3 janvier 1891 - n° 1
- p. 10
M. l'abbé Simonin.
Nous recommandons aux prières de nos lecteurs l'âme de M. l'abbé
Pierre-François SIMONIN, retiré du saint ministère et décédé
à Fontenoy-la-Joûte, le 29 décembre 1890.
M. l'abbé Simonin était né le 20 octobre 1805, ordonné prêtre le
30 décembre 1830, curé de Neufmaisons après l'ordination, d'Atton
le 15 février 1832, de Pannes, le 20 décembre 1835, de
Jezainville le 1er décembre 1850, de Harbouey, le 10 mars 1859,
retiré à Fontenoy-la-Joûte le 1er novembre 1881.
M. Simonin était membre de l'Association des prières pour les
prêtres défunts.
10 janvier 1891 - n°
2 - p.37
NÉCROLOGIE
M. l'abbé Berger.
Nous recommandons aux prières de nos lecteurs, l'âme de M.
l'abbé J.-C.
BERGER, décédé le 6 janvier à Damelevières.
Né en 1831, ordonné prêtre en 1856, M. Berger a été
successivement vicaire à Château-Salins, curé de Chazelles, de
Villey-le-Sec et de Damelevières où il vient de mourir.
M. Berger était membre de l'Association de prières.
L'abbé Simonin.
M. l'abbé
Pierre-François Simonin, dont nous avons annoncé la mort,
appartenait à une famille où la vertu était héréditaire et où le
sacerdoce devait être la récompense de la vertu. Son cousin, M.
l'abbé Fénal, décédé curé de Château-Salins, lui avait donné
l'exemple, il devait le suivre et plusieurs de ses parents l'ont
suivi après lui. L'abbé Simonin fut ordonné prêtre en 1830,
époque de trouble et de perturbation religieuse, mais qui fit
germer bien des vertus dans les âmes. Le jeune prêtre apporta
dans le ministère une foi vive, beaucoup de dévouement et
surtout une grande bonté de coeur qui le fit aimer de tous ceux
qui le connurent. Dans toutes les paroisses où il fut envoyé il
édifia les fidèles par sa piété, sa charité et son zèle.
Plusieurs de ses paroisses lui doivent la construction ou la
réparation de leur église. Il fit relever les murs de l'église
d'Atton, bâtit celle de Pannes, et grâce à lui Harbouey est fier
de sa tour qui domine le pays et porte bien haut la croix du
Sauveur.
Curé de Harbouey pendant plus de vingt-deux ans, l'abbé Simonin
s'appliqua surtout à faire fleurir la piété dans sa paroisse. La
Confrérie du Saint-Rosaire n'y était point établie ; il la fit
ériger canoniquement et il recueillit de cette association des
fruits bien consolants. Saint Joseph était aussi cher à son
coeur; chaque année, sa fête précédée d'une neuvaine se célébrait
avec solennité. C'était pour les hommes le grand jour de la
communion pascale.
Pieux et zélé, le curé de Harbouey était aussi très charitable.
Il aimait les pauvres et les malades, il les visitait souvent,
les consolait et trouvait les moyens de les secourir. Un
attachement sincère l'unissait à ses confrères voisins; tous
aimaient de se réunir dans son presbytère et d'entendre de sa
bouche cos récits d'autrefois, souvent fort longs, fort chargés
d'épisodes, mais toujours animés de saillies spirituelles et
piquantes.
A la fin de l'année 1881, éprouvé par la maladie, M. Simonin
quitta le saint ministère. Il avait été curé pendant plus d'un
demi-siècle. Il se retira dans sa famille à Fontenoy-la-Joûte.
C'est la que pendant neuf ans il n'a cessé d'édifier sa paroisse
natale. Tous les habitants se souviendront longtemps de ce grand
vieillard, courbé par l'âge, qui leur causait avec tant de
bienveillance, s'intéressait à leurs affaires, compatissait à
leurs peines et leur témoignait en tout une paternelle bonté.
Souvent il fut éprouvé par la maladie, mais il supporta
chrétiennement ses souffrances. La prière était sa consolation.
Il priait une grande partie du jour ; et la nuit, quand la
souffrance le privait du sommeil, il priait encore. Apprenait-il
la mort d'un ami ou d'une personne de la paroisse, aussitôt il
tâchait de gagner pour l'âme du défunt de nombreuses
indulgences, afin de la délivrer bien vite des flammes du
purgatoire.
Quelques semaines avant sa mort, apprenant qu'une statue de
Notre-Dame de Lourdes venait d'être placée à l'église, il
voulut, malgré ses souffrances, la voir et prier à ses pieds. II
était en larmes lorsqu'il se releva; il ne devait plus
reparaître à l'église que dans son cercueil.
Sa mort fut digne de sa vie; il reçut avec piété les sacrements
de l'Eglise et ne cessa de prier jusqu'à son dernier instant.
Ses obsèques ont eu lieu le mercredi, 31 décembre. Beaucoup de
prêtres et toute la paroisse y assistaient. Avant l'absoute, M.
le curé de Fontenoy a rappelé en termes émus les vertus du
regretté défunt, sa généreuse bonté, son insigne piété; il a
enfin invité les paroissiens à prier pour celui qui avait tant
prié pour eux.
li repose maintenant au milieu de ses ancêtres, dans la même
tombe que son ami l'abbé Michel, décédé en 1870, curé de la
paroisse. Puisse son âme obtenir bientôt, si elle ne la possède
déjà, la récompense promise au bon prêtre ! X ...
31 janvier 1891 - n°
3 - p. 87
Paroisse Saint-Joseph. (42e LISTE.)
Dons faits en faveur de l'église.
[...] M. L'abbé
Eloy curé doyen de Blâmont, 2e offrande, 10 fr. - [...] - M.
le curé de Domèvre-sur-Vezouze, 5 fr. -[...]
Pour la Chapelle des âmes du purgatoire: [...] - M. le curé d'Ancerviller,
2e offrande, 10 fr. 50. - [...]
31 janvier 1891 - n°
5 - p. 113
Paroisse Saint-Joseph. (43° LISTE.)
Dons faits en faveur de l'église.
Anonyme de Blâmont, 0 fr 50- Anonyme d'Harbouey, 1 fr. - [...]
.- oeuvre des pierres : Somme recueillie par Mlle Gèrardin, d'Ancerviller,
65 fr. - [...] Pour la Chapelle des âmes du purgatoire : [...]
Mlle Marie Dufrères, d'Autrepierre, 6 fr. [...]
21 février 1891 - n°
8 - p. 156
M. Gérard, curé à Diarville.
Nous recommandons aux prières de lecteurs, l'âme de M. l'abbé
Ch.-V. Gérard, pieusement décédé le 18 février 1891.
Né en 1826 Gérard a été ordonné en 1850. Il a été successivement
vicaire à la cathédrale de Toul, curé de Pexonne et de Diarville
depuis 1861.
M. Girard est mort le 18 février à 1 heure du matin.
Sa Grandeur lui avait envoyé sa bénédiction. Il la reçut avec
reconnaissance et il aimait à répéter : « Qu'il fait bon mourir
avec la bénédiction de son évêque ! » M. Gérard était un bon et
édifiant curé. Il laisse des regrets unanimes.
Pendant sa maladie, ses paroissiens l'ont entouré des soins les
plus affectueux et les plus dévoués. Ils lui ont fait de
magnifiques funérailles.
M. Gérard était membres de l'association de l'association de
prières.
28 février 1891 - n°
9 - p. 177
Paroisse Saint-Joseph. (46e LISTE.)
Dons faits en faveur de l'église.
[...] Mlle Elise L'Hôte de Nonhigny, 5 fr. - [...]
14 mars 1891 - n° 11
- p. 217
M l'abbé Gérard.
On nous écrit du canton de Haroué :
Vous avez annoncé dans le numéro du 21 février de la Semaine, la
perte que le diocèse de Nancy a faite dans la personne de M.
l'abbé Gérard, décédé curé de Diarville.
