Henry Ier de
Blamont, prisonniers du Roi de France en 1297 (2)
Voir
Henry Ier de
Blamont, prisonniers du Roi de France en 1297
Les
grandes chroniques de France.
Société de l'Histoire de France (Paris)
Éd. H. Champion (Paris), 1920-1953
[notes renumérotées]
Guillaume de Nangis
(-1300 ?)
Chronique des rois de France
XXII.
Comment Robert, conte d'Artois, se combati à Furnes
contre les Flamens (1)
En ce meismes temps, pape Boniface canoniza à sa vie (2)
le saint roy Loys, et en ycest an ensement comme le roy
Phelippe le Biaux fust devant Lille, Robert noble conte
d'Artois, laissa Gascoigne à nobles et loyaux hommes du
royaume de France, et lors vers Saint Omer (3), sa terre
propre se reçut et revint, et appella avec li son filz
Phelippe (4) avec grant plenté de chevaliers nobles
hommes, lequel conte Robert envay Flandres de celle
part. Contre lequel, Guy conte de Flandres envoia, tant
à cheval comme à pié, grant multitude de gens d'armes,
et de costé la ville de Furnes (5) se combatirent contre
le conte. Lors ilec, les batailles ordenées de une part
et d'autre decourans, fu moult la bataille aspre et
merveilleuse. Mais les Flamens, comme il fussent VIc à
cheval et XVIm à pié, de la gent au conte d'Artois,
furent touz occis. Car le gentil conte noblement se
prouva, si que moult tant chevaliers comme escuiers,
avec Guillaume de Juilliers (6) et Henri conte d'Abemont
(7) furent pris, lesquiex, comme à Paris en charetes et
ailleurs, par diverses prisons fussent envoiez, à la
loenge et à la victoire de noble homme, Robert conte
d'Artois, chevalerie esmerée avoient mis devant leur
visage la baniere et l'enseigne au bon conte, et lors le
conte d'Artois prist la ville de Furnes abandon (8), et
après ce occupa Cassel avec toute la valée. Adonc (9),
endementres ceulz de Lille qui moult estoient grevez et
travailliez de divers assauz de la gent au roy de
France, il veissent à pierres souventes foiz les murs
quasser, ne Robert (10), l'ainsné filz au conte de
Flandres, qui avec eulz estoit ou chastiau, n'osast
contre les François issir à bataille, si firent lors
convenances au roy de France, que de leurs biens ne de
leurs vies ne fussent privez, ne ne fussent sousmis ne
mausmis; il sousmistrent eulz et leurs biens au roy de
France (11). Mais Robert, qui pou de chevaliers avoit,
issi de la ville, et à Bruges où son pere estoit, tout
oiseux, se reçut. Adecertes, le roy d'Angleterre Edouart
estoit venu avec le conte de Flandres; si fu deceu, si
comme aucuns dient que pour certain il li avoit mandé
qu'il tenoit pris le conte Robert d'Artois et Charles de
Valois, le frere au roy de France, lesquiex il devoit
tenir à Bruges en prison, si comme il disoit ; ou pour
ce que plus sauvement peust estre creu, ycelui roy
d'Angleterre estoit là venu pour aidier le conte de
Flandres en sa guerre. Et lors quant le roy de France oy
les nouvelles de l'avenement au roy d'Angleterre, si
garni Lille de sa gent et s'esmut pour aler vers le
chastel de Courtray (12), lequel dès maintenant il prist
abandon. Et d'ilec après se hasta pour aler Bruges
asseoir. Et endementres, Edouart roy d'Angleterre et Gui
le conte de Flandres laissierent Bruges, et avec les
leur à Gant (13), pour la rorteresce du lieu se
reçurent. De laquelle chose ceulz de Bruges furent
espoentez, et au roy, humbles et devoz coururent, et
eulz et leur ville (14), en sa puissance sousmistrent,
en laquelle ville le roy de France fist i pou son ost
prendre recreacion, et puis prist isnelement son erre
(15) pour aler vers Gant. Mais si comme il s'en alast
ainsi, à une petite villete li vindrent messages de par
le roy d'Angleterre requerans trives (16), auquel, pour
l'yver prochain venant et pour l'amour du roy de Sezille,
qui pour ce venoit en France, à paines jusques à II ans,
à lui et au conte de Flandres ottroia trives. Et lors,
ce fait environ la feste de Touz Sains, le noble roy de
France Phelippe le biaux retourna en France.
