|  | L'archiprêtré de 
						Sarrebourg au XVIIe siècle - Avricourt
 
 Revue 
					ecclésiastique de Metz; études de théologie, ... Annee 27-28 
					(1920-21).L'archiprêtré de Sarrebourg au XVIIe siècle
 d'après quelques documents de l'époque
 AVRICOURT
 Die septima Octobris 1603.
 Ecclia est sub Invocatne strum Fereoli et Feruci. Collatores D. D. 
			de Ogiviller, pastor Nicolaus Dieudonné. Altare majus est stratum, 
			sigillum est ablatum - non habent missale novum, habent tres calices 
			unum argenteum. Asservatur Sum Sacratum in ciborio stanneo 
			Involvatur Sum Eucharistiae Sacratum in corporali novo mundo. 
			Claudatur ciborium ancula. Sacrae unctiones in vasis ex stanno 
			claudantur vasa comparent novam monstrantiam. Fontes lapidei intus 
			lebes cum operculo. Duo alia altaria sunt exsecrata, sunt strata, 
			ablata sunt sigilla. Non utatur casula nigra nisiprius resarciatur. 
			Comparent duo corporalia nova, reficiatur tabulatum, 
			auferanturcistae ex Ecclesia, parent calicem novum ex stanno. 
			Reficiantur fenestrae, fiant portae in coemiterio.
 
 La collation de la cure appartient à la famille d'Ogéviller. 
			Cependant, la paroisse n'est pas exclusivement de la juridiction d'Ogéviller. 
			Elle est partie de Lorraine et partie de l'Evêché, respectivement de 
			France et, à ce titre, du comté de Réchicourt. Mais l'église, le 
			presbytère et le gibet sont en Lorraine et, de ce chef, les 
			seigneurs d'Ogéviller sont seuls seigneurs haut-justiciers et 
			collateurs d'Avricourt ; ceux de Réchicourt ne sont que seigneurs 
			fonciers en la partie d'Evêché puis France. De quelque côté que se 
			présentât le nouveau titulaire du bénéfice, il apercevait sa 
			paroisse dans l'horizon étrange du cadre de deux gibets, faisant 
			acolytes au clocher de l'église : celui d'Ogéviller pour tout 
			Avricourt, près de l'église de la gare d'Igney, et celui de 
			Réchicourt pour Réchicourt et Moussey sur la colline en face, au 
			haut de Linchamp. Les désignations cadastrales, la Potence, le 
			Poteau, la Fosse, en perpétuent encore aujourd'hui le souvenir. 
			Cette question de topographie de la maison curiale, de l'église et 
			du gibet joue alors dans bon nombre de nos paroisses un grand rôle 
			dans les transactions de l'époque. En cas de besoin d'argent - et ce 
			cas était endémique, - on gagera, on aliénera tout, mais pour autant 
			que ce sera possible, on exceptera toujours le gibet et la collation 
			de la cure. C'étaient là, en effet, les deux symboles les plus 
			expressifs et les plus lucratifs de la seigneurie, savoir : le droit 
			de vie et de mort d'une part et le droit de collation de la cure 
			d'autre part. Celui-là rapportait bon an, mal an «  des espaves et 
			confiscations », le tout pretio estimabile, diront les tabellions du 
			Seigneur, en notant, comme c'est le rôle d'un notaire, «  toutes 
			robes, tous chapperons, toutes cottes, tous couvre-chefs » et tout 
			le bric-à-brac plus ou moins ébréché et bancal du meublant. Celui-ci 
			assurait pour une bonne part les dîmes grosses et menues. A 
			Avricourt, les collateurs possèdent les deux tiers, le curé ne jouit 
			que d'un tiers et ce, uniquement dans l'étendue du finage de 
			Lorraine. En mémoire de feu «  messire Nicolas Boulanger vivant curé 
			du dict Auricourt escrit et signé de sa main ainsi que les anciens 
			bourgeois ont lit et recognu faict l'an mil six cent et douze » 
			déclare : « Il (le curé) a la thierse dans les menues dixmes 
			d'agneaux couchons ling chanvre et autre contre les seigneurs 
			dixmiers. Celui qui doibt le dixme d'agneaux et couchons a le droit 
			pour choix d'en eslire deux qui seront neanmoing compris dans ce 
			qu'il debvera de dizaine. Item que pour le dixme des vaches, le 
