Jean-François
Simonin (1772-1851)
Voir aussi
Claude-Ambroise Régnier, Duc de
Massa
Biographies et nécrologies des hommes marquants du XIXe
siècle.
Tome 4
publiées par V. Lacaine et Ch. Laurent
Éd. Paris 1847
Biographie.
SIMONIN
(Jean-François).
DOYEN DES PRESIDENTS DE CHAMBRE DE LA COUR ROYALE DE
ROUEN, OFFICIER DE LA LÉGION D'HONNEUR.
M. Jean-François Simonin, frère du précédent [voir
article Augustin Simonin - textes1905.html], est né le 8
mars 1772, à Blamont (Meurthe).
Bien jeune encore à l'époque des premiers évènements de
la révolution de 89, une réforme fondée sur les progrès
de la raison souriait à la fierté de son âme, lorsque la
fin tragique de son frère aîné, calomnié par une gazette
incendiaire, déchaîna contre lui la tourbe démagogique
et faillit lui procurer les honneurs de la lanterne.
Après trois heures d'agonie lentement écoulées dans un
cachot infect et obscur, le maire, secondé par des
citoyens généreux, le délivra des mains des énergumènes
qui, sur la parole d'un folliculaire, l'avaient déjà
condamné par induction.
Toutefois, il lui fallut s'expatrier, et dans l'intérêt
de sa famille peu fortunée, et pour se soustraire à de
nouvelles persécutions.
Arrivé à Dusseldorf, sur la rive droite du Bas-Rhin, un
heureux hasard le détermina à s'y fixer pour donner des
leçons de français et de géographie.
En moins de huit jours, toutes ses heures furent
employées avantageusement dans les premières maisons de
cette capitale d'un duché incorporé depuis dans la
monarchie Prussienne.
Le passage du Rhin par les Français sous les ordres du
général Kléber, l'ayant forcé de quitter précipitamment
Dusseldorf, la nuit, peu d'instants avant la
capitulation ; il se rendit à Duisbourg, espérant y
recevoir par ses anciens hôtes, ses livres, la plupart
allemands et anglais, ainsi que ses effets personnels.
Dînant le lendemain de son arrivée à une table commune
avec des étudiants, il apprit que le professeur des
langues française et Anglaise venait de mourir, et que
bien certainement il serait agréé par les professeurs
des quatre facultés, qui nommaient en quelque sorte
définitivement, la sanction du roi à Berlin n'étant
qu'une simple formalité. Installé dès le surlendemain
des visites qu'il s'était empressé de faire à ses
vénérables collègues, le jeune professeur entra aussitôt
en exercice.
Dans cette position inespérée, il sentit la nécessité de
consacrer ses loisirs et une partie des heures destinées
au sommeil, à agrandir la sphère de ses connaissances ;
bientôt il méritait l'estime générale dans l'asile où
les malheurs de sa patrie l'avaient violemment poussé.
Nous ne suivrons pas M. Simonin dans toutes les phases
de sa carrière de proscrit, carrière parcourue toujours
avec courage et honneur; il nous suffira de dire que, de
retour en France dans des jours plus calmes, l'élévation
de son caractère et l'activité de son intelligence lui
méritèrent la haute protection du grand-juge, le duc de
Massa.
Nommé, par décret du 1er décembre 1805, après avoir
exercé depuis novembre 1803 les fonctions de rédacteur
au ministère de la justice, secrétaire-général de
l'école de droit à Caen (le grand-juge, mal renseigné,
avait cru lui donner une place de 10,000 fr.), il fut
appelé en août 1806, malgré son refus motivé, aux
fonctions de greffier en chef des cours spéciale et de
justice criminelle de la Seine-Inférieure. Le
grand-juge, trompé encore une fois, croyait donner
provisoirement, disait-il, et en attendant mieux, un
emploi de 15,000 fr. au neveu de son choix; il avait
marié M. Simonin avec sa nièce, sœur de M. Rormer,
directeur de la comptabilité, mort en 1832.
Le 23 avril 1811, M. Simonin recevait le titre de
conseiller en la cour impériale, par suite de la réunion
des juridictions civile et criminelle.
En juillet 1814, la nouvelle de la mort du duc de Massa,
frappé d'une apoplexie foudroyante, venait l'affliger
profondément.
