Dans son étude sur
les sires de Blâmont, Edmond de Martimprey écrit,
concernant Thiébaut II de Blâmont :
«
Quelques années plus tard, il fonda, dit-on, cet ordre de chevalerie appelé de la Fidélité, dont les insignes étaient un collier portant la devise
Tou! un. Il est certain qu'il paraît avoir été tout au moins le promoteur du traité d'alliance en forme de confrérie passé le 31 mai 1416, en présence et sous les auspices du cardinal Louis, duc de Bar, puisqu'il y est nommé le premier, en têtu de la liste des 20 chevaliers et des 25 écuyers des duchés de Lorraine et de Bar qui adhérèrent aux statuts. Ce traité n'était fait que pour cinq ans ; mais, quelques jours avant son expiration, treize des premiers associés le renouvelèrent, tant en leur nom qu'en celui des absents, pour une durée indéfinie, et c'est là qu'aurait pris naissance l'ordre de Saint-Hubert, qui subsista dans le Barrois jusqu'à la fin du XVIIIe siècle. »
Il
semble bien que Thiébaut, comte de Blâmont, ait fondé
cet ordre de chevalerie, mais le duc de Bar s'en déclara le chef suprême, afin de lui donner plus d'éclat et de durée.
Créé pour cinq années l'« ordre de la fidélité
» sera maintenu en 1423 sous le
nom « saint Hubert
».
Plusieurs rois de France approuvèrent cette fondation sous les différents titres d'ordre de Saint-Hubert, de la Fidélité, et du Lévrier. Elle se continua pendant cinq siècles, Louis XIV, Louis XV, Louis XVI, rois de France, ont accordé des privilèges à l'ordre de Saint-Hubert. Il fut supprimé lors de la Révolution en 1789, et fut réorganisé en 1815. En 1816, il fut reconnu par Louis XVIII, et aboli par ordonnance royale du 16 avril 1824.
Notice historique sur
L'ORDRE DE SAINT-HUBERT DU DUCHÉ DE BAR
par V. Servais
Paris - 1868 A mort d'Edouard III, duc de Bar, et de Jean de Bar, son frère, seigneur de Puisaye, tués à Azincourt en défendant la France contre les Anglais, le 25 octobre 1415, fit tomber la succession de ces princes au pouvoir de Louis de Bar, le seul des fils de Robert, duc de Bar et de Marie de France qui vécût alors.
Louis de Bar, trop âgé pour renoncer à l'état ecclésiastique qu'il avait embrassé dans sa jeunesse, accepta la couronne ducale du Barrois, tout en conservant le titre de cardinal, et la crosse épiscopale de Châlons, qu'il permuta depuis pour celle de Verdun, ville plus rapprochée que Châlons de son héritage. Ce prince que son âge, son état et sans doute aussi son caractère, éloignaient des habitudes guerrières, s'appliqua, dès le commencement de son règne, à cicatriser les plaies que les hostilités survenues entre la Lorraine et le Barrois, en guerre depuis plusieurs années, avaient faites au duché de Bar : il rechercha l'amitié du duc de Lorraine et la paix. Il ne tarda pas à obtenir l'une et l'autre. Les deux princes signèrent, le 4 décembre 1415, un traité qui mit fin aux événements désastreux dont les deux duchés avaient été le théâtre sur la fin du règne de Robert et sous celui d'Edouard III (1).
