Si l'on considère la carte du comté de Salm datant de deux siècles et publiée par feu
Ed. Meaume, on voit que l'abbaye de Haute-Seille était située au nord-est du comté et à son extrême limite, environnée de villages et de bois tant français que lorrains. C'était la seconde abbaye fondée dans le comté la première était Senones, cette illustre maison bénédictine dont Dom Cal met a retracé l'histoire. L'abbaye de Haute-Seille, après avoir fait partie toute entière du comté de Salm, fut comprise dans l'indivision de cette seigneurie par suite du mariage de Christine de Salm avec François de Lorraine, comte de Vaudémont, puis fut, par le traité de 1751, complètement cédée au duché de Lorraine. Elle eut, comme à Senones, à souffrir de ses petits souverains qui ne relevaient que de l'empire; mais elle parvint à gagner la Révolution dans un grand état de prospérité, malgré le fléau de la commende qui pesait sur ses religieux par le bon plaisir du roi Stanislas.
Si l'ordre de Citeaux avait alors spirituellement dégénéré, il avait conservé ses grandes qualités au point de vue matériel. Le travail des mains avait été jadis en honneur chez les Cisterciens, comme on le sait. Il était alors encore dirigé par des hommes intelligents. Le drainage, observe M. d'Arbois de
Jubainville, qui est aujourd'hui une importation de l'étranger, était pratiqué dès le Moyen-âge par les moines (1). Les religieux, sachant bien, comme on ne cesse de le répéter de nos jours, que l'engrais est le premier élément de la bonne culture, nourrissaient des bestiaux très nombreux; enfin ils connaissaient l'avantage. de l'amélioration des races tant bovine que chevaline.
Étant aussi avancés dans la science agricole, il n'est pas étonnant que les fermes, qu'ils ne cultivaient plus, leur donnassent de bons revenus et aient été si recherchées par les métayers.
Comme tous les monastères de Citeaux, l'abbaye de Haute-Seille était indépendante de l'évêque diocésain, et un titre du XVIe siècle pouvait dire que le monastère
« assis au détroit du comté de Salm, a toujours été après Dieu, sous la garde de ses seigneurs, » les comtes de Salm. Haute-Seille est actuellement un hameau de la commune de
Cirey, sur la rive droite de la Vezouse, dépendant en. 1789 du bailliage de Lunéville, duché de Lorraine en 1790, du district de Blâmont, canton de Cirey plus tard de l'arrondissement de Sarrebourg, canton de Lorquin, département de la Meurthe aujourd'hui du canton de
Cirey, arrondissement de Lunéville (Meurthe-et-Moselle). Le territoire de Haute-Seille forme encore un ban à part (2).
L'abbé Grosse, curé de Frémonville, village voisin, a décrit (3) avec bonheur Haute-Seille telle que l'abbaye se présentait en 1835
« Le voyageur, dit-il, peut contempler de loin le vaste enclos du monastère, mais sur lequel la main de Dieu s'est appesantie avec justice; les hauts murs de l'enceinte sont debout dans toute leur intégrité et le portail de l'église du plus pur style roman se dresse encore au milieu des massifs de verdure qui l'entourent. On voit aussi l'avenue d'ormeaux plantée par les cénobites et que la destruction a épargnée. L'intérieur de l'église, dont l'enceinte est dessinée par un petit mur, est transformé en jardin. On distingue le cimetière où quelques inscriptions sont à demi effacées. Les bâtiments servant aux religieux, les cloîtres, les tours et les murs de l'église où saint Bernard est venu offrir les saints mystères (on avait bâti une chapelle en son honneur) sont détruits et leurs débris couvrent encore le sol. Les forêts sont transformées en boqueteaux entremêlés de champs et de prairies, et les étangs sont convertis en terres labourables. Seuls les bâtiments des fermiers dits la Basse-Cour sont restés debout, et le propriétaire loge dans la maison du jardinier.
« Haute-Seille, malgré son aspect lamentable, est une des excursions les plus agréables pour le touriste qui vient visiter les bords de la Vesouze et cette partie de la chaîne des Vosges (4). »
Rien n'est plus vrai que cette description pour le voyageur qui vient de Blâmont.
« Les moines blancs, » comme on les appelait, ont disparu, mais leur souvenir existe toujours. Saint Bernard est encore vénéré. Ces religieux étaient connus de la fondatrice Agnès de Langstein (que l'Art de vérifier les dates appelle à tort Adèle). En 1132, son père Thierry Ier, comte de Mousson et de Montbéliard, avait été un des fondateurs de l'abbaye des Trois-Rois ou de
Lieu-Croissant, dans le diocèse de Besançon. Aussi lorsqu'en -1140 elle voulut à son tour fonder avec ses trois fils Henri, Hermann et Conrard une abbaye cistercienne in vasta
solitudine, elle fit venir de la Bourgogne, non loin de la Saône, dans le diocèse de Langres, des moines blancs de l'abbaye de Theuley ou Tuley
(Tulleiim vel Theo Locus, Lieu Dieu), qui vinrent s'établir in Alta silvà, au milieu de vastes forêts, que l'on nommait
Haute-Salle, Haute-Selve, Haute-Seille, en allemand Hoheon vorst. Le monastère naissant fut la fille unique de l'abbaye de Theuley (5), qui resta depuis stérile.
La nouvelle abbaye fut mise sous l'invocation de Notre-Dame en sa nativité. Déjà en 1125, Agnès de Langstein et son mari le comte Hermann avaient donné à l'abbaye bénédictine de Honcourt en Alsace les villages de
Parux, Landange et Vathiménil, situés non loin de Haute-Seille.
La comtesse Agnès était la soeur d'Étienne, évêque de Metz, d'après M. Léon Vieillard (6), et sa mère se nommait Ermentrude de Bourgogne. D'après
M. Léon Germain (7), elle se serait remariée à un comte Grégoire (?)
La maison religieuse de Theuley était la sixième fille de l'illustre abbaye de
Morimond, celle-ci, quatrième fille de Citeaux, et son abbé, le quatrième père de l'Ordre, avait ainsi le droit d'inspection sur Haute-Seille qui recevait de lui l'investiture de ses abbés. Celle-ci était la quarante-unième maison issue de Morimond (8).
Au départ d'une colonie, la cloche rassemblait les religieux à l'église; après l'office, l'abbé allait prendre sur l'autel un crucifix qu'il remettait au chef de l'expédition ; douze religieux se rangeaient autour de celui-ci, puis sans rien dire, la colonie quittait le monastère, accompagnée des moines et des chantres dont la voix était couverte par les larmes. La grande porte extérieure s'ouvrait et se refermait presque aussitôt. Gérard, premier abbé de Haute-Seille, ne faisait plus partie de Theuley ainsi que ses compagnons. Chaque moine portait quelque objet pour le nouveau monastère; l'un des reliques, l'autre des vases sacrés, etc. Au bout de quelques jours ils arrivaient dans l'endroit qu'ils devaient défricher et sanctifier. Ils commencèrent alors à essarter la forêt et à canaliser le terrain pour pouvoir bâtir la nouvelle maison religieuse.
D'après Ruyr, l'abbaye de Haute-Seille se trouvait « entre la ville de Blâmont et les forêts qui regardent le Haut-Westrich (9) pour l'Orient. Les anciens, pour ce qu'elle fut premièrement en une solitude de hautes et amples forêts, la nommèrent Altae silvae mosasterium (10). Ce que le vulgaire a corrompu, l'appelant Haute Saille comme en Gascogne celui du même ordre nommé en latin Grandis
Silva, s'appelle maintenant Grande Selve. Haute-Seille est sur la Vezouse qui vient du Val de
Bon-Moutier, quasi sur le finage de Saint-Sauveur (11). »
L'abbaye fut bâtie sur le ban du village de Tanconville. Les religieux de Theuley y furent reçus en 1140 par Agnès comtesse de Salm et ses deux fils Henri et Hermann. Le 26 Mai on commença à construire, et en 1147, Étienne de Bar, évêque de Metz, fit un accord avec sa nièce Agnès de Bar, fille de Renaud, comte de Bar, son frère et les héritiers du comte de Langstein d'une part et Bencelin de Turquestein et son fils Conon ; Arcelin de Valringen et Bero de Desmes d'autre part, parents du prélat et sujets de son église. Il donna à cette abbaye autant de terres que deux charrues de boeufs pourraient labourer en un jour, lui en accorda d'autres sur les terres de Metz, plus le droit d'acquérir des pâturages, des affouages dans les bois de Rambervillers et de
Nossoncourt.
Il fut convenu en outre par un accord entre l'évêque et le comte de Blâmont que les bois seraient partagés par moitié et que l'abbaye demeurerait au prélat qui en était en possession. Ces bois étaient ceux de Turquestein, Blâmont et Bon-Moutier
(RUYR). On sait que Haute-Seille se trouvait dans le comté de Blâmont, dont les seigneurs étaient de la même famille que les comtes de Salm (12).
