Dictionnaire des
ordres religieux
R.P. Hélyot
Tome III - 1850 Remiremont (Chanoinesses séculières de) en Lorraine
[...]
Les dames de Remiremont ne peuvent pas disconvenir qu'elles
n'aient eu autrefois une règle, puisque, par un acte signé de
l'abbesse qui gouvernait ce monastère l'an 1231, de la doyenne,
de la trésorière et de tout le couvent de Remiremont, elles
déclarent qu' « attendu la désolation, les injures et les
oppressions qu'on leur faites de toutes parts, elles s'obligent, en
tant que leur permet leur règle, que si aucun duc, ou avoué leur
porte â l'avenir aucun dommage, injure on grief, il n'obtiendra
jamais pardon de leur église, qu'il n'ait restitué toutes les
prises qu'il aura faites sur elles ou sur leurs gens, on ne leur
ait assigné un fonds en dédommagement ; ce qu'elles promettent
par serment d'observer. »
Cette règle était celle de saint Benoît, puisque les souverains
pontifes et les empereurs, dans les privilèges qu'ils ont
accordés à cette maison, l'ont toujours reconnue comme étant de
l'ordre de Saint-Benoît.
[...] Mais ce qui prouve encore qu'elles ont été religieuses de
l'ordre de Saint-Benoît, c'est un acte passé le 25 novembre 1403
devant le grand portail du château du Dinevire, par lequel «
nobles demoiselles Waubrune de Blamont, âgée de quinze an plus,
et Jeanne sa soeur, âgée de quatorze ans au plus, hors de toute
tutelle et mainbournie, par plusieurs bonnes et raisonnables
causes, par bonne et pure dévotion, ont résolu de se retirer et
entrer en religion, et y vivre selon les règle et discipline de
saint Benoît au monastère des dames religieuses, abbesse et
chapitre de Remiremont, et en leur congrégation et compagnie, du
consentement du seigneur de Blamont, leur père, présent,
renonçant au profit de leurs autres frères et soeurs, à tous les
biens et héritages quelconques qui pourraient leur échoir, à la
réserve de quinze livrées de terre, de vingt gros par livrée,
pour chacune d'elles pendant leur vie ; ce qu'elles déclarent en
présence du seigneur de Blamont, leur père, de Thierri d'Augevillers,
abbé de Marmounster, Geoffroi, abbé de Saint-Sauveur de Vosge,
et autres. »
[...]
Ces redevances étaient autrefois considérables : car l'an 1403,
Jean de Blamont, chanoine de Toul, ayant été pourvu de l'office
de prévôt de l'abbaye de Remiremont par l'abbesse et les
religieuses, et n'étant pas en état de soutenir les frais et
dépenses à quoi cet office l'obligeait, Henri de Blamont, son
père, s'obligea, le 29 juillet de la même année, par acte passé
par-devant deux notaires apostoliques de la cour de Toul, de
payer et satisfaire à tous les droits dus à ce monastère par
ledit Jean de Blamont, son fils, tant qu'il exercerait l'office
de prévôt, savoir, aux dames tous les jours, depuis la
Purification de la Vierge jusqu'à la Saint-Martin suivant, un
bon muid de vin blanc, mesure ordinaire, ou vingt sols pour
chaque muid, s'il excédait cette somme, si mieux n'aimait payer
en deux payements, quatre cents bons florins d'or, moins quatre
ou dix sols toulois pour florin ; de plus, au jour de Noël un
boeuf gras et vingt sols toulois pour les offrandes de l'abbesse
; à la doyenne le même jour, un cochon et cinq sols; au jour de
la Circoncision, vingt quartes de vin et neuf distributions de
grands pains ; au jour de la Purification, un grand muid de vin
; le dimanche des Bures, trente quartes de vin avec du pain ; le
jeudi saint, demi-muid de vin avec des dragées, et cinquante
sols six deniers pour les pâtés, et le jour de Noël un muid de
vin pour la sauvagire, outre plusieurs distributions de vin, de
pain et d'argent à plusieurs officiers de l'église qui sont
spécifiés dans cet acte. Ce qui fait voir que ces offices
devaient avoir des revenus considérables, puisqu'ils étaient
chargés de si grosses redevances, et que les revenus des dames
étaient encore plus considérables. |