Après avoir assuré la paix au dehors de ses états, le cardinal de Bar s'occupa de rétablir le calme au dedans. C'est à son penchant pour la paix qu'est due l'association de l'Ordre du Lévrier, ou de la Fidélité. Cette institution, créée évidemment pour maintenir dans le duché de Bar et le marquisat du Pont, l'ordre et la tranquillité, se forma à Bar-le-Duc, sous la protection du Cardinal, et les Statuts eu furent arrêtés en sa présence, le 31 mai 1416. - Quarante-six gentilshommes (2), l'élite de la noblesse du duché de Bar, entrèrent dans ce pacte solennel. Ils s'imposèrent entre autres obligations, celles de s'entr'aimer, de se secourir mutuellement et de recourir à l'autorité ducale pour la solution des différends qui s'élèveraient entre eux. Ceux qui avaient à se plaindre de torts ou dommages quelconques, étaient tenus, d'après les statuts, d'en donner avis au Roi, ou chef de la compagnie ; sur la requête de celui-ci, et huit jours après, tous les membres de l'ordre devaient marcher au secours du plaignant, le banneret à trois hommes d'armes, le simple chevalier à deux, et l'écuyer à un. On devait fournir de plus grandes forces lorsque le cas l'exigeait, mais la nécessité de l'accomplissement de cette obligation était soumise à l'appréciation du Roi, et de six des membres de la compagnie.
Ces dernières conditions, et surtout celle qui était imposée aux associés par les statuts, de recourir aux règles du droit pour obtenir justice de celui d'entr'eux dont ils pouvaient avoir à se plaindre, prouvent avec évidence que la fondation de l'ordre avait principalement pour but de prévenir les voies de fait si communes dans le XIVe siècle, malgré les efforts des souverains pour les empêcher ; désordres qui n'avaient pas manqué sans doute de se reproduire et de se multiplier dans le pays, pendant la durée de la dernière guerre.
Le Cardinal promit, sur parole de prince, de faire observer les conventions jurées par les gentilshommes alliés, et de les soutenir de tout son pouvoir et de toutes les forces dont il disposait.
On a vu plus haut, que le chef de l'association portait le titre de Roi. Il devait être élu pour un an. L'insigne distinctif de l'ordre, était un lévrier blanc, ayant au cou un collier portant les mots :
Tout vng ; tous les membres étaient tenus de le porter. La compagnie devait se réunir deux fois par an, la première le 11 novembre, jour de saint Martin, et la seconde le 23 avril, jour de saint Georges. Chaque associé était tenu d'assister aux assemblées générales, sous peine d'un marc d'argent. En cas d'excuse légitime, il devait s'y faire représenter et payer sa part des frais. On voit par les lettres de création de l'ordre que la première réunion dut avoir lieu à Saint-Mihiel.
Les membres devaient être élus par le Roi ou chef, assisté des gentilshommes les plus notables de la compagnie. Ils ne pouvaient être institués qu'en vertu d'une ordonnance du duc de Bar.
Telles sont les principales règles auxquelles étaient assujettis les associés. On voit qu'elles leur imposaient des obligations assez onéreuses, établies non-seulement dans leur intérêt, mais aussi dans l'intérêt du prince et du pays.
Cette institution chevaleresque avait été créée pour cinq ans. Il ne reste d'autres traces des premiers temps de son existence que celles qui nous sont transmises par les lettres de son établissement. On sait cependant qu'il en résulta, pour le souverain et pour le pays, des avantages qui déterminèrent le cardinal de Bar et les chevaliers de l'Ordre, peu de mois après l'expiration des cinq années, à le maintenir à perpétuité. Cette mesure fut décidée dans une assemblée qui se tint à Bar-le-Duc, le jeudi 23 avril 1422, où treize des gentilshommes (3), qui avaient pris part à sa création en 1416, s'engagèrent tant en leur nom, qu'au nom de leurs associés absents, à observer les statuts adoptés en 1416.
Les seuls changements introduits dans les règlements existants portèrent sur la dénomination, la marque distinctive et les jours de réunion de l'ordre. Dans cette assemblée, les chevaliers choisirent pour patron saint Hubert, sous l'invocation duquel ils placèrent l'institution. Ils décidèrent qu'au lieu du lévrier, ils porteraient au bas du collier, un imaige d'or du dict sainct, pendant sur la poitrine, et ung pareil imaige brodé sur leurs habillements. La Journée ou réunion annuelle qui jusque-là s'était tenue à la Saint-Martin (11 novembre), fut fixée au jour de la fête de saint Hubert. Ces dispositions furent approuvées le même jour par Louis de Bar, qui, à la requête des chevaliers assemblés, lit apposer son sceau aux lettres contenant le résultat de leur délibération.
