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L'hôpital de Blâmont du XVIème siècle à nos jours


Les origines

Les origines remontent aux années 1560. A cette époque, Chrétienne de Danemark, duchesse dépossédée de son trône, menait la grande vie à Blâmont. Il s'agissait à l'origine d'une maison de charité distribuant des aumônes aux nécessiteux, en donnant la passade aux passants qui passaient. Il s'agissait donc surtout d'offrir le souper, un lit et un déjeuner aux pauvres voyageurs, et éventuellement de les soigner.
Bref, une sorte de gîte d'étape, comme on en voit encore sur certains chemins où passent les pèlerins.
Marguerite de Gonzague transforma ce bureau de charité en hôpital vers 1625. Cet hôpital aurait été créé près du pont, au bord de la Vezouze. On l'installa dans une ancienne école devenue trop petite.

Marguerite de Gonzague, duchesse douairière de lorraine... à Blâmont
Marguerite de Gonzague était la fille du duc de Mantoue et surtout la seconde épouse du duc de Lorraine Henri Il. Peu après la mort d'Henri II, elle dut laisser la place à Charles IV en 1625. Elle devint dès lors duchesse douairière et put, comme Chrétienne de Danemark au XVIe siècle, se retirer à Blâmont. Le Comté de Blâmont était alors en effet attribué aux souveraines et princesses de Lorraine qui ne pouvaient régner.
Elle s'installa au palais qui jouxtait le château et fit presque simultanément, vers 1625-1627, trois fondations qui marquèrent la ville :
- l'hôpital
- l'école pour filles des religieuses de Notre-Dame
- le couvent des capucins
Marguerite de Gonzague mourut à Nancy le 7 février 1632, juste avant que la Lorraine ne soit ravagée par la guerre de Trente Ans, qui débuta en nos contrées dès l'année suivante.

Comme le reste de la ville, l'hôpital fut sans doute endommagé lors du siège de 1636, et ses archives furent brûlées en 1643 par les Suédois. Depuis, il ne servit qu'à abriter le curé, le presbytère ayant été incendié en 1636. Ses revenus servaient à soulager quelques pauvres, malades et passants.

La nouvelle implantation au début du XVIIIème siècle

Le retour du duc Léopold en Lorraine en 1698 ouvrit une ère de prospérité. La reconstruction de Blâmont battait son plein dans les années 1720, comme en témoignent les dates conservées sur plusieurs maisons.
Entre temps, les bourgeois s'étaient approprié l'hôpital, alors considéré comme appartenant à la ville. Dès lors l'activité hospitalière profita directement aux habitants de Blâmont. C'est en 1726 que l'hôpital fut transféré à cet emplacement. C'est de cette époque que datent la chapelle et le bâtiment central, dont la façade arrière est restée inchangée.
Au milieu du XVIIIème siècle, il fallu agrandir les bâtiments, ils furent prolongés par deux ailes s'étendant jusqu'à la rue. C'est ainsi qu'a été constitué cet ensemble harmonieux de bâtiments formant un U. L'aile de droite date toujours de cette phase d'agrandissement.

Une maison religieuse

Un hôpital au XVIIIème siècle n'accueillait pas seulement les malades. D'ailleurs la plupart des malades se faisaient soigner chez eux s'ils en avaient les moyens. A l'hôpital, on trouvait surtout des vieillards, des pauvres, des orphelins... L'hôpital était l'asile de tous les marginaux.
Pour eux, on créait une société idéale tournée vers Dieu. Les offices étaient réguliers, et la chapelle était au centre des bâtiments pour montrer l'importance de la religion. Il était difficile de sortir, et les comportements déviants étaient réprimés. On ne pouvait rester à l'hôpital qu'en échange d'efforts pour se comporter en bons chrétiens.
Le jeu en valait la chandelle : il n'y avait alors ni assurance maladie, ni chômage, ni retraite, et les personnes exclues de l'hôpital risquaient de se retrouver réduites à l'état de mendiants...
Pour encadrer les «  pauvres malades » qui résidaient à l'hôpital, il fallait des religieux ou des religieuses. D'abord, on fit appel aux soeurs Vatelotes.