M. l'abbé
Charles-Victor Gérard était né à Domjevin, le 24 mars 1826,
d'une famille honorable et chrétienne qui a toujours compté et
qui compte encore aujourd'hui d'excellents prêtres parmi ses
membres.
Ceux qui ont connu Victor Gérard comme élève, soit du Séminaire
de Pont-à-Mousson, soit du Séminaire de Nancy, ont encore
présent à la mémoire ce jeune homme dont l'abord était toujours
affable, le regard toujours sympathique. Il était d'une
régularité exemplaire, mais il était régulier sans raideur. Chez
lui, la simplicité, l'enjouement, la dignité s'harmonisaient
sans effort et sans étude. La finesse des traits décelait une
nature délicate, une esprit délié, une rare noblesse de
sentiments et de caractère.
A ce printemps de la vie, le jeune Gérard inspirait l'affection
et le respect. Les plus jeunes se sentaient attirés vers ce
condisciple dont la sagesse aimable devançait les années. Tous
les élèves de son cours étaient et sont restés pour lui des
frères, et lui est resté un frère pour tous.
Les survivants que la mort a épargnés sont unanimes dans
l'expression de la douleur qu'ils ressentent de cette mort. « Le
bon abbé Gérard, écrivait naguère un de ses condisciples,
archiprêtre dans le pays annexé, le bon abbé Gérard a toujours
été un modèle. Au lieu de prier pour lui, je suis tenté de
l'invoquer. »
Elève modèle, l'abbé Gérard, une fois revêtu du caractère
sacerdotal, se montra bon et édifiant confrère. Partout et
toujours il fut le prêtre pieux, prudent, modeste, uniquement
préoccupé du salut des âmes.
Là où il passa, à Toul, à Pexonne, à Diarville, il laissa une
mémoire embaumée des plus suaves souvenirs.
Sous un extérieur en apparence froid, l'abbé Gérard cachait une
étonnante sensibilité. Il était très affectueux. Son plus grand
bonheur était de rendre service à ses confrères. Et que de fois
il céda à ce besoin de sa nature à cet attrait de son coeur, au
détriment de sa santé !
Il n'a jamais parlé que d'une façon élogieuse de tous les
collaborateurs qu'il avait rencontrés dans le cours de son long
ministère.
Il aimait de faire revivre dans ses conversations si
intéressantes un passé dont il ne reste plus que de rares
témoins. La mémoire de son coeur plaçait sans cesse sur ses
lèvres les noms de ceux qui furent ses maîtres, ses conseils,
ses auxiliaires.
Toutefois, l'abbé Gérard n'était pas seulement un laudator
temporis acti. Il reportait généreusement sur les confrères qui
venaient remplir autour de lui les vides faits par la mort,
l'affectueux intérêt dont il avait été l'objet de la part de ses
aînés.
Avec de telles dispositions d'esprit et de coeur, le ministère de
M. l'abbé Gérard, dans cette paroisse de Diarville, qu'il
dirigea pendant 30 ans, devait marquer sa trace.
Laissant aux individus la discussion des intérêts ou des
questions qu'il n'était pas chargé de défendre ou de dirimer, il
se concentra dans les fonctions, dans les devoirs du ministère
paroissial.
Il aimait l'étude. Disons plus, l'étude était pour lui un
charme, un besoin. Les travaux des conférences et surtout la
méditation de ses instructions pastorales, se partageaient la
plus grande partie du temps que lui laissaient libre les
fonctions de son ministère.
On peut deviner par là, combien solides devaient être des
instructions ainsi étudiées et réfléchies.
C'était la solide base d'une solide piété.
Aussi la paroisse de Diarville a-t-elle conservé cette foi
éclairée qui la préservera des dangers de l'indifférentisme si
commun de nos jours.
Un autre caractère du ministère de M. Gérard était la
conciliation. Il la voulait, il la poursuivait partout. Sa bonne
intention en ce sens était telle qu'il ne s'effrayait pas de ce
qui était inconciliable.
Souvent ses efforts furent couronnés de succès.
Il eut la consolation de pouvoir dire à l'approche de sa
dernière heure : Je ne me connais pas un seul ennemi !
L'abbé Gérard allait atteindre sa soixante-sixième année quand
sonna l'heure de l'appel de Dieu.
La délicatesse de son tempérament inspirait souvent de réelles
inquiétudes à ceux qui le connaissaient. Mais son énergie
semblait vouloir dompter le mal.
Un voyage inspiré par l'intérêt qu'il portait à de jeunes
orphelines élevées dans le Pensionnat des Soeurs de la Foi, et
entrepris dans les conditions les plus fâcheuses fut la vraie
cause de sa mort.
Il se mit au lit, le 10 février, au sortir de la messe des
quarante heures.
Dès qu'il se sentit frappé, il exprima le désir d'avoir des
religieuses pour infirmières à l'exclusion de toute autre
personne. Il voulait entendre autour de lui la voix de la
prière. « Je veux qu'on dise des prières autour de moi »
disait-il. Et jusqu'au dernier jour, son chapelet à la main, il
répondait aux. Ave Maria du Rosaire de saint Dominique ou du
Rosaire de Notre Dame des Sept-Douleurs, que récitaient les
religieuses commises à sa garde.
Les Soeurs de la Compassion eurent ainsi l'honneur d'entourer de
leurs soins un des derniers survivants de la pléïade d'amis qui
entouraient jadis leur regretté Fondateur.
Mais, la maladie du bon curé était dangereuse.
Instruit de la gravité de son état, la malade accueillit de
grand coeur l'offre qui lui fut faite des derniers sacrements.
Lui-même fixa l'heure de la cérémonie.
Sa dernière confession faite, il passa le temps de la sainte
messe en une fervente préparation à la réception du
Saint-Viatique et de l'Extrême-Onction.
En pleine possession de lui-même, il indiquait les dispositions
à prendre pour permettre l'entrée de l'appartement au plus grand
nombre possible de fidèles.
« Que Dieu est bon ! »répétait-il souvent!
Il récitait avec une ardeur de foi incomparable les prières à la
sainte Vierge, à saint Joseph qu'il avait coutume de réciter
chaque jour avant la célébration de la sainte messe.
Les habitants de Diarville, accueillirent avec une douloureuse
anxiété l'annonce du danger, qui menaçait cette vie qui leur
était si chère. Et quand le célébrant. la Sainte-Eucharistie
entre les mains, quitta l'autel pour se diriger vers le
presbytère l'assistance tout entière voulut escorter N.-S. J.-C.
La chambre était plus que remplie par les hommes. La salle
servant d'antichambre, l'escalier, le porche étaient occupés par
une foule pressée.
A la vue de son Dieu qui venait le visiter, le malade se mit sur
son séant, joignit les mains, prononça à haute voix les paroles
les plus propres à exprimer sa foi, son espérance et son amour
pour Jésus-Christ.
« Adoro te, supplex, latens Deitas,
« Quae sub his figuris verè latitas !
...
« Fac me tibi semper magis credere
« In te spem habere, te diligere !
Et en prononçant ces magnifiques strophes, il ne détachait pas
son regard de l'autel improvisé sur lequel reposait le Dieu de
l'Eucharistie.
Puis invité à témoigner de sa charité envers son prochain,
envers ses enfants spirituels, surtout à pardonner à ceux qui
avaient pu lui faire de la peine, il éleva les mains vers le
ciel, et avec une voix qui semblait sortir de son coeur : « Oh !
oui, dit-il, je les aime bien tous. Dites-leur que j'accepte la
mort pour eux. Je fais le sacrifice de ma vie pour mes
paroissiens ! Je pardonne à tous ceux qui ont pu me faire de la
peine. Je leur ai toujours pardonné. » (A suivre).
21 mars 1891 -n° 12
- p. 228
Paroisse Saint-Joseph.