Malgré les graves événements qui suivirent la cession du duché de Bar, faite vers ce temps par le cardinal à René d'Anjou, son petit neveu et ceux qui résultèrent de la réunion du Barrois à la Lorraine, après la mort de Charles II, l'Ordre de Saint-Hubert paraît s'être perpétué sous le règne de René et sous ses successeurs. On manque toutefois de données sur sa composition et sur ses actes. Ses archives mêmes ne fournissent aujourd'hui aucune indication précise sur son existence de 1422 à 1597. A la fin de cette longue période, on retrouve l'institution dans les conditions d'une organisation régulière. Elle était alors régie par un règlement révisé dans le cours de l'année 1597, et qui indique une existence plus ancienne de l'Ordre.
Depuis l'occupation de la Lorraine par les Français en 1552, la ville de Bar avait cessé d'être le lieu ordinaire de la résidence de ses ducs, et Nancy était devenu de fait la capitale des deux duchés. La plus grande partie des familles appartenant à la chevalerie du duché de Bar, qui avaient été attachées au service des ducs, étaient éteintes ou avaient suivi le prince en Lorraine. Aucune de celles qui avaient pris part à la création de l'Ordre en 1416 et 1422 n'y comptait de membres en 1597. Les chevaliers en fonctions alors étaient des hommes notables du pays, mais qui ne se trouvaient pas en position de remplir les conditions imposées par les statuts de 1416, pour la répression des voies de fait. Les désordres du reste étaient devenus, par suite des progrès de l'organisation judiciaire, beaucoup plus rares dans le pays.
Dans les nouveaux règlements arrêtés en 1597, on remarque des dispositions qui consacraient un privilège que l'Ordre paraît avoir possédé dès ce temps, de se livrer à une chasse au lévrier, la veille et le jour de la fête de saint Hubert, son patron, et à laquelle tous les membres étaient appelés à se trouver sous peine d'ung escu d'amende. Ils étaient également obligés, sous la même peine, de nourrir au moins vng lévrier ; ils avaient du reste la faculté d'en élever autant qu'ils le voulaient.
L'origine de ce privilège, que l'Ordre de Saint-Hubert devait tenir de l'autorité ducale du Barrois, était inconnue à cette compagnie, qui, en l'absence de titres réguliers, la faisaient remonter, avec apparence de raison, aux premiers temps de son organisation.
Charles III, duc de Lorraine et de Bar, étant à Bar le jour de la Saint-Hubert 1605, les membres de l'Ordre le prièrent, au retour de la chasse, de leur confirmer ce privilège pour en jouir ainsi qu'eux et leurs prédécesseurs en avaient joui jusque-là. Le prince, sur l'avis de son conseil, permit par un décret expédié le lendemain, 4 novembre, au bas de la requête, aux chevaliers de l'Ordre, de chasser aux lévriers, la veille et le jour de la fête de saint Hubert, à charge de respecter les lieux réservés pour son plaisir. La décision fut rendue en présence du seigneur de Vaubecourt, grand gruyer de Barrois, et de Bardin, maître des requêtes ordinaires.
Les chevaliers de Saint-Hubert étaient aussi, dès ce temps, dans l'usage de faire chanter, le jour de la fête du patron de l'Ordre, une messe à laquelle ils étaient tenus d'assister sous peine d'amende (4) : à la suite de la messe, ils se livraient à la chasse au lévrier dans les environs de Bar-le-Duc, s'abstenant d'ailleurs d'aller dans les lieux réservés par le duc.
En 1623, tous les privilèges de chasse ayant été révoqués par un édit général, les chevaliers de Saint-Hubert firent, contre celle ordonnance, des protestations qui furent reçues par le bailliage de Bar; la sentence est du 24 février. L'Ordre fut maintenu dans la jouissance de son droit (5).