Les soeurs vatelottes
Cet ordre est désormais appelé soeurs de la doctrine chrétienne. Elles furent instituées par Jean-Baptiste Vatelot et Claude Varnerot dans le Toulois au début du XVIIIème siècle. Au milieu du siècle, alors que disparaissait Vatelot en 1748, une trentaine de maisons avaient déjà été fondées. Une centaine devaient suivre durant les 40 années qui séparent la mort du fondateur de la Révolution de 1789. Ces soeurs étaient surtout spécialisées, dès cette époque, dans l'enseignement. Leurs établissements étaient modestes, et le nombre de soeurs toujours très réduit. Leur activité hospitalière resta marginale.

En 1771, ce furent les soeurs de Saint-Charles qui prirent le relais à la tête de l'hôpital. Trois soeurs y furent envoyées, une comme supérieure et économe, la seconde comme pharmacienne, et la troisième comme maîtresse d'école. Elles durent quitter leur nouvelle maison dès 1792, puis y revinrent à partir de 1800.

Les premières soeurs de Saint Charles
Cet ordre religieux, fondé à Nancy au XVIIème siècle, eut un grand succès en Lorraine, surtout au XVIIIème siècle. Ces religieuses s'occupaient parfois d'écoles ou de bureaux de charité ; mais elles se firent surtout connaître pour leurs hôpitaux. Le plus souvent, elles furent appelées par les municipalités pour reprendre en main des petits hôpitaux déclinants.
Dans les maisons religieuses les plus petites ou nouvellement fondées, on envoyait trois religieuses, nombre considéré comme minimum pour former une communauté viable.
Les trois soeurs envoyées à Blâmont étaient:
- soeur Marie Badel, supérieure, qui devint directrice du Coton de Lunéville après avoir été chassée de Blâmont sous la Révolution ; elle y mourut en 1812;
- soeur Monique, pharmacienne, qui termina sa carrière supérieure à Gondrecourt
- soeur Agnès Grandmaire, enseignante, qui revint après la Révolution à Blâmont.

Avec les guerres révolutionnaires, les blessés affluèrent. Il fallut augmenter le nombre de lits, qui passa de 9 à 24 en 1793.

L'essor du XIXème siècle

L'hôpital traversa une passe difficile au début du XIXème siècle, mais il fut sauvé par quelques donateurs, comme l'abbé Fidry, qui avait été, avant la révolution, chanoine régulier.
A partir de 1820, l'hôpital, toujours dirigé par les soeurs de Saint-Charles, fut aidé par la ville qui forma un conseil d'administration présidé par le maire.

L'abbé Pierre François Edme Fidry
Né à Metz en 1745, il fit profession dans la congrégation des chanoines réguliers de Notre-Sauveur (implantée notamment à Domèvre) en 1763. Jusqu'en 1793, il enseignait dans la prestigieuse Ecole Royale Militaire de Pont-à-Mousson, dont il fut un des derniers directeurs. Il se rendit alors à Domèvre... pour s'y marier en 1794 !
Mais il devint rapidement veuf et revint à des activités plus religieuses. En 1802, alors âgé de 57 ans, il ouvrait à Blâmont une classe de latinité. Il se rapprocha ensuite des religieuses de l'hospice et fut leur aumônier.
Il devint bienfaiteur de l'hôpital dès 1817 : il acheta alors au boucher Pierre Meisse un pré de 40 ares situé aux Paquis, qu'il donna immédiatement à l'hôpital; ce dernier le possède encore aujourd'hui. Lorsqu'il mourut à Blâmont le 24 mars 1826, âgé de 80 ans, il laissait derrière lui 600 francs à l'hospice, et autant au bureau de charité.

La prospérité de Blâmont (1830-1860) fut l'époque où l'hôpital fut le plus florissant. Blâmont était alors une ville active de 2600 habitants. Dans les années 1840, il y avait 14 lits à l'hôpital, moitié pour les hommes, moitié pour les femmes. On joignit alors à l'hôpital un pensionnat pour une vingtaine d'orphelines. Sept soeurs s'occupaient alors de l'établissement, grâce aux efforts soeur Denise Granier, supérieure de 1845 à sa mort en 1872.
On procéda également à de nouveaux agrandissements. La façade de l'aile centrale fut remaniée, avec la chapelle, en 1864-1865. Ce furent Thomas frères, entrepreneurs en maçonnerie à Blâmont, qui se chargèrent des travaux, sous la direction de l'architecte blâmontais Charles Bailly, ce qui coûta 15.000 francs. En 1867, on édifia un clocheton de bois équipé de trois cloches, au dessus de la chapelle. La même année, on fit refaire l'horloge, fournie par Ungerer Frères, horlogers à Strasbourg.

