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Atrocités bavaroises en Lorraine
 


L'Avenir d'Arcachon - 29 octobre 1916

ATROCITÉS BAVAROISES EN LORRAINE

En face de l'armée bavaroise, la région de Blamont semble avoir été, pendant les premiers jours de la mobilisation, le point faible de la couverture française; cette couverture ne comprenait que le 17e et le 20e bataillon de chasseurs ; dans cette région, selon l'expression d'un officier, les troupes ne formaient qu'une fine toile d'araignée accrochée au fort de Manonvillers.
Le 1er corps bavarois, général Xylander, avait envahi Blamont-Cirey-Badonviller, alors que nous nous attachions à la conquête des cols des Vosges.
L'occupation de Blamont et de Badonviller fut marquée par les pires excès. On sait aujourd'hui qu'ils avaient été résolus de sang-froid par les autorités allemandes. Le prétexte que les civils ont tiré n'est employé que pour la forme.
Les pertes des Allemands avaient été considérables. On n'a pas assez dit la vigueur de nos bataillons de frontière qui ne cédèrent le terrain que motte à motte à l'ennemi et non sans l'avoir cruellement éprouvé. Le moral des armées allemandes fut fortement éprouvé dès le début par la vigueur de celle résistance qui provoqua leur fureur.
Le dépouillement des lettres écrites par les soldats allemands a permis d'établir par des preuves irréfutables que l'incendie des villages a été une mesure générale ; que les mises à mort des habitants ont été également une mesure générale; que ces atrocités ont été commises dans les localités que défendait l'armée française et que les ordres d'exécution ont été donnés par le commandement.
Venons maintenant aux faits,
La base officielle, de toute documentation en matière d'atrocités est la protestation du gouvernement français auprès des puissances signataires des conventions de La Haye.
Celle protestation juridique s'appuie sur une série de rapports contrôlés parles autorités qualifiées, après enquête faite dans les formes et auditions sous serment. Une commission a été chargée de constater sur place les violations du droit des gens commises par les troupes allemandes. Elle a relevé un nombre considérable de faits qui ne peuvent laisser aucun doute sur la méthode, le parti pris et les intentions sans excuses : violation de la frontière française, avant la déclaration de guerre, assassinats de prisonniers et de blessés, pillage, incendies, viols, meurtres, attentats contre les hôpitaux et les ambulances, emploi de projectiles interdits, emploi de liquides enflammés et de gaz asphyxiants, bombardement de villes non défendues, destruction d'édifices consacrés au culte, aux arts, aux sciences et à la bienfaisance, usage de procédés déloyaux, actes de cruautés commis à l'égard des populations civiles, telles sont les têtes de chapitre de ce triste martyrologe.
On a pu chicaner le détail : l'ensemble subsiste. Un horizon de flammes, une mare de sang, une catastrophe barbare, une régression impie c'est ce qui restera pour l'avenir de ces journées affreuses où tant de maux particuliers accumulèrent leur indéniable et innombrable souffrance. Devant les neutres et devant la postérité, ce stigmate a été imprimé au front de l'Allemagne pour toujours.


L'Avenir d'Arcachon - 12 novembre 1916

ATROCITÉS BAVAROISES EN LORRAINE

Quelques faits et quelques témoignages parmi ceux qui ont été recueillis donneront l'idée de ce qui fut accompli, sans parler de ce que le désordre et le temps ont effacé pour jamais.
Dès le 10 Août, les premières constatations sur des faits de violation du droit des gens affluent auprès du Grand Quartier Général qui les transmet au gouvernement français :
«  Suivant rapport du 10 Août, transmis par le généra! commandant en chef l'armée de l'Est, les troupes allemandes ont achevé un nombre important de blessés par les coups de feu tirés à bout portant dans le visage, ainsi que peut en faire foi la dimension de la blessure; d'autres blessés ont été piétines intentionnellement et labourés à coups de talon ; à la date du 10 Août, les fantassins Bavarois ont systématiquement incendié les villages qu'ils ont traversés; dans la même région, ils ont obligé les habitants à précéder leurs éclaireurs. »
Après le combat du 12, le bataillon de chasseurs qui défendait Badonviller se retira sur Celles. Les troupes bavaroises occupèrent aussitôt le village ; 78 maisons furent brûlées, plus de dix personnes dont deux jeunes filles furent fusillées.
Le maire, M. Benoît, fut fait chevalier de la légion d'honneur, le 18 Août, pour sa conduite héroïque dans l'exercice de ses fonctions. Sa femme ayant été assassinée, sa maison incendiée, il continua, avec un sang-froid et une fermeté admirables, à protéger la population contre les actes de sauvagerie.
Par la suite, il sauva la vie d'un prisonnier allemand menacé par la juste colère des habitants.
Comme pendant à cet acte d'énergie et de grandeur d'âme, voici une lettre d'un soldat bavarois à son amie Grete Mayer : «  Chère Grete Mayer, depuis le commencement j'ai pris part à tout et j'ai tué beaucoup de Français et de femmes â coups de fusils et à coups de baïonnette, En cinq minutes, j'ai transpercé avec ma baïonnette sept femmes et quatre jeunes filles. »
Cet abominable coquin exagère probablement pour plaire à sa douce amie.
A Blamont, trois personnes furent fusillées sans aucun motif, dont une jeune fille et un vieillard de 86 ans.
Quand nos troupes sont entrées dans la commune, elles ont trouvé sur les murs des affiches annonçant que, le lendemain matin, le maire et les notables du pays seraient fusillés.
Notre arrivée rapide et le désordre, de. la retraite allemande leur ont sauvé la vie.
Un soldat bavarois écrit à sa famille : «  On n'a pas besoin d'argent, on prend, tout simplement. Aussi on ne manque de rien ; avant de brûler les villages nous emportons tout ce qui est mangeable ou buvable. »
Un autre écrit : «  On fusille tout ; les hommes et même les jeunes garçons non encore adultes. J'ai vu passer trois convois de paysans français prisonniers : tous seront fusillés. Nous avons fusillé les habitants de quatorze à soixante ans. Tout a été fusillé : on tue tout ; on n'a pas laissé un habitant vivant. »
Voilà ce que l'on trouve dans les carnets de route et dans les lettres des soldats bavarois.


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