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Usages locaux de Meurthe-et-Moselle - 1933


Préfecture de Meurthe-et-Moselle
Usages locaux à caractère agricole
Ed. Nancy - 1933

CHAMBRE D'AGRICULTURE DE MEURTHE-ET-MOSELLE
Nancy, le 27 mai 1933
Secrétariat : 26, Rue de la Pépinière, Nancy.

Le Président de la Chambre d'agriculture départementale à Monsieur le Préfet de Meurthe-et-Moselle
Monsieur le Préfet,
Aux termes de l'article 3 de la loi du 3 janvier 1924 créant les chambres d'agriculture, ces établissements publics sont appelés notamment à «  grouper, coordonner, codifier les coutumes et usages locaux à caractère agricole qui peuvent ordinairement servir de base aux décisions judiciaires ». Et la loi ajoute: «  les usages codifiés seront soumis à l'approbation du Conseil général ; un exemplaire en sera déposé et conservé au secrétariat des mairies pour être donné en communication à ceux qui le requerraient ».
Cette attribution d'ordre judiciaire et consultatif, dévolue aux chambres d'agriculture, est due à l'initiative de M. le Senateur Carrère qui la justifiait ainsi : «  .lorsqu'un litige naît dans une exploitation agricole, il est souvent nécessaire d'aller au chef-lieu de canton soit consulter le Juge de paix, soit demander à une personne compétente des détails sur les usages que le litige met en oeuvre. Nous avons pensé que si les intéressés pouvaient trouver dans les Mairies les usages codifiés par les chambres d'agriculture, avec l'approbation du Conseil général, la conciliation entre les divers éléments de l'exploitation rurale s'en trouverait hâtée ».
Notre collègue envisageait donc la solution amiable des litiges d'ordre individuel qui pourraient surgir dans l'exploitation agricole entre voisins, entre patron et ouvrier, ou encore entre propriétaire et fermier.
La Chambre d'Agriculture de Meurthe-et-Moselle a estimé que cette initiative aurait une portée plus grande que celle envisagée. En effet le législateur a une tendance marquée à renvoyer aussi souvent que possible aux traditions, aux coutumes, aux usages, plutôt que d'imposer des solutions uniformes pour l'ensemble du pays.
Les usages locaux sont le reflet de l'activité agricole propre à chaque région. Ils trouvent leur justification dans une application immémoriale à laquelle des générations de cultivateurs se sont toujours volontairement soumises parce qu'ils apparaissaient, - et qu'ils apparaissent toujours - comme une création spontanée de l'activité agricole.
Jusqu'à maintenant, ces usages se sont perpétués par la tradition orale. Mais la tradition orale a contre elle le défaut d'incertitude : elle risque de laisser une trop grande place à l'appréciation des intéressés, surtout lorsque l'usage n'est pas nettement défini. C'est pour obvier à ces inconvénients que la Loi a chargé les Chambres d'agriculture de définir les usages locaux agricoles et de les codifier. Il va sans dire que cette codification ne tend pas à figer les usages actuellement suivis et à les fixer d'une manière rigide pour l'avenir. Mais l'évolution de ces usages sera lente, comme le sont les moeurs et les habitudes à la campagne, et, plus tard, nos successeurs auront le loisir de reprendre notre travail et de l'adapter aux conditions nouvelles de l'agriculture.
La Chambre d'Agriculture de Meurthe-et-Moselle a pris pour base de son travail le «  Recueil des usages locaux dans le département de la Meurthe », par E. Berthelin, publié à Nancy en 1857. D'autre part, sous les auspices du Comité départemental de retour à la terre, une enquête fut entreprise en 1924 en vue de constater les usages agricoles en vigueur. Des commissions cantonales furent instituées et saisies d'un questionnaire auquel elles répondirent, généralement, avec beaucoup d'intelligence. Ces commissions cantonales étaient présidées par les Juges de paix et réunissaient cinq ou six notabilités agricoles auxquelles se joignit quelquefois un notaire. C'est dire toute la valeur des réponse recueillies.
Enfin, la Chambre d'Agriculture put s'assurer le concours de MM. Gilliard, ingénieur en chef, et Bourdier, ingénieur du Génie rural, à qui leurs connaissance agricoles, administratives et juridiques, permirent d'extraire des documents recueillis, un projet de codification qui fut rédigé au début de 1933. Ce projet fut examiné par une Commission qui comprenait MM. Suisse, Cournault, Galliot, Henry, et Gérard. Le texte définitif sorti des délibérations de cette commission a été adopté par la Chambre d'agriculture de Meurthe-et-Moselle dans sa session du 6 mai 1933.
J'ai donc l'honneur, Monsieur le Préfet, de vous transmettre ce texte, en vous demandant de vouloir bien, conformément à la loi, le soumettre pour approbation à l'examen du Conseil Général de Meurthe-et-Moselle.
C'est avec confiance que nous présentons ce recueil des usages locaux agricoles, fruit de la collaboration de membres de la Chambre d'agriculture et de fonctionnaires qui ont toute la confiance des agriculteurs lorrains. Nous formons le voeu qu'il contribue à maintenir la paix du village entre tous les hommes de bonne volonté.

Le Président de la Chambre d'agriculture,
Sénateur de Meurthe-et-Moselle :
Louis MICHEL.


EXTRAIT DU PROCÈS-VERBAL DES DÉLIBÉRATIONS DU CONSEIL GÉNÉRAL DU DÉPARTEMENT DE MEURTHE-ETMOSELLE.
2e session de 1933
Séance du 26 septembre 1933

USAGES LOCAUX A CARACTÈRES AGRICOLES CODIFICATION. - DEMANDE D'AVIS

M. le Docteur HANRIOT, rapporteur: RAPPORT DE M. LE PRÉFET L'article 24 de la loi du 3 janvier 1924 stipule que les Chambres d'Agriculture sont spécialement appelées par le Préfet : «  A grouper, coordonner, codifier les coutumes et usages locaux à caractère agricole, qui servent ordinairement de base aux décisions judiciaires.
Les Usages codifiés seront soumis à D'approbation du Conseil Général; un exemplaire en sera déposé et conservé au Secrétariat des Mairies, pour être donné en communication à ceux qui le requerront. »
Vous trouverez ci-après, le texte définitif des usages locaux en vigueur en Meurthe-et-Moselle, que la Chambre d'Agriculture a adopté dans sa session du 6 mai 1933.
Je vous serais obligé, conformément aux dispositions de la loi ci-dessus visée, de vouloir bien, s'il y a lieu, donner votre approbation à ce texte.