Dons faits en faveur de l'église. (49° LISTE.)
[...] Pour la Chapelle des âmes du purgatoire. - [...] M.
Breton, de Blâmont, 2 fr.
21 mars 1891 -n° 12
- p. 231
NÉCROLOGIE.
M. l'abbé Gérard.
(Suite.)
Puis après un instant de silence, il fit signe qu'il avait
encore quelque chose à dire... Et d'une voix affaiblie, mais
pénétrante : a J'ai toujours cru, ajouta-t-il, que « ceux qui me
faisaient de la peine, n'y pensaient pas ! «
Il récita ensuite le Confiteor avec cette vive piété qui nous
édifiait quand nous avions le bonheur d'assister à la messe.
Qui pourrait dire les sentiments intérieurs qu'il éprouva
lorsque son fils dans le sacerdoce, déposant sur ses lèvres le
pain de vie, prononça ces paroles de la liturgie : « Accipe,
frater, viaticum corporis Domini nostri Jesu-Christi, qui te
custodiat ab haste maligno et perducat in vitam aeternam. Amen !
»
Après la communion, on le vit se recueillir en Dieu, et dans ce
recueillement ineffable on l'entendit réciter la belle prière :
« Ame de Jésus-Christ, sanctifiez-moi ! Corps de Jésus-Christ,
sauvez-moi ... etc ... etc... »
Tout priait en lui. L'assistance le dévorait des yeux.
Il reçut ensuite l'extrême-onction avec la même foi qu'il avait
reçu le saint viatique.
Le malade répondait aux prières de l'Église, présentait ses
mains, les diverses parties du corps qui devaient recevoir
l'onction sainte avec un empressement pieux aussi instructif
qu'émouvant.
Quand la dernière prière fut terminée, le malade tendit ses deux
mains vers le confrère qui lui avait apporté les secours et les
consolations de la religion : « Merci, oh ! merci, lui dit-il.
Que vous avez été un bon ami ! Comment pourrai-je vous rendre
cela ?
« - Vous prierez pour moi, Monsieur le curé, quand vous serez
près de Dieu.
« Vous prierez pour vos paroissiens afin qu'ils restent fidèles
à vos enseignements et qu'ils soient toujours bons chrétiens.
« Maintenant, vous allez nous donner à tous votre bénédiction. »
Tous les assistants tombèrent à genoux.
« Je recommande instamment, dit-il, qu'on ne néglige pas
l'instruction religieuse des enfants. Qu'on soit exact à leur
faire étudier le catéchisme. »
Puis il bénit l'assemblée.
Cette cérémonie fut suivie d'une scène inoubliable.
Les hommes qui remplissaient la chambre vinrent l'un après
l'autre serrer la main du bon curé qu'ils voyaient pour la
dernière fois. C'était l'Adieu pour l'Éternité. Chacun d'eux eut
une parole affectueuse, une parole de curé et d'ami quittant la
terre et donnant le rendez-vous au ciel.
L'émotion était grande. Les larmes seules répondaient.
Après les pères de famille et les jeunes gens, ce fut le tour
des mères, des jeunes filles, des enfants. Chacun vint
s'agenouiller au pied du lit et demander la bénédiction du
bien-aimé pasteur.
Tous les enfants, petits garçons et petites filles furent aussi
admis. Chacun d'eux eut sa bénédiction spéciale.
Le cher malade était sourd à tous les conseils de l'amitié qui
tremblait des suites d'un effort si longtemps soutenu. Il ne
s'appartenait plus. Il semblait redire et il redisait en effet
L'Omnibus debitor sum de saint Paul.
Personne ne pouvait croire qu'il fût si près de sa fin. Lui seul
n'attendait pas de guérison et il ne songeait qu'à mettre à
profit le temps que Dieu semblait vouloir lui accorder encore.
Il attendait la mort comme le soldat attend l'ordre du départ.
Il parlait de ce voyage avec la tranquillité d'un enfant qui
retourne au sein de la famille, ou d'un ami qui va se retrouver
au milieu des amis dont il a été si longtemps séparé.
Un jour, le soleil qui s'était tenu caché laissa tout à coup
pénétrer un rayon dans sa chambre.
« Oh ! le beau soleil ! je ne le verrai plus ! C'est fini, ma
bonne soeur, je le sens bien, disait-il à la soeur infirmière. Je
ne verrai plus votre chapelle où j'ai passé de si bons moments.
J'aimais tant d'aller prier là Notre-Dame-des-Sept-Douleur ! Je
ne verrai plus les belles fêtes de la Compassion.
« Mais que la volonté de Dieu soit faite, ajoutait il ensuite !
J'ai l'espoir de voir bientôt la sainte Vierge. Je la prierai
pour vous. Je verrai le bon Père Thiriet. Et nous causerons
ensemble de ses enfants qui m'auront si bien soigné ! »
Parfois la crainte du Purgatoire envahissait son âme. « Je
crains le Purgatoire ! Mais la sainte Vierge et saint Joseph ne
m'y laisseront peut-être pas longtemps ! »
Sa résignation dans les douleurs qu'il endura pendant sa maladie
fut telle qu'on ne l'entendit pas proférer la plus petite
plainte. Et cependant qui ne sait combien sont pleines
d'angoisses et de malaise les nuits des malades. On le mettait
toujours trop bien... On avait trop soin de lui... Il n'était
pas habitué d'être choyé comme cela ! ...
Le souvenir de Notre-Seigneur Jésus-Christ opérait ce prodige de
résignation. Quand sous l'empire de la fièvre, ou par l'effet de
cette inquiétude qui est comme un avant-coureur de la mort, il
voulait descendre de son lit : « Notre-Seigneur n'est cependant
pas descendu de sa croix ! Monsieur le curé lui disait
doucement la soeur. Et aussitôt le pieux malade reprenait son
immobilité.
Ce sentiment d'abnégation parut surtout quand il fut question de
mettre sans retard ordre à ses affaires temporelles. C'était le
lundi 16 février au matin. Un de ses confrères présents lui
proposa de nouveau d'appeler le notaire dans la soirée.
« - Non, demain, » fut toute la réponse.
« - Non, pas demain, répliqua son parent et ami, M. l'abbé
Dufour. Tout de suite !
« Eh bien, ce sera comme vous voudrez, reprit en souriant M.
Gérard. »
Ce lendemain sur lequel il comptait fut précisément le jour de
cette longue agonie.
Il conserva jusqu'à la fin la plénitude de son intelligence.
Quelle moisson de mérites ne dut-il pas recueillir ? Il ne se
lassait pas de prononcer le saint nom de Jésus. Et quatre heures
avant de rendre le dernier soupir il suivait le chapelet de
Notre-Dame-des-Sept-Douleurs, récité par les religieuses et les
prêtres qui étaient réunis autour de lui.
Une consolation bien douce fut accordée au cher malade en cette
dernière soirée. Mgr l'Evêque de Nancy prévenu du danger,
s'empressa d'envoyer par télégramme sa bénédiction la plus
paternelle à son très aimé et très estimé prêtre :
« Nancy, 17 février, 6 heures soir.
« Envoie de tout mon coeur meilleures bénédictions à excellent
curé. Suis profondément attristé. Prie pour lui.
« Evêque de Nancy.
Quand lecture lui fut donnée de ce télégramme, le mourant prit
entre ses mains le crucifix qu'il baisa; et, avec un sentiment
inexprimable d'attendrissement et de reconnaissance il traça sur
lui le signe de la croix.
Il chargea un de ses amis qui étaient présents de remercier
Monseigneur de sa paternelle et affectueuse attention. Et il
témoignait de son contentement en redisant ces paroles
prononcées en 1879, dans une circonstance analogue, par le pieux
abbé Noël, premier curé et fondateur de la paroisse Saint-Léon :
« Il fait bon mourir avec la bénédiction de son Evêque ! ».
