Les armées françaises dans la Grande guerre
Tome 4,Volume 1 - Annexes 1er volume
Ministère de la guerre, état-major de l'armée,
service historique
Imprimerie nationale (Paris) 1924
ETAT-MAJOR GÉNÉRAL.
2e BUREAU.
Au G.Q.G., le 18 janvier 1916.
Note sur les travaux exécutés par les Allemands sur
le front des armées
françaises.
Les travaux exécutés par les Allemands sont poussés
avec une grande activité sur tout le front. Ils ont,
en général, un caractère nettement défensif et ne
revêtent un caractère offensif que sur certaines
parties du front de Champagne et au nord de Verdun.
Sur le front des différentes armées françaises, ils
présentent les particularités suivantes :
[...]
D.A.L. - Sur tout le front, activité considérable de
l'ennemi. Travaux ayant un caractère défensif, sauf
dans la région Leintrey-Reillon où les
organisations, très augmentées depuis quelque temps,
peuvent avoir un caractère offensif.
GROUPE D'ARMÉES DE L'EST.
LE GÉNÉRAL COMMANDANT.
N-261/C.
Q.G., le 21 janvier 1916.
Le général Dubail, commandant le groupe d'armées de
l'Est, au général commandant en chef.
[...]
DÉTACHEMENT D'ARMÉE DE LORRAINE.
Je vous envoie ci-joint un croquis des positions
allemandes dans la région du bois Zeppelin, où l'on
signale depuis quelque temps des travaux importants.
Vous verrez par ce croquis que ces travaux sont
plutôt défensifs: il comprennent des tranchées de 2e
ligne, des boyaux de communication et des postes
d'écoute poussés vers la crête.
Il n'y a là rien qui doive nous préoccuper
spécialement.
Je tiens à vous faire part sans tarder, mais avec
toutes les réserves qu'il mérite, d'un renseignement
fourni par l'un des officiers aviateurs, faits
prisonniers hier à Ogeviller après leur atterrissage
forcé à Flin : on disait dans son escadrille que la
pièce d'Hampont était actuellement hors d'état de
servir, sans préciser si cet accident était le fait
de l'usure ou d'un coup heureux de notre artillerie.
Quoi qu'il en soit, nos mesures de surveillance et
nos préparatifs de riposte ne se relâchent pas. Une
de nos pièces de 240 a été mise hors de service au
cours du bombardement violent qu'elle a subi: elle
sera remplacée dans 2 jours par une pièce de même
calibre, qui était en batterie au bois des Railleux
en vue de tirer éventuellement sur Avricourt.
[...]
DUBAIL
GROUPE D'ARMÉES DE L'EST.
ÉTAT-MAJOR.
SECRET.
Au Q.G., le 10 février 1916.
Le général de division Dubail, commandant le groupe
d'armées de l'Est, au général commandant en chef.
Vous m'avez prescrit, dans votre directive du 15
décembre 1915 de faire procéder à l'étude d'une
offensive d'ensemble dans la région comprise entre
la Seille (forêt de Bezange-la-Grande) et les
Vosges.
A la date du 17 décembre 1915, j'ai confié la
direction de cette étude au général Deprez, en
mettant à sa disposition le général Nollet -
ultérieurement remplacé, sur votre autorisation, par
le général Nourrisson - et le nombre d'officiers
nécessaires pour renforcer, à proportion du travail
à fournir, l'état-major du D.A.L.
Je vous communique aujourd'hui les résultats de
l'examen auquel je viens de soumettre les dossiers
très complets établis au D.A.L.
Comme pour les études similaires qui furent
entreprises à la Ire armée et dans la R.F.B., mes
conclusions porteront sur :
- l'emploi général des forces;
- l'estimation des moyens d'artillerie et
d'aéronautique;
- l'aménagement de la zone des attaques.
DUBAIL.
I. - EMPLOI GÉNÉRALDES FORCES.
A. But de l'opération.
B. Caractéristiques de la zone des attaques.
C. Conditions générales de la manoeuvre.
D. Moyens nécessaires (divisions d'infanterie).
E. Dispositif initial d'attaque.
F. Organisation du commandement.
A. - BUT DE L'OPÉRATION.
Une attaque d'ensemble dirigée sur le front de
Lorraine méridionale, dans l'espace compris entre la
vallée de la Seille et les Vosges, peut avoir pour
objet:
Soit de libérer la bande du territoire national
encore occupée par l'ennemi et dont la profondeur
atteint son maximum, une quinzaine de kilomètres,
dans la région de Blâmont-Cirey;
Soit de réaliser une avance qui mette définitivement
les centres industriels de Meurthe-et-Moselle à
l'abri des bombardements ;
Soit d'ouvrir la voie à une offensive de grande
envergure sur le territoire annexé, en direction
générale de Sarrebruck (bassin houiller de la
Sarre).
La libération du sol national exige, outre la
rupture de la ire position allemande, la double
chute :
D'une 2e position jalonnée par les lisières ouest
des bois situés entre la Garde et Igney, par les
crêtes parallèles à la route Igney-Repaix et par les
hauteurs au nord de Barbas, d'Harbouey et de Parux;
D'une 3e position, encore fragmentaire, dont les
travaux ont été repérés à l'est de la ligne
Moussey-Avricourt, sur la rive droite de la Vezouse
entre Blâmont et Tanconville, et autour de Cirey.
L'enlèvement de ces positions nous conduirait sur un
front sensiblement jalonné par les lisières nord de
la forêt de Bezange-la-Grande et les localités de
Xanrey, Moncourt, la Garde, Béchicourt-le-Château,
Ibigny.
S'il s'agit de pénétrer assez avant dans les lignes
adverses pour couvrir efficacement Nancy, Dombasle,
Baccarat... il faudra non seulement atteindre le front
défini ci-dessus, mais encore chercher à exploiter
le succès à l'aile gauche, dans la région de
Château-Salins-Dieuze que desservent deux voies
ferrées utilisables par l'ennemi pour la mise en
oeuvre de son artillerie à grande puissance.
L'invasion du bassin de la Sarre constitue une
opération de groupe d'armées subordonnée :
- d'une part à l'occupation préalable du massif du
Donon, prolongée par des actions sur St-Quirin, Dabo
et dans la vallée de la Bruche, en vue de couvrir le
flanc droit des forces engagées dans le couloir de
Sarrebourg;
- d'autre part, à une avance immédiate dans la
région Delme-Mohrange pour dégager le débouché de
Dieuze que devraient utiliser les forces chargées
d'agir entre la ligne Mohrange-St-Avold et la Sarre
(sur les plateaux que sillonnent la Roth et l'Albe).
Dans ces conditions, il ne suffit plus d'attaquer
entre la Seille et les Vosges: l'offensive devrait
s'étendre au nord jusqu'à la Côte de Delme, au sud
jusqu'au Ban-de-Sapt. Et le développement de
l'opération demanderait qu'après la rupture du front
compris entre Nomény et Senones, nous disposions
encore des moyens nécessaires pour livrer une
bataille sur les deux rives de la Sarre, plus ou
moins près de Sarrebruck, tout en nous couvrant
contre les manoeuvres débordantes que l'ennemi
pourrait préparer en arrière des lignes de Metz ou
de la crête des Vosges.
Un effort aussi considérable peut-il procurer des
résultats décisifs?
La reprise de la Lorraine annexée constituerait un
avantage moral et matériel de premier ordre; son
influence sur l'issue de la guerre reste néanmoins
problématique. Admettons toutefois que l'ennemi,
sentant ce domaine menacé en fasse l'enjeu d'une
bataille: nous aurions alors contre nous la
situation et la nature du champ de bataille
lui-même, qui se trouve dans une région couverte et
coupée, en dehors de toute direction stratégique
importante, à l'intérieur d'un vaste rentrant du
front adverse; ce sont là des conditions qui, a
priori, se prêtent mal à la recherche d'une
victoire.
En réalité, la mise en oeuvre brusquée de grosses
masses nous étant, sur le théâtre de Lorraine,
interdite par la force même des choses, il est
probable que l'ennemi chercherait délibérément à
nous y contenir avec des moyens restreints en
utilisant toutes les ressources de la manoeuvre et
en s'appuyant sur le compartimentage naturel du
terrain ; une contre-offensive dirigée sur des
parties du front français stratégiquement plus
sensibles que le front lorrain lui apparaîtrait
comme le meilleur moyen de limiter sinon de
paralyser notre effort.
Les considérations qui précèdent montrent que la
rupture des lignes allemandes entre la Seille et les
Vosges est en soi une opération à rendement limité.
Ses bénéfices immédiats - libération d'une bande
étroite et plutôt pauvre du territoire national,
sécurité des agglomérations urbaines et
industrielles de la vallée de la Meurthe - prennent
une valeur médiocre si on les compare aux
conséquences possibles d'une rupture de même
amplitude en Artois, en Santerre et en Champagne.
Examinée au point de vue exclusif de la bataille,
elle n'offre pas les caractères de la « menace
mortelle » qui amènerait l'adversaire à jeter, en
travers, toutes ses forces disponibles et nous
assurerait dès lors l'initiative dans la conduite
générale des opérations.
Quoi qu'il en soit, en raison même du fait que vous
avez admis l'éventualité d'offensives d'ensemble en
Haute-Alsace et en Woëvre Méridionale, il est utile
d'étudier les conditions dans lesquelles une action
du même ordre, sur le front intermédiaire de
Lorraine, pourrait être préparée et exécutée à
l'heure actuelle. Cette étude fournirait
ultérieurement, s'il y a lieu, les éléments d'une
discussion sur les manoeuvres offensives
susceptibles d'être montées dans la zone du G.A.E.
