Chronologie historique des comtes de
Salm en Ardennes
Nouvelles
Archives historiques des Pays-Bas
Baron de Reiffenberg
Tome VI
Ed. Bruxelles, 1832
CHRONOLOGIE
HISTORIQUE DES COMTES DE SALM EN ARDENNES,
D'après les MSS. de M. Ernst.
L'origine des comtes
de Salm a été tellement défigurée et mêlée de fables par
ceux qui en ont parlé jusqu'au 17e siècle, qu'on est
forcé à passer l'éponge sur tout ce qu'ils en ont
débité. Ce serait en pure perte de temps qu'on voudrait
s'amuser à en relever l'absurdité. Pour qu'une
généalogie soit assurée, il faut qu'elle se fonde sur
les chartes et le témoignage d'historiens contemporains
ou presque tels, et ce sont précisément ces bases qui
manquent aux généalogies de la maison de Salm, même
celles que Rittershusius et Spenerus ont publiées, les
moins mauvaises de toutes. Le dernier doutait lui-même
cependant qu'elles trouvassent de la croyance auprès des
gens versés dans l'histoire. André Duchesne fut le
premier, que je sache, qui ait prouvé que l'origine de
cette illustre famille devait être rapportée à la maison
des comtes de Luxembourg (Histoire généalogique des
maisons de Luxemb. et de Limb., chap. 4, p. 24, et chap.
10, p. 42). Aujourd'hui il n'est plus de savant, qui ne
souscrive au sentiment de Duchesne, et qui ne regarde
avec lui Gilbert ou Giselbert, comte de Luxembourg comme
la tige des comtes qui depuis lui ont porté le nom de
Salm.
GISELBERT, COMTE DE LUXEMBOURG.
Gilbert ou Giselbert, fils et successeur de Frédéric,
comte de Luxembourg, et nommé comte de Salm, dans une
ancienne généalogie des comtes de Flandre et dans une
ancienne chronique, toutes les deux du 12e siècle, dont
Duchesne a rapporté les passages (loc. cit. preuves, p.
23). Il est qualifié, Comes Giselbertus de Salmo dans
une charte de l'an 1035, publiée après la mort de
Duchesne, par D. Martene, Amp. collect., t. II, p. 58,
et par M. de Hontheim, Hist. Trevir. Deploin., t. I,
nums 229, p. 367.
Giselbert mourut après l'an 1056, et avant 1059, en
laissant de son épouse, dont le nom et l'extraction sont
inconnus, entre autres enfans, Conrad, son successeur
dans le comté de Luxemboung, et Herman, qui eut pour sa
part le comté de Salm.
HERMAN I.
Herman de Luxembourg, comme il est nommé par Burchard
dans sa chronique de S. Gal., frère de Conrad comte de
Luxembourg, ainsi que le nomme Berthold de Constance,
sous l'année 1086, fut élu anti-césar par les princes
saxons révoltés contre l'empereur Henri IV, et assemblés
en diète à Goslar, le 9 août 1081. Il fut couronné à
Mayence le 28 décembre de la même année, par
l'archevêque de cette ville. Dégoûté de la royauté,
Herman l'abdiqua, et se retira, l'an 1085, dans ses
états, où il mourut en 1088 (Duchesne, ch. ro., p. 42 et
suiv., aliique).
Quelques écrivains lui ont donné pour femme Adélaïde d'Orlamunde,
veuve d'Adelbert, comte de Ballenstads (.voy. entre
autres Tollerus, in addit. ad Hist. Palatin., p. 19, et
Joannis, in append. ad Parai Hist. Palatinam, p. 429);
mais M. Lamey (Acta acad. Palat., t. III, p. 21) et M.
Crollius, Erlauterte Reihe der Pfalzgrafen zu Aachen,
etc., p. 120-130 et 274-279), ont fait voir que ce
sentiment était insoutenable. M. Martin Kremer (Genealogische
geschichte des alten Ardennischen Geschlechts, § 25, p.
77), conjecture qu'il faudrait regarder comme sa veuve
Irmentrud ou Irmetruit de Salmena, qui avait cédé
certains biens dans le Bedgau à Egilbert, archevêque de
Trèves, car, dit-il, comme elle est nommée Domina
Irmentrud de Salmena, elle ne peut pas avoir été la
fille d'un comte de Salm, mais doit en avoir été
l'épouse. Ce raisonnement ne me paraît pas tout-à-fait
concluant, et en le supposant même tel, Irmentrude
pourrait avoir été la veuve de Giselbert, car son grand
âge, qui paraît, à M. Kremer, s'opposer à cette
supposition, y forme d'autant moins de difficulté que la
charte, où il est parlé d'elle et que M. de Hontheim a
publiée (Hist. Triv. dipl., t. I, p. 451), est sans
date, et a été placée, vers l'an 1098, par l'éditeur,
sans qu'il ait dit quelle raison l'avait porté à le
faire; Irmentrud y est d'ailleurs mentionnée comme déjà
morte.
Herman laissa deux fils, savoir: 1° Herman, qui suit, et
2° Otton, comte palatin de Reneck, près de Brisig sur le
Rhin. Otton porta d'abord simplement le nom de Salm;
mais ayant épousé Gertrude, fille de Henri-le-Gras,
comte de Nordheim, et veuve de Sigefroì, comte Palatin
du Rhin, il obtint, entre autres biens, le château de
Rineck, et en prit le titre depuis l'an 1125; car encore
en cette année il est nommé Otto de Salmena dans un
diplôme de l'empereur Henri V, des nones de Mai
(Martene, ampl. coll., t. I, p. 686, Hontheim, l. c., t.
I, p. 512), et dans un diplôme du même empereur, du 7
des ides de janvier 1125 comite Pet. (Pal) Ottone de
Salm (Gerbert, Cod. dipl. hist. Sylvae nigrae, n. 36, p.
54). Il mourut l'an 1150, ayant eu de son épouse, morte
en 1154, ou à peu près, un fils nomme Otton, comte de
Bentheim, mort en 1148 ou 1149, sans laisser d'enfans,
qu'un auteur du temps nomme Filium Ottonis palatini
comitis, patruelem Herimanni Salmonis (chron. reg. S.
