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Le miniaturiste lorrain Nicolas-François Dun (1764-1832)


Bulletin de la Société de l'Histoire de l'Art Français
Société de l'Histoire de l'Art Français
1925

Le miniaturiste lorrain Nicolas-François Dun (1764-1832).
(Communication de M. Carlo Jeannerat.)

L'histoire du portrait en miniature, de même, du reste, que les autres branches de l'Art, présente à chaque instant une foule de problèmes qui attendent leur solution par la découverte de pièces documentaires.
Tel a été jusqu'ici le cas Dun.
Les collectionneurs de petits portraits et de souvenirs napoléoniens et les historiens de l'art Empire ont été souvent intrigués par cette maigre signature posée sur des miniatures que Henri Bouchot, dans la suite d'articles sur le portrait-miniature en France publiés en 1892-1895, qualifie de «  petits riens mièvres, étroits, mesquins, défiant la loupe, abominablement poncifs et pourléchés et cependant attachants comme des pages de missel, brillants comme des émaux ».
Je me permets de ne pas partager complètement l'opinion excessive exprimée par cette phrase légèrement rhétorique.
Il y a de médiocres miniatures signées Dun, et il y en a aussi d'excellentes. Leur technique inégale ne trahit pas une origine bien définie; le modelé des portraits manque souvent de solidité et il a la superficialité de bien des miniatures anglaises ; leur dessin, correct mais un peu sec, les rapproche de ceux d'école italienne; les fonds sont le plus souvent à l'aquarelle, à petits traits de pinceau, mais il ne manque pas ceux complètement gouachés d'après les meilleures traditions françaises.
Une particularité bien spécifique est le soin minutieux des détails dont il meuble ses intérieurs, et la couleur rose tendre dont sont fardés le plus souvent les modèles.
Les recherches que j'ai faites de ces œuvres m'ont permis d'en repérer jusqu'ici le nombre respectable de soixante-dix-huit, toutes signées et quelques-unes même datées.
Qui était-ce donc le mystérieux personnage qui se cachait sous le nom insaisissable de Dun?
Sans vouloir approfondir l'origine ethnique et étymologique de ce mot, il est curieux d'observer qu'il se trouve à avoir une racine commune en France et en Angleterre, ce qui nous permet d'expliquer la confusion que ce nom a donnée aux biographes qui se sont occupés de cette recherche. Le mot celtique Dun (Dunum) a la même signification «  d'élévation », «  d'éminence », que le mot anglais Dun, et il se trouve comme préfixe à plusieurs noms de villes sur la côte d'Ecosse et en France. Les villes de Dun (dans le comté d'Angus en Écosse), Dunbar, Duncastel en Angleterre, trouvent leurs correspondants en France dans les villes de Dun (en Ariège), Dun-sur-Meuse, Dunsur-Auron ou Dun-le-Roi, Verdun, etc.
Il existe aussi comme nom de famille tant en Angleterre qu'en France. Il y a eu le jurisconsulte écossais Lord Dun, le violoniste également écossais Finlay Dun qui, par une étrange coïncidence, était justement «  prima viola » au théâtre de San Carlo à Naples à l'époque où notre Dun y exerçait la miniature; on trouve enfin à Paris, au XVIIIe siècle, une famille Dun qui a donné des musiciens, violonistes et compositeurs, et des chanteurs à l'Opéra et aux théâtres de la cour.
Est-ce à cette dernière famille qu'il faudra un jour rattacher notre miniaturiste? Peut-être. Si mes conclusions n'ont pu arriver jusque-là, il y a de fortes présomptions en faveur de cette hypothèse. Le fait que le père et le grand-père de notre Dun étaient musiciens à la cour de Lorraine fait penser tout de suite à une parenté avec les musiciens de Paris; mais la preuve n'est pas encore faite.
Voyons ce que l'histoire avait raconté jusqu'ici sur le compte de Dun miniaturiste.
Le dictionnaire des artistes de Nagler affirmait qu'il était Flamand et qu'il avait travaillé à Naples : ainsi, Maze-Sencier et Henri Bouchot s'appuyèrent sur son autorité. Le prince Filangieri, dans le catalogue vaguement historique du musée qu'il a laissé à la ville de Naples, avouait, en 1888, que cet artiste, sur le compte duquel il ne pouvait pas donner de détails, avait suivi les troupes françaises à Naples au début du XIXe siècle, et il s'y était établi. D'autres compilateurs de catalogues pensèrent que la signature Dun pouvait être une abréviation pour Dumaine ou Dubourg, et quelques antiquaires se crurent même autorisés par ces circonstances à la compléter d'autorité : Dun est devenu trop souvent Dumont, ce qui n'est pas du tout dépréciable.