B. - CARACTÉRISTIQUES DE LA ZONE DES ATTAQUES.
(Cartes I et II)
Avant d'aborder la discussion qui permettra de fixer
le dispositif initial d'attaque, il importe de
dégager la physionomie générale du champ d'action et
le caractère des organisations défensives que
l'ennemi y a établies.
I. - Le front dont on envisage la rupture présente
un développement de 50 à 55 kilom. - toute la
progression nécessaire pour amener notre ire ligne à
distance d'assaut étant supposée réalisée.
La forêt de Parroy, dont les Allemands tiennent la
partie est, divise ce front en deux secteurs; en
outre, elle se soude par les bois de la Garenne et
les bois de Maizières à la forêt de
Réchicourt-le-Château : il y a donc, suivant l'axe
tracé par le canal de la Marne au Rhin et le canal
des Houillières, un compartimentage très net de la
zone des attaques.
Si l'on examine les deux compartiments sous le
rapport des facilités de pénétration, les remarques
suivantes s'imposent :
Dans le compartiment nord, le seuil de
Réchicourt-la-Petite donne accès à la région
découverte des Salines que dominent les promontoires
de la rive droite de la Seille (hauteurs du bois de
la Géline).
La route de Strasbourg traverse le compartiment sud
suivant toute sa profondeur pour pénétrer dans le
bassin de la Sarre par un défilé large de 3 kilom.
entre les forêts de Réchicourt-le-Château et de
Blâmont (défilé A l'ouest de cette d'Ibigny). route,
le compartiment est lui-même cloisonné, à une
distance de 2 à 8 kilom. de la 1re ligne allemande,
par une étroite bande boisée - bois de la Garenne et
de la Baronne, Amienbois, bois des Prêtres - au delà
de laquelle se dresse la crête d'Igney-Repaix qui
commande l'entrée du défilé d'Ibigny.
A l'est de la même route, le terrain - relativement
découvert et de libre parcours jusqu'au fossé de la
Vezouze - est barré au nord de ce fossé par les
forêts de Blâmont et de Cirey.
II. Pour caractériser les organisations ennemies du
théâtre de Lorraine il suffit de rappeler en
quelques mots la méthode qui a présidé à leur
développement depuis le mois de septembre 1914.
Après leur échec devant Nancy, les Allemands prirent
du champ en arrière et fortifièrent la position que
jalonnent les hauteurs de Juvelize, les bois de la
Garenne, les hauteurs entre Avricourt et Blâmont, la
rive droite de la Vezouse.
Quand ces travaux furent assez avancés, ils
portèrent leur position principale sur la position
de leurs avant-postes, alors marquée par les
lisières sud de la forêt de Bezange-la-Grande, le
plateau de Réchicourt-la-Petite, Xures, le signal de
Xousse, les Amienbois, la crête Igney-Repaix,
Harbouey et Cirey-sur-Vezouse.
Puis, de février à mai 1915, ils employèrent leur
activité à renforcer ce front et à le rectifier, en
occupant les crêtes propres à l'installation de bons
observatoires. C'est ainsi, notamment, que les
croupes au sud de Bezange-la-Petite furent garnies
de solides défenses entre la Chapelle-St-Pierre et
le bois du Haut de la Croix; que des lignes
successives, s'appuyant au Remabois et aux
Amienbois, vinrent barrer le vallon de Leintrey;
couloir de Bréménil fut bouclée entre le bois du
Chamois et la lisière sud du bois du Feys.
Ainsi, après sa retraite, l'ennemi s'est reporté
lentement en avant en laissant derrière lui, à
chaque avance, une position organisée à loisir. Sans
doute, les lignes successives qu'il a construites se
présentent encore sous la forme de centres de
résistance à intervalles passifs; il n'en reste pas
moins que la plus avancée de ces lignes est protégée
par une nappe continue de fils de fer et que les
ouvrages y sont assez rapprochés pour pouvoir être
reliés en peu de temps par des tranchées de tir.
On ne saurait donc, en aucune façon, assimiler les
fortifications du front de Lorraine à des
installations de fin de combat.
La première position présente un tracé systématique,
où les rentrants et les saillants s'adaptent bien
aux accidents du sol; elle assure presque partout à
nos adversaires un bon commandement sur le terrain
des approches.
En arrière, les autres positions sont aménagées avec
un égal souci des vues et des flanquements; elles
épousent et renforcent les grandes coupures
naturelles.
C. - CONDITIONS GÉNÉRALES DE LA MANOEUVRE.
(Cartes I et II.)
Les caractéristiques que nous venons de mettre en
évidence déterminent les conditions générales de la
manoeuvre.
Compartiment nord :
Sur le front d'attaque nord, il est indiqué de
porter tout d'abord l'effet principal sur le plateau
de Réchicourt-la-Petite, dont les approches directes
sont faciles et où la forme générale ainsi que la
faible profondeur des lignes ennemies permettent
d'escompter une pénétration immédiate. Une fois
maîtres de ce plateau, nous ferions
vraisemblablement tomber assez vite, par des actions
combinées sur les deux rives du Sanon, les
résistances accrochées à la zone Moncourt,
Mouacourt, Xures, Bois du Ht de la Croix. Aussi
bien, pour venir à bout des flanquements établis à
l'intérieur et immédiatement en arrière de la partie
est de la forêt de Parroy, faudrait-il, à première
vue, recourir à une manoeuvre enveloppante dont les
directions maîtresses sont jalonnées par Moncourt et
la Garde au nord, Emberménil et Vaucourt au sud.
Par contre, notre avance vers le nord sur Xanrey et
la butte de St-Piamont serait ardue, pour ne pas
dire impossible, tant que l'adversaire tirerait un
libre parti du bastion flanquant constitué par la
forêt de Bezange-la-Grande.
La nécessité d'investir ce bastion, d'y prendre pied
et d'en faire le point d'appui de notre aile gauche
s'imposera donc dès la première heure. Nos troupes
ne sauraient consolider leurs gains au nord de la
crête Moncourt-Réchicourt-la-Petite - et encore
moins entreprendre des avances vers les positions de
Juvelize, sans être protégées contre les feux
d'écharpe ou de flanc provenant des hauteurs de la
rive droite de la Seille: une telle protection doit
être demandée évidemment au canon, amené entre
Bezange-la-Grande et Juvrecourt (versant nord de la
vallée de la Loutre Noire).
Au total, il semble que sur le front d'attaque nord
on puisse prétendre à s'assurer, dans la première
foulée, la possession des hauteurs de
Réchicourt-la-Petite, Bezange-la-Petite, Moncourt.
Mais on doit aussi prévoir qu'une lutte difficile
s'engagera immédiatement autour du môle Forêt de
Bezange-la-Grande, butte de St-Piamont, qui flanque
ces hauteurs et offre à l'artillerie ennemie le
masque et le site nécessaire pour la mise en oeuvre
de nombreuses batteries.
Compartiment sud:
Sur le front d'attaque sud, la rupture de la 1re
position ennemie paraît devoir être obtenue dès
l'abord dans le secteur Xousse, Leinirey, Gondrexon
et dans le secteur Domèvre, Montreux.
Les forces ayant pénétré entre Xousse et Gondrexon
chercheraient à progresser d'une part sur Remoncourt
et Vaucourt, d'autre part, sur Amenoncourt et
Autrepierre, c'est-à-dire à s'étendre dans les zones
découvertes où elles pourraient :
- prendre rapidement le contact de la 2e position
allemande et investir le saillant que cette position
forme aux bois de Sauxure et de la Baronne;
- amorcer l'encerclement des centres de résistance
constitués par la partie est de la forêt de Parroy
et les bois de la rive est du ruisseau d'Albe (Bois
Gde Seille, Grand bois, bois des Prêtres).
D'où la formation d'une « poche» dont le contour
extérieur serait vraisemblablement jalonné par
Xousse, Remoncourt, le bois de Sauxure, Amenoncourt,
Gondrexon.
La rupture de la 1re position entre Domèvre et
Montreux amènerait de même nos troupes à pousser par
le terrain libre sur Barbas et Harbouey, en vue
d'aborder la 2e position, et à se couvrir à droite
(est) par un mouvement de rabattement qui leur
assurerait la possession des bois en bordure de la
route Bréménil-Cirey (bois du Feys, bois delà Touret
du Ht de la Tour, bois Harbouey).
La poche à envisager ici engloberait l'espace
compris entre cette route et la ligne Harbouey, cote
325 (sud de Barbas.)
L'élargissement des deux poches que nous venons
d'esquisser constituerait une nouvelle manoeuvre;
cet élargissement viserait nécessairement :
- en premier lieu, la réduction du saillant
Verdenal-bois du Trion (mamelon sud de Blâmont);
- puis la chute du barrage établi sur les crêtes
d'Igney-Repaix
Tout l'intérêt de la bataille dans le compartiment
sud se concentrerait dès lors sur la ligne
Avricourt-Blâmont (c'est-à-dire à l'entrée du défilé
d'Ibigny, porte du couloir de Sarrebourg).