Pantal. ad ann. 1146 ap. Eccard, corpus hist. medii aevi,
t. I, p. 932), et Sophie, mariée à Thierri VI, comte de
Hollande (voy. sur lui Duchesne, I. c., ch. II, p. 34,
Iung Hist. comitatus Benthemiensis, I. 3, cap. 1 et 2,
p. 160 seq., et principalement Crollius à l'endroit
cité, p. 361-396.
HERMAN II.
Herman étant presque toujours nommé avant son frère, et
qualifié comte de Salm, on doit croire qu'il fut l'aîné
des fils d'Herman I. Ce qui est d'autant plus
vraisemblable qu'Otton lui survécut de plusieurs années.
C'est en 1095, que je l'ai vu pour la première fois,
comme témoin dans une charte, Herimannus Herimanni
comitis filius et frater ejus (Martene, Ampl. coll., t.
1, p. 552 et ailleurs). Dans une autre de l'an 1104, on
le voit sous la qualité de comte de Salm, Hermanus
Salmuncensi comite et fratre ejus Ottone (Ibid., t. II,
p. 80). Dans une charte de l'an 1121, il est encore
nommé Comes Hermannus de Salmo (Bertholet, Hist. de
Lux., t. IV, preuves p. 3). La même année, cinquième du
pontificat du pape Calixte, il avait fait un voyage à
Rome, comme il se voit par une charte de Guillaume,
comte de Luxembourg, que les éditeurs ont mal rapportée
à l'an 1122 (Calmet, t. V, Preuv., p. 114. Bertholet, t.
III, Pr., p. 49. Hontheim, tit. I, p. 507). Dans un
diplôme de l'empereur Lothaire, du 21 janvier de l'an
1129, les deux frères sont mentionnés entre les témoins,
en ces termes : comes Hermannus de Salmena; comes Otto
de Rinege (Schoepflin, Alsatia diplom., t. I, n° 255, p.
207). Dans un diplôme du même prince, du 24 avril 1131,
ils reviennent en ordre inverse: comes Otto de Rineke
fraterque suus de Salmis Hermannus comes (Duchesne, I.
c., Pr., p. 34, et Hontheim, t. I, p. 516). Je ne l'ai
plus aperçu après l'année 1135, où il se montre encore
dans une charte d'Adalbert, archevêque de Mayence, comes
Hermannus de Salmis et frater ejus Otto de Rineche (Gudenus,
cod. dipl., t. I, n° 115, p. 120, et Gall. christ., t.
V, instrum., p. 451), et où Henri, son fils, lui avait
déjà succédé dans la vouerie de l'abbaye de Senones,
ainsi qu'on le verra plus bas, Herman s'étant permis,
dans cette qualité, de vexer ce monastère, il fut
excommunié par Adalbéron IV, évêque de Metz. Ce comte
reconnut son tort, et le prélat leva en 1111
l'excommunication dont il l'avait frappé (Calmet, Hist.
de Lorr., 2e édit., t. III, Pr., p. 62). Dans des titres
de 1226 et de 1227, il revient sous cette qualification:
Hermannus comes et advocatus ecclesiae senoniensis
(ibid., t. V., Pr., p. 164. Gall. christ., t. XIII, p.
489 et 490). Herman avait, suivant Albéric des Trois
Fontaines (Chron. ad ann. 1158, p. 309), épousé une sœur
d'Étienne, évêque de Metz, et de Renaud-le-Borgne, comte
de Bar, fille de Thierri, comte de Montbéliard et de
Bar, que des modernes nomment Adélaïde, dont il eut
Henri, comte de Salm, qui suit, et Thierri, abbé de S.
Paul de Verdun, depuis 1141 jusqu'en 1148, mort au
château de Marange, appartenant à son frère, le 12
février 1149, selon Hugo (Annal. Proemonstrat., t. II,
p. 509), ou après l'an 1156, suivant l'auteur du nouveau
Gallia christ., t. XIII, p. 1330. Ces deux écrivains se
trompent en le faisant fils de Reinard ou Reinold, comte
de Salm, qui n'a jamais existé. Herman eut encore un
troisième fils, nommé comme lui Herman, ainsi que le
prouve une charte d'Étienne, évêque de Metz, de l'an
1130, pour l'abbaye de Senones, où l'on voit le père et
le fils, comites Hermani et filii ejus Hermanni (Calmet,
t. V, Pr., p. 172, et Gallia christ., t. XIII, instrum.,
p. 492). D. Calmet avait donné à Herman II pour épouse
Agnès, comtesse de Langenstein, ou Pierre Percée, et
pour fils, 1° Conrad, qualifié comte de Pierre-Percée
dans une charte de l'an 1127 qu'il rapporte t. V, Pr.,
p. 265), et Henri, comte de Salm et voué de Sénones,
qu'il fait la tige des comtes de Salm en Vosges.
Bertholet, au contraire, donne cette Agnès de
Langenstein pour femme à Henri, fils d'Herman II, et le
fait père de Conrad, qui, selon lui, fut seigneur de
Pierre-Percée et comte de Salm. M. Kremer, 1. c., p. 79
et suiv., rejette avec raison la descendance de ce
Conrad de l'un ou de l'autre de ces comtes de Salm, mais
c'est sans preuve qu'il le soupçonne avoir été le frère
d'Agnès susdite. Suivant lui, ce fut Herman III, fils
d'Herman II, qui eut pour femme Agnès, comtesse de
Langenstein, dont il eut deux fils, savoir: Henri, époux
de Judith, fille de Frédéric de Bitche et sœur de
Frédéric II, duc de Lorraine, et un deuxième, nommé
comme lui Herman. Et c'est, suivant lui, cet Herman,
mari d'Agnès de Langenstein, qu'il faut regarder comme
la tige des comtes de Salm dans les Vosges, tandis que
Henri, fils d'Herman II et d'Adélaïde de Bar, fut la
tige des comtes de Salm en Ardennes.