(1) Guillaume de Nangis, Chronique
latine, dans Rec. des Hist. des Gaules et de la France,
t. XX, p. 579-580. Cf. éd. Géraud, t. I, p. 300-302.
(2) Latin : « apud Urbem veterem ». C'est à Orvieto que
le 11 août 1297, « tertio idus augusti », Boniface VIII
canonisa saint Louis et non à Sienne comme l'indique P.
Paris, dans son édition des Grandes Chroniques, t. V, p.
121. Dans la leçon des Chroniques de Saint-Denis, donnée
par le Rec. des Hist. des Gaules et de la France, t. XX,
p. 664, on a : « en la Ville vielle ». Cf. la bulle de
canonisation publiée par Raynaldi, Annales ecclesiastici,
t. IV, p. 244-247.
(3) Robert II, comte d'Artois, qui déjà le 13 juillet
était à Lens, fut le 4 août à Saint-Omer
(Funck-Brentano, Philippe le Bel en Flandre, p. 250,
note 4).
(4) Philippe, fils de Robert d'Artois et de sa première
femme Amicie de Courtenai, mourut le 11 septembre 1298
des blessures qu'il avait reçues au combat de Pont-à-Vendin.
(5) La bataille de Furnes fut livrée le 20 août 1297
(Annales Gandenses, éd. Funck-Brentano, p. 4, et
Chronique artésienne, ibid., p. 15. Cf. Funck-Brentano,
op. cit.. p. 250-254).
(6) Guillaume de Juliers, petit-fils de Gui de Dampierre
par sa mère Marie, qui avait épousé Guillaume, fils aîné
de Guillaume IV, comte de Juliers. Il mourut quelques
jours après de ses blessures à Saint-Omer (Annales
Gandenses, p. 4).
(7) Latin : « comes Albimontis ». Henri de Blamont
(Meurthe-et-Moselle, arr. de Lunéville), seigneur
lorrain, l'un des principaux conseillers de Gui de
Dampierre ; son fils avait été pris au combat du pont de
Comines (Funck-Brentano, op. cit., p. 241, note 8).
(8) La ville de Furnes fut occupée après la bataille
(Chronique artésienne, éd. Funck-Brentano, p. 16).
(9) Lille, qui avait été investi le 23 juin 1297,
capitula le 1er septembre suivant (Funck-Brentano, op.
cit., p. 239 et 254, note 3, et Chronique artésienne, p.
13 et 16).
(10) Robert de Béthune, fils aîné de Gui de Dampierre et
de sa première femme Mathilde, fille de Robert, seigneur
de Béthune, lui succéda en 1305 sous le nom de Robert
III, et mourut le 17 septembre 1322.
(11) Voir, sur les conditions de la capitulation de
Lille, Funck-Brentano, op. cit., p. 258.
(12) Philippe le Bel vint à Courtrai le 3 septembre
(Chronique artésienne, p. 17).
(13) Edouard fit son entrée à Gand avec le comte de
Flandre le 4 septembre (Funck-Brentano, op. cit., p.
264).
(14) Il est fait allusion ici aux conventions
d'Ingelmunster (Belgique, Flandre occidentale, arr. de
Roulers, cant. d'Iseghem) du 18 septembre 1297
(Funck-Brentano, Philippe le Bel en Flandre, p.
260-264).
(15) « Esmut isnelement son ost » (Bibl. nat., ms. fr.
17270).
(16) Ce sont les trêves qui furent conclues le 9 octobre
1297, en l'abbaye de Vyve-Saint-Bavon sur la Lys, près
de Gand, entre les rois de France et d'Angleterre. Le
texte de ces trêves est donné par Rymer, Fœdera, t. I,
28 part., p. 879, et Limburg-Stirum, Codex diplomaticus
Flandrise, t. 1, p. 208, n° 62.
Cf. Funck-Brentano, op. cit., p. 267-270.
Chronique
latine de Guillaume de Nangis, de 1113 à 1300. Tome 1
Guillaume de Nangis (12..-1300?)
Éd. J. Renouard et Cie (Paris), 1843
[notes renumérotées]
Tertio idus augusti
(1) papa Bonifacius, apud Urbem veterem, sanctum
Ludovicum, regem quondam Franciæ, canonizavit.
Philippo rege Franciae ad obsidionem Insulae commorante,
interim nobilis comes Attrebati Robertus de Gasconia
reversus (2) [apud sanctum Audomarum in terram propriam
se recepit, et] vocato ad se filio suo Philippo cum
aliis nobilibus Francorum., ex alia parte quam rex
intraverat (3) Flandrias aggreditur, omnia usque ad
villam quae Furnes nominatur capiens et devastans (4).