RAPPORT DE LA COMMISSION
Votre deuxième commission vous propose d'approuver la rédaction des usages locaux établie par la Chambre d'agriculture.

DÉLIBÉRATION DU CONSEIL GÉNÉRAL
Les propositions de la Commission sont adoptées.


Recueil des usages locaux du département de Meurthe-et- Moselle constatés et codifiés par la Chambre d'Agriculture de Meurthe-et-Moselle par application de l'article 24 de la loi du 3 janvier 1924.

CHAPITRE PREMIER
DES BOIS ET PÉPINIÈRES

1° Un bois est appelé taillis quand il est exploité périodiquement en vue d'obtenir un recrû par rejets de souche.
Les bois taillis s'exploitent habituellement de .25 à 30 ans, suivant la richesse du sol. Plus le sol est riche - et par conséquent plus la croissance est rapide - plus on peut abaisser l'âge d'exploitation.
2° L'âge d'exploitation est essentiellement déterminé par la nécessité d'obtenir une proportion suffisante de rondins, à raison du trop bas prix de la catégorie inférieure: charbonnette ou fagots.
3° Le bois taillis s'exploite normalement par coupes assises de proche en proche par contenance.
Certains propriétaires s'astreignent à réaliser les produits inférieurs à 15 ou 20 ans (nettoiement), afin de favoriser la croissance du taillis. Cette pratique onéreuse tend à disparaître.
4° La période d'abatage a lieu hors le temps de sève, c'est-à-dire du 1er novembre au 15 avril. L'écorçage a lieu pendant le temps de sève active, c'est-à-dire du 1er mai au 31 août.
La vidange a lieu, en principe, pendant la morte saison et est conditionnée par les disponibilités en attelage. Toutefois elle doit être déterminée au plus tard le 15 avril de l'année qui suit l'exploitation, car à ce moment les rejets, qui ont un an, sont fragiles et pourraient être cassés par les charrois.
5° Les outils admis pour l'exploitation sont la hache et la serpe. L'usage de la scie est prohibée.
6° Un bois est appelé futaie quand il est traité de façon à se renouveler par brins de semence.
7° Le traitement des futaies est très variable et ne compte aucun usage établi quant à l'âge d'exploitation et à l'assiette des coupes.
Les périodes d'abatage, d'écorçage sont les mêmes que pour les bois taillis. Toutefois, l'abatage des futaies résineuses a lieu toute l'année.
Les outils admis pour l'exploitation des futaies sont, outre la hache et la serpe, la scie passe-partout.
8° Les végétaux qui croissent en sous-étage (houx, bruyère, genêts, épines) s'exploitent annuellement à courte périodicité. Ils appartiennent à l'usufruitier ou au fermier.
9° Il n'y a pas d'usage quant au nombre de baliveaux à réserver à l'hectare. En principe, on réserve tous les brins de semence: à défaut, on réserve des rejets de souche en choisissant les mieux conformés.
Il appartient au propriétaire de désigner les baliveaux et, d'une façon générale, les arbres réservés, à la condition que la proportion entre la réserve et l'abandon soit conforme aux errements antérieurement suivis.
10° Les limites de coupes sont habituellement fixées par des lignes ou layons; à défaut par des arbres marqués spécialement et appelés «  parois » (lignes) et «  pieds corniers » (angles)
11° Les débris et rémanents doivent être enlevés ou incinérés, les chemins de vidange réparés, le tout à la charge de l'usufruitier.
12° Il est encore d'usage de pratiquer l'émondage en vue d'améliorer le fût de l'arbre. L'émondage se pratique 3 ou 4 ans après la coupe et 4 ou 5 ans plus tard. Les produits appartiennent à l'usufruitier.
13° L'usufruitier peut, sans autorisation du nu-propriétaire, et le fermier, sans autorisation du propriétaire, élaguer les arbres dont les branches surplombent les héritages voisins. L'élagage se fait du 1er novembre au 31 mars.
14° Les liens gaules, tuteurs doivent être prélevés sur les produits de la coupe annuelle.
15° Les seuls arbres qui donnent des produits annuels ou périodiques autres que les fruits, sont : l'osier qui se coupe tous les ans et la saule cultivée comme l'osier, le saule têtard dont les branches se récoltent tous les 3 ans, le peuplier qui s'élague tous les 5 ou 6 ans, ou même tous les 3 ans dans les sols convenables.

CHAPITRE II
DE L'ASSAINISSEMENT DES FONDS

16° Les fossés d'assainissement se font, soit à ciel ouvert, soit sous la forme de fossés perdus. Ce sont des fossés dont le fond est rempli de pierrailles recouvertes de pailles, mousse ou branchages eux-mêmes recouverts de terre.
Cet usage n'est praticable que quand le propriétaire peut faire écouler ses eaux sans les amener sur le bord inférieur ou quand il remplit les formalités de la loi du 10 juin 1854 sur le drainage.
17° Dans les pays de vignobles, il est d'usage que le propriétaire qui veut se débarrasser des eaux de source ou d'infiltration creuse librement sur sa propriété un fossé jusqu'à un puits perdu situé à un mètre du fonds inférieur. Le plus souvent le propriétaire du fonds inférieur demande que ce fossé soit prolongé sur sa propriété où il le reprend pour le conduire de la même manière jusqu'à la propriété inférieure.

