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Galère à perpétuité commuée en déportation - 1793


Gazette des tribunaux, et mémorial des corps administratifs et municipaux
1795

TRIBUNAL DE CASSATION
Jugement d'un Tribunal criminel, cassé, attendu qu'il prononce, qu'il n'y a pas lieu à délibérer sur une demande en commutation de peine.
Un jugement du tribunal du district de Blamont, du 21 mai 1791, condamne Adam, coupable d'un vol, à un bannissement de trois ans, hors du territoire de la république.
Infraction de ban ; autre vol nocturne, avec effraction, dans une église. Jugement du même tribunal, du août 1791, qui condamne Adam aux galères perpétuelles.
Appel au tribunal du district de Saint-Diez.
Jugement confirmatif.
La loi du 3 septembre 1792., autoriseront à provoquer l'anéantissement ou la modération de sa peine.
Il use de cette faculté.
Requête présentée au tribunal criminel du département de la Meurthe. Adam demande l'abolition de la peine prononcée contre lui; et en cas de difficulté, la commutation de cette peine en celle que détermine le code pénal, pour le délit dont il s'est rendu coupable.
Ce tribunal (jugement du 28 décembre 1792) déclare que la peine n'est point abolie. A l'égard de la commutation, considérant qu'Adam, lors du jugement du 20 août 1791, avoit déjà été repris de justice, attendu que la peine dont il demande l'abolition ou la commutation est celle des galères à perpétuité, et que la loi du 3 septembre n'admet pas la commutation de peine en faveur de ceux qui, ayant été repris de justice une première fois, ont été condamnés en récidive aux galères, ou à une prison perpétuelle, déclare qu'il n'y a pas lieu à délibérer.
Décision contraire à l'esprit et au texte de la loi du 3 septembre 1792. Cette infraction, le ministre de la justice la dénonce au tribunal de cassation. Voici l'analyse des observations du commissaire national.
L'objet de la loi du. 3 septembre 1792, le préambule l'atteste, est de faire participer les condamnés qui vivent encore, à l'adoucissement que le nouveau code apporte aux peines.
Le délit paroît-il excusable aux juges ? L'article 3 les autorise à remettre la peine infligée à celui qui réclame.
Les juges ne trouvent-ils pas le délit excusable ? Ils doivent (aux termes de l'art. 4) examiner si la peine prononcée est plus rigoureuse que celle qu'on eût prononcée, en exécution de la loi actuelle, et la réduire aux termes de la condamnation qu'eût entraîné la disposition de cette loi.
Article applicable à l'espèce. Quel délit a commis Adam ? Un vol nocturne, avec effraction, et dans un édifice public. La peine que le nouveau code pénal détermine pour ce délit est moindre que la peine prononcée par les tribunaux des districts de Blamont et de Saint-Diez. C'étoit donc le cas de commuer la peine.
L'art. 5 ajoute : la peine des fers, delà réclusion, de la gêne et de la détention, ne pouvant, en aucun cas, d'après le code pénal, être perpétuelle, la perpétuité des galères ou prisons, autrefois en usage, est, à compter de ce jour, anéantie pour tous ceux qui ont pu y être condamnés: en conséquence, les condamnés qui auront subi ces sortes de peines pendant un tems égal au plus long terme fixé par le code pénal pour les fers et la réclusion, seront de suite, sans qu'il soit besoin d'aucun jugement, rappelés des galères et mis en liberté, à moins qu'il ne s'agisse d'une récidive, dans le cas prévu par l'article premier du titre 2 du code pénal, dans lequel cas ils seront, aux termes de cet article, transférés, pour le reste de leur vie, au lieu fixé pour la déportation des malfaiteurs.
Cet article a, suivant toute apparence, été la base de la détermination des juges de la Meurthe. Mais il est sensible qu'ils l'ont mal entendu. Cette disposition n'exclut point du bénéfice de la commutation ceux qui sont coupables de récidive. A l'expiration du tems que le code pénal détermine pour la prison ou pour les galères, les condamnés, il est vrai, ne recouvrent pas leur liberté. Ils doivent subir la déportation. Ainsi, même dans ce cas, la perpétuité des galères n'a plus lieu.
L'art. 6 est encore précis : à l'égard de tous les autres condamnés aux galères ou aux prisons, soit perpétuelles, soit à tems, qui n'auront pas encore subi leur peine, pendant le temps fixé par leur jugement, ou pendant un temps égal au plus long-temps fixé par le code pénal. La peine, si elle est des galères, sera commuée en celle des fers, de la réclusion, ou de la gêne, selon qu'il est réglé par le code pénal, pour le délit qui aura donné lieu à la condamnation, et la peine de la prison en celle de la détention. Tout le temps pendant lequel ils auront subi la peine qui leur aura été infligée leur sera compté, de manière que si ce temps surpasse ou égale celui fixé par le code pénal, ils seront de suite mis en liberté; et s'il, lui est inférieur, ils ne subiront la peine substituée que pendant un tems nécessaire pour completter la durée fixée par le code pénal.
On ne pouvoit donc refuser à Adam la commutation qu'il sollicitoit. Aujourd'hui la peine des galères remplace provisoirement celle des fers. Mais du moins, aux termes de l'article 4, falloit-il abréger la durée de sa peine. La récidive n'autorisoit pas à proroger cette durée. Elle entraînoit seulement la déportation, autre genre de peine.
Le tribunal criminel de la Meurthe ne devoit donc pas déclarer qu'il n'y avoit pas lieu a délibérer. Sa décision porte donc atteinte à la disposition de la loi.
Le Tribunal, après avoir entendu le rapport de Depronnay, l'un de ses membres, et les conclusions du commissaire national.
Casse le jugement du tribunal criminel de la Meurthe du 28 décembre dernier, comme contraire à l'article 4 de la loi du 3 septembre précédent, ainsi conçu : Si les juges trouvent que le délit n'étoit pas excusable, ils examineront si la peine prononcée est plus rigoureuse que celle portée au code pénal actuellement en vigueur contre le même délit, et dans ce cas ils la réduiront à celle qu'auroit subi le coupable, s'il eût pu être jugé suivant les dispositions du code pénal; en conséquence renvoie Adam devant le tribunal criminel du département de la Meurthe... Impression... transcription sur les registres du même tribunal.
Jugement du 19 avril 1793, (v. s.)

 

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