A compliquer le problème, voilà que le dictionnaire des artistes de Thieme et Becker a dédié à cet artiste une longue colonne en faisant de Dun une seule personne avec l'Irlandais John Dunn, qui avait fréquenté l'école de dessin de Dublin depuis 1768, qu'on supposait s'être perfectionné à Paris et qui avait exposé au début du XIXe siècle à Dublin où il résida de 1828 à 1841.
Quant au dictionnaire de Benezit, il a renchéri la dose, en incorporant dans le même personnage un troisième Dun, un paysagiste, qui exposa à la Royal Academy jusqu'en 1884, c'est-à-dire quand notre Dun aurait eu l'âge de 122 ans.
Tout ça n'était pas clair; seulement de Naples, où cet artiste avait travaillé pendant tout le premier quart du XIXe siècle, pouvait venir la lumière; ce problème, dans lequel il était question d'un miniaturiste et de l'Italie, me concernait doublement. Je n'ai pas manqué à ma tâche, et je suis fier de pouvoir partager avec les collègues de la Société de l'Histoire de l'Art français la primeur de cette trouvaille, qui sera développée prochainement dans un article de revue.
Dans mon dernier voyage, j'ai eu la chance remarquable de mettre la main sur le registre de l'arrondissement où notre artiste est mort, le 19 juillet 1832.
Avec ce point de départ, il n'était pas difficile de remonter à son origine et les recherches continuées en Lorraine nous permettent de tenir la clef de son secret.
Nicolas-François Dun, fils légitime du sieur François-Jacques Dun et de demoiselle Anne-Françoise Lagrange, son épouse, est né le 28 février 1764 à Lunéville et il y a été baptisé le 1er mars suivant.
Son père, François-Jacques, ordinaire de la musique du roi Stanislas Leczynski en qualité de second violon dans l'orchestre de la cour, habitait déjà Lunéville en 1762 : en cette dernière année il avait, en effet, épousé dans la paroisse de Couvay, hameau qui fait partie maintenant de la commune d'Ancerviller (Meurthe-et-Moselle), demoiselle Françoise Lagrange, fille mineure du sieur Jean-Nicolas Lagrange et de demoiselle Jeanne Droüet.
Son grand-père, Jean-Jacques Dun, aussi ordinaire de la musique du roi, avait comme femme Marguerite Barbiche, et le lieutenant Charles Denis, dans son inventaire des registres de l'état civil de Lunéville, publié en 1899, nous signale que cette dernière, restée veuve, épousa en 1756 le sieur Jean Nicolas, procureur du bailliage de Lunéville.
Nous avons donc les preuves que le miniaturiste Dun est Lorrain de naissance, Lorrain par trois générations en ligne maternelle et deux, au moins, du côté paternel ; il a donc droit d'être cité parmi les artistes lorrains et d'être compris dans la grande famille qui a donné à la France les plus grands miniaturistes de la fin du XVIIIe siècle et de l'Empire : J.-B. Augustin, Jean-Antoine Laurent, François Dumont, J.-B. Isabey, ainsi que grande partie des apprentis de l'atelier d'Isabey, que ce dernier allait embaucher à Nancy, tels que Nicolas-Jacques-Léon Larue, dit Mansion, J.-B. Singry, J.-B. Soyer, etc.
Il est né dans la même ville que les miniaturistes Jean Girardet, François Dumont (son aîné de treize ans), le frère de ce dernier, Tony Dumont, Mme Jeanne-Bernard Dabos et Jacques Fleury.
Le nom de Dun ne figure pas dans l'Essai de répertoire des artistes lorrains de A. Jacquot, mais au même titre on pourrait reprocher à ce dernier l'oubli d'autres miniaturistes, tels que Pierre Démange, Vincent Bertrand et son fils Louis, François Badiot, le marquis de Boufflers, Charles Duval, Henri Michel, Sophie Jadelot, Jean-Pierre Robelot, Faivre, et ce chevalier Bernard de Guérard, Lorrain d'origine, qui alla travailler à la cour d'Autriche et des Deux-Siciles, et mourut à Naples en 1836.