I
L'abbaye avait des maisons de sûreté à Blâmont et à Sarrebourg. Dans cette ville, elle en avait plusieurs dès le XIIIe siècle, entre autres une avec cour devant l'hôtel de l'évêque, un jardin et une vigne de quatre jours et une autre en 1232, par donation du prévôt
Vibert, moyennant une rente annuelle et viagère de 12 deniers pour lui et son épouse
Iunga; le couvent obtint une autre maison avec ses dépendances, un jardin, une grange et un cellier (13).
En 1420, l'abbé Gérard cède à Jean Charpentier et à Agnès, sa femme, bourgeois de Sarrebourg, une maison, cour, étables et un pré à Hof, à charge de fournir aux religieux du couvent l'hospitalité, le gîte et la lumière, et à leurs chevaux le foin et la paille, en passant à Sarrebourg. Cette maison était venue en 1522 à Messire
Veltin, chanoine et curé de Langatte, qui en refusa l'entrée aux Cisterciens de passage. De là, une instance entamée par l'abbé Jean
Husson.
Le jugement est ainsi conçu en 1529 « Sachent tous que le Révérend abbé et religieux de Haute-Seille ayant prétendu droit de résidence sur une maison établie, avec aisances et dépendances, rue de la Fontaine, laquelle est à présent aux mains et à la possession de Messire Veltin (et cohéritiers), chanoine et curé de
Langatte, de laquelle résidence lad. abbaye a été par ledit sieur Veltin (et cohéritiers), environ l'espace de six ans frustrée et empêchée. Pour laquelle cause le R. P. Adam
Husson, abbé de Haute Seille, aurait fait demande à actionner
led. Veltin (et cohéritiers) à cause dudit refus touchant la résidence. Lesquels sont comparus devant les gens de justice (prévôt, échevin et notaire) auxquels les actionnés promirent de laisser l'ancien droit aux religieux, et furent condamnés à payer deux et demi florins pour les six ans de frustration et dommages-intérêts. »
La maison passa encore à d'autres propriétaires, à l'insu de l'abbaye, elle fut vendue à un chanoine-curé de Sarrebourg, sans signification au couvent, à qui l'acquéreur en refusa l'ouverture, ce qui amena une nouvelle instance près du duc Charles
III.
L'histoire de l'abbaye peut se résumer dans les vexations qu'elle eut à subir de la part de ses fondateurs, les comtes de Salm, dans les raccommodements avec ces derniers; puis surtout dans les troubles et les ruines qui sur-vinrent à la suite du passage des gens de guerre depuis le XIVe siècle jusqu'au
XVIIe.
Un nom se fait remarquer au milieu de tous dans les premières années de l'abbaye, c'est celui du moine Jean dont nous allons parler longuement. Il le mérite bien. C'est un des plus grands écrivains de l'époque.
II
Dans les premières années de l'existence de Haute-Seille vivait dans l'abbaye un moine nommé Jean, qui composa un poème latin (14), véritable encyclopédie du temps et cité par tous les auteurs du Moyen-âge. L'orignal du poème, conservé jadis dans la bibliothèque de Haute-Seille, est perdu depuis longtemps. Il en existe une copie latine datant du XIIIe siècle à la bibliothèque de la ville de Luxembourg. Cette copie, signalée par Dom Martène au XVIIe siècle, provient de la riche abbaye cistercienne
d'Orval. Voici la dédicace (1180-1212) « Au Révérend Père en Dieu et Seigneur Bertrand, Évêque de Metz, par la volonté de Dieu, frère Jean, frère cistercien de Haute Seille, souhaite de vivre heureusement encore le cours de sa vie (15).
« Je cherchais, continue-t-il, dans les profondeurs des cloîtres et sous les bandelettes des pontifes, un homme en qui mon coeur pût se complaire, un homme de vertu, saint, juste, parfait, versé dans les lois divines et humaines. »
Le moine Jean avait bien raison de louer l'évêque Bertrand, qui fut un des bienfaiteurs du monastère", Le poème en vers fut traduit en français et est intitulé Dolopathos ou le Roman des Sept Sages, ouvrage singulier et bizarre, dit Legrand
d'Aussy, mais qui peut se glorifier d'une des plus heureuses destinées qu'aucun livre ait jamais obtenues (16).
Une foule d'auteurs ont puisé dans le Dolopathos, et pour ne citer que les plus illustres, nommons Boccace et le bon La Fontaine. L'ouvrage fut traduit dans toutes les langues. Plus tard, un moine nommé Herbert, sans doute de Haute-Seille, traduisit le Dolopathos du frère Jean en vers français (12.901 vers) de huit syllabes, au commencement desquels il rend hommage à l'auteur
Li bon moine de bonne vie,
De Haute Selve l'abbeye,
A l'estoire renouvellée,
Par bel latin l'a ordenée;
Habers la vient en roman traire,
Et del romans un livre faire,
Et nom et en la réverence
Del roi fil Phelipe de France,
Loeis qu'en doit loër, etc. (17).
La traduction, observe Mgr Mathieu, comme il arrive quelquefois, éclipsa l'original, et par une application nouvelle du Sic vos non
vobis, Herbert (18) se fit un nom et Jean tomba peu à peu dans l'oubli. Le Dolopathos français fut signalé dès 1581 par le président Claude Fauchet, par le célèbre Huet en 1670, en 1751 par Dom Calmet qui, n'y regardant pas de si près, ne fait qu'un seul personnage de Jean et d'Herbert. Les Bénédictins de l'Histoire de Metz ont suivi l'erreur de l'illustre abbé. On trouve des fragments du poème dans la
Bibliothèque française de Duverdier et un extrait fort étendu dans le Conservateur (Janvier 1760), d'après un manuscrit français de la bibliothèque de Sorbonne, aujourd'hui perdu. Le poème a été analysé inexactement en 1838 par l'ex-oratorien Daunou, dans le tome XIXe de l'Histoire littéraire de la France.
On lit dans le Dolopathos quelquefois des détails très libres, dans lesquels entre notre
« bon moine de bonne vie, » dans un poème dédié à un évêque renommé pour sa sainteté; mais c'était dans la mode du temps grossier dans le langage, mais chaste dans les moeurs. Le poème du frère Jean fourmille de sentences et de proverbes (19)
Si com Dom Jehans nos devise
Qui en latin l'histoire a mise.
On sert le chien por lo seignor,
Et por l'amor le chevalier,
Baise la Dame l'escuyer.
...
Riens tant en grève menteor,
A larron, ne a rebeor,
N'a mauvez hom quiex qui soit,
Com' veritez quand l'apperçoit,
Et veritez est la masme
Qui tot le monde occit et tue.
Le manuscrit fut étudié de plus près par Le Roux de Lincy, et enfin publié intégralement en 1856 dans la collection Jannet par Charles Brunet et Anatole de
Montaiglon. Cette publication attira de nouveau l'attention sur le
Dolopathos, et un jeune savant allemand, Hermann Oesterly, eut le bonheur de retrouver le manuscrit
d'Orval cité par Dom Martène, à la bibliothèque de la ville de Luxembourg, qui eut beaucoup de richesses littéraires de l'opulente abbaye. Il publia sa découverte en 1873 chez Trübner à Strasbourg, en une brochure in-8° de cent pages, ayant pour titre Johannis de Alta Silva Dolopathos, sive de Rege et Septem Sapientibus, précédée d'un introduction en allemand.
Le moine Jean, la principale illustration de Haute-Seille, devait être très savant pour son temps, curieux de belles aventures et de récits merveilleux il mérite une place d'honneur dans l'histoire de la littérature populaire. Mais il eut le tort d'écrire en latin au moment même où la langue des trouvères prenait son essor.
Mais grâce à des travaux littéraires modernes, le nom du moine Jean est sorti de l'oubli et l'abbaye de Haute-Seille est connue de tous les érudits (20).
III
Les moines cherchaient toujours à empiéter sur les droits des seigneurs voisins c'est ainsi qu'ils prétendaient que le meunier de leur ferme de Xirxange (21) était en droit d'aller charger les grains au village de Moussey. Ce qui amena un grand procès qu'ils perdirent, et dont
quatre liasses étaient aux archives du comté de Réchicourt dont dépendait Moussey.
En qualité de seigneurs de Xirxange, les-religieux avaient cinq simmers sur l'excédant en blé contre un donné au maire, un autre à l'échevin, deux au sergent, trois aux héritiers de Barbas et le surplus à l'évêque de Metz (charte du lundi avant la sainte Madeleine -1442), sur le ban de Maizières.