En supposant que Herman III ait épousé, environ l'an
1120, Agnès de Langenstein, sa descendance misé en avant
par M. Kremer, serait admissible, si d'ailleurs rien ne
s'y opposait; il faudrait seulement y ajouter une
génération que M. Kremer n'a pas connue, ou plutôt à
laquelle il n'a pas fait attention; car il rapporte
lui-même l'extrait d'une charte où Henri, époux de
Judith, nomme Agnès son aïeule et son père Henri, qui
fut, par conséquent, fils d'Agnès, et où il fait mention
d'Herman son oncle.
Mais avant de proposer mon sentiment à l'égard d'Agnès,
il faut commencer par établir ce qui est incontestable.
Il est d'abord certain, par une bulle du pape Innocent
II, de l'an 1135, en faveur de l'abbaye de Honcourt, que
M. Kremer cite, d'après Schoepflin, Alsatia diplom., t.
I, n° 258, p. 208, qu'Agnès a eu pour époux un comte
nommé Herman, Ecclesiam ejusdem villae, y est-il dit,
quam dedit Conradus comes (de Langenstein, comme il y
est nommé un peu plus haut), et Ermannus comes cum uxore
sua Agnete. 2° Agnès, qualifiée comtesse de Salm, était
déjà veuve en 1240, où, de concert avec ses fils Henri
et Herman, elle donna commencement à la fondation de
l'abbaye de Haute-Seille, dans le comté de Blamont.
C'est ce qui se voit par une charte de Pierre, évêque de
Toul, de l'an 1176, par laquelle il confirme différentes
donations faites à l'abbaye de Haute-Seille, pièce que
M. Kremer n'a pas vue et qui se trouve au nouveau Gallia
christ., t. XIII, instrum., n° 74, p. 518. Quos
comitissa de Salmis Agnes, femina videlicet venerabilis
et illustris, et filii ejus comes Henricus et comes
Herimannus, nobiles quidem genere, sed morum nobilitate
multo generosiores... susceperunt... data est eis à
praedictá comitissa et à filiis ejus... heremi vastitas...
super fluvium veososam... anno igitur ab incarn. Domini
1140 facta est in montibus illis mansio, etc. 3° Le
comte Henri, fils d'Agnès, étant mort, le fils de
celui-ci, nommé aussi Henri et qualifié comte de Salm,
fit de nouvelles donations à cette abbaye, car voici
comme en parle l'évêque de Toul dans la charte citée p.
519: Cumque domus haec diuturná paupertate fatigata
usque ad haec nostar tempora cucurrisset. Comes Henricus
de Salmis, filius praedicti comitis Henricii, juvenis
quidem aetate, sed morum gravitate grandaevus et ipsius
ecclesiae cultor et amator, paternam donationem non
solum laudavit, sed insuper adjecit et concessit, etc.
Lambert, abbé de Beaupré, ayant été témoin à cette
concession, elle doit avoir eu lieu avant 1165, où l'on
rencontre cet abbé pour la dernière fois, ou du moins
avant 1168, où Pierre, son successeur, se fait déjà voir
(Gall. christ., t. XIII, p. 1369).
4° Ce fut ce Henri, petit-fils d'Agnès, et non Henri,
fils de cette princesse, comme le dit M. Kremer, qui
épousa Judith ou Joatte, sœur de Frédéric II, ou Ferri,
duc de Lorraine, ainsi que le témoigne Richer (Chron.
senon., lib. 4, c. 26, apud Acherium, Spicilegii t. II,
p. 639, éd. in-fol.), et, par conséquent, fille de
Ferri, dit de Bitche; dans une charte de l'an 1186, il
dit : Ego Henricus comes de Salmis notum facio.....
Agnetem comitissam de Langenstein aviam meam, Henricum
patrem meum et Hermannum fratrem et (il faut lire ejus)
consules (id est comites) qui pari devotione... cœnobium
altae sylvae fundaverunt..... laudaverunt hoc et pariter
contulerunt Joatha comitissa uxor mea, et filius meus
Henricus (Calmet, t. VI, Pr., p. 54). Dans une autre
charte de l'an 1174, il nomme Herman son oncle, et Agnès
son aïeule, sans exprimer sa qualité de comtesse de
Langenstein: Patrui mei comitis Hermanni, aviaeque meœ
Agnetis (ibid., p. 19).
5° Ce Henri, époux de Judith de Lorraine, fut avoué de
l'abbaye de Senones, comme le témoigne en plus d'un
endroit Richer, son contemporain, dans la chronique de
cette abbaye, où il rapporte en détail ce qu'elle a eu à
souffrir tant de lui que de ses fils Henri et Frédéric,
et particulièrement de son petit-fils nommé aussi Henri.
6° Suivant le même écrivain, Henri, époux de Judith de
Lorraine, qu'il nomme aussi comte de Blamont (lib. 5, c.
6, p. 648), fut originaire du château de Salm en
Ardenne, et fit bâtir sur les fonds de l'abbaye de
Senones un château, auquel, pour cette cause, il donna
le nom de Salm. Incipiamus igitur, dit-il, à comite
Henrico, qui dictus est de Salmis, qui et contemporaneus
noster fuit.... ejus tempore castellum in Brusca valle
in fundo hujus ecclesiae, quod Salmis dicitur tempore
dicti abbatis Henrici (il a gouverné cette abbaye depuis
le mois d'août 1204, jusqu'au 21 sept. 1225, Gallia
christ., t. XIII, p. 1388), constructum est. Quod nomen
à quodam castro, quod in territorio Ardena situm est,
unde idem comes et sui praedecessores orti sunt, accepit
(lib. 4, c. 26, p. 639, et l. 5, cap. 6). Un des
petits-fils de ce comte, nommé aussi Henri, vendit ce
château et celui de Pierre-Percée ou Langenstein, à
l'évêque de Metz (lib. 5, c. 6), et encore celui de
Morhange au duc de Lorraine (lib. 5, c. 5), pour les en
tenir en fief.
De tous ces faits combinés, il résulte clairement que
Henri, époux de Judith et fondateur du château de Salm
en Vosges, ayant été, 1° originaire de Salm en Ardenne;
ayant été, 2° fils d'un comte Henri, et ayant, 3° joui
de l'avouerie de l'abbaye de Senones, ainsi que du
château de Morhange, doit avoir eu pour père Henri, fils
d'Herman II et d'une fille de Thierri I, comte de
Montbéliard et de Bar, puisque, comme il sera prouvé à
l'article suivant, ce dernier comte Henri a possédé et
le château de Salm en Ardenne et l'avouerie de l'abbaye
de Senones, et que ce même Henri a été propriétaire du
château de Morhange, où décéda l'abbé Thierri, son
frère, ainsi qu'il a été dit plus haut.