			veaux toreaux doibvent chacun trois deniers et les genisses deux 
			tant au sieur curé qu'aux seigneurs dixmiers. Cette rente est chue a 
			chacune St Georges. Item que le dixme des meix et jardins du Breu 
			(le Brolium de l'Auiaca villa cum ecclesia inibi constructa du VIII 
			siecle) appartient entièrement au sieur curé qui sont présentement 
			réduits en terre labourable pouvant comter environ de cinq jours 
			trois quarts. Item que le maire des seigneurs d'Ogiéviller doibvt 
			annuellement payer deux poules au Sr Curé à la St Martin. Item que 
			le maire doibt aussi annuellement le dixme du foin du prey du Breu 
			qu'il tient des seigneurs a cause de son office lui estant loisible 
			de prendre pour son dixme de l'argent ou bien du foin. Item qu'il 
			est loisible au Sr Curé de nourir et mener dans les bois du seigneur 
			Comte de Linange autant de porcqs qu'il lui plaira sans payer l'avêne 
			des bois à cause des services qu'il est obligé de dire à Richecourt 
			comme l'ancienneté (Encore une ancienneté à retenir). Item que le 
			dit Sr Curé n'est obligé de fournir un toureau ni un cheval ains 
			seulement le porcq masle avec lequel il a un porcq franc du garde ». 
			- Voilà ce qui s'appelle en l'espèce la portion congrue du sieur 
			curé d'Avricourt Lorraine. Le fait est assez singulier. La partie la 
			plus considérable de la paroisse est d' Evêché de France, donc de la 
			seigneurie de Réchicourt. Le curé la dessert et il n'en tire 
			cependant aucune dîme. Au siècle suivant, à l'occasion du défrichage 
			en cette partie d'une forêt, le curé essaye bien de faire appliquer 
			à ces terrains la règle des terres novales. Il expose qu'il «  est 
			extrêmement lézé de ce qu'étant curé d'Avricourt on le frustroit de 
			la dixme sur les terres qui sont du domaine de France ». «  Je suis 
			curé de A. partie France et partie Lorraine, la première de soixante 
			et dix ménages, l'autre quarante-huit. Ces deux parties font deux 
			communautés distinctes séparées : chacune a son maire, son ban, son 
			finage. L'Eglise et le clocher sont communs a tout le village. Les 
			deux communauté sont également contribué à la réédification du 
			presbitère, de la tour de l'Eglise. Je ne tire rien deus les dixmes 
			de quelle nature elles puissent être sur le finage de la communauté 
			de France ny desserte. Le ban ou finage de la partie de France était 
			cy devant une forest qu'on a commencé a défricher depuis environs 
			cinquante ans. Votre Excellence sera peut être étonnée que mes 
			prédécesseurs n'ayent pas réclamé et soient demeurés tranquilles sur 
			cet objet. La raison en est que lors du défrichement des terres dont 
			il s'agit, le titulaire était infirme de corps et d'esprit. Celui 
			qui lui succéda voulut remuer, mais une longue maladie dont il 
			nourut l'empêcha de suivre ses droits. Un troisième à qui je 
			succède, peu intelligent dans les affaires, se rendit aux avis du 
			procureur d'office de Réchicourt. Si on ajoute à cela que pendant un 
			nombre considérable d'années, la dixme entière ne valait pas dix 
			écus, il ne sera plus étonnant qu'on l'ai si aisément abandonnée. » 
			Non, ses prédécesseurs ne l'avaient pas abandonnée. Ils n'avaient 
			pas trop réclamé parce que «  d'ancienneté », ils ne recevaient rien 
			et n'avaient rien à prétendre. Et pour cause : la question de droit 
			remontait «  d'ancienneté » au VIIIe siècle. Il n'avait d'ailleurs 
			qu'à regarder le plan topographique de la paroisse tel qu'il se 
			trouve encore aux archives de Nancy. La ligne du tracé de la 
			frontière France Lorraine passe tout contre la tour de l'église, 
			laquelle est dessinée à pic sur la pointe du clocher pour pouvoir 
			demeurer en deçà de la ligne de Lorraine.
