Le Pays lorrain
- 1905
Les Légionnaires de la Meurthe sous le premier empire
A Légion d'honneur a été instituée par la loi du 29 floréal an X (19 mai 1802) pour récompenser les services civils et militaires
; elle devait en partie remplacer l'ordre militaire de Saint-Louis, aboli par la Convention, le 15 octobre 1792, et les armes d'honneur qu'on décernait aux soldats et aux officiers sous la République. On sait que la nouvelle institution fut d'abord fort mal accueillie au Conseil d'Etat, au Tribunat et au Corps législatif, où les traditions républicaines étaient encore suivies, le premier consul rencontra une vive opposition (1).
Bonaparte dût attendre deux ans, même après le vote de la loi, pour distribuer solennellement les premières décorations
; la remise en eût lieu, d'abord à Paris, dans la chapelle des Invalides, le 14 juillet 1804, au camp de Boulogne ensuite, le 16 août de la même année. Ces cérémonies ont été maintes fois décrites. On sait également combien l'empereur utilisa le nouvel ordre pour affirmer sa puissance et combien l'étoile au ruban rouge moiré, rapidement populaire, fut bientôt désirée, non seulement par les vétérans de l'armée, mais par les civils, savants ou fonctionnaires de
l'Empire.
Nous voulons rappeler brièvement les noms de quelques-uns. des légionnaires de la Meurthe qui, en vertu des sénatus-consultes du 22 février 1806 et du 3 mai 1815 se trouvaient de droit membres des collèges électoraux de département
ou d'arrondissement (2).
Commençons d'abord par les civils. Ils sont peu nombreux : en 1814,
sur 30 747 légionnaires vivants, on n'en comptait guère que 1,200 pour les carrières civiles.- Dans la Meurthe, nous pouvons mentionner le préfet Jean-Joseph
Marquis, chevalier du 14 juin 1804, qui laissa dans le département, dont il fût le premier préfet, de si excellents souvenirs, qu'on envoya à son successeur, le baron Riouffe, le jeu de mots suivant « Vous pourrez devenir comte, vous ne serez jamais Marquis! » Marquis, qui avait pris sa retraite en 1808, fut élu député pour la Meurthe et la représenta au Corps législatif de 1811 à
1815. Son successeur (1808-1814) le baron Riouffe (Honoré-Jean) membre du Tribunat, puis préfet de la Côte-d'Or (1804-), était légionnaire du 26 novembre
1803.
Dans l'administration, on doit encore citer M. Lallemand, qui fut un instant conseiller de préfecture- de la Meurthe, avant de devenir maire de Nancy (18 mars 1808), et plus tard baron de l'Empire. Le maire de Phalsbourg, M. Charles-Joseph Parmentier (1765-1843), qui fut fait également baron de l'Empire (13 mars 1813), et M. Vallet de Merville (1767-1833), avocat au Parlement, professeur au collège de Nancy, chef de bureau à la préfecture, puis secrétaire général de la Meurthe (1811-1814) qui, aux Cent-Jours, occupa la préfecture, abandonnée par le préfet de la Restauration, M. de Mique, et y arbora le drapeau tricolore (23 mars 1815).
C'est dans la magistrature que nous trouvons le plus grand nombre de légionnaires civils. A la Cour impériale, nous relevons le nom du premier président, le baron
Henry (1734-1816); d'un président, le baron Saladin (1761-1831), ancien secrétaire général au Ministère de la justice
; des conseillers Grison (1747-1823), ancien député de la Meuse aux Anciens, et Hugo, ancien président du Tribunal criminel d'Epinal, du procureur général, le baron de Metz, et de ses substituts, MM. Bazoche, ancien administrateur du département de la Meuse, et Derazey. A la Cour de justice criminelle, le président Mangin, baron de l'Empire, et M. André, procureur général. sont tous deux légionnaires,
Mais, ni au Tribunal civil, ni au Tribunal de commerce, ni dans l'Université, ni dans aucune des autres administrations du département de la Meurthe, nous ne rencontrons de membres de la Légion d'honneur. Ajoutons toutefois que l'évêque de Nancy, Mgr d'Osmond. comte de l'Empire, était officier de la Légion d'honneur.
