Cahier de
doléances - 1789 - Vého
Cahiers de
doléances des bailliages des généralités de Metz et de
Nancy pour les Etats généraux de 1789
Charles Etienne
Ed. 1907
Baillage de Vic
VÉHO
« Procès-verbal de la communauté de Vého et nomination
des députés. »
15 mars 1789,
« En l'assemblée convoquée au son de la cloche, en la
manière ordinaire et accoutumée au domicile du sr
Nicolas Bister, syndic de l'assemblée municipale,
par-devant nous, maire, syndic de ladite communauté,
composée de 56 feux. »
Députés Joseph L'hôte,
Nicolas Bister, maire et laboureur.
Signatures: Nicolas Bister ; J. L'hôte ; E. Gérardin ;
N. Thiébaut ; André Thirion ; Nicolas Marcel.
Cejourd'hui, 15 mars 1789.
Au domicile de Nicolas Bister, syndic de la communauté
de Vého, à sa diligence, ladite communauté y étant
assemblée par la voie du sergent et au son de la cloche
accoutumé pour y entendre la lecture et publication des
lettres du Roi et du règlement y joint, et de
l'ordonnance de Monsieur Vignon, lieutenant-général au
bailliage royal de l'Évêché de Metz à Vic, et
l'assignation donnée par l'huissier Maldidier, de même
que le procès-verbal d'assemblée pour par nous faire les
remontrances que Sa Majesté demande de ses sujets,
plaintes et doléances, ladite communauté, après avoir
mûrement examiné, ont l'honneur de vous présenter tout
ce qui suit,
Savoir :
Art. 1. - Que les verreries, faïenceries sont en si
grande quantité que les bois de tous leurs environs sont
presque ruinés, et [cela] vient d'une cherté de deux
tiers de plus au moins depuis douze ans, ce qui est
cause que quantité de pauvres gens n'en peuvent plus
avoir ; ce qui est plus, toutes les coupes sont pour eux
; personne n'en peut plus avoir presque pour de
l'argent.
ART. 2. - Les forges sont de même en si grande quantité
que le charbon, bois de charronnage se trouve augmenté
depuis dix ans [au] moins du double, ce qui est cause
que les maréchaux et charrons sont obligés à augmenter
les prix au moins du double au laboureur. Par ce moyen,
les laboureurs ne sont plus en état de [se] soutenir. On
n'entend que des acclamations de tous côtés, que des
laboureurs ruinés. Si donc les laboureurs ne peuvent
plus [se] soutenir, qui est-ce qui sera le soutien pour
pourvoir aux besoins nécessaires de la vie ?
Art. 3. - Nous voulons que les forges soient utiles pour
fournir du fer pour satisfaire au besoin du laboureur ;
mais, si les verreries et faïenceries n'étaient pas si
communes, il s'y trouverait que les charbons et bois de
charronnage seraient d'autant plus communs que les
forges et maréchaux, charrons en pourraient avoir plus
commodément, et les laboureurs retrouveraient par ce
moyen beaucoup de soulagement.
ART. 4. - Les trois salines appartenant à Sa Majesté,
qui sont Dieuze, Moyenvic, Château-Salins, sont en trop
grande consommation de bois. N'en pourrait-on pas
supprimer l'une ou l'autre, ou diminuer sur chacune
d'elles au moins la moitié de leurs poêles qui sont en
augmentation depuis plusieurs années ? L'on prévoit
qu'il y en aurait encore suffisamment cela donnerait
beaucoup de soulagement à tous les peuples des environs.
ART. 5. - Les employés des Fermes du Roi sont en si
grand nombre qu'il nous semble que cela coûte beaucoup à
Sa Majesté, qu'il nous semble qu'ils sont peu utiles
dans nos environs, où on en pourrait diminuer le nombre
en mettant les sujets des Trois-Évêchés et du
Clermontois dans la même convocation que la Lorraine,
tant du côté de sels, tabac et acquits que les sujets
d'Évêchés se trouveraient bien soulagés par rapport au
sel, que lesdits sujets d'Évêchés sont obligés de payer
d'un prix que quantité de pauvres sujets de Sa Majesté
n'en peuvent plus acheter ; on retrouverait par [là] le
moyen de diminuer les employés, vu que les employés
coûtent considérablement tous les jours, ce que nous
voyons sous nos yeux.