A 1 heure du matin, tout était fini. Le bon serviteur avait
remis sa belle âme entre les mains de son Dieu qui nous fait
dire : « Apud Dominum misericordia et copiosa apud eam Redemptio.
»
Les funérailles, célébrées le vendredi 20, furent dignes du
défunt, dignes de la chrétienne population de Diar ville. Ce fut
un triomphe.
Soixante et un prêtres se trouvèrent réunis pour rendre les
derniers honneurs à ce confrère regretté et vénéré entre tous.
Trente messes furent célébrées soit avant, soit pendant la
cérémonie pour le repos de son âme.
Dans un de ses épanchements intimes le défunt avait dit à un des
confrères : « Ce qui me rassure, c'est qu'on priera pour moi ! »
Il avait dit vrai. Mais sa modestie ne lui faisait pas
pressentir un tel empressement.
Nous l'avons dit: ce fut un triomphe. Si la vieille croix du
pont n'avait pas été voilée d'un crêpe, si l'arc de triomphe sur
lequel un sentiment exquis d'affectueuse reconnaissance avait
placé cette inscription : A notre bon Père, si cet arc de
triomphe n'avait pas été revêtu de tentures de deuil, on se fût
fait volontiers illusion. Par un soleil radieux, à la suite de
ces bannières étincelantes précédant les longues files des
congréganistes vêtues de blanc et les rangs pressés de la belle
et majestueuse congrégation des hommes, on aurait cru volontiers
que ce splendide cortège conduisait un saint jusque dans les
célestes demeures.
Le clergé en habit de choeur précédait immédiatement le corps
auquel la compagnie des pompiers rendait les honneurs
militaires.
Le deuil était conduit par M. l'abbé Dufour, curé de
Saint-Pierre de Nancy, accompagné du frère et des neveux du
défunt.
Venaient ensuite les membres du conseil municipal et du conseil
de fabrique, les nombreux amis, les habitants de Diarville et
des paroisses voisines qui n'avaient pas leur place assignée
dans le cortège.
Le Saint-Sacrifice terminé, M. le doyen de Haroué prononça
l'éloge funèbre. Mais comme l'orateur l'observa, quel éloge la
langue humaine pouvait-elle prononcer qui fût plus éloquent que
cette église incapable, malgré ses dimensions, de contenir la
foule des pieux fidèles réunis pour la circonstance ? Qui fut
plus éloquent que ces larmes dont tous les yeux étaient remplis
... ?
Sa Grandeur Monseigneur l'Évêque de Nancy avait voulu elle-même
devancer cet éloge : elle avait écrit dès le 1er février :
« J'apprends avec une vraie douleur la mort de l'excellent curé
de Diarville. Je l'aimais et je l'estimais beaucoup.
« J'appréciais son esprit vraiment sacerdotal, sa foi vive, son
zèle plein de prudence, son affection pour ses confrères, son
respect pour ses supérieurs et la droiture très remarquable de
son jugement.
« C'est une grande perte pour ses confrères, pour sa paroisse et
son Evêque.
« Je vais célébrer pour ce cher défunt le saint sacrifice de la
messe, et je prierai de grand coeur pour lui.
« Je suis heureux que ma bénédiction lui soit arrivée en temps
opportun et qu'elle lui ait été une consolation. Ce que vous me
dites des regrets de ses paroissiens me touche vivement. Ce sont
les bons pasteurs qui font les bons peuples.
« Je désirerais que sa paroisse de Diarville pût savoir et
l'estime et l'affection que j'avais pour cet excellent' curé, et
combien je suis consolé par la démonstration si filiale, si
chrétienne et si émouvante que vient de faire cette bonne
paroisse.
« Je serai avec vous, avec la paroisse et avec vos confrères par
la pensée, par le coeur et par mes prières le jour des
funérailles. »
Ces honneurs, ces éloges décernés à ce saint prêtre après sa
mort ne peuvent être qu'un écho de l'éloge qu'il a reçu de la
bouche du Seigneur, et un pâle reflet des honneurs réservés par
le ciel au on et fidèle serviteur : Euge, bone serve et fidelis,
intra et gaudium Domini tui.
28 mars 1891 - n° 13
- p. 249
NECROLOGIE
M. Pinoit
Nous recommandons aux prières de nos lecteurs l'âme de M.
l'abbé P.-A.
PINOIT, décédé curé de Guébling le 7 mars.
Né à Blâmont en 1821, ordonné en 1848, M. Pinoit a été
successivement vicaire à Malzéville, à Foug, curé à lay-Saint-Remy
et Guébling.
M. Pinoit était membre de l'Association de prières.
4 avril 1891 - n° 14
- p. 264
DIOCESE.
ACTES OFFICIELS.
Itinéraire pour la tournée de Confirmation dans l'arrondissement
de Lunéville,
1891 [...]
Lundi, 20 avril à BÉNAMÉNIL. - Bénaménil, Domjevin, Manonviller,
Laneuveville-aux-Bois, Ogéviller.
[...]
Jeudi, 30 - à XOUSSE. - Emberménil, Leintrey, Vaucourt, Xousse.
Vendredi, 1er mai, à BLEMEREY. - Blémerey, Herbéviller,
Saint-Martin, Vého.
Samedi, 2 - à AMENONCOURT. - Amenoncourt, Autrepierre, Chazelles,
Repaix.
[...]
Mercredi, 6 - à BARBAS. - Ancerviller, Barbas, Frémonville,
Harbouey, Nonhigny.
Jeudi, 7 (Ascens.) à BLAMONT. - Blâmont, Domêvre-sur-Vezouze,
Gogney, Verdenal.
Vendredi, 8 - à SAINTE- PÔLE, - Merviller, Mignéville, Reherrey,
Sainte-Pôle, Vacqueville.
18 avril 1891 - n° 16 - 305
Paroisse Saint-Joseph.
Dons faits en faveur de l'église. (53° LISTE.)
Par M. le curé d'Ogéviller, 12 fr. [...]
9 mai 1891
DIOCESE.
ACTES OFFICIELS.
La prétendue visionnaire de Loigny.
Ordonnance de Mgr l'Evêque de Nancy et de Tout; approuvée et
confirmée par Notre Très Saint-Père le Pape.
Attendu que plusieurs fois, dans les réunions des retraites
ecclésiastiques, nous avons fait connaitre au clergé de notre
diocèse les décrets de la S. Congrégation de l'Index. et le
décret de la S. Congrégation de l'Inquisition contre Mathilde
Marchat de Loigny et ses adeptes, et les Annales ou brochures
publiées en leur faveur, et en particulier le décret de la S.
Congrégation de l'Inquisition du 11 juin 1890, qui donne à Mgr
l'Evêque de Chartres, au nom du Saint-Siège, la mission «
d'interdire sous peine de suspense à tout prêtre soit de son
diocèse, soit de diocèse étranger: 1° d'accéder à la maison des
Soeurs de la prétendue Congrégation, tant qu'elles n'auront pas
obéi aux décisions portées, et que la communauté n'aura pas été
dissoute; - 2° d'admettre aux sacrements les Soeurs elles-mêmes;
- 3° d'entretenir des rapports quelconques, soit personnels,
soit même par lettre, avec ces mêmes soeurs »; - et une autre
lettre de Son Eminence le cardinal Monaco, Préfet de la S.