En 1661, Charles IV,duc de Lorraine et de Bar, qui, à l'exemple de ses prédécesseurs, manquait rarement d'assister aux cérémonies de l'Ordre, s'étant rendu à Bar, quelques jours avant la fête, confirma, par un décret expédié en conseil le 27 octobre, celui de Charles III. Le même duc, accompagné des princes de Vaudemont et de Lislebonne, ses fils, assista, pour la dernière fois, à la messe solennelle célébrée le jour de Saint-Hubert, 3 novembre 1668. Il alla à l'offrande, et après la cérémonie, déjeuna avec les chevaliers qui eurent l'honneur de le suivre à la chasse.
Peu de temps après, ce prince se vit obligé de se retirer avec ses troupes en Allemagne, d'où il ne revint pas. Charles V, qui lui succéda, fut absent de ses états toute sa vie. Pendant cette espèce d'interrègne, l'Ordre de Saint-Hubert se ressentit des malheurs de la guerre. La plupart des titres furent dispersés ou enlevés, après avoir épuisé inutilement les autres moyens; mais on ne put en recouvrer qu'un très-petit nombre. Pour y parvenir, il fallut recourir à la voie du Monitoire.
Peu d'années après l'avènement de Léopold, MM. de Beauvau et de Martigny, grands veneurs de Lorraine et Barrois, accordèrent à l'Ordre la permission de chasser. Leurs lettres sont des 3 novembre 1704 et 28 octobre 1705. Le duc lui accorda le 12 juin 1718, un décret confirmatif de celui de Charles III.
François III, fils et successeur de Léopold et depuis empereur d'Allemagne, sous le nom de François Ier, fut presque continuellement absent jusqu'à la cession de ses états.
Malgré l'édit de Meudon du 18 janvier 1737, qui, à l'avènement de Stanislas dans les duchés de Lorraine et de Bar, confirmait tous les droits et privilèges de ces états, les chevaliers de Saint-Hubert se pourvurent au Conseil du roi de Pologne pour obtenir la confirmation de leur privilège. Se croyant suffisamment autorisés par cet édit, ils continuèrent de chasser dans la banlieue de la ville de Bar, jusqu'en 1754, époque à laquelle ayant été rencontrés chassant dans le bois de Mensonge (6), le garde chasse fit un rapport contre eux. En vertu de cet acte ils furent assignés à la requête du procureur du Roi en la maîtrise des eaux et forêts, pour être condamnés à l'amende. Mais ils recoururent de nouveau au roi de Pologne, et sur leur recours. en mars 1755, M. de Lignéville, grand veneur de Stanislas, accorda à l'Ordre de Saint-Hubert, par une lettre du 23 octobre suivant, la permission de chasser.
En 1766, après la mort du roi de Pologne, duc de Lorraine et de Bar, Louis XV, roi de France, confirma les privilèges des deux duchés. L'Ordre de Saint-Hubert se trouvait compris dans cette confirmation; il se pourvut néanmoins près du prince de Lamballe, grand veneur de France, qui, par une lettre du 24 octobre 1767, lui continua ses anciens privilèges. Le duc de Penthièvre lui accorda la même faveur par une lettre du 20 octobre 1776.
Bien que l'Ordre de Saint-Hubert n'eût d'autres ressources que celles qui provenaient de l'exécution de ses règlements et des sommes données par ses membres, il n'en parvint pas moins à suffire à ses dépenses et même à réaliser quelques capitaux qui lui permirent de consacrer la mémoire de l'institution par des oeuvres de bienfaisance. Au mois de septembre 1781, les grand veneur et chevaliers résolurent de donner une somme de 1,500 fr. qu'ils avaient alors en caisse, soit à la maison de charité établie à Bar, soit à l'hôpital de cette ville. Sur leur requête le Roi, par un arrêt rendu en conseil d'Etat à Versailles, le 19 juillet 1782, autorisa l'Ordre à exécuter ce projet, mais le 21 août 1785, il se décida à fonder, à l'hôpital de Bar, un lit et pension pour l'entretien d'un pauvre au lieu de la donation de 1,500 fr., « qui devait être faite à « cette maison, et il chargea le même jour, le secrétaire de régler avec les commissaires, nommés par la Chambre des comptes, les conditions de la fondation. Celle-ci fut consommée le 24 août, moyennant 3,000 fr. » versés le même jour, et confirmée par de nouvelles lettres patentes du Roi, données à Versailles au mois de janvier 1786. La place fondée fut occupée, à partir du 14 novembre 1787, par un ancien orfèvre de Bar-le-Duc, septuagénaire, nommé Pierre Devaux, que la Chambre des Comptes y nomma sur la présentation de l'Ordre (7).