Or, Henri, époux de Judith et fondateur du château de
Salm en Vosges, ayant été incontestablement fils de
Henri, comte de Salm en Ardenne, mort entre 1153 et
1163, il est clair, ce me semble, que la comtesse de
Salm Agnès, qu'il qualifie comtesse de Langenstein, et
qu'il dit son aïeule, doit avoir été la femme d'Herman
II et non pas d'Herman III, fils d'Herman II, comme le
prétend M. Kremer, et comme avant lui D. Calmet l'a
avancé dans un endroit, quoique dans un autre, comme il
a été dit plus haut, il l'ait attribuée pour femme à
Henri II, et qu'ailleurs il l'ait fait nièce d'Étienne,
évêque de Metz et fille de Renaud, comte de Bar, son
frère (liv. 21, n° 103, t. II, p. 483).
Mais comment, dira-t-on, identifier cette Agnès avec la
femme d'Herman II, mère de Henri I, comte de Salm en
Ardenne, laquelle se nommait Adélaïde ? A cela je
réponds que le nom d'Adélaïde n'est avéré par aucun
ancien monument de ma connaissance, et quand même il le
serait, rien n'empêcherait que cette princesse n'eût été
binome, comme l'ont été tant d'autres dans ce temps-là.
Mais, répliquera-t-on, l'épouse d'Herman II était issue
de la maison de Montbéliard et de Bar, comment
aurait-elle donc pu être qualifiée comtesse de
Langenstein par un de ses petits-fils ? cette difficulté
est nulle, parce qu'en premier lieu Agnès est aussi
nommée comtesse de Salm, dans la charte citée de
l'évêque de Toul de l'an 1176, et l'on sait qu'il n'est
pas rare dans ce temps-là de voir donner à des princes
et à des princesses, propriétaires de plusieurs
châteaux, tantôt le nom de l'un, tantôt celui d'un autre
de ces châteaux. C'est ainsi que l'auteur de la
chronique de Senones nomme en quelques endroits Henri,
petit-fils d'Agnès, comte de Salm (lib. 4, c. 20), et
plus bas, comte de Blamont (ibid., 5, c. 6).
Cette difficulté est nulle en second lieu, parce
qu'Agnès peut avoir eu en dot une part dans le château
de Langenstein et ses dépendances. Ceux qui connaissent
l'histoire du moyen âge, savent que souvent le même
château appartenait à différens seigneurs, et que les
dots des princesses étaient fréquemment assignées sur
des châteaux. Ma supposition à cet égard, par rapport à
la comtesse Agnès, est d'autant plus solide, qu'après
qu'elle eut fondé l'abbaye de Haute-Seille concurremment
avec Conrad (nommé comte de Langenstein dans une charte
de l'an 1127 déjà citée), Hadewige, sa femme, et Hugues,
leur fils, qui avaient aussi une part à ce château (voy.
une charte d'Étienne, évêque de Metz, sans date, dans
Calmet, t. V, Pr., p. 355), Étienne de Metz (qui était
le frère de la comtesse de Salm), donna à cette abbaye
tout ce qu'il possédait dans cette contrée, concessit et
confirmavit eidem ecclesiae quidquid ibidem possidebat
in omni usu et fructu (Gallia christ., t. XIII, instrum.,
p. 518). Le même prélat voyant que les religieux de
Haute-Seille ne pouvaient avancer dans l'établissement
de leur monastère, à cause de ce qu'Agnès et les
habitans de Langenstein, ainsi que les seigneurs de
Turquestein, qui étaient tous ses parens, s'arrogeaient
chacun les droits de fondateur dans cette abbaye, il
arrangea cette difficulté en 1147. Jus fundationis et
ominium in dictá ecclesiá sibi omnes attrahendo, unde
quia periculosum erat viris religiosis sub tot dominis
fundare coenobium, et in tali discordiá permanere.......
Quoniam vero praedicti nobiles fideles nostri erant
(cela regarde les seigneurs de Turquestein), et de lineá
consanguinitatis nostrae vel descenderent (ceci doit
concerner Agnès, sœur du prélat), omnes pariter
convocavimus et querelam sedavimus in hunc modum. Agnes
comitissa et heredes sui, etc. (Calmet, t. V, Pr., p.
328.)
HENRI I.
Henri I, fils d'Herman II, est nommé avec son père dans
une charte d'Étienne, évêque de Metz, de l'an 1130
(Hist. de Metz, par deux religieux Bénédictins, t. III,
p. 109). Dans une charte du même, ayant pour date
l'année 1125, il est déjà nommé comte de Salm et avoué
de Senones, Henricus comes de Salmis et advocatus
ejusdem loci (Calmet, t. V, Pr., p. 153). Mais son père
étant encore postérieurement nommé avoué de Senones, il
faut croire qu'il y a erreur dans la date, aussi
l'indiction I et l'épacte VII y marquées, portent sur
l'année 1138, quoique la concurrente III convienne à
l'année 1125; il fut certainement avoué de cette abbaye
en l'année 1135, où l'on a aperçu son père pour la
dernière fois, et il fit essuyer de si mauvais
traitemens aux religieux et aux gens qui en dépendaient,
qu'il s'attira une sentence d'excommunication de la part
de l'archevêque de Trèves. Le comte reconnut son tort,
fit satisfaction à l'abbé de Senones, et fut absous de
la censure dans un concile provincial tenu à Metz la
même année ou aux premiers mois de la suivante (Calmet,
t. V, Pr., p. 193, et Hontheim, t. I, num. 354, p. 529).