La discussion qui précède conduit aux conclusions
suivantes :
1° Dans la partie nord de la zone des attaques, la
rupture des premières lignes allemandes entre la
forêt de Parroy et la forêt de Bezange-la-Grande
n'ouvrira pas la voie immédiatement vers la 2e
position: celle-ci ne saurait être absorbée qu'à
partir du moment où nous aurons pris pied dans la
forêt de Bezange-la-Grande.
2° Dans la partie sud de la zone des attaques, la
seule manoeuvre qu'il soit logique, a priori, de
monter, est la poussée convergente vers la partie
centrale de la 2e position allemande qui forme
l'entrée du couloir de Sarrebourg.
3° La jonction des forces qui opèrent respectivement
dans le compartiment nord et dans le compartiment
sud, et qui sont sollicitées, comme on vient de le
voir, par des actions principales divergentes - doit
être cherchée dans une opération secondaire ayant
pour objet l'encerclement de la partie est de la
forêt de Parroy, dont les défenses échapperont en
majorité aux tirs de destruction de l'artillerie.
Ces conclusions peuvent servir de base à la
détermination du dispositif initial d'attaque. Mais
il convient d'observer qu'elles ont un caractère
nettement spéculatif, qui tient aux conditions très
spéciales du contact et de l'occupation de terrain
sur le théâtre de Lorraine.
En effet, de la Moselle aux Vosges, les deux fronts
opposés sont encore, sur presque toute leur étendue,
à une distance telle l'un de l'autre que
l'établissement de nos premières lignes à portée
d'assaut se présente comme un ensemble d'opérations,
plus ou moins délicates, dont il est impossible de
prévoir les conséquences en ce qui concerne les
réactions offensives de l'ennemi.
Les plans ou dispositifs d'attaque qu'on bâtit
aujourd'hui peuvent devenir caducs dès le moment où
les lignes allemandes commenceront, sous la menace
de nos approches, à s'adapter aux exigences du
contact étroit.
D'ailleurs, la nature couverte et coupée du pays
lorrain judicieusement mise à profit par les
Allemands dans l'assiette et le tracé de leurs
positions successives, apportera toujours une
inconnue dans le problème de l'exploitation des
premières ruptures.
D. - MOYENS NÉCESSAIRES (DIVISIONS D'INFANTERIE).
(Carte III.)
a. Il résulte des études effectuées sur le terrain
qu'un effectif global de 25 D.I. (dont 18 en
première ligne) paraît nécessaire pour rompre, en
son état actuel, la première position allemande et
exécuter au delà les opérations qui nous
permettraient d'atteindre un front sensiblement
jalonné par la corne N. E. de la forêt de
Bezange-la-Grande, Xanrey, Moncourt, le bois du Ht
de la Croix, Igney, Blâmont, Harbouey.
b. L'exploitation de ces premiers résultats, sous
forme d'avances dans la vallée de la Seille, dans le
bassin supérieur de la Sarre et dans la région
intermédiaire des Étangs (Maizières-Azoudange),
exigerait vraisemblablement l'entrée en ligne de D.
I. fraîches. On ne saurait fixer par un chiffre
l'importance de ce renforcement éventuel, sans
risquer de tomber dans l'arbitraire.
Au surplus, une telle exploitation soulève la
question de la couverture des ailes du dispositif de
bataille: nous avons vu, au § A, qu'il s'agirait
alors d'étendre nos actions, au nord, sur Delme; au
sud, sur le Donon.
E. - DISPOSITIF INITIAL D'ATTAQUE.
(CARTIE III.)
Le détail de la mise en place des divisions
d'attaque (de 1re et de seconde ligne) est donné par
la carte n° III ci-jointe.
L'économie du dispositif se justifie à la fois
d'après les considérations générales développées au
§ C ci-dessus et les données d'ordre local qui
suivent :
a. La forêt de Parroy s'étend de part et d'autre
d'une ligne de partage des eaux (fossé du Sânon au
nord, ruisseau des Amis au sud) orientée ouest-est.
Les observatoires et les emplacements de batterie
qu'on peut y aménager sont donc presque
exclusivement utilisables pour des actions
d'écharpe. Aussi est-on conduit à prendre l'arête
dorsale comme limite des zones attribuées aux deux
grandes unités qui opéreront respectivement dans le
couloir d'Emberménil et dans la vallée du Sânon.
b. Dans le compartiment Nord de la zone des
attaques, la distribution des forces répond à l'idée
d'exécuter :
- une attaque principale à cheval sur la crête bois
de Bonamont-chapelle St-Pierre-Moncourt, visant la
prise du saillant de la chapelle St-Pierre et
ouvrant la voie aux forces qui déborderont par l'est
le rentrant de la butte de St-Piamont;
- une couverture de l'attaque principale, consistant
dans l'investissement de la forêt de
Bezange-la-Grande par le sud et par l'ouest
(Moncel-les Ervantes);
- une attaque secondaire prolongeant au sud
l'attaque principale payées deux versants de la
vallée du Sânon.
Dans la forêt de Parroy, on se bornerait à mordre
sur la ire ligne, dont seule la constitution est à
peu près terminée (réseau de fils de fer et
blockhaus) : en effet, il s'agira surtout d'y
assurer la couverture de notre artillerie.
c. Dans le compartiment sud de la zone des attaques,
les D.I. sont articulées pour mener:
- deux attaques principales, l'une sur le front Ht
de Corbe, Rémabois, Leintrey, Gondrexon, l'autre en
direction générale d'Ancerviller, Harbouey,
Tanconville;
- une attaque de neutralisation sur la lisière ouest
du bois des Prêtres;
- une attaque visant à déborder par le sud le bois
des Prêtres et se développant sur les deux rives de
la Vezouse;
- une couverture d'aile droite, à réaliser par
l'occupation des hauteurs qui dominent à l'ouest et
au sud la clairière de Parux (attaque sur le front
Montreux-Bréménil).
F. - ORGANISATION DU COMMANDEMENT.
(Carte III.)
L'étendue du champ offensif; son compartimentage (§
B, I) par une bande boisée presque ininterrompue qui
borde le sillon du canal de la Marne au Rhin; les
conditions dans lesquelles les attaques semblent
devoir être montées et exploitées (§ C et E)
imposent la constitution de deux groupes de forces,
c'est-à-dire de deux armées.
Au nord, armée N - zone d'action s'étendant de la
Seille à la ligne tranchée du Haut de la Faite
(forêt de Parroy) exclue - Vaucourt inclus - la
Garde inclus....
Au sud, armée S - zone d'action comprise entre cette
ligne et la limite nord de la VIIe armée.
Ces deux armées comprendraient respectivement 10 et
15 D.I.
II. - ESTIMATION DES MOYENS D'ARTILLERIE ET
D'AÉRONAUTIQUE.
ARTILLERIE.
L'exposé qui va suivre est établi sur les mêmes
bases que celles d'après lesquelles ont été arrêtées
les précédentes études (Woëvre et Hte-Alsace) :
- Souci des réalisations possibles en tenant. compte
des obligations éventuelles auxquelles vous auriez
simultanément à faire face sur d'autres théâtres
d'opérations;
- Détermination en conséquence de la contribution
supplémentaire d'ensemble à vous demander, compte
tenu des ressources existant déjà dans le G.A.E.
ainsi que dans les corps d'armée engagés.
J'ai été amené ainsi aux conclusions suivantes :
A. - Artillerie de campagne.
Les corps d'armée engagés peuvent et doivent se
suffire avec les batteries de 75 leur appartenant
organiquement, renforcées d'un certain nombre de 90
existant sur le front du D.A.L. ou prélevés sur le
matériel encore en dépôt dans les anciennes places.
Les ressources existantes permettent de faire à
volonté ce renforcement qui facilitera d'autre part
l'adjonction éventuelle aux groupes de
contre-batteries de quelques batteries de 75
(destinées à des effets de surprise sur le
personnel, offrant la rapidité d'action nécessaire
sur toute artillerie ennemie vue dans un changement
de position, présentant enfin la mobilité
indispensable pour profiter ded l'avance de
l'infanterie).
B. - Artillerie de tranchée.
Dans le même ordre d'idées, il convient de ne faire
état, en ce qui concerne l'artillerie de tranchée
que des disponibilités des troupes d'attaque
définies par vos notes n° 3340 du 9 mai 1915 et n°
14.829 du 23 décembre 1915.
Les batteries de 240 que vous pourriez mettre en
outre à ma disposition seraient réparties entre les
armées du nord et du sud et le détachement d'armée.
C. - Artillerie lourde.
Canons longs. - L'étude très complète, qui m'a été
présentée, conduit à une véritable saturation, en
artillerie à tir tendu, de tous les terrains
disponibles.
Elle se chiffre en conséquence par une demande
considérable (700 environ) de canons longs (calibre
95 et au-dessus). Cette évaluation dépasse de
beaucoup l'ensemble des ressources (280 environ) des
six régiments d'A. L. existant sur le territoire du
G.A.E. et de l'artillerie de position du secteur
intéressé. Elle s'explique ainsi :
1° Calcul très large du nombre de contre-batteries
nécessaires de façon à compenser dans une certaine
mesure l'avantage résultant pour l'ennemi de sa
situation dominante sur la plus grande partie du
front d'attaque; la raison donnée mérite d'être
prise en considération mais reste discutable.
2° Appel à l'artillerie lourde longue pour parfaire
l'oeuvre de l'artillerie de destruction sur la 1re
position, au moyen de tirs d'écharpe et d'enfilade
exécutés à longue distance. Tout utile que puisse
être cette collaboration, elle n'est pas absolument
indispensable.