 Ce dualisme politique ne simplifiait pas le ministère du curé. A un 
			moment donné, les actes le Lorraine sont libellés en français ; les 
			actes de France-Réchicourt-Linange, en allemand. Le curé doit 
			posséder les deux langues, et le bilinguisme local le fait dé signer 
			comme socius du visiteur de l'archidiaconé dans les parties 
			allemandes de Sarrebourg, du Palatinat et de la Sarre. L'archidiacre 
			se fie nécessaire ment à son traducteur d'office et suppose que son 
			compagnon ne dit pas le contraire de son mandat. « Nous n'avons pu en 
			cette église (Bruderdorff) interroger que deux ou trois enfants, 
			parce que la plupart ne scavent pas le françois mais nous avons prié 
			le sieur archiprêtre (M. Le Grand, curé d'Avricourt) d'interroger et 
			les enfants et les grandes personnes en allemand, et il nous a 
			assuré qu'ils ont encore beaucoup de religion, de docilité, de piété 
			et de déférance aux ordonnances de Monseigneur en toutes choses ».
 Nos anciens ne nous ont-ils pas raconté qu'au temps où 
			l'archidiaconé de Château-Salins était du diocèse de Nancy, Mgr 
			Foulon dut parfois recourir à un interprète bilingue et qu'il eut 
			des fois l'impression que les paroles de son traducteur ne 
			provoquaient pas sur le visage des auditeurs du canton d'Albestroff 
			le contentement qu'il prévoyait ? Quoi d'étonnant! L'évêque faisait 
			des compliments ; le traducteur grondait en son nom. L'évêque 
			donnait raison à une municipalité, le curé traducteur ne se donnait 
			pas tort. Voilà pour la langue.
 Pour les fondations, il ne fallait pas que les biens fussent situés 
			en l'une et l'autre juridiction, sinon, sous peine de nullité, il 
			fallait se faire autoriser et en Lorraine et en France et payer, 
			cela va de soi, doubles droits. De là, et des retards dans 
			l'approbation et des frais sans fin. Pour l'entretien de l'église et 
			les réparations les plus urgentes, c'était la même difficulté. 
			Lorraine et France mettront soixante ans à se mettre d'accord sur 
			les modalités de l'exécution d'une grosse réparation. Pendant ce 
			temps, l'autorité diocésaine mettra en interdit l'église et le 
			cimetière adjacent; les mariages seront publiés à Blâmont, à 
			Ogéviller, et les enterrements se feront à Igney, à Amenoncourt, à 
			Leintrey. C'était assez loin pour les porteurs, car les chemins de 
			communication n'étaient pas carrossables.
 Ce dualisme politique était tellement rigoureux que de 1514 à 1625, 
			aux archives de la seigneurie de Réchicourt, il y avait une liasse 
			spéciale pour «  les papiers concernant une difficulté avec les 
			co-seigneurs d'Avricourt, Lorraine au sujet de l'entrée des 
			habitants de France en Lorraine ». Pour passer d'une juridiction 
			dans l'autre, il fallait «  tourner la thuile » Ou encore «  se 
			contremander ».