CHAPITRE III
DES CLOTURES

18° Les clôtures en murs, palissades, branchages, haies sèches s'établissent sur la ligne extérieure de la propriété qui se clôt et quand elles sont mitoyennes, à cheval sur la ligne séparative des deux propriétés.
19° Il est d'usage que le propriétaire d'un mur passe par la propriété voisine pour le crépir; le propriétaire d'une haie peut faire de même pour la tondre.
20° Celui qui creuse un fossé ou une raie sur son propre terrain, doit laisser entre le bord extrême du fossé et la limite des propriétés une bande de terrain.
21° La largeur de cette bande est fixée par l'usage à 50 centimètres dans les cantons de Longuyon, de Briey, de Nancy, à Migneville et à Montigny (canton de Baccarat). Elle est de 33 centimètres dans les cantons de Toul, Pont--à-Mousson, Nomény, Cirey et quelques communes du canton de Baccarat.
Elle est égale à la profondeur du fossé dans les cantons de Gerbeviller, Lunéville, Nancy-Sud, Saint-Nicolas-de-Port, à Favières (canton de Colombey).
22° Lorsqu'il s'agit de rigoles n'ayant pas plus de 15 centimètres de profondeur, il est d'usage de n'observer aucune distance.
23° Celui qui veut clore son héritage au moyen d'une haie vive ne peut le faire qu'à une distance de 50 centimètres du fonds voisin. L'usage est constant dans les cantons de Toul, Longuyon, Cirey, Nancy.
Dans le canton de Gerbeviller, la haie propre peut être plantée à la limite de propriété, à condition de ne pas dépasser la hauteur de 1 m. 33 centimètres.
24° La haie ne doit jamais être constituée par des essences forestières, quand bien même le propriétaire s'engagerait à la maintenir à la hauteur de 1 m. 33 centimètres ou 1 m. 50 centimètres fixée par les usages locaux.
25° En principe, la haie doit être tondue tous les ans, surtout celles de sureau et de noisetier. Toutefois, l'usage admet que la tonte n'ait lieu que tous les deux ans, ou trois ans, sans que le voisin puisse élever de réclamation.
26° Celui qui veut clore son parc au moyen de fil de fer ou de ronce artificielle ne peut le faire, à moins de 50 centimètres de la limite de propriété.
Il serait souhaitable que dans tous les cantons la largeur de la bande de terrain réservée fut égale à la profondeur du fossé.

CHAPITRE IV
SUR LA DISTANCE A GARDER ENTRE LES HÉRITAGES ET LES PLANTATIONS

27° En général, on suit les distances imposées par l'article 671 du Code civil, savoir : 2 mètres de la ligne séparative des héritages quand les plantations dépassent 2 mètres de hauteur et un demi-mètre pour les autres plantations.
28° L'usage déroge à la loi et n'impose aucune distance minimum pour tous les arbres, même à haute tige, d'essences forestières ou autres qui auraient crû ou qui seraient plantés à côté d'un terrain déjà emplanté en bois.
Dans les cantons de Chambley et de Conflans, il est d'usage, en ce qui concerne les endroits du pays en nature de vergers, de n'observer aucune distance, même pour les arbres à haute tige.
29° Pour les arbres à basse tige, il est d'usage de n'observer aucune distance quand les deux héritages sont séparés par un mur, mitoyen ou non, et que l'arbre ne dépasse pas la hauteur du mur.
Mais seul, le propriétaire du mur peut palisser contre ce mur.
Le palissage est assimilé au mur dans les cantons de Lunéville, Pont-à-Mousson, Toul, Baccarat, Nomény.
30° Il est également dérogé aux dispositions de l'article 671 du Code civil pour les plantations de vigne contigüe à une autre vigne: le pied de vigne se place à un fer de bêche, c'est-à-dire vingt-cinq centimètres de la limite de propriété, quand il s'agit d'un plant local. La distance est de deux fers de bêche, c'est-à-dire cinquante centimètres, quand il s'agit d'un plant américain dont le développement est plus grand.
31° Dans le canton de Bayon, chacun des voisins se retire sur lui-même de vingt à trente centimètres, de manière à laisser entre les propriétés un sentier de quarante à soixante centimètres. Dans le canton de Pont-à-Mousson, chacun se retire de vingt-cinq centimètres.
32° Dans les cantons de Blamont, St-Nicolas, Thiaucourt, Longuyon, Pont-à-Mousson quand deux héritages sont séparés par un cours d'eau il est permis à chaque riverain de planter des arbres à haute et basse tige sur le bord extrême de sa propriété.
33° L'usage tend également à s'établir de ne planter le houblon qu'à cinquante ou soixante centimètres de la limite de la propriété. Le fait est certain dans les cantons de Toul, Lunéville, Gerbeviller.
34° La haie vive n'est réputée à basse tige que quand elle est maintenue par la tonte à une hauteur inférieure à un mètre trente-trois centimètres. Cette hauteur est portée à un mètre cinquante centimètres dans les cantons de Blamont, Saint-Nicolas-de-Port, Briey.

CHAPITRE V
DES CONSTRUCTIONS ET TRAVAUX SUSCEPTIBLES DE NUIRE AUX VOISINS

35° Celui qui creuse un puits, une citerne, une fosse d'aisance ou une fosse à fumier près d'un mur mitoyen ou non, est tenu d'établir un contre-mur en maçonnerie dont l'épaisseur est généralement fixée à 0 m. 50.
Cette épaisseur n'est que de 0 m. 30 dans les cantons de Toul-Nord et Nancy-Sud.
Avec les matériaux actuellement en usage, il est possible de réduire cette épaisseur à 20 centimètres.
36° Celui qui construit un four, une forge, une cheminée près d'un mur mitoyen ou non doit établir un contre-mur dont l'épaisseur est généralement fixée à 0 m. 33.
37° Un vieil usage reçu à Toul et tombé en désuétude, voulait que le constructeur du four laissât de plus, entre le four et le mur, un espace vide de 0 m. 16 appelé le «  tour du chat ».
Cet usage est aujourd'hui en vigueur dans les cantons de Toul, Colombey, Nancy, Saint-Nicolas-de-Port, Lunéville, Cirey, Badonviller et Thiaucourt.
Celui qui veut ouvrir une carrière sur son propre fonds ou créer toute autre excavation importante, ne peut le faire, suivant l'usage, qu'à une distance minimum de un mètre s'il y a un mur pour soutenir le bord extérieur. A défaut de mur, la distance à observer est égale aux quarante-cinq centièmes de la profondeur.

CHAPITRE VI
DE LA MITOYENNETÉ

39° Outre les signes de non-mitoyenneté indiquée par le Code civil, on utilise aussi les «  témoins » qui sont des cavités pratiquées dans l'épaisseur des murs, de 30 à 40 centimètres de hauteur sur 15 à 20 centimètres de largeur et fermées sur une face par une épaisseur de brique ou une légère maçonnerie.
40° Pour les murs de clôture mitoyens, au lieu d'établir la sommité du mur à deux pans inclinés de manière à déverser de chaque côté l'égout des eaux, on divise le mur dans le sens de sa longueur: la moitié déverse la totalité des eaux qu'elle reçoit sur un des propriétaires mitoyens et l'autre moitié de la longueur déverse également la totalité de ses eaux sur l'autre propriétaire. Selon l'article 654 du Code civil, cet état de choses semblerait indiquer que chaque propriétaire a la propriété exclusive de la partie du mur dont il reçoit l'égout.
Dans l'usage, c'est un-signe de mitoyenneté sur toute la longueur du mur.
41° A l'égard des palissades, la saillie des poteaux et traverses est en regard de la propriété à laquelle la clôture appartient. Si tous les poteaux sont d'un même côté, c'est un signe de non mitoyenneté. Au contraire, il y a signe de mitoyenneté si les poteaux sont placés alternativement d'un côté et de l'autre de la palissade.
S'il est fait des clôtures de parc mitoyennes entretenues à frais communs, il est recommandé d'en laisser trace par convention signée des deux parties.