3° Prévision, dans la première phase de l'attaque,
d'une action visant le bouleversement de certains
points de la 2e position, en concordance avec la
destruction totale de la première position. Cette
idée, qui touche à la doctrine même de l'attaque
reste, en tous cas, subordonnée au plan d'engagement
du général commandant l'armée d'attaque.
La différence entre la demande (700) et les
ressources locales immédiates (280) semble donc
pouvoir être réduite. Quelle qu'elle puisse devenir
ailleurs, je serais en mesure de la combler au moyen
des disponibilités en artillerie de position et en
matériel prélevées sur les armées voisines et sur
les approvisionnements encore importants qui restent
dans les anciennes places. La question du personnel
de service pourrait seule devenir délicate, si cette
différence devenait trop forte.
Canons courts et mortiers.
Demande: 216 canons de 155 C., 132 canons de 155
C.T.R., 88 mortiers de 220 et au-dessus.
Ressources: 144 canons de 155 C., 64 mortiers de 220
(y compris 48 sur plateforme en bois en cours de
rassemblement à Toul et à Epinal).
Ici, la différence qu'il est nécessaire de combler
ne peut l'être que par un apport venu de
l'extérieur, apport que j'estime pouvoir être réduit
à :
- un régiment à tracteurs (en plus du 84e);
- neuf groupes de 155 C.T.R. (un par corps d'armée
engagé).
Cet apport résume d'ailleurs toute la demande de
matériel que je serais amené à vous faire pour
l'opération en question.
Les quelques différences qui subsisteraient encore
entre les chiffres des ressources et des besoins
exprimés seraient compensées en fait par l'appoint
des canons de tranchée qu'il serait permis
d'escompter.
D'autre part les douze groupes longs du régiment à
tracteurs demandé atténueraient dans une large
mesure le déficit signalé plus haut en canons longs.
Il demeure entendu d'autre part qu'il y aura
toujours place sur la ligne de bataille pour les
mortiers de 370 que vos disponibilités permettraient
d'attribuer au G.A.E.
Le projet qui m'a été présenté prévoit l'emploi de
trois de ces mortiers.
D. - Artillerie à grande puissance.
Conformément aux dispositions du plan d'emploi de
l'artillerie à grande puissance adressé par ma
lettre n° 5271 du 16 novembre 1915, il y a lieu de
prévoir le concours :
1° D'un certain nombre de pièces (au minimum quatre)
destinées à battre les objectifs suivants :
Pont d'Amelécourt;
Pont et bifurcation de Han-sur-Nied;
Pont sur la Seille à Dieuze;
Pont de Réchicourt.
2° D'une ou plusieurs pièces à très grande portée
tirant sur voie ferrée et prenant
comme objectif la gare des Sablons à Metz.
Un certain nombre de pièces marine et de côte (14
c/m., 16 c/m., 2/10 échantignolles) se trouvent déjà
disponibles dans le G.A.E. pour ces missions.
Enfin toutes les pièces de 19 c/m., 24 c/m., 240
(Tournier), 274, 305, dont il sera possible
d'assurer le concours à l'action des armées engagées
trouveront leur emploi, soit en doublant l'action
des pièces de marine, soit en canonnant des
cantonnements ou points de passage particulièrement
importants et éloignés, soit encore en s'associant à
l'action générale des contre-batteries. La
répartition de ces pièces dépendra de leur nombre et
du dispositif finalement arrêté pour l'attaque.
E. - Munitions.
Un devis approximatif de l'approvisionnement initial
à constituer peut être établi en prenant pour base:
Le taux de 1.200 coups par pièce de 75;
Le taux de 7 jours de feu par pièce d'A.L. (art. 36,
37 et 38 de l'Instruction du 20 novembre 1915).
On arrive ainsi à un ensemble nécessaire de :
1.400.000 coups de 75;
105.00 - 90 (pour 100 pièces);
900.000 - d'A.L. de tous calibres (mortiers
exceptés);
70.000 - de 220 et au-dessus.
Il y aurait en outre à prévoir quelques
approvisionnements supplémentaires (obus de marine
et d'A.L.G.P., bombes de 58 et de 240, projectiles
spéciaux).
F. - Matériel divers.
Le matériel supplémentaire correspondant aux besoins
propres de l'artillerie est compris dans l'ensemble
des devis sommaires qui font l'objet du chapitre.
SERVICE AÉRONAUTIQUE.
I. - AVIONS.
a. Avions de tir.
Le projet d'opérations prévoit 8 alvéoles d'attaque
affectées à des G.A. d'un nombre variable de
divisions. Mais la densité d'artillerie étant à peu
près constante, la dotation de chacun des secteurs
envisagés doit être sensiblement la même (sauf pour
le corps d'armée B qui comprend 5 D.I.).
La dotation par secteur, d'une escadrille du type
escadrille de C.A.(2 pour le corps B) permet de
satisfaire aux besoins et de l'E.-M. et des
artilleries constitutives du C.A. (savoir:
artillerie de campagne, A.L. de C.A.), soit :
... 9 escadrilles du type des escadrilles de C.A.(10
appareils, 10 observateurs).
Le renforcement en A. L. réservée consiste en :
5 régiments d'A.L. attelés;
2 régiments d'A.L. à tracteurs;
9 groupes de 155 C.T.R.
Ce renforcement entraîne la participation à
l'opération de :
1 section par régiment d'A.L. attelé;
2 sections par régiment d'A.L à tracteurs ;
Soit: 9 sections d'A. L.
Enfin l'artillerie à grande puissance exige une
dotation de : 2 sections d'A. L.
b. Avions de chasse et de protection.
Quatre escadrilles seraient nécessaires pour assurer
la protection des avions de tir.
Une escadrille à chaque armée pour ses
reconnaissances.
c. Missions spéciales.
2 escadrilles spéciales pour l'attaque des drachen.
3 groupes de bombardement (qui sont constitués :
deux à Malzéville et le 3e à Ochey).
Soit au total :
9 escadrilles du type escadrilles de C.A.;
9 sections d'A.L.;
6 escadrilles de chasse et de reconnaissance;
2 escadrilles pour l'attaque des drachen;
3 groupes de bombardement.
II. - BALLONS.
La dotation prévue par l'annexe aux Instructions du
12 août sur l'observation aérienne et du 20 novembre
sur l'emploi de l'A. (dispositif combiné) convient
au cas particulier envisagé ici et conduit à la mise
en oeuvre du matériel suivant :
Pour le corps:
A. - 2 ballons aux D.I. de 1re ligne. 1 ballon à
l'A.L.
B. - 3 - 1
C. - 2 - 1
D. - 2 - 1
E. - 2 - 1
F. - 3 - 1
G. - 3 - 1
H. - 2 - 1
- 18 - 8
Au total: 26 ballons.
III. - T. S. F.
Une dotation de 1 poste récepteur par groupe
d'artillerie en dehors des postes de T.S.F. du
commandement est désirable. Cette dotation est
subordonnée aux possibilités du service de la T. S.
F. au moment où l'opération envisagée aura lieu.
III. - AMÉNAGEMENTDE LA ZONE DES ATTAQUES,
(Cartes IV, V et VI.)
Les travaux nécessaires à l'aménagement du terrain,
ainsi qu'à l'installation des troupes et aux
ravitaillements de diverses natures, ont fait
l'objet d'études détaillées de la part de
l'état-major du D.A.L. (commission du général
Nourrisson).
Les tableaux I, II, III et IV ci-joints constituent
un devis approximatif du personnel spécial, du
matériel et des matériaux que ces travaux semblent
devoir exiger.
A. - Échelonnement des travaux d'approche.
On sait déjà que les avances à réaliser pour amener
notre ire ligne à distance d'assaut du front ennemi
sont considérables :
Les D.I. du D.A.L. n'ont encore, entre la Seille et
les Vosges, que quatre zones de « friction »,
d'ailleurs peu étendues.
L'exécution de ces avances exigera des travaux
importants immédiats en raison de la profondeur du
terrain à gagner, de l'état du sol,des réactions
possibles de l'adversaire. Elle se compliquera du
fait qu'en beaucoup de points notre 1re ligne ne
constitue pas une base solide pour l'ouverture des
approches. Aussi faudra-t-il sérier les problèmes.
Dans ces conditions, on est amené à envisager 3
stades pour l'aménagement du terrain - des stades
correspondants aux zones indiquées sur la carte n°
ci-jointe, savoir :
1re zone: Renforcement ou réunion de nos postes ou
éléments de tranchée sur la première ligne actuelle;
établissement de communications avec l'arrière;
installations diverses, baraques, abris, points
d'eau, etc.
2e zone: Travaux au delà de notre première ligne
actuelle, jusque et y compris la construction d'une
nouvelle tranchée de 1re ligne.
3e zone: Ouverture des parallèles de départ et des
boyaux de liaison.
B. - Durée des travaux et main-d'oeuvre nécessaire.
Toute cette progression aura à vaincre de sérieuses
difficultés techniques. En effet, pendant la période
d'hiver et jusque vers le 15 avril, l'avance sur
certains points sera impraticable : notamment dans
la vallée de la Loutre Noire; dans les fonds de
Riouville (est d'Arracourt); au nord de l'étang de
Parroy; dans les thalwegs des ruisseaux du Jalindet,
des Prés-Bois et de Leintrey; dans la région
comprise entre Ancerviller et le bois des Chiens;
dans la vallée de la Brême (est de Neuviller).