Les atteintes des guerres du XXème siècle

Les deux guerres mondiales firent affluer les blessés à l'hôpital de Blâmont. Le 8 août 1914, les Allemands envahissaient la ville et l'hôpital fut immédiatement transformé en ambulance militaire. Les soeurs durent prendre en charge ces nombreux blessés, tout en secourant les Blâmontais. Le 14 août, les Français reprennent la ville... pour l'évacuer de nouveau dès le 20, laissant la place à l'occupation allemande.
L'hôpital continue de fonctionner jusqu'au 23 juillet 1918, date à laquelle les Allemands font évacuer Blâmont.
Les religieuses ne pourront revenir qu'après l'armistice. Une grande cérémonie aura lieu le 22 août 1919 dans la cour d'honneur de l'hôpital, afin de récompenser, en présence du maire et du sous-préfet, le comportement exemplaire de la supérieure de l'hôpital, soeur Léopold.
Le nombre de lits de 1940 (45) doubla pour totaliser une centaine en 1944. Le 8 septembre 1944, les Allemands réquisitionnèrent l'hôpital pour en faire une ambulance provisoire.
La première guerre avait endommagé les bâtiments ; mais ce fut surtout la seconde qui causa le plus de dégâts; trois bombes détruisirent le clocheton, firent tomber la toiture et ébranlèrent sérieusement l'édifice. Les occupants des lieux durent se réfugier dans les caves; à la mi-novembre, une bombe éclata à l'entrée d'une d'entre elles sans faire de victimes. Le 18 novembre 1944, l'intense bombardement cessait enfin : Blâmont était libéré.

L'après-guerre

Les bâtiments avaient beaucoup souffert, ayant reçu 33 obus. Le maire Jean Crouzier évacua les patients vers d'autres hôpitaux. Ne restèrent que quatre soeurs et quelques vieillards employés aux travaux de la ferme. Cette situation perdurant, la Maison-Mère de Nancy rappela les soeurs en janvier 1949.
Les bâtiments furent pourtant remis en état. L'aile droite, relativement épargnée, fut restaurée en 1948. Le bâtiment central et sa chapelle le furent en 1953. Le décor fut simplifié, mais la chapelle reçut de beaux vitraux des ateliers Ott Frères.
L'aile de gauche, trop endommagée, fut entièrement reconstruite, selon un plan qui s'intègre bien à l'ensemble, de 1958 à 1960.

L'atelier Ott frères
Cet atelier a été fondé à Strasbourg en 1852. Il joua une grande importance dans la décoration des églises alsaciennes et mosellanes (pays de Bitche) dès le XIXème siècle. L'atelier existe encore aujourd'hui.

Le déplacement des activités...

En 1987, commença la construction d'un nouveau bâtiment pour abriter l'hôpital. Ce bâtiment, nommé le couarail, fut édifié à l'arrière de l'hôpital, dans d'anciens jardins.
A la même époque, les hôpitaux de Blâmont, Cirey et Badonviller se regroupèrent pour former la structure «  3 H Santé ». L'activité hospitalière put ainsi perdurer dans ces trois petites structures, désormais recentrées sur l'accueil des personnes âgées en long séjour. Il fut un temps prévu d'aménager les anciens bâtiments ; mais ils furent finalement confiés, au début des années 1990, au Carrefour d'Accompagnement Public Social.


Eléments de décor et mobilier répertoriés par les services de l'inventaire du patrimoine :
A. Un autel XVIIIème et son antependium XIXème
B. Un christ en croix dans un tableau XIXème
C. Quatre reliquaires en bois dorés XIXème
D. Une statue de la vierge en bois peint XVIIème ou XVIIIème (disparue)
E. Une statue de la vierge en bois doré XIXème

Eléments de décor non répertoriés :
A. Vitraux Ott Frères, Strasbourg, 1955
B. Bancs en chêne XIXème
C. Ensemble de chasubles probablement XIXème
D. Importante statue en bois polychrome, probablement de la vierge, probablement XVIIIème
E. Deux statues en pierre d'époques inconnues dans le jardin à l'arrière de la chapelle
 

Rédaction : Cédric Andriot

 

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