Depuis cette époque, M. Simonin fut successivement nommé
:
Chevalier de la Légion d'honneur, par ordonnance du 17
août 1824.
Président de chambre, par ordonnance du 18 août 1833(1).
Officier de la Légion d'honneur, par ordonnance du 4 mai
1845.
Aujourd'hui, M. Simonin compte quarante-trois ans de
services civils, trente-huit de magistrature; il est
doyen des présidents et de tous les magistrats du
ressort.
C'est à ses longs et loyaux services, à sa courageuse
impartialité dans bien des circonstances, enfin, à la
noblesse, à la générosité constante de ses sentiments,
qu'il doit la considération dont il est entouré. Depuis
1841, il remplit pendant la plus grande partie de
l'année les fonctions de premier président intérimaire.
(1) M. Simonin avait vu avec satisfaction
l'issue de la révolution de 1830. Après les désastres de
l'Empire qui froissaient si péniblement l'orgueil
national, il était loin de penser que des princes qui
avaient passé vingt ans à l'école du malheur, seraient
assez aveuglés par l'esprit de vertige pour exposer la
France aux horreurs de la guerre civile, dont l'héroïsme
des Parisiens nous a si heureusement préservés.
Revue de
Rouen - 1851
« M. Simonin,
président honoraire à la Cour d'Appel de Rouen, officier
de la Légion d'honneur, vient de succomber à l'âge de
quatre-vingts ans. Son inhumation a été célébrée dans
l'église métropolitaine. La Cour, une députation de
l'Ordre des avocats, de la compagnie des avoués et de
celle des huissiers assistaient à cette cérémonie ; les
cordons du char étaient tenus par M. le conseiller
Leballeur, M. l'avocat-général. Blanche, M. Verdrel,
président du Tribunal de commerce, et M. Lecæur, avocat.
Un peloton du 24e de ligne a rendu les honneurs
militaires
Jean-François Simonin est né le 8 mars 1772, à Blancour,
département de la Meurthe. Tout jeune encore, il fut
obligé de fuir devant le flot révolutionnaire qui
menaçait de briser son inoffensive existence et
d'engloutir son obscurité.
Réfugié à Dusseldorf, il se livra avec courage à
l'enseignement du français et de la géographie : c'était
la seule ressource du proscrit. Bientôt l'armée
française force, avec ses armes victorieuses, les portes
de Dusseldorf; et lui, français, et lui qui, les larmes
aux yeux, applaudit aux succès de ses compatriotes, est
contraint de fuir encore et de se retirer à Duisbourg.
Là, il devient professeur-adjoint des quatre facultés,
et attend des jours plus calmes et plus heureux.
Rentré en France, Jean-François Simonin sut conquérir
une haute protection, dont il a conservé jusqu'à ses
derniers jours le souvenir le plus reconnaissant. Ce fut
celle du grand juge, de Regnier, duc de Massa.
Nommé le 1er décembre 1805 secrétaire de l'école de
droit à Caen, il fut appelé, en août 1806, aux fonctions
de greffier en chef des cours spéciale et de justice
criminelle de la Seine-Inférieure.
En avril 1811, à l'organisation de la Cour Impériale de
Rouen, M. Simonin reçut le titre de conseiller. Ses
habitudes de travail, sa fermeté de caractère, sa
facilité de parole, le désignèrent bien vite au chef de
la justice comme l'un des magistrats les plus aptes à
juger les débats du grand criminel.
Lorsqu'en 1833, le vénérable M. Eudes fut place à la
tête de la compagnie, M. Simonin devint président de
chambre. Ce fut la légitime rémunération de bons et
loyaux services qui dataient déjà de loin.
Le gouvernement, et ce n'était que justice, crut n'avoir
pas encore assez fait pour récompenser une si honorable
et si laborieuse existence. M. Simonin, qui avait été
nommé en 1824 chevalier de la Légion d'honneur, fut
promu, en 1845, au grade d'officier.
Après trente-neuf ans de service dans la magistrature,
M. Simonin songea au repos, emportant dans sa retraite
un nouveau témoignage d'estime que le chef de l'État
n'hésita pas à lui donner, le titre de président
honoraire, et quelque chose qui le touchait encore plus,
la considération de ses concitoyens et l'affection vive
et sincère de tous ses collègues.
