RECUEIL DES
TRAVAUX DU COMITÉ CONSULTATIF D'HYGIÈNE PUBLIQUE DE FRANCE ET
DES ACTES OFFICIELS DE L'ADMINISTRATION SANITAIRE
Tome 27
Ed. Melun - 1897
Eaux potables
BLAMONT (MEURTHE-ET-MOSELLE)
: PROJET D'ADDUCTION D'EAU PRÉSENTÉ PAR LA COMMUNE .
M . JACQUOT rapporteur.
(5 avril 1897)
Malgré la situation privilégiée qu'elle occupe au pied
occidental de la chaîne des Vosges, la petite ville de Blâmont,
chef-lieu de canton de l'arrondissement de Lunéville, est assez
mal pourvue en eau potable. Elle ne possède en effet que celle
qui est amenée d'une petite source sise sur le territoire de
Repaix à 2 kilomètres vers le nord. En temps normal le débit de
cette source est de 135 litres à la minute; mais il tombe dans
les grandes sécheresses à 48 litres, ce qui réduit à 34 litres
par tète la quantité mise en distribution.
Autre inconvénient très grave, la source de Repaix prend
naissance à un niveau tellement bas qu'elle ne peut desservir le
quartier élevé de Blâmont. Il en résulte que l'alimentation se
fait en grande partie par de nombreux puits particuliers et par
quatre puits publics munis de pompes.
Le projet soumis au Comité, tout en maintenant l'adduction d'eau
de Repaix, a pour objet d'y ajouter celle d'une source très
puissante, dite du Val-des-fontaines, qui émerge à 5 kil. 500 de
Blâmont sous le talus de la route nationale de Paris à
Strasbourg. L'habitation la plus rapprochée est la ferme des
Sallières qui se trouve à 500 mètres de la source. D'après les
jaugeages effectués par les ingénieurs des ponts et chaussées
chargés du service hydraulique du département de
Meurthe-et-Moselle, cette source, dont le débit s'est élevé en
décembre 1892 à 850 litres à la minute, ne descend pas dans les
périodes de sécheresse au-dessous de 300 litres. En temps normal
on peut compter sur un débit de 600 litres et c'est ce volume
que le conseil municipal se propose d'amener en ville. Il
représente 420 litres par habitant et par jour, chiffre énorme
qui permettra aux ingénieurs d'assainir la ville en construisant
un réseau d'égouts pour l'évacuation des eaux pluviales et
ménagères.
L'adduction de l'eau de la source des Sallières à Blâmont n'est
pas sans présenter quelques difficultés à raison de la faible
différence de niveau d'un peu plus de 3 mètres seulement qui
existe entre le point où elle prend naissance et celui de la
partie la plus élevée de la ville. Pour les résoudre, les
ingénieurs chargés de dresser le projet ont dû adopter, pour le
tracé de la conduite d'amenée, une ligne d'égale pente ayant
seulement quatre dixièmes de millimètre d'inclinaison. Cette
ligne aboutit à un réservoir placé au point culminant de la
ville, à proximité de la gare du chemin de fer.
Le projet se recommande également par une particularité qu'il
convient de signaler. La source des Sallières est située sur le
territoire de la petite commune de Gogney qui ne compte que 200
habitants. Par suite d'un accord intervenu entre les deux
communes, Blâmont a pu acquérir la source à l'amiable et elle a
également obtenu l'adhésion des propriétaires de toutes les
parcelles de terrains à traverser et à occuper. En revanche, la
ville s'est engagée à conduire à Gogney dix litres d'eau à la
minute et à y construire une fontaine. On explique ainsi comment
le projet s'applique en réalité aux deux communes.
L'eau à dériver a été analysée en mars 1895 dans le laboratoire
du Comité. Le degré hydrométrique est de 22. Comme on devait s'y
attendre, eu égard à son gisement qui est à la base de l'étage
supérieur du muschelkalk, l'eau est fortement calcaire et elle
renferme même une proportion assez notable de sulfates de chaux,
0 gr. 046 par litre. On y trouve également 0 gr. 042 de
carbonate de magnésie; mais c'est la conséquence de la place
qu'occupe Blâmont en plein terrain triasique.
L'analyse bactériologique a décelé 387 germes au centimètre
cube. Enfin la recherche spéciale des espèces pathogènes ou
suspectes a donné des résultats négatifs.
Le projet se présente donc dans d'excellentes conditions. Il a
d'ailleurs été très favorablement accueilli tant par le conseil
d'hygiène de l'arrondissement de Lunéville que par celui, du
département de Meurthe-et-Moselle.
Nous estimons donc qu'il y a lieu, de déclarer qu'il ne s'oppose
pas â la dérivation de la source des Sallières pour
l'alimentation des communes de Blâmont et de Gogney, sous
réserve de ne pas introduire d'autre eau dans la conduite.
Conclusions approuvées par le Comité consultatif d'hygiène
publique de France, dans sa première section, le 5 avril 1897. |