Congrégation de l'Inquisition, à Mgr l'Evèque de Chartres, du 12
août 1890 et ainsi conçue:
« Les décrets et actes du Saint-Office étant tous soumis, avant
d'être publiés, à l'approbation du Souverain Pontife, rien ne
s'oppose à ce que, dans la Lettre pastorale que vous préparez,
vous fassiez connaître que les décisions portées par ce Tribunal
suprême contre Mathilde Marchat et ses fauteurs ont été
approuvées par le Saint-Père, puisque vous le jugez opportun
pour briser enfin leur contumace » ;
Attendu que M. X., curé de .. ., a
résisté aux défenses réitérées que nous lui avons faites, et par
M. le Doyen de ..., et par M. Didierjean, vicaire général,
d'entretenir des relations avec Mathilde Marcbat et ses adeptes;
Attendu que M. le curé de ..., a envoyé une jeune fille de sa
paroisse auprès de Mathilde Marchat et qu'il refuse d'user de
son influence pour la faire revenir auprès de ses parents ;
Attendu que par une lettre du 2 mars 1891, M. le curé de ..., a
de nouveau manifesté sa résistance à nos ordres, et que par une
autre lettre du 7 mars1891, il s'exprime ainsi : « Dans sa
lettre datée du 3 mars dernier, M. Didierjean, vicaire général,
me demande, de nouveau, de m'engager par écrit: 1° à cesser
toute relation avec Loigny ; - 2° à faire tous mes efforts pour
rappeler ma paroissienne, qui est entrée dans l'Ordre des
Epouses du Sacré-Coeur de Jésus Pénitent, à Loigny. Monseigneur,
si j'avais l'ombre d'un doute que le Souverain Pontife s'est
prononcé contre Loigny, je signerais à l'instant les engagements
que Monsieur votre vicaire général sollicite avec instance. Mais
comme j'ai la certitude absolue, preuve en main, que Sa Sainteté
Léon XIII ne s'est pas prononcé contre l'oeuvre du Sacré-Coeur de
Jésus Pénitent et de Notre-Dame de Lourdes Expiatrice, qui
apparaissent à Loigny, il m'est impossible d'accéder à votre
demande » ;
Attendu que nous l'avons averti plusieurs fois que, s'il
s'obstinait, nous serions obligé de le frapper d'interdit;
Considérant qu'il est de notre devoir, de faire exécuter les
décrets des SS. Congrégations et de mettre un terme à la
résistance obstinée de M. l'abbé X.; .
Avons décidé et décidons ce qui suit :
1° M. l'abbé X., curé de ..., est
frappé d'interdit a divinis, jusqu'à ce qu'il ait reconnu ses
fautes et qu'il ait donné des témoignages de son repentir ;
2° M. l'abbé ..., curé-doyen de ..., est chargé de signifier
cette décision à M. l'abbé X., curé de ..., en présence de deux
témoins.
Nancy, le 9 mars 1891.
CHARLES-FRANÇOIS, Evêque de Nancy.
La prétendue visionnaire et ses adeptes en appellent constamment
au Pape, affirmant qu'il ne les a pas condamnés et qu'il a été
et est encore trompé.
Voici les paroles que Mathilde Marchat, prétend avoir été
adressées par Notre-Seigneur au prêtre que Monseigneur de Nancy
a condamné : « Cette feuille sous laquelle votre Evêque a signé
votre interdit ... sera pour Léon XIII ... son vicaire dévoué,
auquel vous voulez obéir... une preuve palpable et vivante qu'on
agit en dehors de Sa Sainteté ... et en son Nom... à son insu...
qu'on l'a trompé par d'affreux mensonges... et par une
hypocrisie ... qu'on trompe indignement les âmes... en faussant
les consciences en disant : le Pape a condamné ... non ... non
... en vérité ! »
Monseigneur de Nancy a reçu de Rome l'approbation suivante de la
condamnation de M. l'abbé X.:
Illustrissime et Révérendissime Seigneur,
La suprême Congrégation du Saint-Office a reçu communication de
la lettre que Votre Grandeur a adressée, à la date du 24 mars
dernier, à l'auditeur de Notre Saint-Père le Pape, et par
laquelle vous faites connaître qu'un prêtre de votre diocèse
nommé X., qui s'est montré le fauteur opiniâtre d'une
visionnaire de Loigny, a été par vous interdit a divinis, en
vertu du décret porté par cette suprême Congrégation le mercredi
11 juin 1890.
L'affaire a été déférée à Notre Saint-Père le Pape qui, accédant
au voeu des Em. Cardinaux, a approuvé la manière d'agir de Votre
Grandeur; bien plus, Sa Sainteté, après avoir mûrement examiné
l'affaire, s'est réservé à Elle-même la censure que vous avez
infligée au dit X., de telle sorte que ce prêtre ne peut en être
relevé que par le Souverain Pontife, décision que vous êtes
chargé de lui signifier.
De plus, Sa Sainteté a daigné décider que la Suspense portée par
le décret du 11 juin 1890, rappelé ci-dessus, serait encourue
par le fait même, sans qu'il soit désormais nécessaire de
prononcer la sentence; et que, en conséquence, les prêtres qui
entreraient dans la maison de Mathilde Marchat seraient, par le
fait même, soumis à cette censure. Cette décision doit être
rendue publique par une ordonnance qui sera affichée aux portes
de l'église paroissiale de Loigny.
Notre Saint-Père le Pape confie à la sollicitude et au zèle de
Votre Grandeur la mission de rappeler la jeune fille qui est
entrée dans la Société des Epouses du Sacré-Coeur de Jésus
Pénitent et d'empêcher par tous moyens que d'autres suivent cet
exemple.
En vous communiquant ces différentes décisions, je prie Dieu
qu'il protège les jours de Votre Grandeur.
Rome, le 26 avril 1891.
Votre tout dévoué en N. S.
R. Card, MONACO.
23 mai 1891 - n° 21
- p. 403
DIOCESE.
ACTES OFFICIELS.
Nomination.
Par décision de Monseigneur l'Evêque, a été nommé :
Curé de Nonhigny, M. l'abbé
GAILLARD, précédemment curé de Pierre-Percée.
13 juin 1891 - n° 24
- p. 469
La prétendue voyante de Loigny.
La voyante de Loigny et ses adeptes ont toujours soutenu que le
Pape ignorait tout ce qui les concerne, qu'il n'avait jamais
désapprouvé leurs prétendues révélations. Voici, maintenant,
après d'autres documents, d'une autorité indiscutable pour
quiconque a un peu de bonne foi, voici une lettre sur les
affaires de Loigny signée par le Pape lui-même; elle est
adressée à Mgr l'Evêque de Chartres, qui l'a communiquée aux
intéressés.
LÉON XIII, PAPE,
Vénérable Frère, salut et bénédiction apostolique. Au milieu des
graves et multiples soucis de Notre charge apostolique et parmi
les inquiétudes qui, dans ces temps malheureux, Nous pressent
de toutes parts, surviennent quelquefois certaines choses
fâcheuses, qui, bien que peu importantes en elles-mêmes,
cependant, ne Nous causent pas une peine légère, surtout
lorsqu'elles ont pour cause, non des ennemis, mais des fils
indociles de l'Eglise.
Telles sont les choses qui se passent depuis quelque temps dans
un village de votre diocèse, vulgairement nommé Loigny, par le
fait d'une certaine Mathide Marchat, laquelle se glorifie encore
d'un autre nom à elle imposé divinement, comme elle le dit, et
par le fait de ses fauteurs, qui sous prétexte de piété et de
zèle envers la religion et la patrie, ont osé résister
opiniâtrement non-seu-lement à l'autorité de l'Ordinaire, mais à
Notre suprême autorité. Quand cette femme se mit à répéter
qu'elle était favorisée de fréquentes apparitions de N. S. J.-C.
et de la Vierge Mère de Dieu et de communications surnaturelles,
et que la mission lui avait été confiée d'ériger un nouvel Ordre
religieux, Votre prédécesseur, Vénérable Frère, soumit toute
cette affaire à l'examen, et lorsqu'il lui parut constant que
les visions et révélations prétendues étaient destituées de tout
fondement, qu'elles étaient dépourvues de ces notes
caractéristiques par lesquelles les vrais dons surnaturels de ce
genre se distinguent des faux, il porta à juste titre plusieurs
décrets et sanctions pour empêcher leur divulgation et
l'érection de la nouvelle société.