D'autre part, certaines approches devront
s'effectuer dans des rentrants bien flanqués de la
position ennemie (Juvrecourt, Domèvre) ou au pied
des crêtes dominantes (Coincourt, Rémabois.) :
elles demanderont à être conduites avec habileté et
vigueur, sous la protection d'un sérieux déploiement
d'artillerie.
Force est donc d'envisager l'emploi d'importants
effectifs pour mener à bien, dans des limites de
temps raisonnables, toutes les avances - et les
travaux correspondants - sur l'ensemble du champ
offensif.
Si l'on se fixe, comme terme obligatoire extrême de
la préparation du front d'attaque, la date du 1er
août, l'examen des calculs établis par la commission
d'études permet de formuler les conclusions
suivantes :
1° L'aménagement des deux premières zones entamé
dans la première quinzaine d'avril, demanderait de
deux mois à 2 mois 1/2 de travail, à condition qu'il
soit fourni au D.A.L. un appoint de 8 D.I., savoir :
3 D.I. pour la zone entre Seille et forêt de Parroy;
5 D.I. pour la zone entre forêt de Parroy et Vosges.
2° Les travaux de la 3e zone doivent être confiés
aux D.I. d'attaque; leur durée peut être évaluée à 3
semaines.
La moitié des renforts nécessaires au D.A.L. pour
exécuter les travaux des 2 premières zones, soit 4
D.I., pourraient être constitués par le 20e C.A. et
la 128e D.I., qui seront de nouveau disponibles en
arrière du front de Lorraine, vers le 15 avril.
Il faudrait donc amener à cette date, dans la vallée
de la Meurthe, 4 D.I. supplémentaires à prélever sur
les disponibilités extérieures.
Ces prévisions de temps et d'effectifs n'ont bien
entendu qu'une valeur théorique, car elles ne
tiennent pas compte des retards qui pourraient
résulter :
Soit des initiatives de l'adversaire;
Soit des obstacles créés par les intempéries.
CONCLUSIONS.
I. Une offensive d'ensemble sur le front de
Lorraine, dans l'espace compris entre la Seille et
les Vosges, apparaît comme une opération coûteuse si
l'on compare la valeur des buts qu'elle peut viser à
l'importance des moyens qu'elle comporte.
II. Pour rendre l'opération exécutable avant le
milieu de l'été prochain (premiers jours du mois
d'août), il faudrait fournir au D.A.L. pour le
commencement du mois d'avril, un renfort de 8 D.I.
Ce renfort permettrait d'exécuter les avances
préparatoires aux attaques dans un délai inférieur à
3 mois.
III. La réalisation discrète des approches et de
l'aménagement du terrain est impraticable en raison
:
- de l'éloignement du front adverse;
- des vues étendues que l'ennemi possède sur la zone
des approches;
- des remaniements très apparents que nous aurons à
faire subir à notre propre front pour lui donner la
valeur d'une base offensive.
IV. Un effectif global de 25 D. I. semble nécessaire
pour prétendre à atteindre le front : corne N. E. de
la forêt de Bezange-la-Grande, Xanrey, Moncourt, le
bois du Ht de la Croix, Ygney, Blâmont, Harbouey.
Les moyens d'artillerie lourde mobile correspondant
à la mise en oeuvre de cet effectif absorberaient :
- les ressources des 6 régiments d'A.L. stationnés
sur le territoire du G.A.E.
- un appoint de 9 groupes de 155 C.T.R. et d'un
régiment lourd à tracteurs.
En résumé, le front de Lorraine ne saurait se prêter
à l'engagement d'une bataille de groupe d'armées
sans subir au préalable une transformation complète,
qu'il est matériellement impossible de soustraire
aux investigations de l'ennemi. Nous ne pouvons donc
prétendre à y réaliser la surprise stratégique au
cours du prochain été, puisque les attaques
devraient succéder immédiatement à une préparation
très complexe et très apparente du terrain.
J'estime cependant qu'au prix de travaux
relativement faciles à dissimuler, certaines parties
de ce front peuvent se prêter à l'organisation
d'attaques brusquées, ayant pour objet de prendre
pied par surprise sur des positions faiblement
tenues.
De telles attaques ne doivent d'ailleurs, à mon
avis, être envisagées que dans le cadre de la
bataille générale, c'est-à-dire dans une situation
nous assurant la supériorité locale des moyens sur
un adversaire amené à concentrer ses disponibilités
sur d'autres théâtres d'opérations.
DUBAIL.
TABLEAU N° I.
Nota. - Ce tableau résume les demandes d'un dossier
spécial concernant les voies de communications. Ce
dossier pourra être transmis au général en chef dès
que celui-ci le jugera utile.
I
VOIES FERRÉES.
Voie normale à réfectionner.
(Raccord de voie double à la sortie de Lunéville,
direction de Saint-Clément. - Gare de
ravitaillement.)
Voie de 1 m. Aménagement et création de gare. 1.800
m.
Locomotives. 32
Wagons. 400
Voie de 0 m. 60. A construire 400 km.
Locomotives. 200
Wagons-trucs. 1.100
Wagonnets. 600
Wagonnets-caisse à obus pour la traction animale
1.200
Ballast. 45.000 tonnes.
II
ROUTES.
Routes à construire. 10 km. 500
- à améliorer 163 km.
Caillasse de fondation. 3.200 tonnes.
Cailloux 50.000 tonnes.
Cylindres à vapeur. 5
- à chevaux. 9
Tonneaux d'arrosage. 17
Sections de T.M. 2
TABLEAU N° II.
MATÉRIEL DIVERS.- OUTILLAGES.
EXPLOSIFS NÉCESSAIRES POUR LA PÉRIODE DE PRÉPARATION
DE L'ATTAQUE.
A. - Matériel du génie.
Rondins. 450.000
Rails ou poutres en ciment armé. 650.000 m.
Sacs à terre. 5.000.000
Planches. 290.000 m. carrés.
Chevrons 30.000 m.
Tôles ondulées. 120.000 m. carrés.
Tôles cintrées renforcées. 80.000 éléments.
Carton bitumé. 400.000 m. carrés
Ciment 4.000 tonnes.
Ronce. 150 tonnes.
Fil de fer. 100 tonnes.
B. - Outillage (en sus de la dotation normale des
grandes unités).
Pelles. 100.000
Pioches. 100.000
Serpes. 20.000
Haches diverses. 20.000
Scies. 6.000
Cisailles renforcées. 1.000
Outils d'ouvriers d'art.
C. - Explosifs.
Explosifs 10.000 kgs.
Cordeau détonant. 7.000 m.
Mèche lente 3.500 m.
Allumeurs Ruggieri. 5.5 00
Amorces fulminantes et détonateurs. 5.500
TABLEAU N° III.
MATÉRIELS DIVERS.- OUTILLAGES.
EXPLOSIFS NÉCESSAIRES POUR L'ATTAQUE PROPREMENT
DITE.
A. - Matériel du génie et outillage.
Échelles d'assaut. 15.000
Ponts volants d'infanterie 6.000
- - d'artillerie 1.000
Sacs à terre. 600.000
Cisailles d'infanterie. 4.000
- renforcées. 8.000
Éléments Brun. 100.000
Gabions Magdalena. 200.000
Les outils divers (pelles, pioches,..) seront
prélevés sur le matériel ayant servi à la
préparation de l'attaque.
B. - Explosifs.
Explosifs. 8.000 kgs.
Cordeau détonant. 3.500 m.
Mèche lente. 2.000 m.
Allumeur Ruggieri. 4.500
Détonateurs. 2.000
Grenades. 4.000.000
Fusées éclairantes. 40.000
- signaux. 100.000
TABLEAU N° IV.
MATÉRIEL TÉLÉPHONIQUE NÉCESSAIRE POUR LE RÉSEAU DE
COMMANDEMENT ET LE RÉSEAU D'INFANTERIE.
Fil nu 15/10 180.000 m.
Câble de campagne 50.000 m.
- léger. 40.000
- - à 2 conducteurs. 10.000
sous plomb. 3.000
- armé. 1.500
Standard à 50 directions. 5
- 25 - 26
- 7 - 51
- 4 - 119
Appareils magnéto. 180
- à appel vibré. 1.000
Les armées françaises dans la Grande guerre
Tome 4,Volume 1 - Annexe 2e volume
Ministère de la guerre, état-major de l'armée,
service historique
Imprimerie nationale (Paris), 1930
D.A.L.
ETAT-MAJOR.
3e BUREAU.
Quartier général, le 8 mars 1916
Instruction générale n° 55, sur l'organisation
défensive du D.A.L., faisant suite aux changements
apportés à sa constitution.
A. - RÉPARTITION DE LA ZONE DU D.A.L. ENTRE LES
GRANDES UNITÉS.
[...]
B. - ORGANISATIONDES POSITIONS FORTIFIÉES.
Chaque position fortifiée comprend un ensemble
d'organisation : première ligne, lignes de soutien,
points d'appui, centres de résistance., présentant
une profondeur variable suivant le terrain, les
obstacles et les localités qui s'y trouvent.
Le front des positions successives à organiser sur
l'ensemble du détachement d'armée de Lorraine est
indiqué ci-après:
PREMIÈRE POSITION.
Groupe nord.
Front marqué par ;
Ferme Vitrey, signal de Xon, Norroy, lisière
nord-est de la forêt de Facq, Morville,
Port-sur-Seille, Clémery, Nomény, bois du Haut des
Trappes, Létricourt, Chenicourt, Ajoncourt, Arraye
et Han, Chambille, Armaucourt, Lanfroicourt, Bly,
Brin.