Il reste donc de l'ouvrage pour les historiens de l'art, et je m'empresse d'ajouter que l'oubli de M. Jacquot a une excuse : Nicolas Dun est parti de sa ville natale très jeune et ne paraît plus y avoir fait retour. Vers 1790, nous le trouvons à Naples et nous ignorons quel chemin il a suivi, quelles sont les études qu'il a faites, à quel titre il s'est mis en voyage.
Quelle éducation artistique et quels rapports avait-il eus avec les miniaturistes de Lunéville, avant son départ pour l'Italie ?
Il était âgé de cinq ans lorsque son concitoyen François Dumont, resté orphelin, quitta Lunéville avec ses frères pour venir travailler à Paris; ce n'est donc pas possible de trouver une liaison entre l'art des deux miniaturistes, à moins que Dun n'ait pu retrouver Dumont à Rome, en 1784, au moment où ce dernier, après les premiers succès de Paris, ayant rêvé de se dédier au grand art, se rendit en Italie pour un séjour de quelques mois.
Il paraît aussi peu probable que Dun ait pu avoir comme maître ce Jean Girardet dont Dumont avait été l'élève, car Girardet mourut à Nancy en 1778 lorsque notre miniaturiste avait à peine quatorze ans. Ajoutons enfin que Dun avait le même âge (à quelques mois près) que ses collègues ès miniatures Jacques Fleury, dont on ignore le maître, et Jeanne Bernard que Bellier de la Chavignerie dit élève de Mme Guyard et qui épousa plus tard le peintre toulousain Laurent Dabos.
Le temps qui s'est écoulé avant la vingt-sixième année de Dun (c'est-à-dire 1790) reste donc assez mystérieux.
Est-ce que le retour de la Lorraine à la France à la mort du roi Stanislas, en 1766, porta un changement ou un déplacement de la famille du musicien de la cour ?
Le jeune Dun a-t-il été enrôlé, à l'âge de la conscription, et incorporé dans quelque régiment faisant partie des corps d'expédition, d'occupation ou d'observation dans le Midi ? Nous ne possédons pas encore de documents ni d'indications susceptibles de répondre à ces questions.
L'affirmation du prince Filangieri qu'il soit entré à Naples à la suite des troupes françaises manque de précision et doit être soumise à contrôle. Ce n'est guère avec le général Championnet que notre artiste se porta à Naples, car nous retrouvons trace de portraits exécutés dans cette ville une huitaine d'années plus tôt.
L'activité de Dun, d'après les œuvres que j'ai pu examiner et classifier, peut se diviser en trois périodes : celle qui va de son arrivée à Naples jusqu'en 1808, celle de 1808 à 1815 (époque Murat) et celle de 1815 à sa mort.
A la première époque, qui commence par la miniature chronologiquement plus ancienne comme date, c'est-à-dire celle d'un officier de marine de 1790, de la collection Bernard Franck, appartient un groupement de portraits qui semble clôturer cette période brillante qui a attiré les grandes personnalités artistiques et littéraires en mal de classicisme à la cour de Lady Hamilton, à Naples. Angélica Kauffmann, le peintre et miniaturiste Henri-Frédéric Füger, le paysagiste Hackert, Göthe, Tischbein et Mme Vigée-Lebrun s'étaient suivis dans ce pèlerinage esthétique, attirés par le milieu suggestif d'art créé par les fouilles d'Herculanum et par les «  attitudes » des tableaux vivants du beau modèle de Romney, cette Emma Lyon, cette Miss Hart que Lord Hamilton avait ravie à son neveu et avait épousée.
Dun paraît avoir été aussi convié à recueillir les fleurs, sinon les miettes, du festin, car, dernier arrivé, il fit un médaillon de Lady Hamilton destiné à son ami l'amiral Acton,et fit aussi les miniatures de ce dernier, alors gouverneur de Gaëta, et de son fils, cadet de marine, en 1810.
Le succès du miniaturiste dut lui attirer bientôt l'attention de la cour, car les portraits de la reine Marie-Caroline de Bourbon (sœur de Marie-Antoinette), que j'ai retrouvés, doivent dater des premières années du XIXe siècle.