CHAPITRE VII
DE L'ENTRETIEN DES TOITURES

42° Dans les cantons de Haroué, Lunéville, dans quelques communes du canton de Toul, de Nomeny. lorsqu'une maison est plus élevée que ses voisines, il est d'usage que le propriétaire de la première entretienne trois coulants de tuiles de la seconde le long du mur faisant pignon (0 m. 45 environ).
43° Ailleurs, lorsqu'une maison est plus élevée que la voisine, le propriétaire de la première fait crépir son mur et établir un solin étanche sur le premier rang de tuiles pour faciliter l'écoulement des eaux et prévenir toute infiltration.

CHAPITRE VIII
DES BAUX A FERME

44° Une ferme se compose ordinairement de terres arables et de prairies naturelles. La proportion habituelle des prairies aux terres varie suivant les pays.
45° L'assolement triennal est encore le plus usité. Toutefois, la sole jachère est occupée en partie par des prairies artificielles et des plantes sarclées et la «  versaine » représente souvent moins de la moitié de la jachère. Cette pratique n'est pas considérée comme une infraction à la règle de l'assolement.
46° Toutefois, dans les cantons de Nancy, de Lunéville, il existe des fermes importantes où l'assolement triennal n'est plus suivi.
47° Le bail sans écrit d'un bien constituant un corps d'exploitation est réputé fait pour trois ans. Les baux écrits sont généralement faits pour une durée de trois, six ou neuf ans.
48° Les baux à ferme commencent le plus souvent à la Saint-Georges (23 avril). Le fermier entrant jouit à partir de cette époque :
a) de la totalité des prés et des parcs de la ferme,
b) de la sole des terres labourables qu'il doit préparer pendant l'été et ensemencer en blé à l'automne,
c) des jardins, vergers, chenevières, vignes et houblonnières.
d) des maisons, écuries, étables, bergeries, basse-cour et colombiers.
Jusqu'à présent, le fermier sortant a joui pendant la dernière année d'une partie des parcs créés par lui. Il est souhaitable qu'à l'avenir les baux soient rédigés de telle sorte qu'ils accordent la totalité des parcs aux fermiers entrants.
49° Le fermier sortant qui n'a plus à faire que la récolte de deux soles ensemencées en blé et en marsage a droit seulement au moment de la moisson et des battages aux engrangements, à la machine à battre, à une partie des greniers à grains, à la portion des écuries nécessaires pour les chevaux qui doivent rentrer les récoltes, à la place dans les greniers à foin suffisante pour la nourriture. La partie des logements strictement nécessaires pour lui et ses auxiliaires et l'usage des aisances communes comme four, puits, fontaine, etc.
50° Le fermier sortant doit avoir vidé les lieux à l'époque où la campagne agricole est réputée close, c'est-à-dire aussitôt les battages terminés et au plus tard le 11 novembre, étant entendu que l'entrée en jouissance a lieu à la Saint-Georges.
51° Le fermier entrant a droit aux fruits des arbres fruitiers, aux légumes du potager. Il peut semer du trèfle dans les blés et les avoines du fermier sortant, à charge de paver une indemnité à dire d'expert si la croissance du trèfle a nui au blé ou à l'avoine. Dans le canton de Baccarat, il n'est jamais réclamé d'indemnité. Cet usage n'est pas admis dans le canton de Gerbéviller.
52° Le fermier sortant qui fait la récolte des céréales paie le fermage de l'année. C'est le fermier sortant qui paie les frais de battage (personnel, essence, électricité) éventuellement de pressage de paille.
Le fermier sortant paie les contributions foncières de l'année. Dans les cantons de Nomeny, de Toul, à moins de conventions contraires, les contributions foncières sont à la charge du propriétaire.
53° En cas de dégradation aux haies, fossés, clôtures, l'indemnité est reçue par le propriétaire, s'il entretient les clôtures. Sinon, c'est le fermier entrant qui reçoit cette indemnité.
54° Le bail sans écrit d'une sole de terres labourables qui ne forment pas un corps de ferme est réputé fait pour trois ans.
55° Le bail sans écrit d'une prairie naturelle est réputé fait pour deux coupes : foin et regain. Celui d'une prairie artificielle en nature de trèfle pour deux coupes et en nature de luzerne pour trois coupes. Les unes et les autres doivent être libérées au 1er octobre pour donner au preneur le temps de les cultiver et de les ensemencer avant l'hiver.
Pour les prairies naturelles, on admet qu'elles doivent être libérées au 11 novembre, afin de les laisser pâturer jusqu'à cette date, sauf application de la loi du 24 octobre 19i9 (voir N° 59).
56° Le bail sans écrit d'un jardin ou d'une chenevière est réputé fait pour l'année; la jouissance commence au début de février et finit après la rentrée des produits. Toutefois, dans le canton de Toul, l'entrée en jouissance d'un jardin est fixée au 11 novembre. L'ancien locataire garde le droit de rentrer ses récoltes après cette date, jusqu'à la fin de l'année.
57° Quand le jardin dépend d'une maison dont l'entrée en jouissance est fixée au 23 avril, le nouveau locataire peut faire les cultures et semailles du jardin, à charge d'user discrètement de cette faculté et de ne pas incommoder le locataire sortant.
58° Le délai d'usage pour donner congé d'un bail à ferme est généralement de six mois. Il est d'un an dans les cantons de Saint-Nicolas-de-Port, Nancy, Cirey, Baccarat, Briey, Longuyon, Audun-Ie-Roman. Il n'est que de 3 mois dans le canton de Gerbéviller.
59° Aux termes de l'article 1775 du Code civil, modifié par la loi du 24 octobre 1919, le bail des héritages ruraux, quoique fait sans écrit, ne cesse que par l'effet d'un congé donné par écrit au moins six mois à l'avance.

