Herbéviller -
Philippe Claude, curé
d'Herbéviller - XVIIIème
L'Ami de la
religion. v. 85
(1835)
La ville de Nancy a
perdu l'année dernière le doyen d'âge du clergé de tout
le diocèse, dans la personne de M. l'abbé Claude, curé
de Saint-Sébastien. M. Philippe Claude, né le 14 février
1743, était fils d'un honnête notaire de Longaville,
près de Bar-le-Duc. Appliqué à l'étude de très-bonne
heure, à quatorze ans il avoit terminé, avec succès, le
cours de ses classes de latin. Se sentant appelé de Dieu
à l'état ecclésiastique, il entra au séminaire de Toul,
où, après s'être distingué, comme élève, dans les
sciences théologiques, on le retint plusieurs années, en
qualité de répétiteur. Le 19 septembre 1767, il fut
ordonné prêtre par M. de Drouas, qui voulut bien
l'accorder à la demande de M. de Lignéville, seigneur d'Herbéviller,
lequel cherchoit pour ses deux fils, un précepteur sage
et intelligent. C'est à la fin de cette éducation, que
M. l'évêque de Strasbourg, sûr de son mérite, l'appela
en 1774 à la cure catholique de Sainte-Marie-aux- Mines.
Sans parler des embellissemens considérables qu'il fit
dans son église, les témoignages de satisfaction qu'il
reçut de son évêque, lorsqu'après six ans
d'administration il fut rappelé dans son diocèse,
prouvent avec quelle sagesse et quel zèle il avoit
gouverné la paroisse confiée à ses soins. Nommé par M de
Montauban, curé à Herbéviller en 1780, il commença par y
bâtir une église et un presbytère, qui sont une preuve
subsistante de son goût pour les arts et la décoration
des temples. Pendant douze ans qu'il fut dans cette
paroisse, il travailla à la vigne du Seigneur avec un
zèle vraiment apostolique, qui lui mérita, sans doute,
outre l'estime de ses paroissiens, la grâce de soutenir,
durant nos troubles, l'intégrité de sa foi, par dix ans
d'un pénible exil. La crise révolutionnaire étant
apaisée, M. Claude revint en France en 1802, et se
rendit directement à Herbéviller, où sa réception fut on
vrai triomphe. Une année ne s'étoit pas écoutée, que M.
d'Osmond l'appela dans sa ville épiscopale. Là il
dirigea, quatre mois seulement, la paroisse du faubourg
de Boudonville; puis, le 7 juin 1803, il fut nommé à la
succursale de Saint-Nicolas.
Il seroit difficile de dire tout le bien que le nouveau
curé fit, au milieu de ces temps mauvais, dans une
paroisse dénuée de tout, n'ayant dans son église ni pavé
ni plafond, manquant de linge et des choses les plus
indispensables au service des autels. Convaincu que
l'amour de Dieu est la source de toutes les bonnes
oeuvres, son premier soin fut de songer aux moyens de le
ranimer dans les coeurs. C'est dans ce but qu'il établit
plusieurs confréries, lesquelles réveillèrent en effet
la piété chez nombre de personnes, et avec elle, une
généreuse charité qui le mit à même de donner au culte
autant de majesté que possible. A l'aide des offrandes,
des quêtes et des dons pieux, il pava l'église, fit
construire un portail convenable, fournil la sacristie
de linge, d'ornemens, de vases sacrés et ne laissa
regretter qu'une tour nouvelle, dont déjà les plans
étoient faits, et les fonds destinés à sa construction à
peu près trouvés; mais une paroisse plus considérable
réclamoit alors les dernières ressources d'un zèle qui
ne finit qu'avec la vie. Quoique septuagénaire, on jugea
M. Claude très-propre à diriger la plus forte paroisse
de Nancy, et il fut installé curé de Saint-Sébastien le
17 juin 1813. Pendant vingt-deux ans qu'il y vécut
encore, il y renouvela ce qu'il avoit fait à
Saint-Nicolas; il réveilla la piété, embellit l'église,
la fournit d'ornemens, fit faire une belle sonnerie,
acheta, à ses propres frais, tous les vases sacrés, dont
il fit présent à la fabrique, ainsi que de plusieurs
autres objets utiles et précieux.
C'est après des jours si bien remplis, que ce digne
prêtre finit sa carrière le 22 septembre 1834, à l'âge
de quatre-vingt-douze ans. M. de Janson, pour lui donner
une marque de son estime, l'avoit admis au nombre de ses
chanoines; M. Jacquemin, évêque de Saint-Dié, avec
lequel il étoit lié d'une tendre amitié, lui avoit fait
le même honneur; mais s'il tenoit à l'estime de ses
supérieurs et de ses amis, les honneurs le touchoient
peu, et ce n'est qu'après sa mort qu'on sut, qu'en 1775,
il avoit été créé chevalier de l'Eperon-d'Or, et
autorisé à en porter la décoration.
Un caractère froid mais bon, une vie très-sobre sans
qu'elle le parût, des vues grandes, un esprit solide,
une régularité et une vertu qui ne se sont jamais
démenties; voilà ce qui a caractérisé un homme, qui a
laissé un grand vide dans une paroisse où sa mémoire
vivra long-temps après sa mort. |