Certainement, les comptes de la maison de Bourbon pourront prochainement nous donner des précisions sur les livraisons de Dun à la cour de Naples, mais les archives royales ne sont pas encore à la disposition du public.
Aux premières années du XIXe siècle doivent aussi se rapporter les miniatures de la princesse de Bauffremont, née Paterno-Moncada (aujourd'hui chez la princesse de Viggiano à Rome), de la princesse Belmonte-Ventimiglia (qui a été exposée à Londres en 1865 au South-Kensington-Museum) et de la duchesse Harley d'Oxford (dans une collection particulière à Milan).
On a pas de preuves que Dun ait travaillé pour Joseph Bonaparte pendant les deux années de son royaume napolitain, mais on trouve à Rome, chez le comte Primoli, le portrait d'Alexandrine de Beauchamps, femme de Lucien Bonaparte. Peut-être a-t-il été exécuté à Rome pendant un séjour de l'artiste qu'il est utile de signaler. Le catalogue des artistes établis à Rome environ 1808, publié par Guattani dans les Memorie enciclopediche romane, porte en effet parmi les peintres de miniatures et de petits portraits un Monsieur Deun qui, malgré une variante d'orthographe, ne paraît pas douteux.
La période suivante, de 1808 à 1815 (époque Murat), est très intéressante pour l'histoire de la miniature à Naples, parce qu'elle voit consacré officiellement par une classe d'enseignement particulier à l'École des arts du dessin l'essor que cet art avait eu pendant le règne de Ferdinand IV (Ier des Deux-Siciles).
Ce roi, appelé Re Nasone, dont la laideur est proverbiale, peut-être à la recherche instinctive et inassouvie de l'artiste idéal qui sut donner à son portrait un aspect séduisant, s'est fait peindre en grand et en petit, par tous les artistes qui se sont trouvés à Naples pendant les trois reprises de son règne, et l'exemple du souverain a créé une telle vogue et donné un tel développement à l'art de la miniature qu'on signale, pour la seule ville de Naples, une trentaine et plus de spécialistes, sans compter les étrangers de passage.
Cette floraison exceptionnelle a eu sa consécration, comme je disais, par une classe de miniature instituée par le roi Joachim Murat, à l'occasion de la réorganisation de l'Académie royale de dessin, par le décret du 25 septembre 1809.
La propagande artistique de la maison impériale et des cours napoléoniennes, dans un but d'opportunisme politique, retrouve ici encore un témoignage frappant et nous procure une source peu connue des recherches historiques.
Naples est, en effet, la seule ville (avec Saint-Pétersbourg) où la miniature a été enseignée officiellement, pendant quelque temps, à une école d'État. A professeur de cette classe fut nommé Antonio Zuccarelli, qui sut défendre les intérêts de son art jusqu'à la mort (1818).
On lui doit naturellement plusieurs portraits en miniature du roi Joachim, qui ont été gravés. Mais en même temps qu'à ce miniaturiste, qui avait rang officiel, la cour s'adressait aussi à d'autres artistes pour les portraits des tabatières et des cadeaux diplomatiques; c'est ainsi qu'on en trouve signés par des noms français, tels que Ulysse Griffon, Jean Marras, Dun.
Dans les papiers d'archives provenant de Naples, survivants d'une fâcheuse dispersion, qui appartiennent aujourd'hui au prince Murat, on trouve dans les Comptes de la reine, 1814 (sa cassette), des détails très intéressants sur les artistes français qui ont livré des œuvres à la reine Caroline ou qui étaient pensionnés par elle. A côté de paysages de Denouy, de tableaux de Granet, de pierres gravées de Pickler et d'œuvres de Mazois et de Montagny, on trouve signalés des portraits en miniature par Dun. Ces portraits, espacés en plusieurs commandes, représentent le roi, la reine et leurs enfants en différents formats (une série est spécifiée comme étant destinée à être placée sur une boîte rouge de S. M. la reine Caroline) et on les retrouve aujourd'hui dispersés en différentes collections; une série complète est chez le prince Murat à Chambly; une autre chez la comtesse Badeni à Lemberg. Dans la collection du prince Murat, on conserve aussi l'émouvant souvenir de la montre que le roi portait sur lui quand il fut fusillé, et celle-ci porte au dos, sur deux petits losanges, les portraits du roi et de la reine, également signés par Dun.