RÈGLES SPÉCIALES AUX BAUX A LOYER

60° Les délais d'usage pour donner congé d'une maison non meublée est de 3 mois dans les cantons de Nancy. Ce délai est porté à six mois pour les locaux à usage commercial. Pour les garnis loués au mois, le délai pour donner congé est de un mois : il n'est que de 15 jours dans les cantons de Nancy, Gerbéviller, Pont-à-Mousson.
61° A Toul, lorsqu'un fonctionnaire ou un militaire change de résidence, la, location est résiliée de plein droit au jour du départ, à charge d'une indemnité égale à un trimestre de loyer en sus du loyer couru jusqu'au dit départ. S'il y a eu préavis, le loyer couru entre ce préavis et le jour du départ vient en déduction de l'indemnité.

CHAPITRE IX
DU PAIEMENT DES LOCATIONS

62° Sauf quelques exceptions intéressant les locations nouvelles, il n'est pas d'usage de payer les loyers d'avance, qu'il s'agisse de baux à loyer ou de baux à ferme.
63° Les loyers se paient à l'année, à la Saint-Martin, dans les cantons de Baccarat, Toul, Vézelise, Haroué et dans les communes rurales des cantons de Nancy.
Les loyers se paient par semestre le 23 avril let le 11 novembre (ou 25 décembre) dans les cantons de Nancy, Blâmont, Pont-à-Mousson, Saint-Nicolas-de-Port et les communes rurales des cantons de Lunéville.
Les loyers se paient par trimestre à Lunéville et dans les cantons de Bayon, Gerbéviller, Domèvre, Longuyon et Longwy.

CHAPITRE X
DES RÉPARATIONS LOCATIVES ET DE MENU ENTRETIEN

64° Outre les réparations locatives ou de menu entretien prévues à l'article 1754 du Code civil, sont à la charge du locataire dans les maisons : la réparation de trous faits à la maçonnerie et aux boiseries pour y placer des tableaux et des meubles, la réparation des papiers de tentures dégradés, la réparation de la serrurerie des portes, fenêtres et armoires, des jalousies à cordons, des croisées, des mouvements, fils de fer et cordons de stores ou sonnettes, des cordes de puits et greniers. On aura égard, pour apprécier le dommage, à l'usage et la destination des lieux ainsi qu'à la durée de la location.
65° Sous les mêmes réserves, sont également à la charge du locataire : la réparation des éviers des cuisines, la réparation des mangeoires, râteliers, bat-flancs, piliers et séparations des écuries toutes les fois que le bris ou l'usure n'est pas l'effet du temps ou d'un usage raisonnable.
Le locataire doit encore assurer le ramonage des cheminées et des poêles, le nettoyage et le balayage des pièces, caves, greniers, cours et remises.
66° Dans les jardins, le locataire doit entretenir et rendre en bon état les allées sablées, les parterres, plates-bandes, bordures et gazons. Il doit de plus rendre les arbres et arbrisseaux de même espèce et en même nombre qu'ils étaient à l'entrée du bail, à moins qu'ils ne soient morts de vétusté ou n'aient été détruits par force majeure.

CHAPITRE XI
DU LOUAGE DE SERVICE

67° Les domestiques attachés à la personne, au service du ménage, sont engagés ordinairement au mois. Dans les grandes villes les domestiques sont engagés sans détermination de durée, quel que soit le mode de calcul des gages et l'époque de leur paiement qui a lieu généralement chaque mois.
L'engagement a lieu à n'importe quelle époque de l'année. Il est, sauf rares exceptions, toujours verbal.
68° Les domestiques attachés en même temps à l'exploitation rurale sont engagés à l'année. Les engagements ont lieu habituellement à la Noël. Si, par suite, un engagement de ce genre se fait accidentellement dans le cours de l'année à quelque époque que ce soit, il n'est censé fait, sauf renouvellement, que pour le temps qui reste à courir jusqu'au 25 décembre.
Il est, sauf rares exceptions, toujours verbal.
69° L'usage de verser des arrhes tend à disparaître.
70° Pour les domestiques attachés à la personne, il y a facilité réciproque, pour le maître ou pour le domestique, de faire cesser l'engagement moyennant un préavis de huit jours.
71° Le domestique attaché en même temps à l'exploitation rurale et engagé à l'année doit être averti un mois à l'avance et, réciproquement, doit avertir le maître un mois à l'avance de la rupture de l'engagement.
72° Le maître, pas plus que le domestique, ne peut, sans motif grave, rompre l'engagement avant l'échéance du terme. S'il le fait, il est passible de dommages-intérêts que le juge de paix fixe suivant les circonstances et la gravité du dommage résultant d'une rupture inconsidérée.
73° Lorsque les gages ont été convenus pour toute l'année, si le contrat prend fin avant l'échéance du terme, il convient pour fixer les gages courus de tenir compte, non seulement du temps passé au service du maître, mais de l'importance des travaux agricoles pendant le temps passé au service du maître, ou qui aurait dû être passé au service du maître si le contrat avait été complètement exécuté.
74° La répartition des gages annuels suivant les différents mois de l'année pourrait être basée sur l'un des deux barèmes suivants donnés ci-dessous à titre d'indication :
Janvier... 1/24 ou 5 %
Février... 1/24 ou 5 %
Mars... 2/24 ou 6 %
Avril... 2/24 ou 7 %
Mai... 3/24 ou 8 %
Juin... 3/24 ou 10 %
Juillet... 3/24 ou 12 %
Août... 3/24 ou 14 %
Septembre... 2/24 ou 12 %
Octobre... 2/24 ou 10 %
Novembre... 1/24 ou 6 %
Décembre... 1/24 ou 5 %
75° Les aides ruraux sont engagés à la journée ou pour la durée de certains travaux déterminés.
76° Le salaire des journaliers est fixé à tant par jour et se paie par jour ou par semaine, ou à intervalles réguliers par acomptes successifs. Le salaire, notamment au temps des récoltes, varie suivant la durée de la journée et est souvent fixé d'après le travail effectué.
Quelquefois certains travaux, comme le binage et l'arrachage des pommes de terre ou betteraves se paient à façon.
77° Les aides ruraux dits «  manoeuvres » restent en général attachés au patron pendant toute l'année. Celui-ci, de son côté, fait pour eux les cultures et les charrois dont ils ont besoin pendant la même année et leur loue des terres pour y planter des pommes de terre. Ces services réciproques sont rétribués à prix convenu et il en est fait compte une fois par an au 11 novembre. Cependant, il n'est pas d'usage de considérer cet accord tacite comme constituant un engagement annuel : chacune des parties se considère comme libre de l'interrompre quand bon lui semble.
78° La durée de la journée des ouvriers agricoles varie suivant la saison : elle égale, en général, la durée du jour, sauf le temps nécessaire aux repas, qui est d'une demi-heure pour déjeuner, une heure pour dîner et une demi-heure pour goûter.
79° Les jardiniers, vignerons, houblonniers sont quelquefois engagés à l'année.
L'engagement des jardiniers commence au 11 novembre; celui des vignerons commence immédiatement après la vendange et celui des houblonniers à l'époque des premiers travaux, c'est-à-dire en février ou mars.
Ils doivent faire en temps et saisons convenables tous les travaux de culture et d'entretien que comporte la propriété qui leur est confiée.
80° Le vigneron doit, outre le premier labour, donner trois cultures nécessaires dites «  rebêchages », dont la dernière donne quand commence la coloration du fruit. Dans le canton de Pont-à-Mousson, cette troisième culture est due par le vigneron de l'année suivante. Dans d'autres cantons, Bayon, Haroué, Nomeny, cette troisième culture est payée en sus du salaire annuel.
81° Le vigneron doit aussi relier et entretenir les vignes liées : C'est le propriétaire qui fournit les liens sauf convention contraire.
Le provignage se paie à part et proportionnellement au nombre des provins ou à l'étendue du terrain provigné.
Le sulfatage se paie en sus.
82° Le houblonnier doit effectuer toutes les façons à donner au houblon : décavage, taille, plantation des perches, labour à la bêche, mise à la perche et liens successifs; autant que de besoin, deux cultures à la houe; moulinage et battage, puis, après la cueillette, l'effilement des perches et leur mise en meules.
La cueillette se paie à part. Le houblonnier fournit les liens. Dans le canton de Pont-à-Mousson cette fourniture incombe au propriétaire.
83° Le salaire des jardiniers et vignerons se paie encore quelquefois en trois termes, savoir : à la Chandeleur, à la Saint-Georges et à La Madeleine (2 février, 23 avril, 22 juillet). Le salaire des houblonniers se paie encore quelquefois moitié après le premier labour et le reste à la fin des travaux.
L'usage tend à s'établir de verser des acomptes au fur et à mesure de l'avancement des travaux, avec règlement définitif au Il novembre.
Quelquefois, les jardins, vignes et houblonnières se cultivent à façon.
84° Le maréchal-ferrant. le charron, le sellier travaillent de leur profession pour les cultivateurs pendant tout le cours de l'année. Dans les cantons de Briey, Bayon, Toul-Sud, Thiaucourt, Longuyon, il est encore d'usage de ne leur régler leur fourniture qu'à la Saint-Martin.
Cet usage tend à disparaître et dans d'autres cantons : Haroué, Lunéville, Nancy, Domèvre-en-Haye, Longwy, ces artisans travaillent au comptant.
Dans d'autres cantons : Nomeny. Pont-à-Mousson, le règlement se fait par acomptes tous les trois mois, avec règlement du solde au 11 novembre.