Renaud-le-Borgne, comte de Bar, son oncle, s'étant
emparé, en 1134, du château de Bouillon sur Alexandre I,
évêque de Liége, Albéron II, successeur de ce prélat,
entreprit, l'an 1141, de récupérer cette place qui était
regardée comme imprenable: Hugues, fils du comte de Bar,
et un de ses frères, y commandaient. Le siège tirant en
longueur, et la place étant réduite à l'extrémité,
Henri, comte de Salm, demanda à y entrer pour voir ses
cousins germains, qui étaient malades, et les porter à
entrer en capitulation: Hic die comes Salmensis Henricus
natus de sorore comitis Ragnaldi venit in castra,
petiitque episcopum, ut concederet sibi visitare nepotes
suos, quos infirmari audierat... propter viri fidem,
prudentiam et honestatem et modestiam quod petebat.....
ei concedunt (Triumph. S. Lamb. de castro Bullino, cap.
19, ap. Chapeauville Gesta Pontif., Leod., t. II, p.
599). L'an 1152, Henri, formant des prétentions sur
l'église, puis prieuré d'Amange, aujourd'hui Insming,
que Thierri, comte de Montbéliard et de Bar, son aïeul
maternel, avait donnée en 1102 à l'abbaye de S. Michiel
en Lorraine (l'Art de vérifier les dates, t. II, 545),
en chassa les moines que l'abbé de S. Michiel y avait
placés, et y établit un prêtre. Le pape Eugène III,
informé de cet acte de violence, en écrivit au comte de
même qu'à Étienne, évêque de Metz, son oncle. Ces
lettres ont été publiées par D. Martene, Ampl. collect.,
t. I, p. 811, et dans le Recueil des historiens de
France, t. XV, p. 473: didicimus, dit le pape au prélat,
quod comes H. de Salmis nepos tuus cellam Asmingia... de
novo per violentiam occupavit ejectis monachis, etc.
Henri eut égard aux remontrances du pape et de l'évêque,
et remit le prieuré d'Amange à l'abbaye. Il pria
l'évêque de Metz de faire rédiger un accord à ce sujet
par écrit, qui est du 7 des ides d'octobre (Calmet, t.
V, Pr., p. 347, et Hist. de l'abbaye de S. Michiel, par
D. Joseph de L'Isle, liv. I, ch. 7, p. 113). Le premier
septembre précédent il se trouva au concile provincial
de Trèves, où Mathieu, duc de Lorraine, rendit
satisfaction des torts qu'il avait faits à l'abbaye de
Remiremont (Martene, Ampl. coll., t. VII, p. 71, et
Hontheim, t. I, num. 386, p. 568).
L'année suivante, Henri, comte de Salm, allié avec
d'autres princes, était entré en guerre avec les
Messins, Étienne, évêque de Metz, engagea S. Bernard à
le prier de leur accorder la paix. Le comte s'y refusa
d'abord, mais le saint abbé le fléchit en rendant, en sa
présence, l'ouïe à un sourd (Vita S. Bernardi auct.
Gaufrido, lib. 4, num. 49 operum, S. Bern., t. II, p.
1149, édit. de 1690).
Pendant son absence, la garnison de son château de Salm
avait commis quelques excès sur les terres de l'abbaye
de Stavelo. Les religieux en donnèrent avis à leur abbé,
le célèbre Wibald, celui-ci s'en plaignit au comte
Henri, qui lui répondit par une lettre pleine
d'affection, en lui protestant que rien ne pourrait
altérer leur amitié. Il laissa à son ami à estimer les
dommages causés à son monastère par l'imprudence
réciproque de leurs gens, et finit par lui dire Scitis
enim quoniam castellum meum Salmis, et omnia quae
possideo, in pace et in guerra vobis, sicut mihi, parata
semper suberunt, etc. Ces lettres se trouvent au tome II
de Ampl. collect. de D. Martene, entre celles de Wibald
(num. 401 et 402, p. 568 seq.), et celle du comte se
voit aussi dans le Recueil des hist. De France, t: XV,
p. 540.
Le comte Henri mourut avant l'an 1163, laissant de sa
femme, dont on ignore le nom et l'extraction, Henri, qui
eut en partage les possessions de son père dans les
Vosges, et qui y fit construire un château qu'il nomma
Salm, en mémoire de celui dont il était originaire.
C'est lui qui fut la tige de la maison des comtes de
Salm en Vosges, ainsi qu'il a été prouvé ci-dessus. Mais
comme il n'a pas recueilli toute la succession de son
père, et notamment pas le comté de Salm en Ardenne, il
est clair qu'il doit avoir eu un frère, dont ce comté
devint le partage, savoir, Frédéric, nommé comte de Salm
en 1163, époque à laquelle il n'y avait pas encore de
prince de ce nom dans la maison de Salm en Vosges.
FRÉDÉRIC.
1163. Frédéric, comte de Salm, comes de Salmena, qui se
rencontre dans une charte d'Hillin, archevêque de
Trèves, de l'an 1163 (Hartzhum concilia Germania, t.
III, p. 394), doit, ainsi que je viens de le dire, être
regardé comme le fils de Henri I, puisqu'il est certain
que Henri, fils de ce comte, mais apparemment puîné, fut
le fondateur de la branche des comtes de Salm en Vosges.
L'existence de Conrad, que Bertholet, qui a méconnu
Frédéric, donne pour successeur à Henri, ne se prouve
par aucune charte, ni par le témoignage d'aucun auteur
contemporain ou de quelque poids.
HENRI II.
Henri II, comte de Salm, embrassa le parti de Frédéric
II, roi des Romains, contre l'empereur Otton IV, comme
il se voit par son intervention à un diplôme de
Frédéric, donné dans son camp près de Juliers, le 9
septembre 1214, que d'après l'original, Lacwitz a publié
dans son Historisch. diplom. Unterricht vom hohen
Teuschen Ritter Ordens, etc. Hadlamhof, 1753, num. 3. Ce
qui me fait croire qu'il faut prendre ce comte pour
celui de Salm en Ardenne, plutôt que pour son oncle du
même nom, comte de Salm en Vosges, c'est que dans la
souscription du diplôme il suit Henri, comte de Vianden,
son voisin. Bertholet, qui n'a connu ce comte que par
une fausse charte de Waleran, comte de Luxembourg,
portant pour date la même année, en prolonge la vie au
delà de l'an 1240.