Pour être complet, citons quelques personnages, originaires de la Meurthe, qui, par leurs fonctions, en sont momentanément éloignés :
MM. Saulnier, ancien commissaire du pouvoir exécutif à Nancy sous le Directoire, préfet de la Meuse en l'an VIII, puis secrétaire général de la police, sous Réal, dont il deviendra le violent adversaire (voir Fouché, par Madelin, t.
Il); le baron Mallarmé (Claude-Joseph), un instant maire de Nancy, en 1795. député de la
Meurthe au Conseil des Cinq-Cents, membre du Tribunat, préfet de la Vienne
(1807) et de l'Indre (1815) ; le baron Joseph Zangiacomi, juge au tribunal de Cassation en l'an VIII, depuis maître des requêtes au Conseil d'Etat
; le comte de Girardin, né à Lunéville en 1762, ancien officier, préfet de la Seine-Inférieure
(1813), et de Seine-et-Oise (1815); le baron de Ligniville, né à Herbéviller en 1760, préfet de la Haute-Marne (1801)
; le baron de Ladoucette, né à Nancy en 1772, préfet des Hautes-Alpes (1802) de la Roër (1809) et de la Moselle
(1815); le comte François de Neufchâteau, né à Saffais en 1750, qui fut, sous l'Empire, président du Sénat conservateur
; l'abbé Grégoire, évêque de Blois, sénateur, comte de l'Empire, commandeur de la Légion d'honneur du 14 juin
1804; enfin Régnier, duc de Massa, né à Blâmont en 1746, en sa qualité de Grand Juge, un des plus hauts dignitaires de la Légion d'honneur (Grand-Aigle du 2 février 1805).
Si les Légionnaires civils sont peu nombreux, les militaires le sont tellement qu'il nous faudrait plusieurs pages pour les mentionner tous. Aussi doit-on se borner à faire un choix, en énumérant les principaux d'entre eux et en groupant les autres par localités.
Le « brave des braves Ney, duc d'Elchingen, prince de la Moscowa, maréchal de France, est né à Sarrelouis, et il semble que nous ne puissions-le revendiquer au nombre de nos compatriotes légionnaires : cependant, puisqu'il figure sur la liste des électeurs du département de la Meurthe, comme domicilié à Jarville, il nous sera permis de placer son nom en tête de cette liste des héros de la Grande-Armée.
Nommons après lui Duroc, duc de Frioul, de Pont-à-Mousson, le plus
fidèle ami de Napoléon, le comte Drouot, de Nancy, aide-de-camp de l'empereur, Mouton, comte de Lobau, de Phalsbourg, comme lui aide-de-camp de l'empereur, et, comme lui, poursuivi par la Restauration
; puis les généraux Gouvion-Saint-Cyr, de Tou! (1764-1830), qui devint maréchal de
France; Beurmann, de Nancy (1777-1815); Bicquilley, de Toul
(1771-1809); Christophe, de Nancy (1770-1839), Dedon, de Toul
(1771-1809); Duppelin, de Phalsbourg (1777-1814); Félix (Dominique-Xavier), de Vézelise
(1763-1839); Fririon (Joseph-Mathieu), de Vandières (1752-1821); Fririon (Joseph-François), de Pont-à-Mousson
(1771-1849); Fririon (François-Nicolas), de Vandières
(1766-1840); Gengoult, de Toul (1767-1846); Gérard (Francois-Joseph), de Phalsbourg
(1771); Gérard (François-Antoine-Christophe), de Nancy; Gouvion, de Toul
(1752-1823); Grandjean, de Nancy (1768-1828); Haxo, de Lunéville
(1774-1838); Hugo, de Nancy (1773-1828); Jordy, d'Abreschwiller
(1758-1825); Klein, de Blâmont ; La Barolliére, de Lunéville
(1746-1827); Pouget (Cailloux, dit), de Haroué (1751-1851).
A la suite de ces généraux illustres, il faudrait énumérer tous leurs collaborateurs directs, ces Parquin et ces Coignet. obscurs et modestes, qui, d'étapes en étapes, avaient visité en vainqueurs les capitales de l'Europe. Mais ils sont légion : notre pays n'est-il pas celui qui a donné le plus de soldats la France ? Il n'est pas une de nos familles lorraines qui ne garde, accrochée au mur auprès
des portraits de famille ou serrée dans quelque tiroir avec les bijoux précieux cette croix d'argent portée par l'ancêtre, véritable titre de noblesse qui vaut bien des parchemins.
