L'Immeuble et la
construction dans l'Est
10 octobre 1923
Au salon de Nancy
[...] Ajoutons-y encore un grand vitrail de Grüber pour l'église
d'Ancerviller, beaucoup trop sombre, et qui sera très discuté
comme facture.
21 octobre 1923
Au Salon de Nancy
A propos du Salon de Nancy, nous avons reçu plusieurs lettres
assez vives au sujet des nouvelles et étranges tendances de la
jeune école picturale.
Nous n'avons pas ici à prendre parti. Le beau est toujours le
beau et le laid sera toujours le laid. Tant pis pour ceux qui se
complaisent dans la laideur.
Une très haute personnalité artistique a aussi donné son avis -
l'avis de tout le monde - sur certains vitraux exposés à la
Salle Poirel. Les uns sont bons pour un café, un théâtre, une
brasserie, mais pas pour une église... et tant pis pour
Ancerviller. C'est drôle, c'est bizarre et surtout très
discutable. Il n'y a guère que les couleurs qui sont riches. Et
surtout il faudrait voir çà, de loin et de très haut.
Imagine-t-on cela dans une église gothique, comme Toul, Metz et
Saint-Nicolas.
De l'avis de beaucoup - sans critiquer l'art, l'effort, le
travail de composition - ces vitraux dits modernes constituent
un genre dangereux, qui ne plairont qu'à une très faible
minorité.
C'est l'avis de nombre d'architectes et de bâtisseurs et de tous
les vrais traditionnalistes.
18 novembre 1923
L'Art du Vitrail
On a beaucoup écrit ces temps derniers, ici ou là, sur l'art du
vitrail - moderne - dans les nombreuses reconstitutions
d'églises dévastées de nos régions.
Les uns ont acclamé à outrance les rénovateurs, un peu
téméraires, les autres les ont justement critiqués et se sont
attachés scrupuleusement à l'art des grands devanciers du XVIe
siècle, surtout dans nos églises ogivales, telles que Toul,
Saint-Nicolas, Saint-Léon et Samt-Epvre de Nancy, Dieulouard,
Saint-Laurent et Saint-Martin de Pont-à-Mousson. La bataille est
chaude et ardente. On voudrait, pour des raisons de politique,
de camaraderie (d'autres encore) nous faire goûter certaines
oeuvres qui sont affreuses et les faire passer pour de la
beauté.
Or, la beauté est une et toujours la même.
Et les cubistes, anarchistes en peinture, les verristes modernes
ne pourront jamais imposer aux gens de goût leurs conceptions
antiharmoniques. Cela, sans le moindre parti-pris. Ce qui est
beau est beau, ce qui est laid est laid, voilà tout. Nous avons
assez, ici et ailleurs, loué et exalté tel artiste lorrain,
admirable dans les verrières pour cafés, théâtres et
appartements, mais qui n'y entend rien - et pour plusieurs
raisons - au vitrail religieux... témoins les étranges
compositions de Saint-Epvre, qui ne respectent ni la tradition
historique, ni l'hagiographie, ni l'esthétique du lieu.
On en peut dire autant d'autres verrières pour églises
reconstituées, qui ont fait hurler les visiteurs de la Salle
Poirel, et qui sont loin d'être - pour l'immense majorité -
d'heureuses références.
Cependant, notre bon confrère Emile Nicolas, un pur nanceiste et
un fervent traditionnaliste, pour des raisons spéciales, exalte
les productions récentes de cet artiste.
Emile Nicolas imprime (il nous permettra de ne pas être de son
avis, sans le moindre parti-pris) :
« Entre tous, un se révèle le seul travailleur digne de ce nom.
Ceci n'implique aucune critique à l'égard des précédents, qui
sont plutôt peintres sur verre. Chez notre artiste, c'est le
verre découpé, à peine souligné de traits au pinceau, gravés
quelquefois, sertis dans des lignes de plomb savamment ordonnés
pour jouer le double rôle de support et d'élément ornemental.
« Son saint Martin, pour l'église d'Ancerviller, est une
merveille (sic !), malheureusement mal présentée à la Salle
Poirel Lorsqu'il occupera la place qui lui est dévolue, il
arrachera des cris d'admiration au moins sensible. Il est
difficile d'arriver à une harmonie de couleurs plus séduisante
que, celle du haut du motif central. Nous voudrions pouvoir
analyser une à une toutes les réductions, de cet ensemble.
Ancerviller deviendra un pèlerinage pour ses vitraux. Les
détracteurs de l'art sont des insensés que le parti-pris
aveugle. Heureuses les églises qui possèderont de ses oeuvres !
».
Nous n'avons pas hésité-à reproduire ces phrases dithyrambiques
pour montrer à nos nombreux lecteurs - qui ont tant critiqué ce
genre de vitraux - que l'excès de louange va toujours à
l'encontre de son but.
Nous, nous répétons: « Tant pis pour Ancerviller ! » Et certes
non, l'on n'ira pas en pèlerinage artistique là-bas... sinon
pour jeter des pierres dans cette grande machine, si pitoyable.
25 novembre 1923
ANCERVILLER
La nouvelle église. - Grâce à l'activité de la Coopérative des
églises, grâce surtout au zèle et au dévouement incomparable de
M. le chanoine Paul Fiel, le village d'Ancerviller, au pays de
Blâmont, a été presque entièrement relevé de ses ruines et sa
neuve église, consacrée par le nonce du pape en France, au cours
de cette semaine, en des fêtes exceptionnelles, encore que
pareille cérémonie n'était guère de mise en cette rigoureuse
saison et que plusieurs: églises de Nancy et de la banlieue
réclament cet honneur.
La nouvelle église d'Ancerviller, au clocher encore inachevé,
est une oeuvre originale et bizarre, nullement dans les beaux
styles d'autrefois, qui font le charme de nos églises du pays
Elle a été décorée par des artistes nancéiens, avec un beau
mobilier d'Auguste Valin, qui continue hardiment la maîtrise
paternelle Nous ne reviendrons pas sur ses vitraux... des gens
prétendent que c'est un genre tout neuf, délaissant l'art naïf
de nos vieux imaygiers. Tant pis ou tant mieux... la postérité
dira son dernier mot... et passons !
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