Sa femme fut sans doute Élise ou Élisabeth, qui se
qualifie de comtesse de Salm par la grâce de Dieu, dans
une charte, par laquelle elle conféra, en l'an 1200, au
couvent de Nieder-Prum, le droit de patronage de
l'église de Sigendorf, située dans son aleu, suivant
l'extrait qu'en donne, d'après l'original, le P.
Wiltheim (Vita venerab. Yolanda, etc. Antwerp., 1674, p.
297).
GÉRARD.
Gérard, comte de Salm, avait suivi l'empereur Frédéric
II en Italie, comme le prouve un diplôme de ce monarque
daté de Melfi au royaume de Naples, au mois de juillet
de l'an 1231, où entre les témoins l'on voit comes
Gerardus de Saumes. Cette pièce se trouve aux
Silesiacarum rerum scriptores, publiés à Leipsig, 1729,
par le chevalier F. W. de Sommersberg, t. I, p. 925, au
diplomatarium Bohemo-Silesiacum, n° VII. N'y ayant point
eu, dans ce temps-là, de comte nommé Gérard dans la
branche cadette de Salm, on est en droit de rapporter
celui-ci à la branche aînée en Ardenne.
Il pourrait sembler que Gérard, avant d'avoir succédé à
son père, eût épousé Clémence, fille de Renaud, sire de
Rosoï, et de Juliane de Rumigni. Car on lit dans les
généalogies de Baudouin d'Avennes, publiées par dom d'Achery
(Spicilegii, t. III, p. 289, édit. in-fol.); Clementia
nupsit Gerardo de Salm. Mais dans l'édition de ces mêmes
généalogies par le baron le Roi, et au Recueil des
historiens de France, t. XIII, p. 552, on lit Clementia
nupsit Gerardo de Salm, et dans Gilbert de Mons, publié
là même, Gerardo de Haslut; ces noms sont sans doute
estropiés; mais Henri IV, qui suivra, ayant épousé
Clémence, fille de Roger de Rosoi, il n'est guère
vraisemblable que Gérard ait eu une épouse de la même
famille; je ne la connais pourtant pas assez pour
prononcer là-dessus.
HENRI III.
1240. Henri III succéda dans le comté de Salm en 1240;
ce fut du moins le 15 mai de cette année qu'il fit à
Henri, comte de Luxembourg, hommage du château et de la
châtellenie de Salm, qu'il reprit dudit comte en fief,
comme ses prédécesseurs les avaient toujours tenus des
comtes de Luxembourg. On peut voir cet acte d'hommage,
qui est très-remarquable, dans l'Hist. de Luxembourg,
par le P. Bertholet (tom. V, Preuv., p. 15 et suiv.). Il
en donne le sommaire dans le corps de son ouvrage (p.
80-82).
Il faudra placer la mort de Henri III (que Bertholet
nomme II) en l'année 1247, ou en 1248 au plus tard.
C'est à lui que Bertholet, aussi bien que le P. Wiltheim
(loc. cit., cap. 16, p. 98) donne pour fille la femme de
Frédéric, fils aîné de Henri, comte de Vianden, et de
Marguerite de Courtrai, laquelle, après la mort de son
mari arrivée en 1248, embrassa la vie religieuse dans
l'ordre de Citeaux et y devint abbesse (Thomas
Cantripatanus de apibus, lib. 2, cap. 29, p. 311).
HENRI IV.
1248. Henri IV fit, suivant Bertholet, huit ansaprès son
père, hommage à Henri, comte de Luxembourg: ce fut le
jeudi après la Toussaint 1248, suivant Bertelius,
Historia Luxemburgensis, p. 105.
Il avait épousé Clémence, troisième fille de Roger, sire
de Rosoi, en Thiérache, laquelle le fit père de
Guillaume son successeur, et d'une fille mariée au
seigneur d'Ayste. C'est ce que dit Baudouin d'Avennes en
ces termes : Tertia filii Domini Rogeri de Rosoi, nomine
Clementia, nupta comiti de Salmis in Ardenna, unum ei
peperit filium et unam filiam. Filius nomine Guilielmus,
filiam comitis Juliacensis Willelmi duxit uxorem, et
filia comitis de Salmis nupsit Domino de Ayste (Bald.
geneal., cap. 25, p. 25, édit. le Roi et Acherii, t.
III, p. 292).
Bertholet, dans sa Liste généalogique des comtes de Salm
en Ardenne, en tête du tom. III de son Hist. de
Luxembourg, p. XXXIV, ajoute que, devenu héritier d'une
partie du château et de la terre de Chaumont en Porcéan,
il promit en 1257 d'en payer le relief à Thibaut, roi de
Navarre.
GUILLAUME I.
Guillaume I avait déjà succédé à son père dans le comté
de Salm, le 8 avril 1277, époque à laquelle il entra
dans la grande confédération des princes du Bas-Rhin
contre Sifroi, archevêque de Cologne (Kremer,
academische Beitrage, t. III, dipl. n. 133, p. 150, et
Fischer, Geschlechts-Register der Hauser Isenburg, etc.,
dipl. n. 78, p. 93). Il vivait encore au commencement de
l'année 1295, puisque M. de Saint-Génois (Monumens
anciens, etc., t. I, p. 352 et 835) indique une
quittance en date du lundi après le huitième jour de
Noël 1294 (vieux style) de Willaume, comte de Saumes,
sire de Prouvy, de la somme de 100 liv. reçue du comte
de Hainaut pour trois hommages à lui dus, à cause de sa
terre de Prouvy. Mais il avait déjà cessé de vivre en
1297.
On a vu ci-dessus, par le témoignage de Baudouin d'Avennes,
qu'il avait épousé une fille de Guillaume, comte de
Juliers, nommée Alix par Butkens (Trophées du duché de
Brabant, t. I. p. 560), et Adélaïde par Bertholet, qui
se trompe lourdement en ajoutant que ce mariage lui
procura les terres de Ravenstein, de Sittard et de Horne
(tom. V, p. 328). Mais il paraît qu'il avait contracté
une alliance postérieure ou antérieure avec la fille
aînée de Gérard, sire de Prouvy, car c'est ce que dit
encore Baudouin d'Avennes en ces termes: Soror Hugonis
de Antoing Maria domino Philippo de Prouvy unicum
peperit filium nomine Gerardum, qui patri succedens ex
Ida, filia comitis Balduini de Ghines, plures genuit
filios et filias, quarum primogenita nupsit primogenito
comitis de Salmis in Ardenna Guillelmo (Bald,, cap. 31,
p. 46, édit. le Roi et Acherii, t. III, p. 296). On voit
aussi par là que Guillaume avait eu des frères, quoique
Baudouin dans l'endroit cité plus haut, semble le faire
fils unique de Henri et de Clémence de Rosoï.