 Cette procédure était des plus pointilleuses ; l'inexécution d'une 
			formalité quelconque entraînait la confiscation du tout, et il ne 
			fallait plus jamais songer à passer dans une autre seigneurie. Pour 
			commencer, il fallait dépendre la crémaillère et ne plus faire de 
			feu sur l'âtre, puis renverser les meubles de telle sorte qu'ils ne 
			fussent plus en leur position d'usage ; il fallait délier les bêtes 
			blanches et rouges de la crèche et les laisser vaguer : il fallait 
			sortir de la maison, n'y rentrer que pour donner provende aux bêtes, 
			ne point être vu dans la demeure de France après le coucher du 
			soleil, à aucun moment s'y asseoir. Et cela pendant la durée de 
			toute une année à compter du jour où au maieur de France on faisait 
			sa déclaration de contremand, de tournethuile pour descendre en 
			Lorraine. Les gens de justice faisaient bonne garde, à moins que des 
			pots de vin pour eux et «  encore trente un sol pour épingles à la 
			femme du prévot » n'endormissent leur vigilance. Il faut croire 
			qu'il faisait meilleur vivre en Lorraine et qu'on y payait moins 
			d'impôts, car les tournethuile se rencontrent fréquemment.
 Le curé avait ainsi deux sortes de paroissiens aux offices, ce qui 
			maintes fois le gênait. Il ne pouvait, comme ses confrères, 
			proclamer au prône les ordonnances de l'un et l'autre des seigneurs, 
			ni autoriser après l' «  lte missa est » l'un ou l'autre des deux 
			maires à se lever pour convoquer les gens sous «  lô mât », le 
			tilleul devant l'église. Pour les ordonnances de Réchicourt, 
			l'église était topographiquement en Lorraine, donc d'Ogéviller. Pour 
			les affaires d'Ogéviller, une partie des auditeurs étaient de la 
			juridiction de Réchicourt, donc pas sujets. L'office terminé, le 
			maieur de Lorraine attendait donc ses administrés à la sortie, les 
			réunissait au cimetière sous le tilleul près de la croix des saints 
			patrons et y tenait sa séance de communauté de Lorraine.
 A leur tour, ceux d'Évêché-France s'en allaient sans dire mot, 
			devant la maison du maieur d'Évêché France y tenir leur séance de 
			communauté.
 Il y avait là une grave question de validité, car certaines 
			ordonnances demandaient trois publications au prône suivant le 
			prescript de la coutume. Après la dernière des dites publications, 
			on «  laissait couler la huitaine », puis les sanctions suivaient 
			leur cours. Les corvéables et censables se riaient de ces rigueurs à 
			Avricourt, parce que leur curé n'avait rien dit, ne pouvait rien 
			dire au prône.
 Il ne fallut rien moins qu'un arrêt de la Cour des comptes de Metz 
			pour permettre, en février 1720, la publication des aveux et 
			dénombrement du comté de Réchicourt et de la baronnie de Marimont «  
			devant la maison du maire d'Avricourt-France, attendu que l'église 
			paroissiale est située en la partie de Lorraine ». Cette maison du 
			maieur de France est la maison qui fait le coin de l'intersection de 
			la route de Moussey avec la rue de la Chapelle. Elle est encore 
			aujourd'hui caractérisée par une niche avec vierge et cette 
			inscription très particulière : Reyne de Paix Mère de Dieu Ayiez la 
			Garde de ce lieu 1684. Les ordonnances à lire au prône par le sieur 
			curé n'avaient pas toutes pour objet «  quantité de cens tant en 
			chapons poulles qu'autrement. lesquels n'auraient pas estés 
			acquittés depuis un fort long temps pour faire commandement d'y 
			satisfaire et dire qu'après la dicte huitaine coulant après la 
			troisième publication, l'héritage censable est saisy et réuny au 
			domaine du seigneur ». On trouve mention d'ordonnances seigneuriales 
			dont l'objet intéresse les bonnes vies et chrétiennes mœurs des 
			sujets. Il est dit : «  Les sieurs curés liront à leurs prônes, deux 
			fois l'année, les ordonnances du Roi (paroisses de France) qui 
			défendent la fréquentation des cabarets dans les lieux où on fait 
			résidence et surtout aux jours de Dimanche et de Fètes. Pendant le 
			cours de l'année, ils veilleront à ce que les gardes-cabarets 
			s'acquittent fidèlement de cette charge. Et si malgré ces sages pré 
			cautions, il arrive que des paroissiens violent souvent les défenses 
			de l'Église et du Souverain à cet égard, on ne manquera pas de 
			réserver à Pâques la confession de ces Profanateurs des jours 
			saints. » Réserver à Pâques signifie sans doute refuser 
			l'absolution.