Des circonstances imprévues mirent, en 1783, l'Ordre de Saint-Hubert dans la nécessité d'ajouter aux règlements de 1597, déjà révisés et modifiés en 1714, Les nouveaux statuts furent arrêtés le dimanche 2 novembre 1783, veille de la Saint-Hubert, dans une assemblée où se trouvèrent le grand maître, le grand veneur, les conseillers et chevaliers, réunis en chapitre, en vertu d'une convocation expresse. Un fait remarquable qui résulte du préambule du règlement de cette année, c'est que l'Ordre ignorait alors l'époque précise de sa fondation, que l'on y fait remonter au temps des comtes de Bar. Cette circonstance prouve que les titres de 1416 et 1422, dont il existe aujourd'hui des copies dans les archives, ne s'y trouvaient point en 1783, et qu'ils n'y ont été réintégrés que depuis cette dernière époque,
On donna en 1619 aux chefs de l'Ordre le titre de grands maîtres. Le grand maître devait présider toutes les assemblées. Il fallait, pour être appelé à ces fonctions, résider à Bar-le-Duc. Il y eut depuis 1597, un conseil dont les membres étaient élus. Le nombre des membres de l'Ordre paraît avoir varié. Du reste, il a été, à toutes les époques, généralement composé de personnes nobles. Aux termes de l'art. 25 des statuts de 1714, il ne pouvait y être admis que des personnes de condition noble, ou de l'état ecclésiastique. Une délibération du 3 novembre 1775 exigea, pour être reçu, quatre degrés de noblesse. Cette délibération réduisit le nombre des chevaliers à 25, non compris le grand maître et l'aumônier. Il fallait pour être admis, professer la religion catholique, apostolique et romaine. Aux termes de l'art. 1er des statuts de 1714, les chevaliers étaient obligés, si le besoin l'exigeait, de prendre les armes pour la défense de la religion.
Malgré ces dispositions, l'Ordre avait perdu de fait, depuis longtemps, le caractère chevaleresque que lui avaient donné ses premiers statuts en 1416. Cette institution, pendant le XVIIIe siècle et dans les derniers temps de son existence, n'était plus guère qu'une association composée de personnes choisies et dont l'existence avait principalement pour but et pour effet de resserrer les noeuds de l'amitié entre ses membres.
Bien qu'elle eût conservé l'usage de célébrer, par des cérémonies religieuses et des exercices de chasse, la fête de son patron, il paraît que les dispositions des statuts qui imposaient aux associés l'obligation d'y prendre part, n'étaient point observées avec rigueur. Il résulte en effet des documents contemporains qu'il y avait, en 1781, peu de chasseurs dans l'Ordre.
Outre les chevaliers titulaires, il y eut dans la seconde moitié du même siècle, des chevaliers d'honneur. Ce titre fut conféré en 1783 à Jacques de Choiseul, marquis de Stainville, maréchal de France, commandant en chef dans les duchés de Lorraine et de Bar, et en 1787, à Louis, prince de Nassau, comte de Saarbruck, et de Saarwerden. L'admission de ces deux personnages dans l'Ordre de Saint-Hubert fut un hommage rendu aux représentants, alors existants, de deux familles qui avaient fleuri dans le Barrois pendant les XIVe, XVe et XVIe siècles.