Henri, son successeur, est le seul de ses enfans qu'on
connaisse, car Wolfgang, que le P. Bertholet lui fait
succéder, et qu'il marie avec Richarde, fille de Henri,
comte de Vienne ou Vianden, et de Marguerite de
Courtrai, est un être aussi imaginaire que sa prétendue
femme. Mais il paraît qu'il eut un fils nominé
Guillaume, puisque dans le Manipulus Hemmenrodensis de
Husius, t. XXIV, p. 71, il se trouve que Guillaume père
et Guillaume fils, comtes de Salm, ont été enterrés dans
la salle du chapitre de cette abbaye. L'auteur en
rapporte les épitaphes suivantes :
Ad nos translatum jacet hic corpus tumulatum
Salmensis Comitis Wilhelmi nomine mitis.
Wilhelmus Salmis comes hic successit ab almis,
Sit Domini palmis adjectus cum prece psalmis.
Comme Guillaume fils est nommé comte de Salm dans cette
épitaphe, il serait possible qu'il eût succédé à
Guillaume I son père, dont il faudrait par conséquent
avancer la mort, et dans ce cas Guillaume II peut avoir
eu pour épouse la fille de Gérard de Prouvy.
HENRI V.
1297. Henri V, fils de Guillaume I ou de Guillaume II,
avait déjà succédé à son père au mois de décembre de
l'an 1297, ainsi qu'il se voit par un acte de cette
date, par lequel Henri, chevalier, sire et comte « de
Saumes, reconnaît être entré dans l'hommage de Jean d'Avesnes,
comte de Hainaut, pour les maisons, comté et
appartenances de Saumes; promet sous peine de mille
livres blancs, d'y faire consentir sa mère en dedans la
chandeleur, et de la faire entrer dans cet hommage; il
promet encore de faire notifier cet hommage à tous les
gentilshommes de son pays. (Saint-Genois, Monumens
anciens, T. I, P. II, » p. 870.)
L'an 1301, le lundi après Pâques, Henri, comte de Saumes,
fut témoin de l'adhéritement fait à Jean d'Audenarde,
sire de Rosoï, de la terre de Faignies que le comte de
Hainaut lui avait cédée (ibid., P. II, p. 88). L'an 1307
ou le lundi après le 13e jour après Noël 1 306 (V. S.),
Henri, Cuens de Salmes, renouvela à Henri, comte de
Luxembourg, le relief du château et de la châtellenie de
Salmes avec toutes les appartenances. Tables des
diplômes Belgiques d'après le Recueil des chartes de
Lux., t. I, fol. 26 (verso).
L'an 1325, le lundi avant la Toussaint, il céda à Jean
d'Useldange quelques biens fonds sur la Moselle, à
condition que celui-ci lui assignerait en fief trente
livres (livrées) de terres sur ses biens allodiaux (Bertholet,
Hist. de Lux., t. VII, p. 208).
L'an 1336, au mois de mai, il approuva avec les nobles
et les magistrats du comté de Luxembourg, le contrat de
mariage entre Charles, fils aîné de Jean, roi de Bohême
et comte de Luxembourg, et Blanche, fille de Charles de
Valois et sœur de Philippe VI, roi de France (Bertholet,
t. V1. Pr. p. 32). Il mourut suivant le P. Bertholet
vers l'an 1339; mais il me semble qu'on doit reculer sa
mort de quelques années. On ignore le nom et
l'extraction de son épouse, dont il laissa plusieurs
enfans, savoir: 1° Henri son successeur, 2° Guillaume
qui, selon le P. Bertholet (t. VII, p. 208) fut en
guerre, l'an 1334, contre Thierri de Walcourt, et qu'il
croit y avoir été tué; mais c'est une erreur; car l'on
voit par Butkens (Trophées, etc., t. I, p. 409) que
Guillaume, comte de Salm, fut allié en 1334, de Louis de
Nevers, comte de Flandre, contre Jean III, duc de
Brabant; 3° Jean, dont Bertholet ne parle pas, mais qui
doit être le comte Jean de Salm, que Butkens (ibid., p.
420) met entre les alliés d'Édouard III, roi
d'Angleterre, contre la France en 1336; 4° Waleran, qui
en février 1357 (V. S.) fut garant du contrat de mariage
entre Godefroi de Heinsberg et Philippine de Juliers (Kremer,
Academ., Beitr. t. I, dipl.n° 31, p. 47); il est aussi
mentionné entre les nobles dans un diplôme de l'empereur
Charles IV, du 19 janvier 1357, Walramus de Salmen
(Martene, ampl. collect. t. II, p. 135). On voit par-là
combien Bertholet s'est trompé en donnant dans sa liste
généalogique, Henri comme le cadet de ses frères, qui
pour leur avoir survécu leur aurait succédé dans le
comté de Salm, tandis qu'au tome VII, p. 209, il montre
Waleran encore vivant en 1344 et lui fait vendre au
comte de Luxembourg les possessions qu'il avait à
Neukerich et à Buezbure.
HENRI VI.