Nous ne pouvons donc reproduire les noms de tous ces braves ; citons-en du moins quelques-uns que leurs descendants lorrains liront, nous l'espérons, avec plaisir. A Phalsbourg, on rencontre les capitaines Joseph Boyer et Etienne Salomon, les lieutenants Jean Stelly et Joseph Facert
; à Sarrebourg, le chef d'escadrons Pirmetz, les sous-officiers François Moulin et Nicolas Müller;
à Château-Salins, le colonel Tribout, le capitaine Jean Astier, les sous-officiers Claude Gasté, Pierre Rapp et Louis Rousselot
; à Nancy, le chef d'escadrons Joseph Vigneron, les chefs de bataillon Antoine Bailly et Nicolas Cochinard, les capitaines Pierre Aubert, Pierre Desnoyers, Nicolas Guérard, Isaac Lionberr, François Milarez, Michel Monnette, Perrin-Brichambeau, Jean Reinder, dit Reinderlé, le chirurgien-major Louis Lucas, l'adjudant-major Ragonnet, les sous-officiers ou soldats Gérard, Antignac, Dieudonné, Gautier, Jean Madimay et Kitz, dit Mathis
; à Pont-à-Mousson, les capitaines Michel Frécy, Nicolas Mlichel et Claude Nachury à Lunéville, le chef de bataillon Claude Décrion, l'adjudant-major Joseph Bernette, les capitaines François Avoine, Léonard Corne, Jean-Pierre
Gérard, François-Marie Lannelongue et Jean-Baptiste Sirejean, les lieutenants Jean-Baptiste Bourgeois et André Lanchy, dit Delanchy, les sous-officiers ou soldats Jean-Mathis Bernard, Bonnet, dit Bouttet, Joseph Chapuy et Charles Menant
; à Toul, le colonel Goury, le chef de bataillon Nicolas Etienne Prévost, les capitaines Nicolas Guillemaux. Arsène Delaroque, Dominique Deguilly, Daniel Claude et Louis Massier, les lieutenants Léopold Duval et Pierre Dupeux, le commissaire-ordonnateur Monnay, le chirurgien-major Joseph Estadieu, les sous-officiers ou soldats Thierry Fanard, Jean Moreau, François Pagny, Jean-Baptiste Gérardin, Michel Hébout et Louis Pierron
; à Moncel, le caporal Genet ; à Flavigny, le capitaine Liboire Wuillaume
; à Blâmont, le soldat Joseph Molard ; à Thiaville, le sergent Parisot
; à Malzéville, l'ex-carabinier Pierre Guilton, etc...
Presque tous ces vaillants soldats, après leurs campagnes, ont pris leur retraite, sous l'Empire, dans leurs villes natales, rapportant chez eux une parcelle de l'auréole du Grand Empereur
; ils vivent entoures de la considération de leurs compatriotes.
Ceux dont nous allons maintenant rapporter les noms n'ont pas eu le même bonheur : engagés, comme leurs camarades, aux premiers jours de la Révolution, ils ont, comme eux, suivi les routes de la Grande-Armée, marquant de leur sang chacune de ses étapes. Mais les uns sont morts, tombés glorieusement sur le champ de bataille, les autres, qui vont être, pour la plupart, impitoyablement frappés par la Restauration, sont, de 1804 à 1815, dans des garnisons éloignées de la Meurthe et ne possédant pas un pouce de terre dans le département, ils ne figurent pas sur la liste des électeurs. Mais s'ils ont été oubliés de leurs contemporains, méritent-ils de l'être également de la postérité
?
Sur leur vieil uniforme déchiré par les balles et noirci par la poudre, éclate le rouge de leur croix d'honneur, symbole de cette armée qui, depuis plus de vingt ans, combat pour la gloire de la France. Comme dans le magique appel de Henri Heiné, on peut les évoquer de tous les coins de ce département où, emportés par l'admirable élan de 92 et de 93, les jeunes Lorrains, paysans et bourgeois, ont couru s'engager dans les bataillons de volontaires.