Et dans la même collection on trouve un service de tasses en porcelaine de la manufacture de Capodimonte décorées avec les portraits des membres de la famille royale de Naples, également d'après Dun.
Chez M. Brouvet, à Paris, se trouve un beau portrait, très frais, très ressemblant, très stylé, de la reine Caroline. Il est placé au-dessus d'un presse-papiers, en lave du Vésuve, sur lequel est gravée la devise Chaque jour davantage, et il fut donne par la reine à l'intendant de sa maison de Mercey.
Des portraits isolés de la reine sont aussi dans la collection de M. Marmottan à Paris, chez la comtesse Isolani, une descendante de Lœtitia Murat, à Bologne, et au Musée Filangieri, à Naples, où la reine est représentée dans l'uniforme de son régiment de hussards napolitains. Un autre exemplaire fut donné par la reine Caroline a Mme Récamier en souvenir de son voyage à Naples et passa en vente publique à sa succession (1893).
Des portraits du roi Joachim (qui le montrent dans les dernières années de sa vie, quand il portait la moustache) se trouvent dans la collection de M. Bernard Franck et chez le comte de Neipperg, à Schvaigern (Wurtemberg).
Portraits, enfin, des jeunes princes et princesses, se trouvent chez le prince Victor-Napoléon, le prince de la Moskowa, la princesse Eugénie Murat, et un exemplaire du portrait du prince Achille est passé à la vente Wellesley à Londres en 1921.
Au retour des Bourbons à Naples, Dun changea son fusil d'épaule et continua à travailler pour la cour, à laquelle, nous avons vu, il avait déjà livré quelques portraits de la reine Marie-Caroline (morte en 1814). Ainsi, en 1816, il fit celui du roi Ferdinand pr et celui de Lucia Migliaccio, veuve du prince de Partanna, que le roi avait épousée morganatiquement en lui donnant le titre de duchesse de Floridia. Cette dernière est représentée avec sa fille cadette, Marianna, née en 1808, qui épousa plus tard le comte Serra di Montesantangelo. (La miniature appartient à M. Roseo, à Naples.)
En cette même année 1816, Dun fit le portrait de Léopold de Bourbon, prince de Salerne, deuxième fils du roi Ferdinand, et cette miniature est entrée avec les collections léguées par le duc d'Aumale au Musée Condé, à Chantilly.
L'année suivante, notre artiste eut la commande des portraits du comte Grégoire Wladimirowitch OrlofT et de sa femme, née Anna Ivanowna Soltikoff. Le comte Orloff, neveu de l'ami de la grande Catherine, faisait de longs séjours à Naples, amoureux de l'Italie et passionné pour les découvertes de Pompéi, sur lesquelles il avait écrit des mémoires avec la collaboration de la comtesse, femme de lettres très cultivée qui inspira la lyre du poète Lampredi, entre autres dans une ode dédiée à sa voix harmonieuse :
«  Sul labbro suo gentile - in puro e colto stile
«  Sonar parea più bella - l'italica favella... »
Ces deux miniatures appartenaient jusqu'ici au prince Galitzine à Marijno (gouv. de Nowgorod), mais le charmant portrait de la princesse vient de passer dans la collection de M. David Weill.
En 1820, Dun fit la miniature de Mme Escalon, née comtesse d'Albon, et peut-être à cette même époque appartient la miniature que S.A.I. le grand-duc Nicolas Michaïlowitch possédait, représentant le prince Dolgorouki.
Toute la vie artistique de notre miniaturiste se serait passée à l'écart du mouvement et de la connaissance du public français, si, tout à coup, en 1824, on n'était pas surpris de lire dans le premier supplément du catalogue du Salon de Paris cette mention :
N° 2195. Dun, à Naples. Portrait de S. A. R. Mgr le duc de Calabre, miniature;
N° 2196. Ibid. Portrait de S. A. R. Mme la duchesse de Calabre, miniature.
Et dans le catalogue du Salon de 1827 :
N° 1273. Leroux, Jean-Marie. Portrait de S. M. le roi de Naples, d'après Dun;
N° 1274. Ibid. Portrait de S. M. la reine de Naples, d'après Dun.