Groupe centre.
Front marqué par :
Bois dit du Ramont, station de Moncel, Moncel, bois
Sainte-Marie, bois de Ranzey, ferme Ranzey, les
Jumelles, Arracourt, ferme de Vandrecourt, crête au
nord-ouest de Bures, Bures, digue au sud de l'étang
de Parroy.
3e Corps de cavalerie.
Front marqué par :
Juvicourt, bois Legrand, coupure nord-ouest, sud-est
de la forêt de Parroy, jusqu'au ruisseau de
Jalindet.
128e Division.
Front marqué par :
Emberménil et sa station, hauteurs sud de Leintrey
et est de Reillon, bois Vannequel, bois des Haies
d'Albe.
71e Division.
Front marqué par :
Bois Banal, Ancerviller, coupure du bois des Haies,
Neuviller, le Haut d'Arbre, le Chamois, hauteurs
entre le ruisseau de Thiaville et la route de
Badonviller à Allarmont.
[...]
DEUXIEME POSITION
[...]
128e Division
Laneuveville, crête fort de Manonviller, Domjevin,
Freménil, Ogéviller, Réclonville, hauteur est de
Réclonville.
Les armées françaises dans la Grande guerre
Tome V, volume 1, annexes 2
Ministère de la guerre, état-major de l'armée,
service historique
Imprimerie nationale (Paris), 1931
GRAND QUARTIER GÉNÉRAL DES ARMÉES DU NORD ET DU
NORD-EST.
ETAT-MAJOR.
2e BUREAU.
Au G.Q.G., le 10 avril 1917.
Compte rendu de renseignements n° 1026.
[...]
Coupure des voies de communications en Lorraine.
Pendant la nuit du 8 au 9, les Allemands ont fait
sauter à Domèvre (ouest de Blamont) le pont sur la
Vezouse où passe le chemin de fer à voie étroite de
Lunéville à Blamont.
Les armées françaises dans la Grande guerre
Tome V, volume 2, annexes 2
Ministère de la guerre, état-major de l'armée,
service historique
Imprimerie nationale (Paris), 1927
GROUPE D'ARMÉES DE L'EST.
ÉTAT-MAJOR.
3e BUREAU.
Au P.C., le, 13 août 1917.
Instruction particulière n° 9 pour le général
commandant la VIIIe armée.
A la date du 9 août, et sous le n° 9499, le général
commandant en chef a approuvé les propositions que
lui a soumises le général commandant le G.A.E. et
relatives aux « projets d'attaque, correspondant aux
parties du front reconnues susceptibles d'être
organisées offensivement.
Le général en chef a en outre fixé l'ordre d'urgence
dans lequel ces projets seront réalisés.
En ce qui concerne la VIIIe armée, cet ordre
d'urgence est le suivant :
N° 1. Projet de Lintrey, entre Sanon et Vezouze
(opération de Lorraine D).
N° 2. Projet de Nomeny, entre Moselle et Letricourt
(opération de Lorraine A).
N° 3. Projet d'Ancerviller (opération F).
N° 4. Projet de Gremecey (opération B).
En raison des opérations en cours sur l'ensemble du
front, l'exécution du projet n° 1 (Leintrey) sera
seule envisagée pour 1917.
La réalisation des autre projets ne peut être
actuellement prévue.
Toutefois, l'opération de Nomény sera, en principe,
exécutée en 1918, en liaison avec l'opération de
Woëvre.
II. - Opération de Lintrey. - Le général en chef
fixera ultérieurement l'époque à laquelle pourra
être exécutée l'opération de Leintrey, cette époque
dépendra de celle où des moyens supplémentaires
pourront être mis à la disposition de la VIIIe
armée. D'ici.
là, la préparation devra être poursuivie activement,
dans la mesure compatible avec les moyens
actuellement disponibles.
Il convient d'ailleurs de remarquer que cette
préparation comporte des études détaillées,
susceptibles de permettre ensuite une réalisation
rapide.
Dans cet ordre d'idées sont :
- la tenue à jour des cartes de renseignements
détaillés, au moyen des reconnaissances
photographiques du front et de l'arrière-front ;
- l'établissement des plans reliefs à grande
échelle, tels que ceux visés par les notes 3827 du 4
août, et 30802 du 27 juillet 1917, du général en
chef (page 5 et renvoi); la reconnaissance
d'ensemble du terrain d'action de l'artillerie et
des zones d'action des grandes unités ;
- l'étude de l'aménagement offensif du terrain qui
sera, dès maintenant, arrêtée dans ses détails ;
- l'étude détaillée des zones de rassemblement en
arrière du front d'attaque et des communications.
Avant toutes autres études, il est indispensable de
reprendre le projet adressé par la VIIIe armée au
G.A.E., le 15 juin, sous le n° 11788, et le mettre
en concordance avec les données de la note 30801 du
29 juillet du général en chef.
En particulier, le nombre de grandes unités
nécessaires à l'opération proprement dite devra être
calculé sur les bases indiquées à la page 9 (renvoi
1) de ladite note.
Le décompte des unités à prévoir pour les premières
relèves après les attaques, sera établi avec
indication de leurs zones de stationnement initial.
En ce qui concerne les travaux d'A.L.G.P., le
général en chef prescrit de réduire leur programme,
de manière que celui-ci ne concerne que les
matériels qui seront réellement utilisables à
l'époque fixée pour cette opération (consulter à cet
égard le représentant de l'A.L.G.P. à la VIIIe
armée).
Le général commandant la VIIIe armée est prié
d'adresser au général commandant le G.A.E. pour le
25 août le complément d'études résultant de
l'exécution des prescriptions ci-dessus.
III. - Sur le reste du front de la VIIIe armée il y
a lieu pour le moment: d'améliorer l'organisation
défensive, en tenant compte du plan de renforcement,
et en s'attachant à améliorer d'abord les parties
utilisables dans les offensives projetées.
Les plans des travaux offensifs et d'A.L.G.P.
devront être dès maintenant étudiés et arrêtés pour
tous les fronts d'attaque envisagés.
IV. - Opération de Woëvre. - L'opération de Woëvre
sera exécutée en 1918 par le groupe d'armées du
Centre en combinaison avec des opérations dans les
Hauts de Meuse. La limite entre G.A.C. et G.A.E.
sera modifiée en conséquence, en temps utile, par le
général en chef. Pour le moment, cette limite n'est
pas changée.
Dès maintenant, le général commandant la VIIIe armée
est prié de donner toutes facilités au général
commandant le G.A.C. pour les études préliminaires à
cette opération.
Le général de division de Curières de Castelnau,
commandant le groupe d'armées de l'Est,
DE CASTELNAU.
VIlle ARMÉE.
ÉTAT-MAJOR.
3. BUREAU
Q.G., le 29 août 1917.
Le général commandant la VIIIe armée au général
commandant le G.A.E.
J'ai l'honneur de vous adresser ci-joint l'étude que
vous m'avez demandée par votre instruction
particulière n° 9, en date du 13 août.
Aux termes de cette instruction, (d'exécution du
projet n° 1 (Leintrey), sera seule « envisagée pour
1917 » « Le général commandant en chef fixera
ultérieurement l'époque à laquelle pourra être
exécutée l'opération de Leintrey. Cette époque
dépendra de celle où des moyens supplémentaires
pourront être mis à la disposition de la VIIIe
armée. »
Il y a lieu de faire, à ce propos, une première
remarque.
Le terrain compris entre la forêt de Parroy et la
Vezouse est absolument impraticable en hiver;
l'expérience en a été faite au cours des deux hivers
derniers, pendant lesquels il est arrivé à maintes
reprises que Français et Allemands devaient circuler
à l'extérieur de leurs tranchées et boyaux envahis
par les eaux.
La limite extrême à laquelle il semble qu'on puisse
concevoir l'exécution d'une opération offensive dans
cette région, est le 1er novembre, le mois d'octobre
étant généralement beau en Lorraine.
Si le général en chef n'était pas en mesure de
donner en temps utile à la VIlle armée les moyens
supplémentaires nécessaires pour la préparation et
l'exécution de cette attaque, il deviendrait
indispensable alors de la reporter au printemps de
1918.
Dans l'hypothèse où le général commandant en chef
maintiendrait sa décision d'exécuter l'opération de
Leintrey en 1917, et partagerait ma manière de voir
au sujet de la date limite à envisager à cet effet,
il est nécessaire de faire une deuxième observation.
Le secteur de Lunéville, qui a un développement de
20 km., n'est tenu actuellement, en première
position, que par une seule division (mettant en
ligne deux régiments renforcés par quelques unités
territoriales). Ce dispositif, qui est le même que
celui adopté depuis le mois d'avril 1917 dans les
secteurs de la VIIIe armée, a conduit à renoncer
d'une manière absolue à l'occupation de lignes
continues. Le front n'est tenu que par des postes de
résistance généralement distants de plusieurs
centaines de mètres.
Avant de procéder dans ce secteur à un travail
offensif quelconque, il est nécessaire de revenir
par une première étape à l'occupation du front telle
qu'elle était réalisée encore pendant l'hiver
1916-1917, où les divisions de la VIlle armée
étaient à 4 régiments et mettaient toutes leurs
unités en ligne. Il faut donc pour être prêt à la
fin d'octobre, rétablir ce dispositif d'occupation
du secteur par lignes continues dès les premiers
jours de septembre, ce qui comporte la remise en
état des anciens travaux, la réouverture des abris
obstrués, l'enlèvement des obstacles passifs qui
encombrent les tranchées abandonnées, etc.