Le prince de Nassau-Saarbruck fut installé le 23 octobre 1787, au château de Jeegersberg, parles soins de M. de Crolebois, envoyé des cours de Trêves et de Nassau-Saarbruck, en vertu des pouvoirs donnés à ce dernier par l'Ordre de Saint-Hubert. D'après le désir exprimé par le prince, l'Ordre s'attacha aussi Jean-Frédéric d'Hommerer, écuyer, président en chef de son conseil, en qualité d'interprète, et Léonard de Furstenrecht, son grand écuyer, et grand veneur du pays, en qualité de hérault d'armes. Ces derniers figuraient l'un et l'autre parmi les officiers de l'Ordre non chevaliers, admis en 1787.
Nous n'étendrons pas davantage les détails sur l'Ordre de Saint-Hubert du duché de Bar. Nous nous bornerons à rappeler que les événements de la première révolution s'opposèrent pendant les dernières années du XVIII siècle à l'exécution des statuts, et que son existence ne se prolongea guère au-delà de 1790. Cependant en 1817 quelques-uns de ses membres, encore existants alors, tentèrent de faire revivre cette institution : il fut question de la rétablir en France sur des bases moins restreintes que les limites de l'ancien duché de Bar, sous le titre général d'Ordre de Saint-Hubert. Des actes de ce temps prouvent que Louis XVIII voulut bien reconnaître l'Ordre et l'honorer de sa protection. Ce monarque lui donna même pour grand maître le duc d'Aumont, son premier gentilhomme. On trouve dans les archives de l'Ordre plusieurs lettres de ce dernier qui constatent l'existence d'un projet de réorganisation de l'association ; mais l'Ordre cessa complètement d'exister depuis, dans la circonscription de l'ancien duché de Bar, par suite de l'extinction de ses membres dont le dernier, M. le chevalier de Marne, est mort à Bar-le-Duc le 19 novembre 1853.
Insignes connus de l'Ordre de Saint-Hubert.
DÉCORATIONS.
Les membres de l'association du Lévrier durent porter d'abord un lévrier blanc ayant au cou un collier d'or sur lequel étaient écrits les mots TOUT VNG.
On ne retrouve aujourd'hui aucun monument métallique dont la forme et l'empreinte prouvent qu'il ait servi de marque distinctive de l'Ordre, à cette époque.
1422.
En arrêtant, le 23 avril de cette année, que l'Ordre serait maintenu à perpétuité sous l'invocation de saint Hubert, les membres décidèrent que, au lieu du lévrier, ils porteraient au bas du collier et pendant sur la poitrine, l'image d'or de saint Hubert. Ils devaient porter aussi une image du même saint brodée sur leurs vêtements.
1600 à 1790.
M. Monnier, propriétaire à Nancy, l'un des plus riches collectionneurs de nos monuments numismatiques lorrains, possédait deux pièces métalliques de modules différents, qui ont certainement appartenu, soit à l'Ordre de Saint-Hubert du Barrois, soit à des membres de cet Ordre. « Ces deux pièces, écrivait M. Monnier, dans une lettre du 12 septembre 1857, sont des empreintes de sceaux ou des médailles : elles sont en plomb et paraissent de la même époque et du même graveur : je n'ai pu voir s'il y avait une bélière. La plus grande pèse 9 grammes et la petite 1 gramme 56. Diamètre : 22 millimètres pour la grande ; 13 pour la petite. Vous remarquerez, ajoute-t-il, la forme des croisettes qui accompagnent les barbeaux et qui ressemblent un peu aux croix de Lorraine. Les lettres sont modernes : c'est donc dans les derniers temps de l'Ordre que mes deux pièces ont été gravées. »
Ces deux pièces ne seraient-elles pas des empreintes, ou fac-similé en plomb, du revers des deux décorations connues et de grandeur différente, de l'Ordre de Saint-Hubert ?
1785.
La marque distinctive de l'Ordre consistait alors en une croix pattée, émaillée de blanc, brodée d'or, au centre de laquelle il y avait, dans un cor de chasse d'or, d'un côté, une médaille de sinople où l'on
voit, en relief et en or, l'image de saint Hubert, prosterné devant un Christ fiché entre les bois d'un cerf, et de l'autre les armes du duché de Bar, sur un fond d'azur, avec cette inscription ORDO NOBILIS S.