A ce jugement, la femme susdite et ses défenseurs
n'acquiescèrent aucunement et firent appel à ce Siège
Apostolique. Mais le conseil de Nos Vénérables Frères les
Cardinaux de la Sacrée Inquisition Romaine et universelle, dont
Nous gérons Nous-même la Présidence, après avoir tout mûrement
considéré et pesé, et avec Notre approbation, jugea, le 12
décembre 1888, férie 4e, que la sentence de la Curie chartraine
devait être confirmée, statua qu'il n'était permis à personne de
prêter secours et faveur à la femme susdite, d'adhérer à ses
prétendues révélations et de les propager, et enjoignit à
l'Ordinaire de dissoudre complètement la communauté par elle
instituée.
On pouvait certes espérer que ceux qui n'avaient pas voulu s'en
tenir à un décret épiscopal obéiraient à nos ordres avec la
docilité qui convient à des catholiques : mais cette espérance
qui était la Nôtre a été vaine. Il n'a rien servi publiquement
en Notre nom que cette femme avec les ministres et auxiliaires
de son hypocrisie en persistant dans leur aveuglement,
méprisaient non seulement les ordres de l'évêque, mais aussi
ceux du Saint-Siège. Car, dans de nouveaux libelles mis au jour,
que l'on sait être pleins d'erreurs, de mensonges, de calomnies,
d'injures, d'inepties et de folies, ils ont continué avec une
audace tout à fait insolente de dénier à l'autorité
ecclésiastique l'obéissance et la révérence due, et de faire
volontairement illusion, si c'était possible, aux esprits sans
défiance. Et, ce que Nous regrettons par dessus tout, c'est que
parmi ces rebelles il y a des ecclésiastiques.
C'est pourquoi, après la discussion des dernières allégations
qui Nous étaient parvenues le XI juin 1890, férie IVe, il vous a
été enjoint, vénérable Frère, par le même tribunal suprême, de
défendre sous peine de suspense a divinis à tous les prêtres,
soit de votre diocèse, soit de diocèses étrangers, d'aller à la
maison des soeurs de la prétendue Congrégation, jusqu'à ce
qu'elles aient obéi aux décisions portées, d admettre ces soeurs
à la participation des sacrements, et d'entretenir avec elles
aucune relation, soit personnelle, soit épistolaire.
Vous le savez, de plus, Nous avons tout récemment ordonné que la
censure susdite, qui auparavant n'était encourue qu'après
sentence (ferendae sententiae), serait encourue par le fait même
(ipso facto), et Nous Nous en sommes réservé à nous mêmes
l'absolution. En outre, Nous avons déjà frappé d'une peine
particulière un des coryphées de la révolte et nous avons donné
l'ordre d'insérer à l'Index des livres prohibés (ce qui a été
fait par un décret du 18 juillet de l'année dernière) le journal
périodique intitulé: Les Annales de Loigny, et les opuscules: «
La vérité sur les condamnations qui frappent Mathilde Marchat
... 1889 ; La question de Loigny au 28 février 1890 ...
nécessité pour tous d'un appel à Sa Sainteté Léon XIII. » Il
paraîtra certes à tous étonnant, et même tout à fait incroyable,
qu'après tant de décrets, d'ordres, de déclarations de ce
Saint-Siège, il se trouve encore des personnes qui se laissent
duper jusqu'à défendre la cause qui a pris son nom de Loigny,
cause qui serait digne de mépris si elle ne sentait l'impiété,
si elle ne tournait au détriment des bons, et ne donnait aux
ennemis de la religion catholique un prétexte de la railler.
Nous n'ignorons pas avec quelle ardeur, Vénérable Frère, comme
votre prédécesseur, vous avez travaillé à détruire ce scandale;
les lettres que vous avez adressées à votre clergé et à votre
peuple le 16 août de l'année dernière, pour briser la contumace
de ces révoltés et dévoiler leurs fraudes, fournissent une
preuve éclatante de votre sollicitude pastorale.
En vous accordant les éloges qui vous sont dus, Nous avons jugé
bon de vous écrire cette lettre, pour que vous continuiez à les
pousser à résipiscence en toute patience et charité.
En attendant, Nous vous accordons avec amour dans le Seigneur, à
vous, Vénérable Frère, et aux fidèles confiés à vos soins, la
bénédiction apostolique comme gage des bienfaits célestes et
témoignage de Notre paternelle bienveillance.
Donné à Rome près Saint-Pierre, le 23 mai 1891, de Notre
Pontificat le quatorzième.
LÉON P. P. XIII.
A notre Vénérable Frère, François, évêque de Chartres.
11 juillet 1891 - n°
28 - p. 543
DIOCESE.
ACTES OFFICIELS.
Ordination.
L'ordination, dite de la fin de l'année, aura lieu le dimanche,
12 juillet, dans la chapelle du Grand-Séminaire. Y prendront
part :
18 tonsurés; 17 minorés ; 5 sous-diacres; 9 diacres; 19 prêtres,
dont voici les noms :
[...] Mottin, de
Blâmont;
18 juillet 1891 - n°
29 - p. 573
Nécrologie.
Nous recommandons aux prières de nos lecteurs l'âme de M.
Joseph-Edouard
VALLET, pieusement décédé le 16 juillet 1891.
Né à Château-Salins, le 18 novembre 1822, ordonné prêtre le 17
juin 1848, le défunt a été successivement professeur au Collège
de Blâmont; vicaire à Saint-Nicolas, de Nancy; aumônier de la
Maison Saint-Mathieu; puis curé de Dommartemont depuis le 1er
mai 1876, où il vient de mourir.
M. l'abbé VALLET était membre de l'Association des prières.
22 août 1891 - n° 34
- p. 666
DIOCESE.
NOUVELLES RELIGIEUSE
Deuxième Retraite ecclésiastique.
Pendant cette semaine a eu lieu la deuxième Retraite pastorale.
Elle a été présidée par Monseigneur l'Evêque et prêchée par le
R. P. Gillot, lazariste. Elle sera terminée dimanche par une
ordination à laquelle prendront part 3 diacres et 4 prêtres: MM.
Lap, de Bayon; Rollin, de Ville-au-Montois; Varney, de Nancy;
Xilliez, de
Blâmont.
22 août 1891 - n° 34
- p. 669
Paroisse Saint-Joseph.
Dons faits en faveur de l'église. (70e LISTE.)
Souscription populaire. - [...] - Pour l'achèvement de l'église:
[...] par Mlle Geoffroy, à Nonhigny, 11 fr.; [...] ; par un
anonyme d'Ancerviller, 5 fr.
29 août 1891 - n° 35
- p. 692
Paroisse Saint-Joseph.
Dons faits en faveur de l'église. (71e LISTE.)
[...] Anonyme de Leintrey, 8 fr. - [...]
NECROLOGIE.
M. l'abbé Klein.
Nous recommandons aux prières de nos lecteurs l'âme de M. l'abbé
J.M. Klein, pieusement décédé, à Nancy, le 23 août 1891.
Né en 1865, M. Klein a été ordonné en 1889. Aussitôt après son
ordination, il fut envoyé comme vicaire à Cirey-sur-Vezouze, et
ne tarda pas à attirer l'attention des fidèles par sa tendre
piété. Son dévouement et son zèle lui gagnèrent aussitôt
l'estime et l'affection de la paroisse, des jeunes gens surtout
dont il aimait à s'occuper. Son ministère commencé dans de si
favorables circonstances promettait d'être fécond et de porter
les meilleurs fruits de salut, lorsque le jeune vicaire fut
arrêté par une maladie qui au début parut sans gravité, mais qui
bientôt inspira de vives inquiétudes à ses parents et à ses
amis. Malgré les soins affectueux dont il fut entouré, il sentit
ses forces décliner de jour en jour, et après une année de repos
qui ne lui fut pénible que parce qu'il ne lui était plus permis
de s'occuper des autres, il rendit sa belle âme à Dieu le 23
août. Ses funérailles ont eu lieu mercredi à 10 heures du matin,
à la Cathédrale, au milieu d'un grand nombre de prêtres et
d'amis de sa famille. La Maîtrise des Frères des Ecoles
chrétiennes, pour honorer l'ancien élève des Ecoles chrétiennes,
chanta la messe en faux-bourdon. Après l'absoute, le corps de
M. Klein a été transporté à Préville, laissant un vide cruel
dans sa famille et de vifs regrets à tous ceux qui l'ont connu
et qui n'oublieront pas ses belles qualités et ses précoces
vertus.