CHAPITRE XII
DE L'USAGE DE PASSER LIBREMENT SUR LES FONDS VOISINS

85° Dans les contrées de terres labourables et de prairies non closes, ou closes seulement de fossés, les propriétaires sont dans l'usage de laisser passer librement les uns sur les autres pour l'exploitation de leurs héritages respectifs, la conduite des engrais et l'enlèvement des récoltes.
86° Ce passage s'exerce dans toutes les directions sans indemnité, mais seulement en temps et saisons convenables, de manière à ne pas causer de préjudice. Il ne grève la propriété traversée d'aucune servitude et n'empêche pas les propriétaires du droit de se clore, de bâtir ou de changer la nature de leur culture.
87° Cet usage diffère par son origine, par ses conditions, par ses effets, du passage en cas d'enclave qui se pratique en tout temps, à charge d'indemnité, suivant une direction unique fixée par le juge et qui enlève au propriétaire asservi le droit de disposer librement de sa propriété.
88° Cet usage n'existe que quand les terrains enclavés ne sont pas dessaisonnés, sinon il peut y avoir lieu à indemnité. Dans certains cantons, cette tolérance ne court qu'à dater de la Saint-Jean.
89° Lorsqu'un pré doit le passage à un autre pré, il est d'usage que le propriétaire du premier coupe d'abord.
90° S'il ne le fait pas, le propriétaire du pré enclavé a le droit, à l'époque de la première coupe, de faire dans le pré voisin une fauchée de deux mètres de large pour permettre le passage des voitures et ce, sans indemnité.
91° A l'époque du regain, le propriétaire du fonds enclavé peut passer avec ses voitures ou avec ses animaux sur les fonds intermédiaires sans indemnité et sans être astreint à faire une fauchée, mais à charge d'empêcher que les animaux ne causent aucun préjudice sur leur passage.
92° Si le propriétaire du fonds enclavé dessaisonne, il peut, suivant l'usage, passer sur les fonds intermédiaires, par le chemin le plus court et le moins dommageable si les récoltes voisines sont encore en herbe.
93° Si les récoltes voisines sont mûres, le propriétaire du fonds enclavé peut les faucher pour se réserver un passage de deux mètres, à charge de prévenir les voisins.
94° Dans le canton de Toul, la largeur du passage dû en cas d'enclave est fixé par un usage constant à un mètre si la parcelle à desservir est une vigne et à quatre mètres pour tout autre terrain.