L'inventaire des archives du comté de Réchicourt, in-fo, page 234, No 125, indique une lettre en date du 24 Juillet 1574, de l'abbé Jean Perrin au comte d'Éberstein, seigneur du comté de Réchicourt, par laquelle il le supplie comme son bon seigneur d'octroyer la cure de Xouassange au sieur
Neufchamp, son protégé.
D'après le Pouillé manuscrit de la bibliothèque de Metz (1770), l'abbaye nommait aux cures suivantes
Fraquelting.
Fribourg. Conjointement avec le Chapitre de Sarrebourg et le Concours l'abbé touchait un tiers de la dime dans un finage.
Hattigny. Cure régulière reconnue par arrêt du Parlement de Metz, malgré l'évêque qui voulait, en 1704, y nommer un prêtre séculier.
Hesse : Cure régulière, l'abbé touchait les deux tiers des dîmes du ban et le curé l'autre.
La Frimbolle. L'abbé possédait la chapelle dédiée à sainte Ursule et à ses compagnes.
Landange. L'abbé et le baron de Saint-Georges (le prince de
Beauveau) y nommaient alternativement; l'abbé y nomma en 1775.
Languimbert. Vicariat perpétuel régulier. L'abbé y nommait alternativement avec l'abbé des Cisterciens, de
Villers-Bettnach; ils touchaient les deux tiers des dîmes et le curé régulier l'autre.
Ommeray. L'abbé y nommait un séculier.
Tanconville. Cure régulière.
Ainsi l'abbaye avait quatre cures régulières: Hattigny, Hesse, Languimbert et
Tanconville. En Alsace, l'abbaye possédait encore le patronage de la cure de Saint-Pierre et Saint-Paul, une des paroisses de la ville impériale de Rosheim. En 1790, M. Molsheim y était curé. Cette église est par son antiquité un monument des plus remarquables.
IV
Au commencement du siècle dernier, il y avait dans l'abbaye une foule de personnes, dont la présence contrastait avec la règle primitive des Cisterciens le cocher de
M..l'Abbé, le sergent, le maître d'hôtel de l'abbaye (en 1714, Nicolas Décrion de
Coincourt). Un vieillard m'a raconté à Tanconville, il y a plus de quarante ans, qu'une vieille coutume monastique s'était conservée dans le couvent. Tous les ans, le
Jeudi-Saint, l'abbé ou le prieur claustral lavait les pieds à douze petits garçons. Après la cérémonie, un bon dîner avec du vin leur était servi, et on les gratifiait chacun d'une pièce de quinze sols, monnaie de Lorraine. Les costumes des enfants pour la fête étaient tirés d'un long coffre, et on les remettait en place pour l'année prochaine, après la cérémonie.
Vers cette époque (1700), les paroissiens de Fraquelfing et de
Niederhoff, son annexe, se plaignaient amèrement à l'archiprêtre de Sarrebourg, en visite officielle, de leur curé Dom
Henrion, qui, depuis cinq mois qu'il était installé, ne leur avait pas encore fait ni prône, ni catéchisme. Le Bernardin inculpé se borna à dire pour sa défense que l'intérêt et la passion faisaient ainsi parler ses ouailles.
Les fermiers, le forestier, le jardinier, les gens employés dans la maison formaient une petite paroisse à laquelle venaient se joindre les rares habitants de
Tanconville. Un moine faisait les fonctions de curé. Il y avait le cimetière des séculiers de l'abbaye.
Le curé de « la Basse Cour, » Dom Lamarche, cite le décès en 1704, à l'âge de soixante ans, de Didier La Tour, parisien, pensionnaire en cette abbaye. C'était un ancien soldat dont l'État récompensait ainsi les services, et plus tard on voit le frère donné Didier, dit de
Villedos, âgé de quarante-cinq ans, figurer sur le registre mortuaire (22).
On rencontre quelques détails intéressants dans les registres de paroisse de la commune de
Tanconville, qui remontent, d'après H. Lepage, à l'année 1700.
En voici quelques-uns
L'an 1702, le 25 du mois de Mars, est décédé dans cette paroisse de Haute-Seille, Hans
Arpaille, allemand de nation valet du marquar de l'abbaye, qui se trouvait encore garçon, lequel est luthérien, et a fait abjuration entre les mains de M. l'Abbé pendant sa maladie, et fut administré avec tous les sacrements usités.
Fois LAMARCHE.
Le 11 Février 1703, est décédé Dominique Christophe, âgé de cent ans, ayant vu quatre abbés, savoir
Dom Jacques Bernard;
Dom Louis de Feriet;
Dom Claude de Bretagne;
Dom Jacques Moreau de Mautour.
Il a reçu l'extrême-onction, ayant tombé en enfance et ne pouvant plus se confesser.
Aujourd'hui 2 Mars 1704, a été baptisé François Massu par Dom Alexis de la Marche, et a eu pour parrain M. le Chevalier Jacques-François de Saint-Vincent, et pour marraine Anne-Marie du Châtelet, de la paroisse de
Cirey, qui ont signé avec moi, religieux de choeur de l'abbaye. François MICHEL.
(Cette demoiselle du Châtelet fut baptisée à Cirey le 23 Juin 1676.
MARTIMPREY.)
En Juin 1707, Jubilé à l'abbaye.
Le 7 Octobre 1707, décès du bourgeois de Strasbourg et menuisier de la maîtrise de cette ville, Patrice Hop, qui travaillait « . à la confection de nos
estaux. »
Le 17 Décembre 1711, décès d'un habitant de la Suisse italienne, a qui travaillait ici depuis deux mois. »
Le 27 Mai 1711, la seconde cloche de l'abbaye, nommée Marie-Catherine, a reçu la bénédiction et a eu pour parrain Messire Albert-François Moreau de
Mautour, prieur de Moustier et l'Isle, et pour marraine Marie-Catherine du Châtelet de
Chauvirey, lesquels ont signé avec nous et les témoins soussignés.
M. DE MAUTOUR DU CHATELET. MASSU DE CHAUVIREY (23). RICHARD.
Feu Chapellier a fait voir en quelques pages comme l'autorité des co-seigneurs était reconnue en 1707 par un abbé nommé par le roi de France. Le juré en la justice de Badonvillers était parti de cette ville le 8 Septembre avec son sergent pour annoncer la fête à l'abbaye; ils la proclamèrent selon la coutume.
« Oyez, Messieurs, de par Dieu, de par
Notre-Dame, de par les seigneurs souverains de la terre de Salm, et de par Messieurs les abbé, prieur et religieux de Haute-Seille, la fête est permise, et il est défendu à qui que ce soit de faire aucun trouble pendant les danses. »
La fête publiée, les deux officiers entrèrent à l'église pour entendre la messe et se présentèrent à l'offrande, mais l'abbé leur refusa à l'autel de marcher les premiers, malgré qu'ils représentassent le duc de Lorraine et le comte de Salm, co-seigneurs souverains, et ce prélat eut l'insolence de dire à un particulier
« Monsieur le Maire, avancez » Après la messe, la fête fut encore publiée, et un moine leur dit
« Dites Monseigneur l'abbé, plutôt que de nommer les princes. » Le cri de la fête prononcé, les délégués entrèrent au couvent pour le dîner accoutumé, mais l'abbé furieux se présenta devant eux, criant
« Sortez, sortez, je ne vous reconnais en rien. » C'est ce que firent les deux officiers qui ne dirent pas où ils mangèrent, mais qui signalèrent l'abbé comme n'ayant pas, à l'Évangile, chanté pour les souverains ni en commun, ni en particulier,
« ce qui avait scandalisé les
assistans, » selon eux.
C'est l'abbé Moreau de Mautour qui, pour ne pas avoir à supporter les frais de réparation de l'église de Hesse,
PL. II
BAS-RELIEF DE LA VIERGE
SCEAU DE HENRI II. COMTE DE SALM (d'après Calmet)
Pl. III.
PISCINE OGIVALE DANS L'ÉGLISE
ARMOIRIES DE L'ABBAYE
CACHET DE DOM CORTADE, PRIEUR
SIGNATURE DE M. DE MONTAUBAN, ÉVËQUE DE NANCY, ABBÉ COMMENDATAIRE
crut bien faire en 1694, en retranchant la plus grande partie de ce
« magnifique » édifice, et la mit, malgré qu'il en tira plus de mille écus par an dans le triste état où le monument se trouve de nos jours (24). Tout penchait vers la ruine, entre autres, dit l'archiprêtre de Sarrebourg, visiteur en 1700, l'autel de Saint-Bernard. Le curé-prieur ne tirait alors que 300 livres pour desservir la cure. Le 29 Septembre 1707, M. de
Mautour, capitaine au régiment d'Anhalt, et Mlle de Saintignon, tinrent sur les fonts baptismaux le fils de l'amodiateur de Haute-Seille, Jacques Klein, le père du maître de poste de Blâmont, l'aïeul du général comte Klein, sénateur sous le premier empire.