 Dans nos difficultés de ministère d'après guerre, il nest pas sans 
			intérêt de faire des approchements entre notre époque et celle qui 
			suivit la guerre de tente ans. qui en notre Lorraine dura, à dire 
			vrai, cinquante-trois ans.
 «  Une fois l'année, les sieurs curés, pour prévenir un abominable 
			genre de scandale qui excite les gémissements et l'indignation de 
			tous les bons chrétiens, liront à leurs prônes l'ordonnance du Duc 
			Léopold concernant les Filles ou veuves qui recèlent leurs 
			grossesses ». La recherche de la paternité est de droit. In dolore 
			partus, la matrone dûment assermentée, le maieur, le syndic et deux 
			échevins lui poseront d'office la question. M. le Curé inscrira 
			l'enfant en ajoutant qu'il est venu «  des œuvres d'un soldat » en 
			précisant, à défaut du nom, le régiment et lieu de garnison, ainsi 
			que l'occasion de la rencontre. Dans la suite des actes religieux de 
			l'époque, il est facile de se retrouver: les décès sont marqués 
			d'une croix, les baptêmes d'un poupon emmailloté.
 Les concubinages sont également à l'ordre du jour, et l'objet d'une 
			ordonnance.
 «  Comme il arrive quelquefois que des inconnus viennent s'établir 
			dans les paroisses avec des concubines qu'ils supposent être et font 
			passer pour leurs femmes, nous ordonnons aux sieurs curés de faire 
			présenter à tout étranger en ce cas, des certificats de leurs 
			mariages signés des curés qui les auraient mariés et légalisés par 
			les seigneurs Evêques diocésains ou leurs vicaires généraux, sinon 
			d'en donner avis aux officiers des lieux pour procéder selon 
			l'exigence des cas et éloigner le crime et le scandale de la maison 
			de Dieu. »
 Au lendemain d'une guerre, l'éclairage et le chauffage sont matières 
			rares et choses coûteuses. Une ordonnance, à lire chaque année dans 
			le courant du mois d'octobre, «  considérant l'extrême misère qui, 
			dans ces temps calamiteux accable les peuples de la campagne », 
			laisse «  à la prudente condescendence des sieurs curés de permettre 
			chaque année les poëles ou ouvroirs, dans lesquels pendant l'hiver 
			plusieurs femmes et filles travailleront à la chaleur d'un seul âtre 
			et à la lueur d'une seule lumière, mais sous les conditions et 
			réserves indiquées par chacun curé». La lecture de l'ordonnance sera 
			faite «  afin que ceux et celles qui transgresseraient les défenses à 
			cet égard ne peuvent prétexter leur ignorance, mais sentent leur 
			obligation de subir avec un coeur pénitent les peines qu'ils 
			encoureront ».
 Ces ordonnances étaient corroborées et complétées au cours de la 
			tenue des «  Plaids annaux, tenus en la haute justice partie de 
			Lorraine. et dérechef tous officiers maieur et échevins continués ou 
			créés, prêtaient serment de bien et fidèlement chacun à leur égard 
			faire les fonctions de leurs charges en honneur et conscience ». «  
			Tous vendans vin, - y est-il dit - sont tenus de fournir les vins 
			nécessaires pour les messes qui se disent dans l'église paroissiale 
			du dit lieu d'Avricourt, le tout à peine de cinq livres d'amende 
			pour la première fois, du double pour la seconde fois et plus grand 
			en récidive ». On ne dit pas si au cours du plaid annal, on les 
			assermentait à l'Évêché de Metz comme fournisseur de vin pour la 
			sainte messe. L'honnêteté d'alors donnait, sans doute, toute 
			garantie que le vin des vendans vin était vinum de vite.