Die igitur martis post Assumptionem beatae Virginis (5),
tota fere militia Flandrensium cum magna multitudine
peditum congregata, adversus comitem Attrebatensem et
suos dimicans, juxta villam superius nominatam (6)
devicta est et deleta; ubi sexcentis equitibus et
sexdecim millibus peditum tam captis quam occisis a
comite Attrebatensi, villa de Furnes capitur, et tota
vallis de Cassello postea occupatur. In praedicto
comitis Attrebatensis bello capti fuerunt Guillermus de
Juliers, et Henricus comes Albimontis, et multi alii de
regno Alemanniae magni nominis milites et præclari. Qui
ad laudem et gloriam [militiae] emeritae Roberti comitis
Attrebatensis, dum [Parisius in quadrigis et alibi] per
diversos regis Franciae carceres mitterentur, scutum
ejus sive vexillum ante facies eorum appositum
deferebant.
Insulani victoria comitis Attrebatensis perterriti,
videntesque muros suos machinis regis Franciae saepius
cassari (7), inito pacto ne bonis et vita privarentur,
se et villam suam regi subjiciunt. Robertus vero filius
comitis Flandrensis, et milites qui secum intus erant
inde fugientes, ad patrem suum apud Brugias existentem
velociter pervenerunt. Ibi enim rex Angliae Eduardus cum
paucis parumper ante advenerat, deceptus, ut aiunt, a
comite Flandrensi, qui sibi pro certo mandaverat
Karolum fratrem regis Franciae et comitem Atlrebatensem
a suis captos apud Brugias se tenere; vel, ut melius
creditur, ut comiti Flandrensi consilium et auxilium in
sua guerra tribueret opportunum.
Rex igitur Francorum [de adventu regis Angliae auditis
rumoribus], Insula sic recepta et gente sua munita,
versus Courteriacum oppidum exercitum suum movit; quod
statim in deditionem accipiens, apud Brugias ire
disposuit. Sed interim rex Angliae et comes Flandriarum
relicta Bruga, apud Gandavum, propter loci fortitudinem,
se recipiunt tempestive. Quod Brugenses percipientes,
regi Franciae et ejus exercitui humiles et devoti mox
occurrunt, et eum apud Brugas introducentes, ejus
ditioni se submittunt. Et cum ibidem per aliquot tempus
recreatus fuisset Francorum exercitus, rex Franciae
versus Gandavum iter arripiens, apud quamdam villam
Inglemoustier nominatam, prope Gandavum sitam, recepit
nuntios regis Anglorum, inducias vel trebas ex parte sui
et Flandriarum comitis postulantes. Et per plures dies
multis tractatibus ibidem habitis de eodem, tandem (8)
propter instantem hiemem sunt concessae; et ob amorem
regis Siciliae, qui propter hoc in Franciam veniebat,
usque ad duos annos, ut creditur, prolongatae (9).
(1) Le 11 août. Cette date n'est donnée
que par le Ms. 10208-6.
(2) Edit, et Mss. 4917-20, relinquens Gasconiam regni
Francorum fidelibus conservandam.
(3) Édit. et Mss. 4917-20, a parte illa, c'est-à-dire du
côté de Saint-Omer.
(4) Ce qui précède depuis le mot omnia et la date
suivante ne se trouvent que dans le Ms. 10298-6. On lit
dans les autres Mss., contra quem [Robertum Attreb.]
Guido comes Flandrice mittens tam equitam quam peditum
ingentem multitudinem, etc. Le Ms. 4918 dont les
derniers feuillets ont été arraches finit au mot equitum.
(5) Le 20 du mois d'août.
(6) Furnes.
(7) Édit. et Mss. 4917,4919 et 4920, Insulani... cum
viderent muros suos, etc., nec auderet Robertus comitis
Flandrensis primogenitus, qui una cum eisdem [al. suis]
crat in oppido, ad bellum exire contra Francigenas, etc.
(8) Edit. et Mss. 4917-20, sed apud quamdam villulam
regis Angliae receptis nuntiis inducias poslulantis,
propter instantem hiemem, etc.
(9) Les édit. et les Mss. 4917 et 4920 ajoutent en
parlant du roi de France, circa festum omnium sanctorum
in Franciam remeavit. Les deux alinéa qui suivent,
imprimés dans les éditions, manquent dans les Mss. 4917,
4919 et 4920. |