Je m'empresse de dire que ces deux dernières œuvres ne sont que les gravures d'après les miniatures exposées trois ans auparavant sous les noms de duc et duchesse de Calabre.; le roi Ferdinand Ier étant mort entre-temps, le prince héritier, duc de Calabre, était en effet devenu roi, en 1825, sous le nom de François Ier. Le dictionnaire de Thieme, par contre, récidive dans ses erreurs et prétend que les gravures représentent le roi Joachim et la reine Caroline Murat.
Il ne faut pas déduire par cette participation de Dun au Salon qu'il soit venu à Paris (du reste, le catalogue explique clairement Dun à Naples) : les miniatures furent envoyées à Paris pour être gravées ; elles furent exposées à cette occasion et rentrèrent ensuite à Naples, au château de Capodimonte, où elles se trouvent encore actuellement.
Ces deux miniatures sont très remarquables pour un miniaturiste déjà âgé de plus que soixante ans; celle qui représente la reine Marie-Isabelle présente en plus un intérêt particulier, parce que le peintre a synthétisé dans un seul portrait toute la famille royale sous l'espèce des miniatures que lui-même avait livrées à la cour. Aux deux côtés du miroir qui se trouve au-dessus de la table sur laquelle la reine appuie son bras gauche, sont suspendues les miniatures des dix enfants nés avant 1824; il manque les deux derniers, nés plus tard, ainsi que la princesse Marie-Caroline-Ferdinande, plus tard duchesse de Berry, que le roi avait eue de son premier mariage avec Marie-Clémentine d'Autriche.
En plus, la reine porte sur la poitrine, barrée par le grand cordon de l'ordre royal espagnol de Marie-Louise, un médaillon avec le portrait du roi son mari, et au bracelet celui avec le portrait de son beau-père Ferdinand Ier.
On ne pourrait vraiment pas demander plus à l'artiste, qui nous signale ainsi des portraits qu'on retrouve aujourd'hui très dispersés : celui de la plus jeune princesse, Marie-Caroline-Ferdinande, sœur homonyme et filleule de la duchesse de Berry, appartient actuellement au duc Della Grazia.
La liste des œuvres de Dun continuerait encore, et je pourrais en citer une douzaine qui sont passées dans les ventes ou qui se trouvent dans des musées (par exemple la Wallace Collection à Londres, le Musée de Gotha et le Musee Filangieri à Naples) et dans des collections particulières, mais, malheureusement, les personnages représentés cachent leur personnalité sous un stricte anonyme.
Me voilà arrivé à la fin de mon travail de glaneur, et j'arrive justement là d'où j'ai pris le premier essor pour essayer de reconstruire à rebours et tirer de l'oubli la vie modeste et méritante de ce Lorrain, de ce Français jusqu'ici complètement inconnu.
Voici le document capital que j'ai retrouvé à Naples.
«  Nicolas Dun, peintre portraitiste, originaire de Lunéville en Lorraine, âgé de soixante-huit ans, mari de Marie-Anne-Claire Mouton, de Toulon en France, est mort à Naples, Riviera di Chiaia, 118, à dix-huit heures, le 19 juillet 1832. »

Essai chronologique des portraits en miniature connus de N. Dun.

Officier de marine, 1790 Coll. Franck. Paris.
Officier de marine française, an V Coll. Blenck. Munich.
Dame avec écharpe tricolore, Musée Filangieri (n° 2664), Naples.
Catherine Paterno-Moncada, princesse de Bauffremont, Coll. princesse de Viggiano. Rome.
Lady Hamilton, Coll. Miss Ouvry. Londres.
Mme Tallien (?),Coll. Simon von Metaxa, Vienne.
Dame inconnue, 1805 ?, Coll. James Simon. Berlin.
Alexandrine de Beauchamps, femme de Lucien Bonaparte, Coll. comte G.-N. Promoli. Rome.
Princesse de Belmonte-Ventimiglia, 1810?, Coll. H. E. Acton. Londres.
Lieutenant général JosephÉdouard Acton, gouverneur de Gaëta, Coll. H. E. Acton. Londres.
Edouard Acton, cadet de marine, 1810 Coll. H. E. Acton. Londres.
Comtesse Harley d'Oxford, Coll. Avv. U. Monteverde. Milan.
La reine Marie-Caroline de Bourbon, Coll. comtesse Galante. Naples.
La reine Marie-Caroline de Bourbon, Coll. C. Jeannerat. Paris.
Le roi Joachim Murat et la reineCaroline (sur une montre), Coll. prince Murat. Paris.