CHAPITRE XIII
DE L'EXÉCUTION DES LABOURS

95° L'obligation de ne pas nuire à autrui ne permet pas au laboureur de marcher sur le terrain voisin pour cultiver les limites de son héritage. Mais l'usage contraire est toléré partout où le piétinement des hommes et des chevaux n'offre pas d'inconvénients.
96° Le premier qui cultive son champ pour l'ensemencement des blés creuse avec la charrue le sillon mitoyen sur toute sa largeur et retourne sur sa propriété la terre qui en provient. Le second cultivateur creuse encore une fois le même sillon dans toute sa largeur et retourne aussi sur sa propriété la terre qui provient de cette excavation. Il se forme ainsi entre les deux propriétés une limite très apparente et qui facilite l'écoulement des eaux.
Lorsqu'on cultive pour semer les avoines, la même opération se fait en sens inverse : chacun des voisins reverse dans la raie mitoyenne la terre qu'il en a tirée lors de la culture des blés.
97° Si des eaux existent à la surface d'une terre labourable, et qu'en labourant celle-ci ces eaux se déchargent sur le voisin inférieur sans autres travaux de mains d'hommes, l'usage admis est que ce voisin supporte cet inconvénient passager sans indemnité.
98° (*) Il est d'usage que pour labourer les champs dits de «  bêne » ou de «  corvée » on passe et on tourne avec la charrue sur les champs dits de tournière ou de tournaille, même ensemencés. En principe, la tournière ne doit pas dépasser 4 mètres. A titre d'indemnité, le champ de tournaille rogne sur les pointes des champs aboutissants une largeur qui varie un peu suivant les cantons; elle est généralement de 1 m. 35.
Dans le canton de Pont-à-Mousson, cette largeur est de 1 m. 65 (à Dieulouard elle est de deux mètres); à Atton, le champ de tournaille ne bénéficie pas de cet usage. Elle est de deux mètres dans le canton de Nancy.
99° Toutefois, il est signalé (canton de Toul) que l'exercice du droit de tournaille est de moins en moins toléré et donne lieu maintenant à des poursuites judiciaires.

(*) Les largeurs à prendre sur les champs aboutissants doivent être accordées à la condition que le propriétaire de la tournaille ne dessaisonne pas.
Dans certaines communes, les cultivateurs font gratuitement et à tour de rôle, les labours de tournailles appartenant à des manoeuvres qui n'ont pas d'attelage.

CHAPITRE XIV
DU GLANAGE, DU RATELAGE, DU GRAPILLAGE

100° Le glanage et le râtelage sont généralement tolérés dans toutes les communes du département, sous les restrictions indiquées par la loi.
Toutefois, le glanage seul est toléré dans les cantons de Thiaucourt, Toul, Lunéville, Gerbéviller, Cirey.
101° Le grapillage est interdit d'une manière générale depuis la suppression du ban de vendange.

CHAPITRE XV
DU BAN DE VENDANGE

102° Le ban de vendange qui était en usage dans toutes les communes viticoles est tombé aujourd'hui en désuétude.
(Le maire de Toul prend tous les ans un arrêté de police restreignant la circulation dans les sentiers de vignobles et interdit aux chasseurs non propriétaires de chasser dans les vignes avant la fin des vendanges. Cet arrêté n'est pas un ban de vendange puisqu'il ne fixe pas l'ouverture des vendanges.)

CHAPITRE XVI
DE LA RÉCOLTE DES FRUITS

103° Quand un arbre fruitier planté, ou non à la distance légale, projette ses branches sur le fonds voisin, le propriétaire de ce fonds a la propriété des fruits qu'il peut, soit ramasser, soit cueillir, sous la seule condition de ne point monter à l'arbre et de n'en point casser les branches.
Toutefois, l'usage ne reconnaît pas toujours au propriétaire du fonds le droit de cueillir les fruits pendants par branches.

CHAPITRE XVII
DE LA VAINE PATURE

104° La vaine pâture continue à s'exercer dans la plupart des communes du département de Meurthe-et-Moselle qui en ont demandé le maintien conformément à l'article 2 des lois des 9 juillet 1889 - 22 juin 1890.
105° Dans les communes suivantes, la vaine pâture a été interdite :
a) Arrondissement de Nancy.
Amance, Art-sur-Meurthe, Barisey-la-Côte, Beaumont, Belleau, Boucq, Bruley, Burthécourt-aux-Chênes, Dommartemont, Eply, Essey-les-Nancy, Euvezin, Fontenoy-sur-Moselle, Hammeville, Hamonville, Jarville, Jezainville, Laneuveville-derrière-Foug, Laneuveville-devant-Bayon, Laneuveville-devantNancy, Laxou, Lay-Saint-Remy, Léménil-Mitry, Lupcourt, Maidières, Manonville, Marthemont, Ménil-la-Tour, Ménillot, Millery, Montauville, Morey, Nancy, Neuviller-sur-Moselle, Pagny-sur-Moselle, Pannes, Pompey, Praye, Rembercourt, Rosières-aux-Salines, Rosières-en-Haye, Roville, Royaumeix, Saint-Max, Seichamps, Sivry, Vandeléville, Vandoeuvre, Viéville-en-Haye, Ville-en-Vermois, Villers-les-Nancy, Xammes.
b) Arrondissement de Lunéville.
Baccarat, Badonviller, Bathelémont-les-Bauzemont, Bayon, Bertrambois, Bertrichamps, Bionville, Blainville-sur-l'Eau, Bonviller, Bures, Chazelles, Chenevières, Cirey, Coincourt, Courbesseaux, Einville, Fenneviller, Flainval, Franconville, Gerbéviller, Haudonville, Haussonville, Hériménil, Hoéville, Lachapelle, Lunéville, Manonviller, Méhoncourt, Merviller, Neufmaisons, Petitmont, Saint-Mard, Saint-Maurice, SaintSauveur, Thiaville, Val-et-Chatillon, Valhey, Veney, Villacourt.
c) Arrondissement de Briey.
Allondrelle, Les Baroches, Briey, Chenières, Cons-la-Grandville, Fléville-Lixières, Hannonville-au-Passage, HussignyGodbrange, Jarny, Joppécourt, Labry, Longwy, Mexy, Montigny-sur-Chiers, Mouaville, Moutiers, Puxieux, Sancy, Sponville, Thil, Villers-Ia-Chèvrè, Villerupt.
106° Dans les communes suivantes, la vaine pâture est admise, mais ne peut s'exercer que sur les terrains vagues et non ensemencés.
a) Arrondissement de Nancy.
Champigneulles, Charmes-la-Côte, Clérey, Essey-et-Maizerais, Fey-en-Haye, Flirey, Forcelles-sous-Cugney, Foug, LaySaint-Christophe, Limey, Marbache, Noviant-aux-Prés, Réménauville, Tantonville, Villey-le-Sec, Villey-Saint-Etienne, Xirocourt.
b) Arrondissement de Lunéville.
Brémoncourt, Jolivet, Lorey, Magnières, Mattexey, Moncel-les-Lunéville, Raon-les-Leau, Saint-Germain, Vennezey, Virecourt.
c) Arrondissement de Briey.
Beuvillers Chambley, Fresnois-la-Montagne, GondrecourtAix, Hatrize, Mance, Murville.
A Marbache, la vaine pâture ne peut s'exercer que sur les prairies naturelles.
107° Dans les communes où elle s'exerce, la vaine pâture est permise sur tout le territoire, à l'exception des bois, prairies artificielles, clos et vergers.
La vaine pâture s'exerce sur les chemins publics, sous réserve des dispositions de l'article 58 du décret du 31 décembre 1922 (code de la route).
108° La pâture n'est permise pour les porcs et les oies que dans les terres en friche et en jachère. Dans les bois, elle est interdite en tout temps et à toute espèce de bestiaux, à moins d'un titre spécial.
L'usage du troupeau commun est tombé en désuétude. On en signale encore quelques-uns, par exemple à Gondreville.
109° Le nombre de bêtes à mettre à la vaine pâture n'est nulle part réglementé, sauf à Pulnoy, où l'on admet une bête pour 2 hectares.