Par conséquent, pour être prêt le 1er novembre, la
condition sine qua non est de densifier cette partie
du front de la VIIIe armée sans le moindre délai.
Conformément aux indications que vous m'avez données
par votre instruction particulière n° 9 susvisée
(page 2, dernier alinéa), le nombre des grandes
unités nécessaires a été calculé à raison de 1.000 à
1.200 mètres de front par division de première
ligne. Le développement du front d'attaque étant
d'une quinzaine de kilomètres, le nombre des
divisions prévu en première ligne s'élève à 11;
celui des divisions prévu, soit en deuxième ligne,
soit en réserve d'armée, à 9.
Toutefois, ce total de 20 divisions parait
susceptible d'une certaine réduction.
D'une part, les études faites d'après mes ordres sur
le terrain, par les états-majors des 9e C.A. et 2e
C.A.C., ont fait ressortir la difficulté qu'il y
aurait à placer des effectifs aussi nombreux, soit
dans la forêt de Parroy, soit surtout dans la région
découverte située plus au sud.
D'autre part, les premiers renseignements que j'ai
fait recueillir auprès du général commandant la IIe
armée sur les opérations exécutées au nord de Verdun
à partir du 20 août, semblent indiquer que l'on
pourra se contenter dans bien des cas d'une densité
d'infanterie inférieure aux chiffres indiqués par le
général commandant en chef dans son
instruction n° 30801 du 29 juillet. Pour un front
d'attaque sensiblement égal à celui de l'opération
de Leintrey, la IIe armée, en effet, n'a employé que
8 divisions en première ligne et 8 comme divisions
de première relève. C'est à ces chiffres,
semble-t-il, qu'on pourrait ramener également les
effectifs jugés nécessaires pour l'opération de
Leintrey.
Si la densité en infanterie parait pouvoir être
réduite, il n'en est pas de même pour l'artillerie.
Sur le front de la dernière offensive au nord de
Verdun, la densité en artillerie, fixée par le
général Pétain lui-même, s'élevait à :
1 pièce tous les 20 mètres pour l'artillerie de
campagne;
1 - 30 mètres - l'A.L.G.;
1 - 30 mètres - l'A.L.L.
Si l'on compare ces densités à ce qui était prévu
dans le projet d'attaque ci-joint avec 11 divisions
en première ligne, on s'aperçoit immédiatement:
1° Qu'il reste nécessaire de disposer du même nombre
de groupes à engager pour obtenir une densité
suffisante en A. G., soit d'avoir 12 groupes d'A.C.,
en supplément des artilleries des 16 divisions
engagées;
2° Qu'il y aurait intérêt à augmenter la dotation en
artillerie lourde courte, pour se rapprocher de ce
qui a été fait à Verdun.
Il y aurait donc lieu de prévoir environ 100
batteries d'A.L.C. au lieu de 90.
Les dotations en artillerie lourde longue, en
artillerie de tranchée et en A.L.G.P. ne sont pas à
changer.
Si vous approuviez cette manière de voir, je ferais
étudier dès maintenant les répercussions qu'aurait
cette modification aux effectifs engagés, tant sur
le dispositif d'attaque envisagé que sur les besoins
en personnel et en matériel.
Toutefois, il y a lieu de remarquer que le nombre de
bataillons en première ligne resterait le même dans
les deux hypothèses; en conséquence, les travaux à
réaliser pour l'équipement du front restent
également sensiblement les mêmes et il n'y a pas
lieu de compter sur une diminution sensible des
moyens nécessaires, tant en travailleurs qu'en
matériel.
GÉRARD.
GROUPE D'ARMEES DE L'EST.
ÉTAT-MAJOR.
3e BUREAU.
Objet: Opération de Leintrey.
Au Q.G., le 31 août 1917.
Le général de division de Curières de Castelnau,
commandant le groupe d'armées de l'Est, à M. le
général commandant en chef.
Votre note 9499 du 9 août a arrêté l'ordre d'urgence
dans lequel seront réalisés les différents projets
d'opérations.
En ce qui concerne le G.A.E., l'opération de
Leintrey (secteur D de Lorraine) est seule envisagée
pour 1917.
Les études détaillées ont aussitôt été entreprises;
le premier projet sommaire que je vous avais adressé
le 25 juin a été repris et mis à jour conformément
aux indications de votre note 30801 du 29 juillet.
Je vous adresserai incessamment les résultats de ces
études, constituant le projet définitif.
D'ores et déjà, on peut évaluer comme suit les
nécessaires, décomptés sur les nouvelles bases.
Le front d'attaque est de 15 km., à compter sur
notre 1re ligne, après réalisation des avances
nécessaires, et de 16 km. comptés sur la position
ennemie à attaquer. En prenant pour base 1 bataillon
en 1re ligne pour 3 à 400 m. de front et 500 et
1.000 m. de profondeur à enlever, on trouve un total
de 8 D.I. en 1re ligne.
Il convient de compter un nombre égal de D.I. pour
les imprévus et les 1res réserves; soit au total: 16
D.I.
Les nécessaires en artillerie sont décomptés suivant
les barèmes généralement admis et proportionnés à ce
nombre de grandes unités.
En ce qui concerne la date de l'opération, il y a
lieu de remarquer que le terrain compris entre la
forêt de Parroy et la Vezouze est à peu près
impraticable en hiver.
La limite extrême à laquelle il semble qu'on puisse
concevoir l'exécution d'une opération offensive,
dans cette région, est le 1er novembre, le mois
d'octobre étant généralement beau en Lorraine.
Les moyens mis à ma disposition pour la préparation
doivent donc être tels qu'ils permettent de
l'achever dans les deux mois de septembre et
octobre; les moyens supplémentaires pour l'exécution
devraient être à pied d'oeuvre vers le 20 octobre.
Une deuxième observation résulte du mode
d'occupation actuelle du secteur envisagé, qui
comporte simplement des centres de résistance,
distants de plusieurs centaines de mètres (2
régiments actifs en première ligne pour les 20 km.
du secteur de Lunéville).
Avant de procéder à un travail offensif, il est
nécessaire de réaliser d'abord la densité
d'occupation antérieure; soit, pour ce même secteur,
4 régiments actifs en première ligne.
On pourra ainsi revenir à la reconstitution et à
l'occupation d'une ligne continue, et, au préalable,
remettre en état les anciens travaux (réouverture
des abris obstrués, enlèvement des obstacles passifs
qui encombrent les tranchées abandonnées, réfection
de ces tranchées, etc.).
En résumé, pour que l'opération puisse être
entreprise en 1917, deux conditions doivent être
réalisées de toute nécessité:
1° Densification immédiate du front envisagé,
doublant au moins l'occupation du secteur de
Lunéville.
2° Mise à ma disposition de moyens tels que les
travaux de préparation puissent être achevés vers le
20 octobre.
CASTELNAU
GRAND QUARTIER GÉNÉRAL DES ARMÉES DU NORD ET DU
NORD-EST.
ÉTAT-MAJOR.
3e BURBAU.
Au Q.G., le 2 septembre 1917.
Le général commandant en chef
au général commandant le groupe d'armées de l'Est, à
Mirecourt.
Réponse à la lettre n° 11.556, du 31 août.
Les circonstances ne me permettent plus d'envisager
la possibilité d'exécuter l'opération de Leintrey en
1917.
En conséquence, vous ne recevrez pas les moyens
supplémentaires qui vous permettraient d'achever les
préparatifs de l'opération avant le 1er novembre.
L'opération de Leintrey reste un projet pour 1918;
vous devez en poursuivre les préparatifs dans la
mesure du possible.
PÉTAIN.
Les armées françaises dans la Grande guerre
Tome VI, vol. 1 annexe 1
Ministère de la guerre, état-major de l'armée,
service historique
Imprimerie nationale (Paris), 1932
GRAND QUARTIER GÉNÉRAL DES ARMÉES DU NORD ET DU
NORD-EST.
État-major.
3e BUREAU.
Au Q.G., le 15 décembre 1917.
Le général commandant en chef à Monsieur le général
commandant le groupe d'armées de l'Est, à Mirecourt.
[...]
Je donne également mon approbation aux coups de main
non suivis d'occupation du terrain préparé :
A la VIIIe armée : sur les saillants du chemin de
fer de Flirey et la crête nord du bois de Remières;
sur la tête de pont de Bezange;
sur le hameau d'Ancervillers.[...]
PÉTAIN
GRAND QUARTIER GÉNÉRAL DES ARMÉES DU NORD ET DU
NORD-EST.
ÉTAT-MAJOR.
2e BUREAU
Au G.Q.G., le 10 février 1918.
[...]
En Lorraine, les dépôts de Rixingen, Blamont, Cirey,
paraissent avoir augmenté d'importance. Rien de
particulier dans les Vosges.
VIIIe ARMÉE.
ÉTAT-MAJOR.
3e BUREAU.
SECRET.
Rapport du général commandant la VIIIe armée, sur
les opérations exécutées le 20 février 1918.
La situation générale sur l'ensemble du front, la
nécessité d'avoir dès que possible des
renseignements en Lorraine, exigeaient de passer
sans retard à l'exécution des coups de main
approuvés par le général commandant en chef et que
les 7e et 15e C.A. étudiaient depuis le 18 décembre
1917.