HUBERTI BARRENSIS. Elle se portait suspendue à un ruban vert moiré, liseré de rouge (8).
SCEAUX DE L'ORDRE.
Le grand sceau qui s'apposait aux lettres de nomination des membres de l'Ordre, est en cire rouge;
son empreinte représente les branches d'une croix pattée sur laquelle on remarque, dans un cercle formé par un cor de chasse, la figure de saint Hubert, prosterné devant un cerf portant un crucifix entre les bois. Derrière le saint on aperçoit la tête de son cheval. On lit en légende l'inscription suivante : SIGILLUM ORDINIS NOBIUS SANCTI HUBERTI BARRENSIS. Le tout dans un plus grand cercle perlé. Le contre-sceau représente l'écu du duché de Bar, sur un manteau ducal, surmonté de la couronne ducale. On lit autour les mots : DUCES BARRI INSTITUERUNT ET ORNAVERUNT.
TIMBRE SEC.
L'empreinte du timbre sec que nous avons trouvée sur un acte de 1785, est absolument identique, pour la forme, le type et l'inscription, au contre-sceau décrit ci-dessus.
DÉCORATION EN BRODERIE.
La décoration que les membres de l'Ordre portaient sur leurs vêtements suspendue à une chaîne formée de chaînons et des lettres S. H. représentait une croix pattée rayonnante, portant au centre un médaillon semblable à celui du sceau.
1787.
MÉDAILLE COMMÉMORATIVE DE LA FONDATION D'UN LIT A L'HOSPICE DE BAR-LE-DUC
Cette médaille, dont on a parlé plus haut dans la notice, devait être portée habituellement par les personnes en possession de la place fondée à l'hôpital de Bar, aux frais de l'Ordre de Saint-Hubert en 1787. Pierre Devaux, à qui elle dut être remise en suite de son admission à cette place, paraît être le seul qui profita de cette fondation. On ne remarque dans les archives de l'Ordre aucun acte qui prouve qu'il ait eu un successeur.
Dans l'énumération des dépenses de l'Ordre, de 1784 à 1789, on en trouve une de 14 sols 9 deniers, pour cuivre, laiton, façon et chaîne de la médaille de Devaux, et 2 livres 8 sols, pour gravure de ladite médaille, par Maillard. La nature de ces dépenses porte à penser que la médaille donnée à Devaux, est la seule qui ait été fabriquée au compte de l'Ordre.
1810.
Le duc d'Aumont, premier gentilhomme du roi Louis XVIII, à qui les membres de l'Ordre encore vivants déférèrent le titre de grand maître, nomma le duc de Saint-Ange commissaire général et secrétaire perpétuel de l'Ordre. Il reste de ce temps un timbre dont on remarque l'empreinte sur une lettre du duc d'Aumont du' 12 mai 1816. Ce sceau ou timbre est celui du commissaire général, secrétaire perpétuel alors en fonctions (le duc de Saint-Ange). Aucun des emblèmes particuliers à l'ancien Ordre de Saint-Hubert ne se trouve sur ce sceau. On y lit dans un écusson entouré de deux palmes, et surmonté de la couronne royale, l'inscription : ORDRE NOBLE DE S.HUBERT, et autour du sceau, les mots : LE COMMISSAIRE GÉNÉRAL ET PERPÉTUEL.
(1) La guerre soutenue par Charles II contre Edouard III a été fatale à plusieurs des villages des environs de Bar-le-Duc. Le 2 mai 1414, des maisons furent incendiées à Savonnières-devant-Bar, par le duc de Lorraine et ses complices, qui brûlèrent aussi le même jour le village de Louppy-le-Château. Des quittances ou décharges d'impôt furent accordées pour 6 ans, à ceux des habitants de Savonnières dont les maisons avaient été arses. De semblables décharges furent accordées, aussi vers le même temps, aux villages de Rambercourt-sur-Orne, Tronville, Fains, les Marais, Condé, Belrain, Ville et Varney. On est fondé à penser que ces dernières exemptions eurent également pour motif les désastres de la guerre.