M. Klein était membre de l'Association de prières.
10 octobre 1891 - n°
41 - p. 809
Paroisse Saint-Joseph.
Dons faits en faveur de l'église. (77° LISTE.)
Souscription populaire : [...] - Pour le vitrail de l'autel du
Sacré-Coeur : M. le curé de Gogney, 2° souscription, 10 fr. 50;
[...]
31 octobre 1891 - n°
44 - p. 873
Bénédiction de l'hospice de Cirey.
On nous écrit de Cirey-sur-Vezouze:
Non loin de ce qui reste encore de la célèbre abbaye de
Haute-Seille, à l'entrée de la petite ville de
Cirey-sur-Vezouze, le voyageur s'arrête involontairement devant
un groupe de constructions neuves et de belle apparence :
Maisons riantes, largement bâties, portant haut leurs étages et
ouvrant leurs grandes fenêtres sur de longs espaces comme pour
respirer avec bonheur l'air pur sous un beau ciel.
De belles terrasses, des pelouses verdoyantes, des massifs de
fleurs, des plantations d'arbres et d'arbrisseaux font, d'abord,
croire à une habitation de plaisance.
Et certes, le site en serait bien choisi : la route y fait un
gracieux détour au pied d'une légère montée. L'on y a sous les
yeux, au premier plan, la vallée de la Vezouze avec ses vastes
prairies, ses ruisseaux limpides et quelques maisons éparses,
sous des bouquets d'arbres, le long des cours d'eau! Un peu
plus loin, c'est Cirey, dont les maisons et le château s'étagent
à l'aise, sur deux légers versants autour de son église et de
son clocher. Puis, d'un côté, comme une longue colonnade, les
grandes cheminées alignées de la célèbre manufacture de glaces.
Et tout ce charmant tableau, entouré des premières ondulations
de la montagne, dont les sommets déjà couverts de sapins vont en
s'élevant à mesure qu'ils s'éloignent
Enfin, là bas, à l'horizon, le rideau bleu des Vosges qui se
développe en un vaste demi-cercle au milieu duquel se dresse,
dans sa silhouette si connue, le Donon, le roi de nos
montagnes.
Mais non! ce n'est pas une maison de plaisance; car entre les
constructions diverses l'oeil a bientôt remarqué un gracieux
portail roman surmonté d'une croix, qui dénonce un lieu de
prière, et une galerie dont les fenêtres de même style font
deviner une sorte de cloître qui doit conduire des habitations à
la chapelle. Car c'est bien une magnifique chapelle qu'il y a
là. Et si vous en doutez, écoutez les tintements argentins de
cette voix sonore qui se fait entendre du haut de la tourelle
... Et cette cloche n'est pas une étrangère dans notre pays, car
il y a plusieurs siècles déjà qu'elle y chante entre la terre et
le ciel, pieuse messagère des prières de nos aïeux et des grâces
du Bon Dieu. - Elle habitait jadis la tour du prieuré de Saint-Quirin,
là bas, à quelques lieues dans les premiers vallons de côté du
levant, - et après avoir été plusieurs fois sauvée de la
destruction par la piété des fidèles, elle fut enfin acquise et
recueillie par M. Georges Chevandier pour être à l'occasion
rendue à sa vocation première.
Et voilà que, dès samedi dernier, elle mêlait sa voix claire à
l'harmonieuse volée des cloches de la paroisse pour annoncer la
grande fête du lendemain et l'arrivée de Monseigneur l'Evêque,
qui venait bénir et inaugurer l'oeuvre complétée de la généreuse
bienfaitrice à qui la ville et le canton de Cirey doivent la
construction, la fondation et l'installation dans tous ses
détails de ce que nous voyons : d'un côté de la chapelle, vrai
petit chefd'oeuvre de M. l'architecte Genay, un orphelinat de
jeunes filles, établi depuis cinq ans, qui compte aujourd'hui
vingt-sept enfants, et de l'autre, un spacieux hospice de
vieillards avec toutes ses dépendances où, dès le soir du
dimanche, douze bons invalides ont été installés.
Voilà ce que c'est que ce groupe de grandes et belles
constructions, que nous avons admirées en arrivant.
Mais ce qu'il serait plus difficile de dire, c'est la joie qui
rayonnait sur toutes les physionomies et qui remplissait tous
les coeurs. - Un grand air de fête régnait partout.
A la messe paroissiale, chantée par M. le Doyen du Chapitre, qui
avait accompagné Sa Grandeur, l'église n'avait pas assez de
places pour les nombreux assistants, venus de toutes parts, qui
ont écouté avec une religieuse attention la parole vibrante et
très pastorale de Monseigneur l'Evêque qui a su tirer de
l'Evangile du jour, sur la résurrection de la fille de Jaïre,
les enseignements les plus élevés et les plus pratiques pour la
vie chrétienne dans la famille.
« Quand, pour notre âme malade, pour nos familles où la vie
chrétienne se meurt... quand pour notre pays que l'on veut
perdre dans l'incrédulité... nous aurons à notre tour jeté vers
Dieu le cri de détresse du chef de la Synagogue pour sa fille
mourante : Seigneur Jésus ! Venez dans ma maison! nos âmes, nos
familles, notre cher pays de France seront sauvés ! Parce qu'ils
seront redevenus chrétiens. »
Cette grande pensée restera dans l'esprit de tous, et
profondément gravée dans les coeurs, elle sera désormais, nous
l'espérons, la lumière qui nous guidera dans l'accomplissement
de tous nos devoirs.
A 3 heures, les Vêpres, commencées à l'église, furent chantées
en procession dans le parcours des rues qui conduisent à
l'hospice. Des arcs de triomphe et des mais plantés ornaient le
chemin que l'on devait suivre. Les congrégations marchaient sous
leurs bannières et portant les statues de leurs patrons, MM. les
curés du canton faisaient cortège à Monseigneur. M. le maire de
Cirey accompagné de MM. les maires du canton, les autorités, MM.
les administrateurs de l'usine venaient après lui en tête des
hommes et de la foule qui fermait la marche.
Arrivé à la maison des vieillards, Monseigneur s'agenouilla sous
un reposoir dressé sur le perron de l'entrée. Et pendant que les
orphelines chantaient un cantique, Mme Chevandier, les membres
de sa famille, ses nombreux invités, MM. les maires et les
autorités prenaient leurs places.
La bénédiction de l'édifice fut faite selon les rites et
cérémonies de l'Eglise; puis Sa Grandeur, exprimant hautement
son admiration et sa reconnaissance pour l'oeuvre qu'il était
heureux de bénir, loua et remercia la généreuse bienfaitrice,
qui met ainsi son bonheur à soulager toutes les infortunes.
« A l'ombre de la Croix, sous les ailes de la charité, confiées
aux soins des religieuses de Saint-Charles, nous voyons réunies
dans cette Maison les deux extrémités de la vie humaine
éprouvées par le malheur; l'enfance sans soutien et la
vieillesse sans asile ! »
Sa Grandeur a trouvé des accents très émus quand elle a parlé
des épreuves et des navrantes douleurs qui viennent souvent
accabler l'homme au déclin de ses jours après une vie remplie de
travail et de peines.
Et le tableau saisissant, du vieillard pauvre, malade, et
abandonné, a profondément remué l'auditoire. L'émotion était
dans tous les coeurs et les larmes dans tous les yeux.