Jean-François SImonin
est le troisième fils (des 9 enfants) de Joseph-Théodore
Simonin (aubergiste, né en 1733) et de Marie Agnès
François (Blâmont 1738, Blâmont 1812); après François
Théodore (Blâmont 2 mars 1766) et Pierre Augustin
(Blâmont 7 septembre 1767, tué à Austerlitz le 2
décembre 1805), Jean-François nait le 8 mars 1772 à
Blâmont.
Le dossier de la
Légion d'honneur indique que Jean-François Simonin, fils
de Joseph Théodore Simonin et Agnès François, aurait été
désigné par erreur sous le prénom de Jean Joseph (par
qui ?) selon l'acte de notoriété du 18 brumaire an XIII
(à cette date Jean-François Simonin est employé dans les
bureaux de la police générale à Paris). La commune, à
l'époque, n'a-t-elle pas retrouvé l'acte de baptême qui
figure toujours dans ses registres ?
Acte de baptême de Jean-François Simonin - 1772
Il est nommé
chevalier, par brevet du 1er septembre 1824, alors
Conseiller en la cour royale de Rouen.
Mais le dossier de la légion d'honneur indique, dans une
attestation de Simonin lui-même, qu'il aurait émigré dès
le mois de juin 1791, servi comme lieutenant dans la
maison du roi, et aurait été blessé aux avant-postes
devant Thionville. Il fait donc état de 16 ans de
services militaires, et serait rentré en 1803, employé
au ministère du grand-juge (« son oncle » - voir
ci-dessous). Il est nommé, par décret du 21 frimaire an
XIV, secrétaire général de l'école de droit à Caen, puis
par décret du 5 septembre 1806, greffier en chef près la
cour de justice criminelle du département de la Seine
inférieure. En avril 1811, il devient conseiller en la
cour.
Si Dedenon dans son Histoire de Blâmontois dans les
Temps Modernes nous dit que « figurent, on ne sait
pourquoi, sur la liste des émigrés, d'autres noms de
personnes plus modestes, telles que : les deux frères
Joseph et François Simonin, perruquiers à Blâmont », la
Revue de Rouen de 1851 donne aussi une biographie bien
moins militaire que l'attestation du dossier de la
légion d'honneur, rédigée en 1824.
|
Attestation du dossier Légion d'honneur - 1824 |
Par ailleurs, Claude Ambroise Régnier n'est pas
directement « son oncle » : on ne trouve pas de liens
familiaux entre le couple Simonin-François et la
famille
de Régnier. Mais Biographies et
nécrologies des hommes marquants du XIXe siècle nous dit
cependant que l'épouse de Jean-François Simonin,
Marie-Françoise Romer, est la « nièce » de Regnier,
et « soeur de M. Romer ».
Joseph Simonin a effectivement
épousé, à Blâmont le 29 janvier 1806, Marie Françoise Romer, née
à Blâmont en 1787 du
mariage entre Charles-Joseph Claude Romer et Marie
Jeanne Régnier (soeur de Claude-Ambroise, 1758-1825).
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Marie-Françoise est donc effectivement la soeur de
Nicolas-Joseph Romer, né à Toul en 1780, secrétaire
particulier du Grand-juge, dont l'acte de naissance est
au nom de Nicolas-Joseph Regnier né de père inconnu le
29 octobre 1780, à la paroisse Saint-Amand de Toul (il ne
sera légitimé par Charles-Joseph Claude Romer qu'en
1798, alors que le mariage avait lieu que le 7 janvier
1784 à Saint Nicolas de Port. Il y aura même jugement du
27 septembre 1821 pour remplacer l'acte par « Joseph Romer, fils légitime de Joseph Romer, marchand demeurant
à Blâmont, et de Jeanne Regnier, son épouse »). |
Acte de naissance de Joseph Romer - 1780 |
Jean-François Simonin est donc devenu le « neveu », par
alliance, du grand-juge.
Jean-François Simonin devient officier de la légion
d'honneur le 4 mai 1845, et décède à Rouen le 21 octobre
1851.
On ne sait quand était décédée son épouse
Marie-Françoise Romer, et quand il s'est remarié, mais
le dossier des pensions des magistrats du ministère de
la justice indique, comme ayant-droit, sa veuve
Marie-Elisabeth Gofestre, née le 21 août 1781 à Rouen
(Seine-Maritime)
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