La reine Caroline Murat, Coll. prince Murat. Paris.
La reine Caroline Murat, Coll. prince Murat. Paris.
Le prince Achille Murat, Coll. prince Murat. Paris.
Le prince Lucien Murat, Coll. prince Murat. Paris.
La princesse Laetitia Murat, Coll. prince Murat. Paris.
Le roi Joachim Murat, Coll. comtesse C. Badeni. Lemberg.
La reine Caroline Murat, Coll. comtesse C. Badeni. Lemberg.
Le prince Achille Murat, Coll. comtesse C. Badeni. Lemberg.
Le prince Lucien Murat, Coll. comtesse C. Badeni. Lemberg.
La princesse Laetitia Murat, Coll. comtesse C. Badeni. Lemberg.
La princesse Louise Murat, Coll. comtesse C. Badeni. Lemberg.
Le roi Joachim Murat, Coll. Bernard Franck. Paris.
Le roi Joachim Murat, Coll. comte de NeippergSchwaizern (Wurtemberg).
La reine Caroline Murat, Coll. E. Brouvet. Paris.
La reine Caroline Murat, Coll. P. Marmottan. Paris.
La reine Caroline Murat, Coll. comtesse L. Isolani. Bologne.
La reine Caroline Murat, Musée Filangieri (n°2725). Naples.
La reine Caroline Murat, Vente Mme Récamier, 29 novembre 1893 (n° 6). Paris.
La reine Caroline Murat (?),Vente Ch. B., 21 février 1906 (n° 115). Paris.
Le prince Achille Murat, Coll. prince Victor Napoléon. Bruxelles.
Le prince Lucien Murat, Coll. prince Victor Napoléon. Bruxelles.
La princesse Laetitia Murat, Coll. prince de la Moskova. Paris.
La princesse Louise Murat, Coll. prince de la Moskova. Paris.
La princesse Laetitia Murat, Coll. princesse Eugène Murat. Paris.
Les princes Achille, Lucien et Louise sur la boîte à rouge de S. M. la reine Caroline, 1814
Le prince Achille Murat, 1818? Vente Wellesley, 28 juin 1921 (n° 247). Londres.
Le roi Ferdinand Ier des Deux-Siciles, 1816 Coll. Dr A. Figdor.Vienne.
La duchesse de Floridia et sa fille, Coll. Cornm. Roseo. Naples.
Léopold de Bourbon, prince de Salerne, 1816 Musée Condé (n° 167). Chantilly.
Le comte Grégoire Orloff, 1817 Coll. prince Galitzine. Marijno.
La comtesse Orloff, née Soltikoff, 1817 Coll. David Weill. Paris.
Le prince Dolgorouki, Coll. grand-duc Nicolas Michaïlowitch.
Mme d'Escalon, née comtesse d'Albon. Coll. H.E. Acton. Londres.
La princesse Marie-Caroline-Ferdinande de Bourbon, 1823? Coll. duc de la Grazia.
Les enfants du roi François Ier des Deux-Siciles,
Le roi François Ier des Deux-Siciles, 1824 Musée de Capodimonte. Naples.
La reine Isabelle des Deux-Siciles, 1824 Musée de Capodimonte. Naples.

Miniatures de date inconnue.

Dame inconnue, Wallace Collection (gall.XI, case B, 141). Londres.
Dame inconnue, Coll. prince de la Moskova. Paris.
Dame inconnue, Coll. Paul Marmottan. Paris.
Dame inconnue, Coll. marquis P. Rusconi. Bologne.
Dame inconnue, Coll. F. Doistau. Paris.
Dame inconnue, Coll. Mme de Lloneux. Huy.
Dame inconnue, Vente Mimerel, 18 avril 1910 (n° 36). Paris.
Dame inconnue, Vente du 11 mars 1912 (n° 21). Paris.
Dame inconnue, Vente Warneck, 19 novembre 1924 (n° 56). Vienne.
Dame inconnue, Vente du 17 décembre 1924 (n° 157). Vienne.
Dame inconnue, Vente du 5 novembre 1925 (n° 241). Vienne.
Homme inconnu, Coll. prince N. Pàlffy. Vienne.
Homme inconnu, Coll. marquis P. Rusconi. Bologne.
Homme inconnu, Musée de Gotha.



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