1343. Henri VI releva en 1343 de Jean l'Aveugle, roi de
Bohème et comte de Luxembourg, le château et la
châtellenie de Salom; le lundi 8 octobre suivant
Bertholet (t. VII, p. 209) ou le 8 décembre, selon la
Tables des diplómes Belgiques. Cette dernière date est
juste puisque le 8 décembre tomba un lundi, tandis que
le 8 octobre fut un mercredi. L'an 1344, Henri se
rendit, au mois de juin, caution avec treize autres
seigneurs envers Marie d'Artois, comtesse de Namur, pour
la somme de dix mille florins d'or que lui devait Jean,
roi de Bohême et comte de Luxembourg. (Saint-Genois,
Monumens anciens, etc. t. I, p. 929). L'an 1354, il fut,
le 11 novembre, témoin à l'acte par lequel Wenceslas,
duc de Luxembourg, assigna à Jeanne, duchesse de
Brabant, son épouse, pour douaire le comté de la Roche
et celui de Durbui (ibid. t. 11, p. 22). On met sa mort,
dit le P. Bertholet (T. VII, p. 209), à l'année 1362,
mais il doit être mort plus tôt si l'on doit reconnaître
pour son successeur Jean, nommé en 1361 comte de Salm,
dont il va être parlé.
Il avait épousé Mathilde, fille d'Albert, comte de Thuin
en Hainaut. L'existence de madame Machaut de Tuing,
comtesse de Saulmes, se prouve par un acte du 24
septembre 1369 touchant le différend qu'elle avait pour
une rente de 200 livres sur la terre de Roeulx à cause
de son douaire, avec Jean de Loss, seigneur d'Agimont et
aussi seigneur viager de Roeulx (Saint-Genois, loc. cit.,
t. I, p. 400).
Le P. Bertholet (t. VII, p. 209) dit qu'il laissa en vie
un fils nommé Jean, qui fut comte de Chiny, par
l'alliance qu'il contracta avec Philippotte de
Fauquemont. Il le remarie ensuite avec Marguerite de
Thuin, de qui naquit Henri son successeur au comté de
Salm. Il y a ici erreur; Jean, époux de Philippine de
Fauquemont et de Born, fut certainement de la branche
des comtes de Salm en Lorraine.
JEAN.
Jean, comte de Salm, de concert avec quelques autres
seigneurs que Wenceslas, duc de Brabant et de
Luxembourg, nomme ses cousins, arrangea le différend de
ce prince avec la ville de Louvain par acte du 19
octobre 1361 (Butkens, loc. cit., t. I. p. 481); mais ce
Jean, comte de Salm, ne serait-ce pas l'époux de
Philippine de Fauquemont ? Quoi qu'il en soit, Jean,
comte de Salm en Ardenne, se trouva à la fameuse
bataille de Baswilre donné le 2e août 1371, entre le duc
de Brabant et celui de Juliers, où il commanda la 14e
route (Butkens, loco cit., p. 491 et 668). Suivant le
même écrivain (pag. 500), Jean, comte de Salm en
Ardenne, prit sur la fin de l'année 1378 parti pour
Eustache Persand de Rochefort, élu par le chapitre
évêque de Liége, contre Arnold de Horne, nommé à ce
siège par le pape Urbain VI; mais Raoul de Rivo (aux
Gesta Episcop. Leod. de Chapeauville, t. III, cap. 14,
p. 42), dit simplement que le comte de Salm, sans en
exprimer le nom, allié du duc de Brabant, fit brûler une
grande partie du Condros. Quoi qu'il en soit, Jean,
comte de Salm en Ardenne, doit avoir cessé de vivre
l'année suivante.
HENRI VII, DERNIER COMTE DE SALM.
Henri VII, comte de Salm en Ardenne, se montre le 1er
février 1378, c'est-à-dire 1379, l'acte étant sans doute
daté du vieux style, en cette qualité parmi les
seigneurs, qui approuvèrent le testament de Wenceslas,
duc de Luxambourg, de Brabant et de Limbourg (Bertholet,
t. VII. Pr. p. 39). L'an 1388, il accompagna Jeanne,
duchesse de Brabant, se rendant à Bastogne pour saluer
le roi de France, qui traversait le duché de Luxembourg
pour aller faire la guerre au duc de Gueldre et de
Juliers (Froissard, vol. III des Chroniques fol. 81
verso, édit. de Paris 1530). L'an 1390 il accompagna le
10 juillet, à son entrée à Liége Jean de Bavière, élu
évêque de cette ville (Corn. Zantfliet adann. 1390 ap.
Martene ampliss. collect., t. V, p. 338). L'an 1396,
Henri de Wastberg et Henri de Bereldange le firent
prisonnier; nous ignorons, dit le P. Bertholet (t. VII,
p. 209) à quel sujet; mais le 15 juillet de la même
année, il paya sa rançon de six cents livres, pour
laquelle Simon de Bassompierre, et Pierre von dem Stelle
s'étaient rendus cautions. L'an 1403, Conrad de
Schonvorst, sire d'Elsloo, ayant été tué à Louvain,
Renaud, sire de Schonvorst, Jean de Schonvorst, sire de
Monjoie, Henri, comte de Salm en Ardenne, et d'antres
seigneurs de ce lignage envoyèrent défier à feu et à
sang ceux de Louvain, et amenèrent même des troupes
jusqu'à Sichem, où une députation de ladite ville ainsi
que quelques conseillers de la duchesse vinrent les
apaiser (Butkens, loc. cit, t. I, p. 523). L'an 1408,
son fils ayant pris le parti des Liégeois contre Jean de
Bavière, on lui confia le grand étendard, mais il périt
dans la bataille d'Othée, donnée le 23 septembre de
cette année (Zantfliet ad ann. 1408, p. 390 et seq). Le
père suivit son fils au tombeau avant l'an 1415 et non
en 1416, comme le dit le P. Bertholet, après avoir
institué son héritier et successeur au comté de Salm,
Jean, seigneur de Reifferscheid, son parent, comme il
sera dit dans la chronologie historique des seigneurs de
Reifferscheid, quoique l'on ne connaisse guère le degré
de parenté entre eux. De son épouse Adélaïde (c'est le
nom que Bertholet lui donne; Butkens, loc. cit., t. 11,
p. 251, la nomme Jeanne), fille de Renaud, sire de
Schonvorst, de Monjoie, de Sichem, etc. (Hemricourt,
Miroir des nobles de Hasbaye, p. 56), il doit avoir éu
outre Henri dont il a été parlé, une fille nommée Marie,
mariée à Otton, Raugrave d'Alten et Neuen Reimbourg, que
le P. Bertholet dit être morte en 1455, sans lui avoir
donné d'enfans; mais il n'apporte aucune preuve de ces
assertions. |