Le registre de Tanconville parle encore de M. de Mautour.
Le jour de Pàques, 8 Avril 1708, l'on a chanté pour la première fois la messe dans le choeur de l'église de l'abbaye. L'abbé officiant pontificalement, le choeur a été construit par ledit seigneur abbé à la gloire et en l'honneur de Dieu. La communauté de Haute-Seille était alors composée de
Messire Jacques Moreau de Mautour, abbé régulier, bachelier en théologie de la maison de Sorbonne, seigneur de Haute-Seille et seigneur foncier de
Neuf-Grange, bien seigneurial exempt de tous droits et dîmes.
Dom Pierre Richard, curé de la Basse-Cour et chantre.
Dom Alexis La Marche, sous-prieur.
Dom François Brissault, curé de et chantre.
Dom Charles Aubertin, dépensier.
Frère Michel, clerc.
Frère Philippe Geoffroy, clerc.
Frère Antoine Thomas.
Et le sieur Jean Charette, tous deux laïques.
Quamvis non mea manu scriptum est, ita est.
Il y avait en outre à l'abbaye
Dom Robert Lambert, curé de Bertrambois.
Dom Robert Massu, né à Blâmont, curé de Languimbert.
Dom Jean Drouet, curé de Hesse.
On trouve comme curés de la Basse-Cour
1700, Frère de Monet.
1702, Frère Henrion.
1703, Frère Lamarche.
1711, François Richard, établi par le révérendissime abbé pour administrer les sacrements à Haute-Seille et ceux de la
Basse-Cour, directeur de l'abbaye.
1724 (25), Frère de la Tour.
1729, Frère de Romain, Frère Lamarche, sous-prieur, etc.
M. de Martimprey cite cette inscription qui se trouve sur un petit mur
FRÈRE JACQUE
MOREAU
ABBÉ RÉGULIER
DE CE MONASTÈRE
A FAIT CONSTRUIRE
CET ÉDIFICE EN 1716
L'inscription doit rappeler la construction de l'hôtel abbatial, mais non celle de l'église dont la nouvelle dédicace eut lieu en 1708, comme on l'a vu.
Dès 1399, la « Congrégation de la Vierge en son Annonciation était en honneur à Haute-Seille. On versait dix sols dans le tronc pour y être admis, et un échevin d'église en était le président. En 1729, il y a beaucoup de personnes des deux sexes qui s'y font recevoir pour participer aux prières et aux messes dites toutes les semaines le samedi pour les confrères; trois ans après, il y a deux nouvelles inscriptions. Un confrère donne trois francs pour la décoration de l'autel de la Vierge, un autre fonde une messe basse à sa mort, etc. Dom de Romain avait été l'administrateur de la confrérie.
En 1732, suivant l'ancien usage, le curé de « la Basse-Cour » réunit les femmes de la paroisse pour élire entre elles une sage-femme, et deux ans auparavant, le curé Dom Thomas Romain avait fait prêter au garde-chapelle de Haute-Seille le serment de bien remplir ses fonctions (26).
VI
La commende fut introduite dans l'antique abbaye cistercienne par la volonté du roi Stanislas, co-souverain du comté de Salm aux droits des ducs de Lorraine qui étaient devenus co-possesseurs par suite du mariage de Christine de Salm avec François de Lorraine, comte de Vaudémont, tige de la maison actuelle impériale et royale d'Autriche. Le prince Léopold de Salm-Salm, dont le gouvernement fut vénéré dans sa petite principauté, n'était pas de force à lutter avec le roi de Pologne, soutenu par la couronne de France; puis des raisons personnelles survinrent, comme on le verra plus bas, et l'empêchèrent de poursuivre ses justes oppositions contre les menées de Stanislas. Elles auraient du reste échoué par suite de la complicité de la Curie romaine avec le monarque polonais (27).
Celui-ci, au décès de l'abbé régulier de Haute-Seille, Dom Henri Lecler en 1747, s'empressa de nommer, en vertu de l'indult du pape Clément XII du 15 Janvier 1740, et sans consulter le prince de Salm-Salm, le fils de son intendant, le jeune Nicolas-Joseph
Alliot, clerc du diocèse de Toul, qui venait d'être débouté par les tribunaux de la commende du prieuré bénédictin de Châtenois, près de Mirecourt. Le prince de Salm-Salm, ignorant le choix du roi, lui avait écrit une lettre pressante pour lui demander la nomination pour son fils aîné, le prince Othon, qui, à sa mort, s'empressa de renoncer à ses bénéfices et à la carrière ecclésiastique pour rentrer dans la vie laïque et être prince souverain de Salm-Salm. Apprenant le choix du roi, Léopold changea de tactique et envoya une protestation en Cour de Rome contre la nomination, s'appuyant sur ce que le comté de Salm dans lequel était située l'abbaye de Haute-Seille était terre d'empire, mais indivis avec le duché de Lorraine et par conséquent régi par le Concordat germanique. Ce qu'écrivit avec raison le prince, fit un certain effet à Rome et fut peut-être cause qu'on refusa d'y reconnaître la nomination royale, et les moines de leur côté, pour montrer à tous leur bon droit de nommer un abbé régulier, s'empressèrent d'élire pour leur supérieur Dom
d'Estrepy. Le roi de Pologne ne se laissa pas intimider par le bref papal, et le procureur général Thibault fut chargé d'y répondre tant bien que mal. Celui-ci ne put s'empêcher de déclarer que le comté de Salm était indivis avec le duché de Lorraine; mais ce qui amoindrissait les droits de l'empire, c'était que l'abbaye de Haute-Seille était du diocèse de Toul et en suivait les coutumes, et que depuis son annexion à la France cette ville ne suivait plus le Concordat germanique. Enfin l'indivision du pays n'empêchait pas la nomination du roi, qui tout au plus souffrirait qu'elle fût alternativement élective et collative avec les religieux, et que pour cette fois le decorum commandait que Sa Majesté eût le pas sur les moines qui auraient la nomination qui surviendrait plus tard.
Le pape Benoît XIV crut devoir par politique adopter ces raisons, et accorda le 18 Novembre 1749 la nomination au roi. Comme Sa Sainteté avait supprimé toutes les procédures, Stanislas, enchanté de l'issue de l'affaire, donna une nouvelle nomination royale à l'abbé
Alliot, qui fut reçu sans difficulté, l'abbé général de Citeaux ayant fait dire aux moines de Haute-Seille qu'il voulait qu'ils restassent tranquilles (28).
Mais dans tout ceci on ne voit plus figurer le prince de Salm-Salm. Que faisait-il donc pour maintenir ses droits? Hélas Son Altesse avait changé du tout au tout, il approuvait tout Les négociations pour le partage du comté de Salm entre lui et le roi de Pologne étaient déjà commencées, et elles finirent par le Traité du 21 Décembre 1751, qui comprit dans le lot royal l'abbaye de Haute-Seille, qui se trouva alors complètement dans le duché de Lorraine, et Stanislas put y faire ce qu'il voulait. C'est ce que savait le prince et l'empêcha d'élever la voix. Quant aux droits des religieux, ils ne comptèrent plus; un prieur claustral administra le monastère.
VII
Voici trois lettres relatives aux discussions des moines avec le curé de Gélacourt, sur la paroisse de laquelle était située la ferme franche
d'Ormange appartenant à l'abbaye, à propos des dîmes à percevoir sur le domaine au profit de la fabrique de la paroisse. Déjà, d'après M. Ch. Guyot, qui a longuement parlé du bien rural
d'Ormange dans les Mémoires de l'Acadénaie de Stanislas, 1887 (29), les parties s'étaient arrangées comme elles s'arrangèrent encore cette fois, en donnant au XVIe siècle au curé par an six quartes de blé et d'avoine. L'alleu
d'Ormange était venu au monastère par suite de donations et d'acquisitions partielles sur Berode
Haraucourt, sa femme et ses enfants. Les moines y avaient une ferme considérable, des bois et des étangs, des Moines (105 jours),
d'Ormange (34) et des Chàtelains (30). Le domaine fut acquis le 4 Mai 1793 par David Braun, de Fénétrange, pour 85.100 livres. Braun ou plutôt ses créanciers le revendirent à Lucie Falconet, belle-fille du célèbre sculpteur, épouse du baron de Jankowitz -de
Marimont. Un souvenir de Notre-Dame de Haute-Seille était la Fontaine-Sainte-Marie que l'on voyait à mi-côte sur le chemin de Dieuze à
Marimont. Elle a disparu par suite de la conduite de la source à la ferme. Quelques arbres isolés la signalent encore de loin.