(2) Voici la liste de ces personnages, d'après le titre de la fondation où ils sont dénommés :
Thiébaut de Blamont; Philibert, seigneur de Beffroimont ; Eustache de Conflans; Richard des Hermoises; Pierre de Beffroimont, sire de Ruppes; Regnault du Châtelet, et Erard du Châtelet, son fils; Mansart d'Esne; Jean, seigneur d'Orne; Gobert d'Apremont ; Joffroi d'Orne ; Jacques d'Orne ; Philippe de Norroy ; Olry de Landre ; Jean de Laire; Jean de Seroncourt; Colard d'Ottenges; Jean de Beffroimont, seigneur de Fontois; Jean de Malbeth ; Joffroi de Bassompierre, chevaliers; Jean, seigneur de Rodemach; Robert de Sarrebruck, seigneur de Commercy; Edouard de Grandpré; Henri de Breux; Wary de Lavaulx; Joffroy d'Apremont; Jean des Hermoises ; Robert des Hermoises; Simon des Hermoises; Franque de Houze ; Olry de Boulanges; Henri d'Epinal; François de Sorbey; Jean de St-Lou (Loup) ; Hugues de Mandres ; Huart de Mandres; Philibert de Doncourt; Jean de Sampigny ; Colin de Sampigny ; Alardin de Mouzay ; Hanse de Nivelein ; Le Grand Richard d'Apremont; Thiéry d'Autel ; Thomas d'Ottanges; Jacquemin de Nicey, et Jacquemin de Villers, écuyers.
(3) Ces treize gentilshommes sont : Eustache de Conflans, Pierre de Beffroimont ; Regnault du Châtelet, Erard du Châtelet; Jean d'Orne; Philippe de Norroy ; Jean de Rodemach ; Robert de Sarrebruck ; Jean des Hermoises ; Simon des Hermoises ; François de Sorbey ; Jean de St-Loup et Arnould de Sampigny.
(4) Les chevaliers ont fait célébrer leurs messes solennelles dans différentes églises de Bar-le-Duc : dans celle des Augustins, dans l'église collégiale de Saint-Pierre, aujourd'hui Saint-Etienne, dans la chapelle de Notre-Dame-de-Paix, et enfin dans l'église de Saint-Antoine, ancienne chapelle des religieux Antonistes, détruite depuis 1790.
(5) La sentence du bailliage, dont il existe une copie dans les archives de l'Ordre de Saint-Hubert, prouve que les habitants de la ville haute étaient alors, et de temps immémorial, en possession de l'usage d'aller a la chasse. Ils protestèrent dans la même audience contre l'édit du Duc, comme portant atteinte à leurs privilèges et franchises. Ce fut messire Claude Bretel, gouverneur de la ville haute, qui les représenta dans cette cause; il était assisté de Collot, avocat au bailliage et syndic des habitants. L'Ordre de Saint-Hubert y fut représenté par noble homme François Pouppart, assisté de Crocq, avocat.
(6) Aujourd'hui Massonge, ancienne forêt domaniale, pies de Bar-le-Duc.
(7) Dans l'acte de présentation en date du 28 octobre 1787, l'Ordre décida que Pierre Devaux, et ceux qui occuperaient après lui la place fondée à l'hôpital de Bar-le-Duc, seraient tenus de porter habituellement une médaille en cuivre, attachée à une chaîne de même métal, représentant d'un coté l'effigie de saint Hubert prosterné devant la croix qui lui apparaît dans les bois d'un cerf, et portant de l'autre côté cette inscription : Ex pielate ordinis nobilis sancti Huberti Barrensis.
Cette médaille devait être remise, par les soins de l'Ordre, à l'individu chargé de la porter.
(8) On voit, par une lettre du 8 novembre 1785, signée par un membre de l'Ordre, que la croix coûtait alors trois louis et demi, sans le ruban, a 32 sols l'aune.
HISTOIRE des ORDRES
MILITAIRES ou DES CHEVALIERS
1721
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