A BLAMONT
A Blâmont, les misérables brutes teutonnes ont assassiné aussi
plusieurs personnes, ont pillé et saccagé plusieurs maisons,
entre autres la grande chocolaterie appartenant à M. Burrus,
sujet suisse.
Quand ils durent quitter Blâmont et se replier, ils emmenèrent
douze otages dont le curé et le buraliste.
Ils les conduisirent auparavant à la place où le pauvre M. Louis
Foëll venait d'être fusillé et, leur montrant la cervelle
épandue sur les pavés sanglants, les menacèrent du même sort.
L'un des otages, M. Colin, professeur de sciences au lycée
Louis-le-Grand à Paris, et en villégiature familiale à Blamont,
tut emmené en chemise, pied nus.
Indigné par les brutalités qu'il voyait commettre sur des
enfants - sa propre file reçut un coup de crosse en pleine
figure - M. Colin s'adressant à un jeune lieutenant lui crie : « Mais vous n'avez donc pas de mère ! » Et l'émule de Forstner de
répondre textuellement ces paroles caractéristiques de la
mentalité d'une race : « Ma mère n'a pas fait de cochon comme
toi ! »
Les otages de Blâmont emmenés jusqu'à Cogney, enfermés dans
l'église de cette commune de 6 heures du soir à 7 heures du
matin, ont pu retourner à Blâmont.
Chez toutes ces populations lorraines si tragiquement éprouvées,
aucun abattement, aucune défaillance.
Un sentiment domine les chagrins intimes les plus cruels : « La
France va vaincre ! »
Ceux-ci ont perdu leur récoltes ; ceux-là ont vu leur maison
saccagée ; les uns ont vu les barbares incendier leur demeure ;
d'autres ont vu fusiller. Beaucoup ont été menacés, insultés,
frappés, blessés. Quelques-uns ont connu en même temps toutes
ces épreuves... Aucun ne baisse la tête. Les yeux ont des
flammes, non des larmes.
Oui, il y a en eux et autour d'eux des ruines. Mais au-dessus de
toutes ces ruines rayonnante de force, de gloire, de beauté,
l'image sainte de la patrie triomphante.
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