ART. 6. - En vertu des moulins à blé banaux, il s'y
trouve quantité de communautés qui sont assujetties
d'aller moudre dans un moulin ou l'autre ; cependant, il
y a d'autres communautés qui ne sont point assujetties ;
ces dernières arrivant un jour, deux, trois, etc., après
ceux qui sont assujettis, seront, encore diligentées
avant ceux qui sont banaux ; quelquefois, on renverrait
de huit en huit jours ceux qui sont assujettis ; encore
ne peuvent-ils pas avoir le jour sûr pour aller moudre
ledit grain ; ne sommes-nous pas tous sujets de Sa
Majesté ? L'on pourrait supprimer cet abus, vu qu'il
faut que chacun moule son grain dans un endroit ou dans
l'autre.
ART. 7. - L'établissement des huissiers-priseurs. Nous
demandons qu'ils soient supprimés pour cause que
personne n'est plus maître de ses biens, vu qu'ils en
exportent, tant frais de contrôle et autre chose, au
moins un tiers de l'argent que l'on pourrait avoir de
reste pour s'aider dans les besoins.
ART. 8. - Nous demandons que les parlements soient
réunis au Tiers état sans qu'ils puissent décider
d'aucune affaire sans que les députés du Tiers état n'y
soient compris.
ART. 9. - Ladite communauté demande à Sa Majesté que les
travaux des routes se fassent toujours à prix d'argent.
Il est vrai que vous trouverez quelques communautés qui
demanderont qu'ils se fassent toujours comme ci-devant à
l'ancienneté. Ces communautés le peuvent bien demander.
Pourquoi ? Étant sur les lieux de leur entretien, dans
une journée ils peuvent avoir fini leurs ouvrages,
attendu que le plus grand nombre des citoyens de Sa
Majesté sont une, deux et trois semaines, etc., sans
pouvoir savoir si leurs ouvrages seront parachevés. Si
donc en les continuant à prix d'argent, les travaux
seront compatibles l'un comme l'autre.
ART. 10. - Ladite communauté demande que les maîtrises
des bois soient supprimées, voyant qu'ils emportent au
moins un tiers des bénéfices des bois qui se marquent
dans une communauté.
ART. 11. - Que ladite communauté étant exposée à une
seconde dîme appelée gerbeau, qui se prend après la
grande dîme de douze gerbes, et ledit gerbeau se prend
au vingt-
quatre, ce qui diminue beaucoup l'avantage des
propriétaires laboureurs. Nous demandons que ledit
gerbeau soit supprimé à une seule dîme de douze gerbes,
et qu'il soit libre à chaque particulier d'enlever ses
gerbes quand elles seront liées et prêtes, sans
cependant qu'aucun ne puisse être dans le cas de taire
tort aux fermiers ou propriétaires de la grosse et menue
dîme.
Art. 12. - Ladite communauté demanderait qu'elle puisse
semer et ensemencer dans leurs potagers ce qu'ils
jugeront à propos, sans qu'aucun ne puisse être attenu
de payer aucune dîme.
ART. 13. - Ladite communauté demanderait que le Clergé
paye rétribution à Sa Majesté, soit chanoines séculiers
et réguliers, et des deux sexes et autres, etc., qu'ils
soient réunis à une pension, qu'ils puissent vivre
honnêtement sans tant de superflu ; que, par ce moyen,
Sa Majesté trouverait des moyens pour soulager son
peuple ; de même que les abbés commendataires,
cardinaux, archevêques et évêques.
ART. 14. - Ladite communauté demanderait que Sa Majesté
ait à supprimer les marques de cuirs et de fers, voyant
que les cordonniers augmentent les souliers et les
maréchaux leurs fers à cause des droits desdites marques
qu'il faut payer une fois autant que du passé, et les
pauvres sujets sont obligés de payer lesdits droits.
Ladite communauté demanderait que les coupelles et
droits de caphouse [existant] dans plusieurs villes,
qu'ils soient supprimés à cause que les sujets de Sa
Majesté vont vendre leurs marchandises et sont obligés
d'en payer lesdits droits c'est toujours les pauvres
laboureurs qui subissent lesdits droits.
Tous ces articles au nombre de quinze, que ladite
communauté a l'honneur de vous faire observer ; et
demandons à Sa Majesté et à Messieurs tenant l'assemblée
des Etats généraux de nous vouloir faire grâce et
justice.
Fait et clos ledit jour 15 mars 1789, ladite communauté
y étant en plus grand nombre, qui ont soussigné avec
nous ledit jour que ci-dessus, après lecture à eux
faite.
J. L'hôte ; Nicolas Bister ; N. Thiébaut ; E. Gérardin ;
Nicolas Marcel ; André Thirion. |