Les lettres font le plus grand éloge de l'esprit pacifique des religieux.
Monsieur, je suis chargé de la part de M. l'abbé de Haute-Seille de vous écrire pour vous demander votre dernière détermination au sujet des interprétations sur la dîme
d'Ormange, si vous prétendez être en droit de tirer la dîme et que vous persistiez à vouloir la tirer, il est déterminé à soutenir ainsi que nous, le procès que vous lui intenterez pour cela. Si au contraire vous vous bornez à une simple rétribution pour la desserte de cette ferme, il voudrait savoir ce que vous prétenderiez la porter, afin de pouvoir convenir ensemble, s'il y a lieu. Faites-moi prompte réponse, afin que je puisse la lui faire passer, et pour qu'en conséquence il puisse se décider.
J'ai l'honneur d'être avec respect, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.
Fr. CORTADE, Prieur de Haute-Seille.
Haute-Seille, ce 29 Janvier 1771.
(Cachet aux armes cire rouge.)
Haute-Seille, 4 Octobre 1771.
Monsieur,
N'aiés aucune inquiétude sur la convention que vous avez fait avec Dom
Cortade, mon prédécesseur, j'en suis instruit par le double que j'en ai à la maison; je l'accepte et la tiendrai avec plaisir pour le tems qu'elle est
faitte.
J'ai l'honneur d'être avec respect, Monsieur, votre, etc.
F. CLAUDE, Prieur de Haute.Seille.
(Sceau de t'abbaye pour cachet cire rouge.)
J'ai reçu votre lettre, Monsieur, et je l'envoie à Mrs les religieux d'Haute Seille pour qu'ils me fassent part du traité passé entre vous et Dom
Cortade; comme il y a long-temps que je ne me suis occupé des affaires de l'abbaye d'Haute-Seille (30), je n'ai pas ce traité présent non plus que vos droits, et j'attendrai pour vous répondre plus positivement, Monsieur, qu'ils m'en ayent rendu compte.
Recevez, Monsieur, l'assurance des sentimens avec lesquels je suis, Monsieur, votre très humble et très obéissant serviteur.
L.-Ap., Évêq. de Nancy (31).
VIII
A Blâmont, d'après le P. Benoit Picart, l'abbaye avait toutes les grosses dîmes, à charge de donner au Chapitre de la ville fondé en 1382, neuf paires de réseaux, et elle recevait du Chapitre cinq gros par an pour la reconnaissance du droit de patronage.
L'abbaye possédait beaucoup de biens en Alsace, qui pourraient bien être des donations de la comtesse Agnès, qui les aurait eues de ses grands parents, les comtes d'Alsace. Le 29 Novembre 1318, le monastère vendit à l'évêque de Strasbourg pour l'hôpital de Molsheim, que le prélat établissait, tout ce qu'elle possédait à Altdorf. En 1576, autre vente à la ville de Strasbourg du droit de collation à la cure et des dîmes de
Dorlisheim. Déjà en 1554, Antoine de Salm, qui se qualifiait de coadjuteur de l'abbaye, avait loué de sa propre autorité tout ce que l'abbaye possédait en ce village (32).
Le blason de l'abbaye ci-joint est copié sur un cachet du prieur Dom Claude, qui se trouve sur l'enveloppe d'une lettre du 4 Octobre 1771 à M. de Nicéville, curé de
Gélucourt.
« Cire rouge, ovale (23x19), d'or à un pont d'argent en pointe, accosté à une tourelle de même, soutenu d'une rivière d'azur, à l'étoile d'argent entre deux fasces de gueules. »
Le blason est surmonté d'une tête d'ange, entre la mitre et la crosse.
Nous ne donnons ce blason que sous les plus grandes réserves. Les armoiries de 1696 pour lesquelles l'abbaye avait dû payer la somme exigée, n'ayant plus aucune valeur dès la rentrée du duc Léopold dans son duché de Lorraine, dont Haute-Seille dépendait par indivis avec le comté de Salm. Ces armoiries étaient, d'après le manuscrit de la bibliothèque de Metz :
« de gueules à un croissant d'argent, surmonté d'une croix fiché d'or. »
M. de Martimprey donne un sceau de l'abbaye. Il est rond d'un diamètre de 0,42 centimètres; la Sainte Vierge, assise et couronnée, tient
l'Enfant-Jésus (33). La légende porte : + Sigillum Connventus Monasterii Alte
Silve. Le groupe offre une grande analogie avec la sculpture de l'église (Pl. II, 1.) Le prieur et l'abbé avaient leurs sceaux particuliers.
M. Louis Benoit, ancien bibliothécaire de la ville de Nancy, a décrit très sommairement les ruines de l'abbaye dans le Répertoire archéologique de l'arrondissement de Sarrebourg, Nancy, 1862, in-8°
(CIREY.)
Dans les abbayes en commende, l'autorité dans le monastère appartenait au prieur claustral. Voici le nom de quelques-uns de ces supérieurs
1754. Dom de Marien.
1770. Dom Cortade.
1771. Dom Claude.
1780. Dom. J.-B. Mouzé, puis prieur-curé de Hesse.
1787. Dom Claude-Antoine Combette, né à Ornans le 2 Février 1747, d'une famille patricienne de la ville, bachelier de Sorbonne, secrétaire de l'abbé de
Morimond, neveu de Dom François-Antoine Leclerc (34), prieur-curé de Hesse, décédé le 7 Mai 1787. Il assista à Lunéville aux élections préparatoires de 1789, fut nommé député suppléant (?). Chassé de son monastère, il se retira chez sa soeur Madame Thérèse
Combette, veuve de l'avocat au parlement de Metz, Jean-Jacques Klein, amodiateur de la commanderie de
Saint-Jean-de-Bassel, premier conseiller général pour le canton de Fénétrange, mort en 1791, peu après la session. La conduite du prieur Combette et de ses religieux fut conforme à la règle du grand saint Bernard ils déclarèrent tous vouloir continuer la vie commune d'après les voeux qu'ils avaient prononcés. Le dernier prieur était un grand bel homme, très instruit et d'une conversation enjouée. Il mourut à Fénétrange le 13 Octobre 1830, jouissant de sa petite retraite de prieur. On lit cette inscription sur sa tombe que signalent les insignes sacerdotaux
HIC JACET
ANTONIUS COMBETTE (35),
SACERDOS, OLIM
PRIOR CISTERCIENSIS
OBIIT DIE 13 OCTOBRIS
1830.
REQUIESCAT IN PACE.
D'après M. Jules Gauthier, archiviste du département du Doubs, les armoiries de la famille Combette d'Ornans étaient
« d'azur à l'aigle d'or, fixant un soleil de même. »
Le prieur Combette (36) avait de l'abbaye trois portraits d'une certaine valeur, représentant, croyons-nous, les trois abbés commendataires du monastère MM.
Alliot, de La Tour-du-Pin-Montauban (37), évêque de Nancy, et de
Cambis. Ces portraits se trouvent actuellement dans le salon du supérieur des Soeurs de
Saint-Jean-de-Bassel, auxquelles le prieur les a donnés avant de mourir.
Dom Combette ne perdit pas son sang-froid lorsque les villages plus ou moins voisins, excités par le plus éloigné, le village français de Hesse, vinrent inopinément devant l'abbaye pour en enlever les titres le 1er Août 1789. La spoliation des titres dut être minime, car il y a encore aux archives de Meurthe-et-Moselle 120 liasses sur l'abbaye. Les villages qui suivirent les Hessois furent les villages allemands de
Trois-Fontaines, Bieberkirch et Hartzwiller, les plus éloignés, puis les villages romans de
Hermelange, Cirey, Nieder-Hoff, Tanconville, La Frimbolle et
Bertrambois. M. de Martimprey a raconté le sac de l'abbaye d'après les archives départementales (H. 513). M. J. Favier l'a aussi raconté dans le Journal de la Société d'Archéologie (1894,172), d'après le rapport de Dom
Claudin. Dès 1868, j'avais inséré dans le même journal ce que m'avait raconté un vieillard de
Tanconville, village composé presque entièrement de potiers il y en avait en 1789 plus de onze dans la localité (38). On nomme plaisamment les habitants
« les enfants de Haute-Seille. » Quoi qu'il en soit, après la journée du 1er Août 1789, des carabiniers de Lunéville occupèrent le village et tous les hommes se tinrent cachés dans les bois pendant plus de dix jours. Leurs femmes leur portaient à manger (39).
