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Août 1914 - Menaces allemandes d'exécution
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Dans l'article Louis
Foell, cafetier victime des Allemands (1854-1914), on voit que
l'exécution du 13 août 1914 est prétendument motivée par le fait
qu'il aurait été « Trouvé porteur d'un révolver ». Mais Louis Foell
était-il vraiment porteur d'une arme ?
Le récit du prêtre ci-dessous montre qu'à Blâmont, le 29 août, les
Allemands accusent encore sans fondement ni preuve « d'avoir tiré
sur les soldats » à l'aide d'une arme « caché sous votre soutane et
laissé tomber à terre ».
Un tel témoignage rend rétroactivement toujours plus suspect le motif d'exécution
du cafetier blâmontais...
Le Carillon de Vimoutiers : diocèse de
Séez
11 mars 1917
Éd Flers
RÉCIT DE CAPTIVITÉ
Au moment où vient de s'achever le recouvrement pour les prisonniers
de guerre du canton de l'argent nécessaire pour leur envoyer des
paquets, nous croyons être agréable en publiant le récit suivant.
Nos lecteurs constateront eux-mêmes combien le narrateur s'est fait
scrupule de conserver à son récit le ton calme et exempt de passion
qui en garantit l'impartialité et la véracité.
« J'ai été fait prisonnier par les Bavarois, le 27 août 1914, dans
ma paroisse de Xaffévillers. Depuis trois jours l'artillerie faisait
rage ; mon presbytère était en partie démoli et, à plusieurs
reprises, j'avais failli trouver la mort dans mes caves. Vers 5
heures du soir, je fus obligé de sortir pour ne pas être enseveli
sous les ruines. A peine avais-je fait cent pas que les Bavarois me
forçaient à prendre rang parmi les trente-cinq prisonniers qu'ils
avaient capturés ce jour-là. Bientôt il me faut partir, sans avoir
pu obtenir de rentrer à la cure. Vers 10 heures du soir, nous
arrivons à Fontenoy-la-Joûte et nous passons la nuit dans l'église.
Le lendemain, nous reprenons le chemin de l'exil. De toute la
journée, nous n'aurons pour toute nourriture qu'un demi-quart de thé
non sucré. Comme la veille, les Allemands me font porter leur sac,
ils me maltraitent et me ridiculisent ; mon voyage est vraiment le
chemin du Calvaire. Aussi, quand un sous-officier, plus humain que
ses camarades, me demande ce que je pense du traitement qu'ils me
font subir, je n'hésite pas à répondre : « Notre Seigneur a porté sa
croix ; je porte maintenant la mienne. »
Le 29, de bon matin, je cache, à Gélacourt, dans l'entonnoir d'une
machine à battre, le chapeau haut-de-forme dont les Allemands
m'avaient coiffé pour mieux attirer l'attention sur moi et me
tourner en dérision.
Nous arrivons à Blâmont dans l'après-midi. Là on m'accuse d'avoir
tiré sur les soldats allemands. Sans me troubler je demande :
« Avec quelle arme ? - Avec un revolver. - Montrez-le-moi, -
impossible, car vous l'avez caché sous votre soutane et laissé
tomber à terre. - Vous l'avez vu tomber ? - Oui. Alors vous avez dû
vous en emparer ; c'était la preuve de ma culpabilité ; montrez-le
moi. »
On n'insiste plus ; mais on me fait monter dans un train en partance
pour l'Allemagne. A Saarbourg, le sous-officier dont j'ai parlé me
fait descendre et me ramène à Avricourt, où le chef de gare me donne
un sauf-conduit grâce auquel je reviens sans être inquiété jusqu'à
Fontenoy-la-Joûte. Mais là, un général allemand refuse de me laisser
aller plus loin, sous prétexte que j'ai vu bien des choses et que je
pourrais renseigner l'armée française. [...]
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