Le Saint Sacrement fut apporté de la chapelle et, du reposoir où
Monseigneur venait de parler, Sa Grandeur donna la Bénédiction
solennelle à cette foule nombreuse qui gardera le souvenir de
cette grande et belle fête.
21 novembre 1891 -
n° 47 - p. 929
Paroisse Saint-.Joseph.
Dons faits en faveur de l'église. (83e LISTE.)
[...] M. le curé de Barbas, reconnaissance à saint Joseph, 10 fr.
12 décembre 1891 -
n° 50 - p. 987
M. l'abbé Lhôte.
Samedi, 21 novembre, la paroisse de Parux rendait les
derniers devoirs à un de ses enfants, l'abbé Jean-Baptiste Lhôte,
ancien curé de Blénod-lès-Pont-à-Mousson, décédé à la Collégiale
de Bonsecours. -
Huitième enfant de parents profondément chrétiens, il se fit
remarquer dans son jeune âge par un fond de douceur et de piété
qui furent toute sa vie ses vertus caractéristiques. A 16 ans,
il sentit l'attrait de la vocation sacerdotale, et il fit part à
sa pieuse mère de l'inclination qu'il éprouvait pour le
ministère de Dieu et des âmes. Il reçut les premières leçons de
latin de l'abbé Doué (qui vient de mourir curé de Mouacourt). A
17 ans, il entrait au Collège de Blâmont, et trois ans après au
Petit-Séminaire de Pont-à-Mousson. Là, comme à Nancy, sans être
un élève brillant, il fut toujours un élève sérieux, rempli de
bon sens, se faisant aimer de ses supérieurs par sa régularité
et son ardeur au travail, de ses condisciples par sa douceur et
sa bonté toujours égales.
Ordonné prêtre en 1852, il fut envoyé comme vicaire à
Château-Salins. Pendant les années qu'il passa dans cette
paroisse, il acquit l'estime et l'affection de tous. On
l'appelait le « saint abbé Lhôte ». Son départ provoqua
d'unanimes regrets, et tous les ans un certain nombre de
familles se rappelaient au souvenir de l'ancien vicaire.
En 1855, ses supérieurs le nommaient curé de
Blénod-lès-Pont-à-Mousson. C'est dans cette paroisse qu'il passa
trente-trois ans de sa vie sacerdotale. Un séjour aussi prolongé
indique chez le curé beaucoup de zèle et de dévouement, chez les
paroissiens un attachement profond, et, certes, l'abbé Lhôte le
mérita bien: car il réalisa toute sa vie l'idéal du bon prêtre
et du bon curé; sans cesser de travailler à sa propre
perfection, il se donna tout entier au salut des âmes, il se
sanctifia pour sanctifier les autres,
Et d'abord, il se sanctifia, il garda toute sa vie la régularité
d'un séminariste, autant du moins qu'elle est compatible avec
les exigences du ministère et l'imprévu des circonstances. Une
prêtre qui a vécu plusieurs années sous son toit, nous a
conservé sur sa vie intime les détails les plus significatifs.
Tous les jours il se levait à cinq heures et commençait sa
journée par l'oraison mentale et la récitation du bréviaire, en
sorte qu'il ne montait jamais au saint autel, sans s'être
acquitté des exercices du saint prêtre. Tous ceux qui l'ont
connu se rappellent sa piété, le recueillement et la dignité
qu'il apportait à l'église dans toutes les fonctions sacrées.
Il se donna tout entier au salut des âmes. Il avait une
prédilection marquée pour le ministère des enfants: il
comprenait l'importance capitale de l'éducation première dans
l'ordre surnaturel aussi bien que dans l'ordre naturel; il
savait qu'il reste toujours quelque chose des habitudes, bonnes
ou mauvaises, contractées dans le jeune âge. Aussi ne
négligea-t-il rien pour instruire et former à la piété les
enfants de sa paroisse. Tous les jours, il les réunissait, leur
faisait réciter la prière à haute voix, les catéchisait, leur
donnait des explications simples, mais frappantes.
L'abbé Lhôte avait mille industries pour attirer les enfants à
l'église ; il leur préparait à chaque instant des fêtes
nouvelles ; le dimanche, il les réunissait pour un office
particulier, et pendant tout le mois de janvier, il fêtait avec
eux la Sainte-Enfance de Notre-Saigneur.
Et il ne les abandonnait pas après leur première communion, mais
il les groupait en des confréries pieuses, où, par des
règlements sévères, il les tenait à l'abri de plaisirs malsains
et dangereux. Il forma de la sorte et il conserva un noyau de
chrétiens éclairés et affermis dans les pratiques religieuses.
Il eut dans son ministère plus d'une difficulté à vaincre. La
création et l'extension de centres industriels ouvriers attirent
à Blénod une foule d'ouvriers, pour la plupart étrangers à tout
acte de religion. L'abbé Lhôte vit toujours avec peine ces
nouveaux-venus échapper à son action et à son influence; mais
s'il ne put les ramener tous, du moins, à force de soins et
d'exhortations. Il sauva la foi de l'ancienne population. Et
c'est un succès dont il faut savoir apprécier l'étendue.
Tel fut l'abbé Lhote, dans l'ensemble de sa carrière sacerdotale
: pour achever de peindre cette physionomie intéressante, il
faudrait encore esquisser bien des traits de détails qui la
mettent en relief. Mentionnons d'un mot son goût pour
l'embellissement de son église; ne jugeant pas le moment
opportun d'en bâtir une nouvelle, il voulut tirer le meilleur
parti possible de l'ancienne, en lui donnant tous les ornements
qu'elle comportait. Signalons encore son ardeur à former un
groupe nombreux de chantres pour la beauté des offices, sa
charité envers les malades, à qui souvent, il ne donnait pas que
les secours spirituels, l'aménité et la douceur de ses
relations, son zèle à préparer des élèves pour le sanctuaire, et
le grand intérêt qu'il porta toujours aux jeunes élèves du
Séminaire. La proximité de son presbytère venait en aide à sa
bonté; les premiers jeudis de chaque mois amenaient à Blénod une
petite caravane de séminaristes, heureux de trouver là une
aimable hospitalité et d'agréables délassements. Voilà ce que
fut la vie de l'abbé Lhôte. Il ne lui manquait que les épreuves,
elles vinrent la couronner. En 1887, une cruelle maladie de coeur
faillit l'emporter; pendant plusieurs mois, on le crut perdu ;
il souffrait beaucoup, mais il souffrait avec résignation, il
gardait dans la souffrance un visage calme et tranquille. Ce fut
dans ces moments, qu'on vit combien il était aimé de ses
paroissiens. Tous s'intéressaient à son état, et lui faisaient
part de leur sympathie.
Une amélioration se produisit; mais ce n'était point une
guérison; l'abbé Lhôte n'était plus qu'une ombre de lui-même;
son visage amaigri, faisait pitié à voir; il était sans forces,
il dut quitter sa paroisse, se retirer à la Collégiale de
Bonsecours. Ce ne fut qu'à force de précautions et de
ménagements qu'il put prolonger, pendant quatre ans encore, une
existence que menaçaient sans cesse les retours de sa maladie.
En novembre dernier, il subit un nouvel accès: il sentit sa fin
approcher, il demanda les derniers sacrements et attendit avec
calme l'heure de la mort. Sa Grandeur vint lui donner, avec une
dernière bénédiction, l'assurance de sa profonde sympathie. Ce
fut le mardi, 17 novembre, au soir, que l'abbé Lhôte rendit son
âme à Dieu. A cette nouvelle, ses anciens paroissiens
accoururent nombreux pour honorer la dépouille mortelle de celui
qu'ils avaient tant aimé.
Puisse une si belle vie avoir déjà reçu sa récompense :
Beati miles, quoniam ipsi possidebunt terram.
L'abbé BOULANGER VALENTIN.
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