Nommons d'abord les sous-officiers et les soldats Charles Besson, de Nomeny, engagé volontaire au 1er bataillon de la Meurthe, décoré de la Légion d'honneur après avoir déjà reçu, le 30 mai 1802, un sabre
d'honneur; Nicolas Masson, de Dieulouard (1773), soldat au 7e de ligne, qui prit deux canons à l'ennemi au camp de Villalonga
(Espagne); des anciens volontaires du 3e bataillon de la Meurthe, Léopold Guyon, né à Villacourt, en
1773; décoré en 1806, blessé à Wagram et à Krasnoïé, Nicolas Régnier, né Azerailles en 1772, décoré en 1804, tué à la bataille de Raab, le 14 juin 1809, Jean-Pierre Saint-Dizier, né à Morey en 1773, décoré en 1806, tué à Moscou en 1812, etc.
Voici maintenant les officiers : les lieutenant François Matlhis, de Villers-en-Haye, légionnaire de
1805; Jean-Baptiste Bourgeois, de Vézelise, lieutenant dans la gendarmerie impériale, officier de la Légion d'honneur
; André Genet, de Nancy (1778), blessé à Leipzick ; Sébastien Maitréanche, de Barisey-au- Plain (1776), légionnaire de 1809, tué à l'assaut du fort de Salm, le 29 mai 1811
; François Favier, de Bezaumont (1773), qui avait reçu un fusil d'honneur, en 1802, et fut tué à Wagram, le 6 juillet 1809.
Parmi les capitaines, citons : Nicolas Caillon, de Neuves-Maisons (1771), blessé au combat d'Ostrowno (25 juillet 1812) et à la bataille de Laon (9 mars
1814); Philbert Huin, de Vic (1770), blessé au siége de Gênes, décoré en 1804
; Lambert Henry, de Lunéville (1770), capitaine dans la garde impériale, qui disparut au combat de Niémen (3 décembre
1812); Charles Vital, de Vic, décoré en 1804; Etienne Beugnot, d'Arraye (1772), décoré en 1809
; Gégout, de Vézelise (1780-1822), blessé à Winkowo (18 octobre 1812), à Hanau (30 octobre
1813) et Muterstadt (1er janvier 1814); Joseph Masson, d'Armaucourt (1773),
décoré en 1811, il avait été blessé à Neuwied et à Essling;
François Bénard, de Colombey (1771), décoré en 1811, il fut tué la bataille de Sagonte (25 octobre
1811); Pillot, de Germiny (1761), décoré en 1809 ; Jean Ollivier, de Bainville-au-Miroir (1770), il fut blessé et reçut la croix au siége de Girone (1809)
; Nicolas Boulanger de Saint-Max (1778), blessé à Wagram et au siège de Tarragone, il fut décoré en 1814
; Henry Vallais, de Maidières (1771), décoré en 1804, il fut tué au combat de Reggio (28 mai
1807); Luc Labussiére, de Regnéville (1769), décoré en 1809, il fut tué à la bataille de Dantzick (5 mars
1813); François Guichard, de Limey, blessé et décoré à la bataille de
Wagram; Joseph Sénique, de Chavigny (1769), décoré en 1809, blessé à Wagram et à Dantzick
; décoré également en 1809 et blessé à Dantzick : François Voisin, de Saint-Nicolas
(1767); Pierre-Marton Collignon, de Lorquin (1757), décoré le 5 août 1804
; enfin Nicolas Gigout, de Donnelay (1771), décoré en 1813.