IX
Il y avait à l'abbaye le 4 Janvier -1791 neuf religieux, qui déclarèrent aux commissaires du district de Blâmont vouloir continuer à mener la vie commune
1. Dom Claude-Antoine Combette, prieur, 44 ans, profession le 1er Janvier 1766.
2. Dom Jacques-François Allard, 66 ans, 15 Juin 1744.
3. Dom François Claudin, 59 ans, 29 Juill. 1757.
4. Dom Louis-François d'Hennezel, 57 ans, 5 Avril 1752.
5. Dom Louis Blondlot, 45 ans, 4 Juin 1766.
6. Dom Otto Xavier Stuppel, 32 ans, 2 Avril 1780.
7. Dom Pierre-Antoine Cottel, 35 ans, 1er Nov. 1779.
8. Dom Louis Mangin, 41 ans, 17 Avril 1772.
9. Dom Irénée Plagnot, 32 ans, 17 Févr. 1782.
Les religieux firent observer aux commissaires que leur maison en y joignant le quartier abbatial, pouvait loger plus de vingt religieux et plusieurs domestiques. Ils observèrent encore que les jardins sont séparés par un très grand mur du surplus des terres, que le bâtiment s'élève au pied des montagnes et est agréable par sa position; il pouvait être conservé pour servir à des religieux rentés qui y viendraient vivre en commun dans le district de Blâmont (40).
Les religieux avaient droit de chasse et de pêche sur le ban du couvent.
L'abbaye subit le sort de tous les monastères de cette époque. On en vendit le mobilier et
« le catalogue des livres des abbayes de Haute-Seille, de Deneuvre et des couvents de Blâmont, » se trouvait dans les temps à la bibliothèque de l'école centrale de Nancy (41).
Le 29 Octobre 1791, lors de la vente du mobilier de l'abbaye, les habitants de Tanconville demandèrent, vu la pauvreté de leur église, qu'on voulût bien leur accorder quelques
« bibelots » (42) pieux, entre autres le grand tableau à cadre doré représentant la Sainte Vierge qui se trouvait derrière le maître-autel de l'église abbatiale, comme patronne du couvent, et d'autres objets servant au culte. Tanconville eut toutes les reliques, celles de saint Bernard, de saint Roch, etc. L'abbé Louis, curé de
Cirey, prit vers 1825 les reliques du Bienheureux abbé de Clairvaux, et dès le 20 Août de cette année, il y eut un grand rapport à Cirey (43), où elles sont vénérées. Celles de saint Roch sont toujours l'objet d'un grand pèlerinage à
Tanconville.
Cette commune demanda aussi une petite cloche du monastère, dont le timbre allait parfaitement avec celui de leur unique cloche. La fabrique
d'Ibigny eut aussi une cloche de Haute-Seille.
Avant de parler de la vente de l'abbaye, que l'on me permette une réflexion. N'aurait-on pas pu l'utiliser pour un service public, pour un hôpital militaire, pour une maison de convalescence pour la troupe ? Cette réflexion me vient en lisant un arrêté du Comité du Salut public et de la Convention nationale du 5 Brumaire an III (26 Octobre 1794), ainsi conçu
« Les militaires qui seront dans le cas d'une longue convalescence auxquels la permission de changer d'air sera jugée absolument nécessaire, seront envoyés dans ces dépôts ou maisons de convalescence, établis à portée de chaque armée, conformément au règlement établi par la loi du 3 Ventôse et l'arrêté du Comité du Salut public du 23 Messidor dernier. »
On fut bien aise pendant les guerres sur le Rhin d'avoir conservé quelques maisons religieuses que l'on utilisa comme hôpitaux, ainsi l'abbaye de Senones qui reçut les blessés de l'armée du Rhin. L'abbaye de Haute-Seille était dans une situation tout aussi favorable et à la même distance du grand fleuve. Quels services l'ancienne maison des Bernardins aurait pu rendre alors au lieu de disparaître après avoir été vendue à bas prix !
L'abbaye abandonnée par ses religieux fut d'abord achetée par M. de
Klopstein, qui venait de s'établir dans le pays. Puis, se ravisant sur son marché, il n'en voulut plus et le céda à son jardinier-concierge avec les plus grandes facilités de payement. Ce dernier accepta l'acquisition bien à
contre-coeur; il craignait de voir revenir les anciens possesseurs, mais ses scrupules prirent fin; il s'enhardit, et la démolition des bâtiments commença, l'hôtel abbatial, le monastère et l'église (44) tout fut nivelé et mis dans l'état où il se trouve aujourd'hui. Les bâtiments des fermiers furent seuls épargnés. Le nouveau propriétaire logea dans le pavillon du jardinier. C'est chez lui que mourut le vieux chasseur des moines, un Allemand que rien ne put détacher de l'abbaye, dans laquelle son existence s'était écoulée calme et insouciante.
Le jardin clos de murs qui remplaçait l'ancienne église conventuelle démolie, a été vendu dernièrement pour la somme de quatre cents francs, avec le beau portail roman que tous les touristes visitaient. Finis Altae silvae
Le moulin et la tuilerie des moines sont encore debout ainsi que leur cense de la Vigne.
Les pierres de taille que l'on voit encore au portail et au mur d'enceinte de l'église, paraissent sortir de la carrière, tant elles sont fraîches de couleur.
Partout on a trouvé, en défonçant le sol, des tombeaux en pierre, en bois, etc. Les tombeaux en pierre dont un est au Musée lorrain, sont souvent en grès vosgien rouge; ils étaient creusés en forme de corps humain, la place pour la tête et le reste allant en s'amoindrissant jusqu'aux
pieds. On n'a rien trouvé de rare quelques monnaies lorraines en argent et en cuivre, etc. (45).
Ce qu'on a trouvé de briques de toutes grosseurs et de toutes formes en démolissant les bâtiments est incroyable. Elles formaient surtout les cintres de l'église abbatiale, etc.
Malgré l'air de tristesse qui règne dans les ruines de l'église et des bâtiments réguliers, l'excursion de Haute-Seille par ses grands souvenirs littéraires et religieux n'en est pas moins, comme le dit l'abbé Grosse, une des excursions les plus agréables des bords de la
Vesouze, et nous ne pouvons qu'engager tous les érudits et tous les archéologues à visiter cette partie de la chaîne des Vosges.
A. BENOIT.
LISTE DES ABBÉS
1. Gérard, 1152-1154.
2. Imbrand, 1154.
3. Fulcon 1er, 1162.
4. Anselme, 1179.
5. Renauld,1185.
6. Fulcon II, 1187.
7. Henri 1er, 1196-1225.
8. Jean Ier, 1127-1275 (?), échange avec l'évêque de Strasbourg le 4 Juin 1249 une cense au Kochersberg contre la cour et la cure
d'Achenheim.
9. Henri II, 1282.
10. Conrard, 1283,
11. Henri III, 1285-1315.
12. Baudouin, 1322.
13. Geoffroy, 1324.
14. Grosmars (Conrard) (?), 1338.
15. Pierre, 1345. Il vend Achenheim au Chapitre de Saint-Thomas, à Strasbourg, par permission de l'abbé de
Theuley, visiteur de l'abbaye, alors à Haute-Seille. (Le monastère comptait Jean, prieur; Nicolas,
cellerier; Albert, économe; Nicolas, sous-prieur, et Jean de Sarrebourg.) (Ch. SCHMIDT.)
16. Albert, 1365 (46)
17. Jacob de Sarrebourg, 1396:1415.
18. Gérard, 1420.
19. Thiriat de Vitrimont, 1433.
20. Jean Milsus, 1436, déposé par ses supérieurs, rétabli par le Concile de Constance.
21. Aubert de Blâmont, 1447.
22. N. Nittin, 1463.
23. Christophe, 1483-1485.
24. Henri IV de Sarrebourg, élu en 1498-1500.
25. Dom Henri V le Moleur, 1504.
26. Adam Husson d'Herbéviller, 1527-1529.
27. Dom Rambaud Gabellot de Merviller, 1533-1555.
28. Dom Jean de Xanrey, élu en 1556; Antoine de Salm, coadjuteur en 1554, abbé intrus en 1557.
29. Dom Jean de Gerbéviller, 1559.
30. Dom Jean Périn de Vaxainville, élu en 1560, mort en 1581.
31. Dom Nicolas Périn, son frère, prieur de Hesse, coadjuteur en 1579, mort le 26 Aoùt 1596.
32. Dom Pierre Guérard, élu en 1596, assiste en costumes pontificaux à l'enterrement à Nancy du duc Charles III, prieur de Hesse, meurt en 1608.
33. Dom Jean Canery, mort en 1627.
34. Dom Nicolas Bernard, coadjuteur en 1617, mort en 1635
35. Dom Louis de Feriet, prieur de Hesse en 1658.
36. Dom Claude de Bretagne de Dijon, fils du président du parlement de Metz, et de Marguerite des Barres, nommé par le roi, coadjuteur en 1651, abbé en 1661, donne sa démission en 1691; Dom Étienne
Thiriet, prieur-curé de Hesse en 1672, et Dom Micolas Doublet en 1690-1705.
