L'abbé Rouyer,
Essai sur la persécution révolutionnaire dans le district de la
Marche
Saint-Dié - 1908
Une bonne catholique de La
Vacheresse, Catherine Guillot, « laboureuse » (1) veuve de
Pierre Bourguignon, également dénoncée par le conseil général de
sa commune comme incivique et pour avoir prêché le fanatisme,
fut traduite devant le district, et définitivement condamnée par
celui-ci, le 8 mai [1793], à être mise en état de sûreté, ce
qui fut exécuté sur l'heure. Mais le chirurgien Monsseaux ayant
reconnu qu'on ne pouvait la laisser en prison sans compromettre
sa santé, les commissaires du district, Noël et Bastien,
l'autorisèrent à demeurer dans les chambres du geôlier, à la
condition de n'en jamais sortir, et ce, sous la caution du
citoyen Richard, habitant de la ville. On la réintégra en prison
le 12 juin, et elle fut mise en liberté le 24, le directeur du «
Juré » d'accusation ayant déclaré qu'il n'y avait lieu à
poursuites.
(1) Elle était la soeur de Joseph Guillot, né à La Vacheresse le
17 août 1739, docteur en Sorbonne, curé de Blâmont en 1789, qui
prit part aux élections du bailliage de cette ville, et fut l'un
des trois commissaires choisis pour fusionner en un seul les
cahiers particuliers.
Il y représenta aussi M. Colson, curé de Nitting, qui allait
être élu aux Etats-Généraux. Puis, du 23 au 28 mars, il figura à
l'assemblée du bailliage de Lunéville comme fondé de pouvoirs de
M. de Cambis, abbé commandataire de Haute-Seille, et de M.
Chaurand, curé de Badonvillers. Insermenté ou rétracté, il prit
un arrêté de déportation en 1798. Qu'il ait quitté ou non la
France, il était à Beaufremont vers 1795; on lui adressa à La
Vacheresse son certificat d'amnistie le 8 avril 1803. Après
avoir desservi Crainvilliers pendant quelques mois, il fût nommé
le 24 octobre à Saulxures-les-Bulgnéville, avec Vaudincourt pour
annexe.
C'était une situation bien modeste, après celle qu'il avait
occupée avant la Révolution, et il n'était pas sans le sentir,
puisqu'il écrivait, le 21 janvier 1816, à l'abbé Bernard,
vicaire général de Nancy : « Je sais d'autant plus sensible à
l'honneur de votre souvenir que je me croyais depuis longtemps
enseveli dans un profond oubli. » Il n'avait pour logement que
les deux chambres de gauche, dans la maison Maximin Rouyer, et
pour revenu que 500 francs augmentés d'un maigre casuel. Il
avait même dû cesser la desserte de Vaudoncourt, qui, sous
prétexte de pauvreté, ne le payait plus des 300 francs auxquels
la commune s'était engagée. On lui offrit alors des postes plus
avantageux: Suriauville, puis Médonville, qui valait encore
mieux ; mais, en raison de son grand âge, il déclina ces
propositions, et il mourut en exercice le 28 juin 1818. Son
corps repose au cimetière de Saulxures, où se voit encore sa
croix, non loin de l'entrée de l'église, à gauche. D'après les
anciens du lieu, il était un savant mathématicien.
Voici la note que lui décerne, en 1802, le juge de paix Godard :
« C'est un homme respectable par son âge et ses moeurs, édifiant
par la conduite, réunissant les talents d'un prêtre très
instruit, qu'il emploie souvent à prêcher l'amour du bien public
et le respect du gouvernement. » |