 «  Le pain bénit se fournit chacun à son tour et il y a un pré pour 
			la fourniture du pain destiné au sacrifice, dit le pré des hosties 
			».
 «  La fabrique n'a point d'autres revenus que celuy des heritages qui 
			se recoit par les echevins. Ils sont au nombre de quatre, dont deux 
			sont pour le gouvernement de la fabrique et la provision des choses 
			nécessaires au service divin pour ce quoy satisfaire, outre le 
			revenu de la dite fabrique qui n'est pas suffisant, ils font une 
			levée authorisée par les maires et gens de justice lu lieu sur la 
			communauté. »
 «  Le curé se fera un point essentiel de son devoir d'avoir 
			l'inspection sur l'école ou il ira régulière ment tous les Samedys 
			pour y faire le catéchisme et voir ce qui s'y passe, et il ne 
			recevra pas de maître d'écolle qui ne soit porté à faire tous ses 
			devoirs. Il y aura une sage femme sermentée et instruite. Les 
			Religieux Carmes de Baccarat et les Cordeliers de Raon comme aussi 
			les pères Capucins de Blamont, diocèse de Toul ont prescrit le droit 
			de faire la quête tant au dit Avricourt qu'au voisinage. Les Carmes 
			déschaussés de Gerbevillé voulaient sy introduire il y a quelques 
			années quoique rentés, ils sont à empêcher. »
 «  Les anciens ont déclaré n jurant que le prey de Bettemanprey doibt 
			trois quarterons de cire au jour du rand Vendredy, et les deux 
			Nierres de terre en la Grande ruelle, doibvent une pinte d'huile. 
			Les échevins d'église rendront compte annuellement de la fourniture 
			d'environ trente cinq livres de cire pour le luminaire de toute 
			l'année. »
 Tout est donc fort bien dit et prévu, en toutes ces ordonnances lues 
			au prône, en tous ces plaids annaux relus à haute voix devant toute 
			la communauté réunie sur le pré du Breuil. Mais à la lecture de 
			toutes ces prescriptions, il vous vient le désir de rechercher 
			quelque document contemporain qui expose la réalité de cet état 
			idéal. Le voici, sous la forme d'un Estat de la Paroisse d'Avricourt, 
			que présente Méssire Jean Le Grand, curé de ce lieu et archiprêtre 
			de Sarbourg à Monseigneur l'Illustrissime et Revérendissime Évêque 
			de Metz dans sa visite du dit Sarbourg, conformément au model que 
			son Excellence a fait dresser.
 M. le curé écrit en1690: «  Il y a deux cents et environ vingt cinq 
			communiants, cinquante neuf familles complettes y compris le maitre 
			d'écolle, la sage-femme et les pâtres. Il y a un marcaire calviniste 
			dans la maison de la Baronne y établi depuis deux ans par le sieur 
			Bouchart chef de cette maison, quoy que jamais il n'y ait habité 
			religionnaire dans cette paroisse.
 Les superstitions et autres crimes notables sont bannis par la grâce 
			du Seigneur de cette paroisse.
 Quelqu'effort que fasse le soubscrit pour en bannir le jeu de carte 
			il n'a sû en venir encore a bout de tout point, plusieurs 
			particuliers s'émancipent malgré ses avis et passent quelquefois des 
			nuits entières chez un nommé Jean Marchal tavernier leur fauteur et 
			refuge, qu'il a déja après plusieurs remontrances charitables, 
			menacé de l'entreprendre en justice, dont il ne tient conte. » 
			Messire Le Grand était pour sûr lui même réfractaire d'un Solo Tout.