37. Dom Jacques Moreau de Mautour, élu en 1692, sujet français, se fit naturaliser lorrain, mort en 1729; Dom François Richard, prieur-curé de Hesse.
38. Dom Henri Lecler, coadjuteur en 1727, dernier abbé régulier, mort en 1747; Dom
Oury, prieur-curé de Hesse en 1724, et Dom Jean Drouet en 1733.
ABBÉS COMMENDATAIRES
1. Joseph Alliot, fils de l'intendant de Stanislas, et de Rose-Marie Mathieu, dont Voltaire eut à souffrir les grossièretés. Né à Lunéville (47) en 1754; 1769; Dom de Marien, prieur de Hesse en 1754; Dom Leclerc, sous-prieur en 1769.
2. Louis-Apollinaire de la Tour-du-Pin-Montauban, né à Paris le 13 Janvier 1744, vicaire général d'Autun, évêque de Nancy en 1775, archevêque d'Auch en 1783, se démit de l'abbaye cette année; évêque de Troyes en 1802, mourut dans cette ville le 28 Novembre 1807.
3. De Cambis, du Comtat-Venaissin, abbé le 19 Octobre 1783, aumônier de la reine Marie-Antoinette, émigra comme le précédent et mourut à Rome en 1793.
APPENDICE
I. TANCONVILLE
En 1710, était qualifié de village ruiné, ban de Haute-Seille. Ce petit village avait une église, consacrée le 25 Février 1749 par Me
Lacour, curé de Blâmont, promoteur du doyenné de cette ville, en l'honneur de la Vierge en sa Nativité, patronne du monastère. Le curé de la Basse-Cour et de la localité était alors Dom Michel
Pierreney, profès de Haute-Seille. La tour carrée (48) fut bâtie seulement sous la Restauration. On lit près de la porte :
Grâce au zèle des autorités locales et aux soins du pasteur, cette tour commencée la première année de l'épiscopat de Mgr de Forbin-Janson, a été bénite par M. Charles Louis, curé de Cirey et de
Tanconville, le jour de la Saint-Roch, 16 Août 1825.
Pendant la Terreur, on saisit dans l'église un calice en argent soufflé, doré en dedans, un ciboire et un ostensoir de même métal avec sa petite étoile, ainsi que la patène couverte d'une feuille d'or, le tout pesant trois livres avec les boîtes d'onction.
On s'empara aussi de trois grandes lampes en cuivre, pesant vingt et une livres, venant sans doute de Haute-Seille, et de six grands chandeliers de même métal, pesant trente et une livres, de même provenance, plus deux Christ en plomb, pesant quatre livres, et deux petits en cuivre, pesant deux livres, enfin deux burettes et deux cloches.
D'après la déclaration de 1790, l'abbé de Haute-Seille percevait annuellement dix paires de réseaux, mesure de Nancy, et deux gros par fauchée. Un étang de vingt-cinq jours et un autre de neuf, mis tous les deux en prairies, lui appartenaient. Sur le ban, il y a les censes de la Grenouillère, du faubourg de Belle-Fontaine et du Moulin. On voit les cantons du Cloître, de la Fontaine, des Potiers, etc.
Bien des habitants avaient des noms allemands Stein, Walser, etc.
La cure fut établie en 1747 et la maison curiale bâtie en 1767. M. F. Savoy était curé en 1789.
Les registres de l'état civil remontent à l'an 1700, ils sont très intéressants les registres de la fabrique vont de cette année à l'an 1721.
Les extraits des archives départementales montrent le désarroi qui régnait au commencement de la Révolution. En l'an III, les corvées pour la République ne sont faites qu'après les dernières menaces. Les gens de Tanconville et
d'Ibigny devaient conduire du blé à Strasbourg. Un propriétaire ne veut confier son cheval qu'à lui-même. Le rassemblement était à Blâmont, etc. Dans ces derniers temps, M.
Ganier, juge au tribunal de Nancy, l'habile dessinateur, fut maire de la commune de
Tanconville.
II. HESSE
L'an 1787, le 7 Mai, à onze heures du soir, est décédé, âgé de soixante-neuf ans, muni des sacrements de pénitence et d'extrême-onction, Dom François Leclerc, religieux de l'Ordre de
Citeaux, prieur-curé de cette paroisse et procureur du Chapitre rural de Sarrebourg. Son corps a été inhumé le surlendemain dans le cimetière de cette
paroisse par nous, doyen curé et archiprêtre de Sarrebourg (49), en présence de MM. Jean Colson (50), curé de
Nitting; Jean-Albert, curé de Walscheid; Charles Matton, curé de
Guntzwiller; Nicolas Corringer, curé de Biberkirch; Louis
Lhuguenot, curé de Hattigny; Mathieu-Félix Bené (51), curé de
Xouassange; Jacques Martin, curé d'Abreschwiller François-Jacques- Victoire de
Maillier, curé de Landange; Jean Delorme, curé de Gondrexange; Dom Jean-Baptiste Mouzé, prieur de l'abbaye de Haute-Seille; Dom Laurent
Blondot, procureur de la même abbaye; Dom George Le Moine, religieux de la même abbaye; haut et puissant seigneur Messire de Saintignon de
Nitting; Me Jacques Klein, avocat au parlement, et M. Michel Berga (52), négociant à Sarrebourg, ses neveux par alliance, qui ont signé avec nous.
(1) C'est ce qui faisait dire
Bernardus valles, colles Benedicius amabat.
(2) La carte de Cassini marque une chaussée de Haute-Seille à
Blâmont. Il y a maintenant un chemin de fer de Blâmont à
Cirey. Haute-Seille était sur une route de Blâmont à Strasbourg, très fréquentée au Moyen-âge, par
Cirey, Châtillon, Turquestein, Saint-Quirin, Abreschwiller,
Dabo, Obersleigen, Wasselonne et Strasbourg. Peu à peu, le souvenir de cette route se perdit.
(3) Dictionnaire statistique du département de la Meurthe, Lunéville, 1843, II, 99.
(4) Le poète Désiré Carrière visita Haute-Seille. Il vante l'ordre de
Citeaux, dont le monastère qu'il voit, ne présente plus que des ruines.
(Oeures choisies, Mirecourt, page 400.)
(5) Le monastère avait été fondé en 1130- Il fut depuis du nouveau diocèse de Dijon, puis de celui de Besançon, arrondissement de Gray, canton de Dampierre (Haute-Saône). L'abbé était visiteur de Haute-Seille comme Père spirituel.
(6) Documents et mémoires pour servir à l'histoire du territoire de Belfort, Besançon, 1884. 224.
(7) Documents sur Agnès de Langstein (Journal, 1883, 147).
Thierry Ier était fils de Louis 1er, comte de Mousson, et de Sophie. comtesse de Bar. Son aïeule était, toujours d'après M. Léon Vieillard, Hildegarde, soeur de Léon IX, le pape alsacien, né au château de
Dabo.
Langstein est le nom allemand du château de Pierre-Percée, près
Badonvillers. Ses seigneurs durent être les voués de l'abbaye et non ceux de Lützelstein.
(8) Diocèse de Toul, archidiaconé de Port, doyenné de Deneuvre. En 1775, du diocèse de Nancy.
(9) Pays entre la Moselle et les Vosges.
(10) En 1147, l'évêque de Metz en parle dans ces termes Abbatiae altae silvae de novo in vasta solitudine
fundata. Ruyr eut entre les mains des documents qui avaient disparu au XVIIIe siècle. Il cite parmi ses sources Chartae Altae
Silvae, Chartae S. Salvatoris in Vosago, etc.
(11) L'abbaye de Saint-Sauveur remplaça Bon-Moutier ruiné et fut elle-même remplacée par Domèvre qui fut détruit à la Révolution.
(12) RUYS. Ils sont nommés comtes de Blâmont, ou de Salm, ou de
Langstein.
(13) WAGNER. Sarrebourg, 1889, 45, 83.
(14) Il est intitulé Dolopathos, sive de Rege et aeptem
Sapientibus.
(15) Poème du traducteur Herbert.
(16) En voici le sommaire d'après Weiss (Biographie universelle). Un jeune prince élevé par sept philosophes dont le principal est Virgile, est accusé par sa belle-mère d'avoir voulu attenter à son honneur. Le roi furieux fait condamner à mort son fils qui persiste à garder le plus profond silence. Un des instituteurs du prince prouve au roi par un conte que l'on doit se défier des apparences; la reine répond par une histoire qui détruit l'effet de la première. Mais le jeune prince est sauvé pour ce jour-là. Pendant cinq jours chacun des instituteurs obtient de la même manière la grâce du prince et la reine sa condamnation.
