparus en l'auditoire de ce
lieu('), pardevant nous, Nicolas Laurent, syndic. »
Communauté composée de 40 feux.
Députés Xicolas Laurent, syndic,
Nicolas Jacque.
Signatures J. Tisserant, greffier ; J. Badenot ; J.-C.
Delubin ; Gabrielle Chrisman ; N. Laurent, syndic ;
Nicolas Jacque.
Cejourd'hui, vingt et un mars mil sept cent quatre-vingt- neuf,à Mignéville, bailliage de Vic;
En conséquence de la lettre du Roi pour la convocation
des États généraux le vingt-sept avril prochain, par
laquelle Louis Seize, notre gracieux souverain, déclare
être disposé à écouter les avis, plaintes et
remontrances des pasteurs du royaume et de tous ses
sujets, les curé et officiers municipaux dudit
Mignéville font les observations et demandes suivantes
ART. 1. - Que les Trois-Évêchés et le Clermontois soient
régis par les États provinciaux.
ART. 2. - Les Etats feraient la répartition et la
réception de tous impôts et les déverseraient
immédiatement dans les coffres du Roi.
ART. 3. - Il paraît du bien public qu'il n'y ait dans le
royaume qu'une coutume, qu'un poids, qu'une mesure et
qu'une aune
ART. 4. - Que tous les sujets du royaume, sans exception
quelconque, soient taxés au prorata de leurs
possessions, arts et industries.
ART. 5. - Non seulement les hommes, mais le bétail
souffrent beaucoup du prix excessif du sel : il
conviendrait de le rendre marchand, le tabac de même.
ART. 6. - Les banalités accablent le pauvre à qui le
meunier arrache le pain, parce que le pauvre n'a pas le
moyen de réclamer en justice.
ART. 7. - La multitude des usines, l'avarice et le
monopole des accapareurs de bois ont quadruplé le prix
de cette marchandise ; le peuple se trouve par là forcé
de piller les bois de commune et du Domaine ; il serait
avantageux de supprimer plusieurs faïenceries,
verreries, et que l'on ne vendît plus le bois qu'en
détail.
ART. 8. - L'État hérissé d'impôts qu'ils seraient
réduits en petit nombre [sic], en abolissant les noms de
subvention, capitation, ponts et chaussées, vingtième,
dixième, imposition accessoire, les sols pour livres,
les impôts sur les denrées de première nécessité ; que
les grains déchargés des droits de coupelles circulent
librement hors du royaume quand ils sont à bas prix, et
qu'ils soient retenus lorsqu'ils sont devenus chers.
ART. 9. - Qu'on fasse cesser les impôts sur le fer, les
cuirs, papiers, tabacs, toiles, fil, chanvre,
mousselines, laines, légumes, s'ils sont employés sans
luxe, comme chez les laboureurs, manoeuvres et artisans
et toutes personnes mal aisées dans leur état.
ART. 10. - Laisser la liberté, en cas de vente de
meubles et immeubles, d'employer tel notaire, huissier,
sergent qu'on voudra, pour faire cesser l'avidité des
huissiers-priseurs et autres qui portent leurs droits
plus haut que le prix des petites ventes, multiplient et
abrègent les séances quand ils voient beaucoup
d'acheteurs, vendent quand il n'y a plus que des
revendeurs avec qui ils s'entendent.
ART. 11. - Que les possesseurs de fiefs et droits
seigneuriaux ou semblables servitudes se renouvellent
tous les vingt décimateurs ecclésiastiques ou laïcs
envers les églises, presbytères et les pauvres, pour
lesquels il faudrait répandre des drogues contre leurs
maladies, surtout dans des lieux éloignés des médecins
et des chirurgiens ; qu'on évite surtout les évocations
aux tribunaux supérieurs, que les riches font afin
d'ôter les ressources des pauvres et des communautés.
ART. 12. - Point de lettres de cachet sans crime prouvé
; point de grandes charges héréditaires ; que tous les
bénéfices soient électifs ; point de pensions sans
raison valide ; que les grandes charges et les grands
emplois soient ôtés s'ils ne sont dignement occupés.
ART. 13. - Pour éteindre les dettes de l'État, qu'on
supprime les emplois sans utilité, qu'on aliène avec
droits de rachat les grandes fermes, bois et domaines
qu'on y emploie les bénéfices en commende, quelques
biens des religieux ; qu'on supprime les usines à feu
qui ne sont pas royales.
ART. 14. - Qu'on mette des impôts sur les denrées de
luxe ; qu'on charge surtout ce qui conduit à la
débauche, spectacles, bals, représentations, comédies ;
qu'on favorise en tout temps les plus pauvres, ceux qui
exercent des professions pénibles, nécessaires au bien
public.
ART. 15. - Qu'on empêche les troupeaux de brebis de
vain-pâturer dans les prés : [ce] sont des animaux qui
broutissent et arrachent la racine du foin.
ART. 16. - Cette communauté est chargée de droits
seigneuriaux qui accablent les habitants, tant en rentes
que corvées personnelles. 1° Nous payons annuellement à
M. Defaye, seigneur de ladite communauté, la somme de
cinquante livres, ce qui fait plus de vingt sols par
chaque habitant ; 2° chaque laboureur doit annuellement
audit seigneur un quarteron de seigle et avoine chaque
cinq jours de culture, outre quatre fois l'année qu'ils
vont à la charrue pour ledit seigneur ; de plus, ils
sont chargés, de même que tous autres habitants, de lui
faire des corvées personnelles une journée l'homme et la
femme pour les foins, et une pour la moisson des blés,
et l'on est chargé de plus aux corvées de l'entretien du
château, les laboureurs aux voitures ; chaque habitant
doit annuellement audit seigneur trois poules et le
guet, et la taille Saint-Remy, droits de feu, outre les
bêtes qui doivent encore audit seigneur.
Fait à Mignéville les an et jour susdits, où la
municipalité adresse ses voeux les plus sincères et les
plus ardents pour la conservation du seigneur Roi, et
pour la prospérité des trois Ordres de son royaume, et a
signé au nom de toute la communauté assemblée.
J. Tisserant ; J. Badenot ; J. C. Delabin ; Gabrielle
Chrisman ; N. Laurent, syndic ; Nicolas Jacque ; P.
Convoux, curé de Mignéville. |