Parmi les officiers supérieurs légionnaires, on peut rappeler les noms de l'illustre colonel Fabvier, de Pont-Mousson (1783-1855), décoré à 23 ans, blessé à Salamanque et à la Moscova;
de Jcan Destribats, de Pont-à-Mousson (1761-1812); Joseph Nozal, de Pont-à-Mousson (1772), blessé
Wagram; Joseph Zimmer, de Lixheim, blessé à Fleurus, au siège de Maestricht et à
Friedland; Etienne Dazier, de Dieuze (1775), blessé à la Moskowa, tué à la bataille de Malojaroslavetz (24 octobre
1812); Charles-Dominique Poinsignon, de Pont-à-Mousson (1768), blessé au siège de Valenciennes,
à Wagram et à Salamanque ; François-Louis Chodron, de Charmes-la-Côte (1775), aide-de-camp du maréchal Ney, il fut amputé à Iéna ;
Vaudeville, de Saint-Nicolas (1770), chef d'escadrons au 1er chevau-légers, blessé au combat de Chiclana (Espagne), (5 mars 1811) et à Leipzick
; Patissier, de Maidières (1752-1824), qui fut retraité avec le grade de maréchal de
camp; du colonel d'artillerie Colin (Louis-Hyacinthe-Auguste), de Saint-Nicolas (1771), retraité également, en 1823, avec le grade de maréchal de
camp; de François-Martin Noël, de Saulxures-les-Vannes (1772), blessé à Polosk;
Louis Hussenet, de Pont-à-Mousson (1760), blessé à Mannheim et à Wagram, et, enfin, de Joseph-Nicolas Noël Brice, de Lorquin, ancien chasseur à cheval de la vieille garde, devenu chef d'escadrons en 1814, qui organisa un corps de partisans pendant la campagne de France, fut poursuivi pendant la Restauration, nommé colonel en 1830 et général en 1848.
Les soldats de la Grande-Armée qui n'ont pas été atteints par les balles et qui ne sont pas morts en de lointaines ambulances, vont être brutalement renvoyés dans leurs foyers en 1815 et en 1816. Heureux seront ceux que la Restauration ne placera pas en demi-solde, pour avoir cru trop longtemps en la victoire de l'empereur.
Dans nos villages de Lorraine, on verra ces vétérans, réduits à la misère, reprendre la bêche et la charrue, délaissés depuis vingt-cinq
ans; c'est ainsi que les vignerons de Jaulny (Meurthe-et-Moselle) pourront contempler, semblable à eux, le général Curély, une des gloires de la cavalerie française, qui, malgré ses vingt-deux ans de services, ses vingt campagnes, ses six blessures, a été rayé des cadres de l'armée, à quarante-et-un ans, c'est-à-dire, fait remarquer le général Thoumas, son historien, à l'âge auquel les chefs d'escadrons sortant de l'école passent aujourd'hui lieutenants-colonels.
Le temps n'était plus où la Légion d'honneur était la plus belle des récompenses. M. Michon, préfet provisoire du département de la Meurthe, écrivait le 26 juillet 1815, au ministre de l'Intérieur, avec un certain mépris, qu'il avait évité de convoquer les membres de la Légion d'honneur, électeurs en vertu des sénatus-consultes de l'usurpateur, parce qu'il estimait que le nombre des électeurs était bien suffisant et avec soin, il proscrivait des papiers officiels le titre de membre de la Légion d'honneur. Sur la liste des électeurs, dressée le 5 août 1815, on ne trouve qu'un nom suivi de la mention, jadis glorieuse, de légionnaire, celui de Antoine-Pascal Crousse, de Nancy.
Quelle figure auraient pu faire, en effet, ces héroïques chevaliers, l'ancien grenadier Fanard, le fusilier retiré Kitz, dit Mathis, l'ancien carabinier Charles Menant, l'ex-chasseur de la garde impériale Nicolas Girot, dit Guyot, ou le tambour-major Jean Moreau, auprès de ces descendants « des anciennes familles connues par leur attachement et leur fidélité à Sa Majesté », qui, en vertu de l'ordonnance du 21 juillet 1815, figuraient maintenant seuls sur les listes électorales !
Henry
POULET
(1) Cf.
l'article de M. Aulard dans la Revue de Paris du 1er juin 1902 : le Centenaire de la légion d'honneur. On a souvent rappelé le geste du général Moreau, offrant à son chien,
après une chasse fructueuse, un collier
d'honneur; à son cuisinier, après un bon dîner, une casserole d'honneur, et l'abstention du maréchal Augereau a l'appel de son nom, le jour de la cérémonie des Invalides
(2) Archives nationales, F. I. C. Meurthe 4 et Archives administratives du Ministère de la guerre dossiers personnels. On a consulté également
l'Etat de la Légion d'honneur depuis son origine jusqu'en 1814, 2 vol. in-8, Bibl. nationale L. I 17/9.
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