Vers le milieu de janvier, les conditions locales
tout à fait défavorables, en particulier le mauvais
état du terrain devant Ancerviller et Bezange, ne
permettaient pas d'espérer qu'on puisse obtenir le
résultat cherché.
Ces opérations pouvaient être ajournées indéfiniment
par suite des conditions climatiques défavorables
qui rendent le terrain longtemps impraticable en
Lorraine en cette saison. Le général commandant
l'armée décidait de les remplacer par d'autres
opérations exécutables dans un délai très court et
quelles que soient les conditions atmosphériques.
[...]
GRAND QUARTIER GÉNÉRAL DES ARMÉES DU NORD ET DU
NORD-EST.
ÉTAT-MAJOR.
2e BUREAU.
AuG. Q.G., le 6 mars 1918.
Compte rendu de renseignements n° 1357.
[...]
Lorraine: la 233e D. I. semble avoir relevé la 12e
D.I. dans le secteur de Blamont. 2 prisonniers du
449e, le 5 mars, dans la région d'Ancervillers.
D'après leurs déclarations, la 233e D.I. aurait
relevé la 12e D.I. vers le 20 février.
L'ordre de bataille serait de l'est à l'ouest :
450e, 448e, 449e.
La 12e D.I. avait relevé la 233e D.I. au début de
février.
(B. R. du 6 février.)
Corps alpin (unité en arrière du front), 1 homme du
14e btn de chasseurs de réserve (2e rgt de
chasseurs, corps alpin) écrit, à la date du 20
février: « Je suis en Lorraine, aux environs de
Sarrebourg».
Le corps alpin, revenu du front italien dans les
derniers jours de décembre, avait été identifié
d'abord en Alsace (B.R. du 26 janvier), puis en
arrière du front de Champagne (B.R. du 19 février).
Plusieurs renseignements, donnés sous réserves,
avaient déjà indiqué sa présence dans la région de
Sarrebourg.
GRAND QUARTIER GÉNÉRAL DES ARMÉES DU NORD ET DU
NORD-EST.
ÉTAT-MAJOR.
2e BUREAU.
Au G.Q.G., le 10 mars 1918.
Compte rendu de renseignements n° 1361.
[...]
Aviation active seulement au sud de Laon, vers
Tahure, et dans la région Blamont, Badonviller.
GRAND QUARTIER GÉNÉRAL DES ARMÉES DU NORD ET DU
NORD-EST.
ETAT-MAJOR.
2e BUREAU.
Au G.Q.G., le 16 mars 1918.
Compte rendu de renseignements n° 1367.
[...]
Lorraine: activité d'artillerie sur les premières
lignes dans la région Vého, Embermesnil.
Activité de minenwerfer dans le secteur de la forêt
de Parroy.
Circulation assez active dans la région sud-est de
Marsal et de Blâmont.
Alsace: activité moyenne de l'artillerie.
Bombardement de nos tranchées au sud-est de
Vieux-Thann et dans la région d'Avricourt et de
Seppois.
Les armées françaises dans la Grande guerre
Tome VI, vol. 1, Annexes 2
Ministère de la guerre, état-major de l'armée,
service historique
Imprimerie nationale (Paris), 1932
GRAND QUARTIER GÉNÉRAL DES ARMÉES DU NORD ET DU
NORD-EST.
ÉTAT-MAJOR.
2e BUREAU.
Au G.Q.G., le 23 mars 1918.
Compte rendu de renseignements n° 1374
[...]
III. - ACTIVITÉ DE L'ENNEMI
[...]
Lorraine : assez grande activité de l'artillerie
ennemie dans la région d'Emberménil aux Vosges. Tirs
de destruction sur les batteries de la région de
Domjevin.
[...]
V. - INTENTIONS DE L'ENNEMI (sous réserves) :
[...]
Lorraine : un artilleur écrit à la date du 14
février de la région de Blamont (identifiée par le
secteur postal) : « Provisoirement, c'est encore le
calme qui règne ici. Mais on construit force
positions de batteries. Le corps alpin vient aussi
d'arriver. Espérons cependant que cela ne se
déclenchera pas... ».
GRAND QUARTIER GÉNÉRAL DES ARMÉES DU NORD ET DU
NORD-EST.
ÉTAT-MAJOR.
2e BUREAU.
Au G.Q.G., le 25 mars 1918.
Compte rendu de renseignements n° 1376.
[...]
IV. - INTENTIONS DE L'ENNEMI
[...]
Lorraine : lettre émanant d'un soldat du 21e
bataillon d'artillerie à pied de Landwehr (secteur
postal 131, région de Blamont). « On construit ici
beaucoup d'emplacements de batteries ».
De bonne source, l'armée Bothmer serait intercalée
sur le front de Lorraine.
GRAND QUARTIER GÉNÉRAL DES ARMÉES DU NORD ET DU
NORD-EST.
ÉTAT-MAJOR.
2e BUREAU.
Au G.Q.G., le 27 mars 1918.
Compte rendu de renseignements n° 1378.
[...]
III. ACTIVITÉ DE L'ENNEMI.
[...]
Lorraine :
a. Journée du 23 : grande activité d'artillerie dans
la région de Reillon; réaction assez violente de
l'artillerie ennemie à la suite de l'opération
locale que nous avons exécutée dans la région de
Nomény. Aviation assez active. Plusieurs patrouilles
sur la région de la forêt de Parroy semblant
protéger des avions de réglage.
[...]
VII. - PHSYIONOMIE DU FRONT FRANÇAIS EN DEHORS DES
FRONTS D'ATTAQUE :
[...]
Lorraine : le front est tenu par des unités
médiocres ou assez bonnes. Les moins mauvaises (10e
D. bav. et 233e D.) sont entre Parroy et les Vosges.
Toutefois, il faut noter :
L'entrée en ligne de l'armée Bothmer;
La présence à l'arrière de bonnes divisions venant
d'Italie (200e D.C. alpin, 117e D.) et peut-être la
division de chasseurs. Ces divisions sont entraînées
à la guerre de mouvement.
La construction d'emplacements de batteries dans la
région de Blamont (document).
D'autre part, l'activité d'artillerie et de T.S.F.
augmente dans la région entre Bezange et les Vosges.
Le nombre des batteries repérées augmente (surtout
de 15 cm.) sans toutefois être très important. Les
prisonniers parlent de bruits d'attaque.
Une attaque de faible envergure, 5 ou 6 divisions,
est donc possible dans cette région.
Les armées françaises dans la Grande guerre
Tome VI, vol. 1, Annexes 3
Ministère de la guerre, état-major de l'armée,
service historique
Imprimerie nationale (Paris), 1932
GROUPE D'ARMÉES DE L'EST.
ÉTAT-MAJOR.
2e BUREAU.
Q.G., le 4 avril 1918.
Compte rendu de l'activité générale sur le front du
G. A. E. (période du 16 au 31 mars.)
[...]
VIIIe armée.
a. Front. - Sur la rive gauche de la Moselle,
suivant déclarations de pris., la 40e D., venue de
Russie, aurait renforcé le front de Woëvre en
s'intercalant entre la 4e D.B. et la 78e D.R.
Ce renforcement aurait été provoqué par une crainte
d'offensive suggérée aux Allemands par
l'identification de troupes américaines sur ce
front.
Sur la rive droite, la 48e D.L., relevée dans le
secteur de Domèvre par la 10e D. B. (vers la fin de
février), a relevé la 54e D. au sud de Delme.
La 233e D. a relevé la 12e D. dans le secteur de
Blamont.
Divisions susceptibles d'être transportées sur le
champ de bataille :
4e D.B., 46e D.R., 10e D.B., 233e D., ces deux
dernières ayant déjà subi un entraînement spécial en
vue d'une guerre de mouvement.
Les 201e, 202e et 78e D.R. pourraient aussi être
employées sur un front plus actif.
GRAND QUARTIER GÉNÉRAL DES ARMÉES DUNORD ET DU
NORD-EST.
ÉTAT-MAJOR.
2e BUREAU.
Au G.Q.G., le 8 avril 1918
Compte rendu de renseignements n° 1390.
[...]
Lorraine :
Journée calme. L'artillerie n'a manifesté d'activité
que sur nos batteries de Domjevin et de la région de
Morville-sur-Seille.
Aucune activité d'aviation.
GRAND QUARTIER GÉNÉRAL DES ARMÉES DU NORD ET DU
NORD-EST.
ÉTAT-MAJOR.
2e BUREAU.
CONFIDENTIEL.
Au Q.G., le 14 avril 1918
Compte rendu de renseignements n° 1396.
[...]
Lorraine. - Activité: Journée calme Toutefois
l'aviation ennemie a montré quelque activité dans la
région de la forêt de Parroy.
Densité du front : sans changement, mais la 233e
div. (assez bonne) a été relevée dans la région de
Blamont par la 96e div., venue de Galicie et de
médiocre valeur. On ignore sur quelle région la 233e
division a été dirigée.
GRAND QUARTIER GÉNÉRAL DES ARMÉES DU NORD ET DU
NORD-EST.
ÉTAT-MAJOR.
2e BUREAU.
Au G.Q.G., le 26 avril 1918.
Compte rendu de renseignements n° 1408.
[..]
4° 2 localisations.
3e D.G. localisée à l'ouest de Merville.
233e division localisée dans la région de Blamont
(Lorraine).
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