Enfin Virgile parait et sauve définitivement la vie au malheureux qui recouvrant enfin la parole, démontre complètement son innocence. La reine est condamnée séance tenante à subir le supplice réservé à l'innocent. Elle périt dans les flammes chargée de la malédiction de tous.
(17) Variante
Un blanc moine de bonne vie,
De Haute Selve l'abbaye,
A cette histoire novellée,
Par biau latin l'a ordenée;
Herbert la veit en romans fère,
Et del romans un livre fère.
(18) Bégin dit que Jean, moine de Haute-Seille, fit passer au
XII- siècle le Roman des Sept Sages du grec en latin et Herbert se servit, d'après lui, de cette traduction pour mettre le poème en français
(19) Dr BÉGIN. Histoire des Lettres, des Sciences dans le pays messin, Metz, 1829, 252.
Mgr MATHIEU. Un romancier lorrain au XIIe siècle. (Mémoires de l'Académie de Stanislas, 1882, 188, 245).
(20) Le précieux manuscrit du moine Jean ne figure pas dans un petit catalogue des manuscrits lorrains de la bibliothèque de Luxembourg, donné récemment dans le Journal de la Société d'Archéologie. Il devait venir de la riche abbaye
d'Orval.
(21) Le domaine appartenait sous la Restauration à M. Reibell, conseiller de préfecture à Strasbourg, député du Bas-Rhin.
(22) En 1704, le jardinier de l'abbaye est « sépulturé » dans l'église abbatiale, devant l'autel. Il y a le fermier de la Moitresse-de-la-Vigne (écart de
Cirey).
Toutes les vignes ont disparu du pays depuis longtemps.
(23) En 1702, La Verdure, domestique des demoiselles du Châtelet à
Cirey, figure comme témoin.
Marie-Catherine du Chàtelet, fille de Pierre-Antoine, chevalier, marquis du Châtelet, baron de
Cirey-en-Vosges, etc., et de Marie Richard de Jaulny, épousa en 1709 le comte de
Gresche, seigneur de Jallaucourt, chambellan du duc de Lorraine, grand duc de Toscane, capitaine de cuirassiers de l'armée impériale.
Il ne faut pas confondre Cirey-en-Vosges avec Cirey-en-Champagne, où résida Voltaire. Marie-Catherine, fut baptisée à Cirey le 1er Janvier 1684.
(24) D. FISCCHER, Die ehemalige Abley Hesse, Mulhausen, 1866, 20 pages.
H. KOHN, Hesse, son ancienne abbaye, son prieuré, son église, Nancy, 1872,
in-8°, 83 pp. planches.
(25) Dom François Richard, profès de Lucelle, prêtre le 27 Mars 1685, prieur-curé de Hesse 1713.
(26) Le frère Richard, curé de la Basse-Cour, est témoin de la mort d'une jeune fille de vingt ans, qui
« donné les marques très sensibles de ses péchés et grande résignation à la volonté de Dieu. »
(27) THIBAULT, Matières bénéficiales, 150
(28) L'abbé de Morimond, Dom Nicolas Philbert de Dijon, eut cependant le courage d'approuver la nomination de Dom
d'Estrepy. Mais il dut changer d'attitude devant la conduite de son chef suprême, l'abbé général de
Citeaux.
(29) Histoire d'un domaine rural en Lorraine, 1, 127.
(30) L'hôtel abbatial avait été reconstruit d'un fort beau style, sous le roi Stanislas, dit
Durival.
(31) M. de La Tour-du-Pin-Montauban, abbé commendataire, évêque de Nancy.
(32) SCHOEPFLIN-RAVENEZ, IV, 592; v, 275.
(33) Ce sceau parait remonter au XIV' siècle.
(34) Son portrait à l'huile se trouve chez M. l'abbé Berga à Paris. Dom Leclerc était procureur du Chapitre rural de Sarrebourg. L'évêque de Metz le chargeait toujours d'instruire toutes les affaires délicates de l'archiprêtré. Dom Leclerc avait eu quelque temps pour yicaire son neveu Dom
Combette. Dom Mouzé le remplaça à Hesse à sa mort. Il adopta les nouvelles idées et eut une assez triste fin.
(35) M. l'abbé Berga possède aussi une miniature du prieur
Combette, son grand-oncle; il porte perruque
(36) Ce fut sa soeur, Madame veuve Klein, qui livra au département les archives de l'ordre de Malte à
Saint-Jean-de-Bassel.
(37) Le cadre carré de M. de Cambis est de toute beauté. Celui de M. de Montauban est ovale.
(38) Ils prenaient la terre dans l'étang du village et ils payaient pour ce droit annuellement huit sols de Lorraine, le roi prenait le tiers de cette somme et la commune le reste.
(39) On trouve dans le Journal A. BENOIT, La tombe du prieur
Combette, 1868, l'église de Hesse sous les derniers abbés de Haute-Seille, 1866.
ANONYME. Tombeaux et monnaies trouvés à Haute-Seille, 1860, 1877.
CHAPELLIER. Le cri de la fête à Haute-Seille, 1875.
Dans les Mémoires de 1886, il y a Le Château de Turquestein, par H.
LEPAGE, on y trouve 9 chartes sur Haute-Seille.
(40) Archives départementales de Meurthe-et-Moselle.
(41) Le 2 Avril 1791, on vendit à Blâmont deux prés appartenant à l'abbaye et, le 16 Mai suivant, la maison où avait résidé l'abbé de
Mautour. Une vente de terres eut lieu aussi à Saint-Médard, etc., etc.
(42) Expression fin de siècle en faveur chez quelques archéologues !
(43) Michel dit que les deux rapports en l'honneur de saint Bernard à Haute-Seille attiraient de 3 à 4.000 personnes. On y vendait principalement de la mercerie et de l'épicerie le dimanche après le 20 Août et le 8 Septembre.
(44) Elle eut lieu sans accident. Au mois d'Août 1805, un maçon natif
d'Harboué fut tué lors de la démolition de l'abbaye voisine de Domèvre par l'effondrement d'une voûte.
(45) D'après H. Lepage, en 1843, on voyait encore quelques débris des cloîtres et des cellules et une chétive portion de voûte. Tout cela a disparu.
La cense de la Vigne sur la hauteur dépend du ban de Haute-Seille. On y jouit d'une belle vue sur les Vosges.
(46) Abbés dont l'époque est inconnue: Étienne, mort le 2 Mai, et
Raimbaud, mort le 16 Mai.
(47) Les enfants de ce serviteur du roi de Pologne tinrent une conduite des plus scandaleuses, et les filles. et les gerçons : l'abbé des Prémontrés de
Jendeure, 1768-1790; l'abbé commendataire des Cisterciens de
Saint-Benoit-en-Voivre; le chanoine de la cathédrale de Nancy, Nicola.François
Alliot; l'un d'eux, presque en enfance, rendit à Lunéville ses lettres de prêtrise pendant la Terreur.
La grande affaire de ces abbés de cour était de toucher les revenus de l'abbaye. Ils ne montaient pour l'abbé, d'après l'Almanach royal, qu'à 2.000 livres La cour de Rome touchait 70 florins à chaque mutation d'abbé. Benoit-Picart dit qu'en 1711, les revenus pour l'abbé et les religieux se montaient à 3.500 livres. Thibault les met en 1763 à 15.000 livres
; il dit que l'abbaye de l'Ordre de Citeaux non réformé était exempte de l'ordinaire (l'évêque de Toul) et que le pape était collateur. A la Révolution, les revenus se montaient à 40.000 livres. Ce n'était pas un bien pour le monastère, car l'Ordre de Citeaux devenu trop riche, avait malheureusement bien changé. On a lu ce que dit l'abbé Grosse à propos de la ruine du monastère de Haute-Seille.
En 1768, le revenu était déjà estimé 34.000 livres, dont 12.000 pour l'abbé et le reste pour les moines ! Et officiellement on ne marquait que 2.000 livres
(48) Sous la tour est la tombe du curé Helfin qui est invoqué contre la grêle. Dès que l'orage menace, on fait dire des messes en sou honneur. C'est une coutume toujours suivie.
(49) Philippe-Michel Georgel avait été supérieur du collège Saint-Claude à Toul, il y prononça l'éloge de l'évêque
Drouas; au Concordat revint dans sa paroisse et y mourut.
(50) Député du clergé en 1789. On a son portrait gravé.
(51) Porté pour évêque constitutionnel, mort curé de Fénétrange, le prêtre qui prononça son oraison funèbre, eut la malice de prendre pour texte Bene omnia
fecit, et c'était vrai.
(52) Michel Berga fut le premier maire de Sarrebourg. C'était mon grand-oncle et l'avocat Klein mon bisaïeul. Je possède le verre à boire avec inscription de Dom Leclerc.
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