 «  Il y a un jeune homme libertin, nommé Christophe Malnory qui 
			n'ayant d'autre profession que le jeu de carte et la chicane est la 
			source de tout le désordre qui se commet dans la paroisse au sujet 
			du jeu, étant celuy qui recherche, excite et entretient les autres 
			dans ce mauvais commerce et le dit Marchal luy donne ordinairement 
			retraitte, malgré les avis et menaces du dit soubscrit curé. - 
			Lesvalentines n'ont plus de lieu dans la paroisse ni les follies du 
			mardy gras.
 Le soubscrit a toléré des assemblées nocturnes pour filer jusqu'à 
			présent mais avec des règles qui les excluent de l'occasion 
			d'offenser Dieu, les garcons n'y ont point d'entrée. Elles ne sont 
			qu'un petit nombre et toutes alliées ou parentes, les filles sont 
			avec leurs mères ou d'autres femmes d'honneur qui veillent sur leur 
			conduite. Elles sont chargées de faire la prière, chanter quelques 
			chansons spirituelles, les litanies de la Sainte-Vierge, de dire 
			quelque point de catéchisme.
 On ne boit et on ne joue point impunément pendant les offices de 
			l'église. ll y a un petit moulin, qu'on appelle «  écoute s'il pleut 
			! » qui ne tirant son avantage que de la pluye, son munier tâche 
			d'en profiter quand elle vient, même ès jours de fêtes et de 
			dimanches.
 Il est malaisé que les pâtres puissent assister régulièrement tous 
			les dimanches au service divin, d'autant que le paturage est fort 
			éloigné du village. Je les ay exhortés de sy rendre le plus souvent 
			qu'ils pourront ce qu'ils font alternativement.
 La messe et les vêpres se chantent aux heures réglées par les 
			Statuts - et fêtes et dimanches le catéchisme s'y fait à midy 
			jusqu'à une heure et demie, depuis saint Remy jusqu'au commencement 
			de la moisson. »
 Dans ce qui précède, nous avons toute la vie préceptive d'une 
			paroisse. C'était vraiment une force pour l'autorité religieuse que 
			d'avoir l'appui de l'autorité civile. Or, celle-ci paraît avoir tenu 
			à faire respecter les préceptes de l'Église. Nous l'avons entendu 
			dire ci-dessus à M. Le Grand et voici à Avricourt et autres lieux un 
			fait complémentaire.
 «  En 1632-1633, par ordre de Charles IV, les habitants ont à fournir 
			aux régiments cantonnés à Saint Martin, Avricourt, Domepvre, 
			Verdenal, Petitmont, Autrepierre et Repaix, des rations de pain, de 
			vin, de chaire, sauf les jours maigres où il s'agissait de trouver 
			3760 rations de frommage «  parce que on ne donnait pas le Wendredy 
			de chaire ».
 Encore fallait-il y tenir la main. Le même curé écrit, dans 
			l'exercice de ses fonctions d'archiprêtre, que «  la superstition des 
			Valentines, les danses entre personnes de différent sexe et autres 
			abus étaient fort en usage parmi les jeunes gens de M... et le sieur 
			curé de Neil, à la dernière visite du sieur archi prêtre faite le 
			jour de la fête du patron à l'issue des Vêpres, exprès pour arrêter 
			les danses publiques, fit paraître son mécontentement en sortant de 
			l'église. Ceci donna lieu à deux ou trois mutins auteurs de ces 
			danses de se récrier contre ce que le sieur archiprêtre venait de 
			dire, en opposant la permission qu'ils disent en avoir du chatelain 
			de Réchicourt. Mais le maire et d'autres notables firent des excuses 
			au dit sieur archiprêtre sur ce qu'ils n'avaient pas encore été bien 
			instruits sur cet article ». Cette fois ils l'étaient, car M. Le 
			Grand avaient parlé toute une demi-heure. Quant au sieur curé de 
			M..., l'archidiacre écrira à son sujet : «  Ce curé de M... n'a nul 
			soin d'instruire - il permet aisément les danses. Si Monseigneur 
			voulait bien in cursu visitationis luy ordonner trois mois de 
			séminaire, cette pénitence pourroit le ramener à son devoir ».
 
 J. PAULY.
 
 
 |  |