CHAPITRE XVIII
DU PATRE COMMUNAL

110° Le pâtre communal nommé par le maire, conformément à l'article 13 de la loi du 18 juillet 1837, est payé par les propriétaires de bestiaux proportionnellement au nombre de têtes qu'ils possèdent.
111° Un ancien usage accorde aux bergers et pâtres des troupeaux communs le droit de faire pâturer avec le troupeau quelques pièces de bétail leur appartenant. Cet usage est en vigueur dans les cantons de Longuyon. Longwy, Chambley, Conflans, GerbévlIler, Lunéville, Pont-à-Mousson. Partout ailleurs, cet usage est rejeté ou bien est tombé en désuétude.
Dans certaines communes, il est fourni un logement gratuit au pâtre commun.

CHAPITRE XIX
DE LA POSSESSION A VARROI

112° C'est un mode d'exploitation autrefois usité dont il ne reste que peu de traces. Plusieurs ayants-droit a un immeuble en laissent la propriété en commun, quoi qu'il soit divisé pour la jouissance en un nombre suffisant de parcelles. Les ayants-droit jouissent alternativement de chacune des parcelles, de manière que chacun, à son tour, possède les meilleures comme les plus mauvaises.
Ce mode d'exploitation est encore signalé à Domèvre-sur-Vezouze.

CHAPITRE XX
DE L'ENLÈVEMENT DES MATÉRIAUX

113° Les propriétaires peuvent toujours reprendre sur les chemins publics les terres, sables, pierres, etc. enlevés de leurs terrains à la suite d'orages.
114° Il est d'usage dans les communes d'Euvezin, Jaulny, Rembercourt, Thiaucourt et Viéville (canton de Thiaucourt) que les habitants puissent extraire des terrains communaux et sans autorisation spéciale, les sables, cailloux, pierres dont ils ont besoin. Cet usage s'applique aux terrains vagues seulement.
115° Dans les cantons de Gerbéviller, Lunéville-Sud, Longuyon, les habitants peuvent extraire des terrains communaux les pierres, sables et cailloux aux conditions fixées par les Conseils municipaux. Cet usage existe également dans les communes de Barisey-au-Plain, Mont-l'Etroit, Saulxerotte (canton de Colombey).
A Petitmont (canton de Cirey) les habitants peuvent extraire annuellement des carrières communales 5 mètres cubes de sable sans payer aucune redevance.

ANNEXE
LES ANCIENNES MESURES.

(Les renseignements contenus dans ce chapitre sont extraits du livre de M. Pierre Boyé, secrétaire perpétuel de l'Académie de Stanislas «  La Lorraine commerçante sous le règne de Stanislas », Nancy 1899)

Avant l'application du système métrique, les anciennes mesures lorraines offraient la plus grande variété. Chaque région, parfois chaque commune, avait ses mesures propres. Aucune relation n'existait entre ces mesures et celles du reste du royaume, d'où il résultait une grande complication.

A) LES POIDS. - On utilisait comme unité la livre qui valait 489 grammes 51. La livre valait 16 onces (1 once = 30 gr. 59) et l'once valait 8 gros (1 gros = 3 gr. 82).
On utilisait aussi le grain (10 grains = 0 gr. 53).

B) MESURES DE LONGUEUR. - Les longueurs étaient mesurées en toises et en aunes; cette dernière s'employait pour la mesure des étoffes. La toise et l'aune de Lorraine différaient de la toise et de l'aune de Paris :
Toise de Lorraine 2 m. 859
Toise de Paris 1 m. 949
Aune de Lorraine 0 m. 639
Aune de Paris 1 m. 188
Encore ces comparaisons ne valent-elles que pour la toise et l'aune en usage dans la région de Nancy et Lunéville. Dès que l'on s'éloigne, ces mesures prennent, suivant les lieux, des valeurs très différentes. La toise vaut 10 pieds et le pied vaut 10 pouces.

C) MESURES DE SURFACE. - On mesure les surfaces en jour pour les terres et les vignes, en fauchée pour les prés, en arpent pour les bois. De même que pour les mesures linéaires, les mesures superficiaires varient à l'infini, suivant la région, suivant les localités et même à l'intérieur des localités suivant les parties du ban communal.
Citons quelques-unes de ces mesures :
- Le jour de Lorraine, qui vaut 10 hommées, est de 20 ares 44 centiares à Nomeny, à Pont-à-Mousson le jour vaut 32 ares 70 centiares.
- La fauchée de pré, dite «  mesure d'Evêché » vaut 35 ares 17 centiares.
- L'arpent de Vic vaut 23 ares 44 centiares.

D) MESURES POUR LE BOIS DE CHAUFFAGE. - On utilise la corde qui présente elle-même beaucoup de variétés. La corde de Lorraine valait 2 stères 972 et celle de Pont-à-Mousson 4 stères 387. On reconnaissait encore une corde pour bois d'affouage, une autre pour les bois des salines.

E) MESURES DE CAPACITÉ POUR LES LIQUIDES. - L'unité est la pinte qui vaut 2 chopines; elle est égale à 1 litre 22 (2 pintes font 1 pot et 18 pots font une mesure. La mesure vaut exactement 44 litres 070.757 (L. Morel. - Table de réduction des mesures anciennes en nouvelles Lunéville 1830.)
Enfin, 7 mesures font un virli ou muid.
La hotte de Pont-à-Mousson et la charge de Toul valaient 39 litres 174, ou 16 pots de Lorraine.

F) MESURES DE CAPACITÉ POUR LES GRAINS. - Ici la confusion est complète. Contentons-nous de signaler quelques-unes des mesures les plus courantes.
On utilisait le résal. Pour le blé, on compte un résal ras, qui vaut à Nancy 117 litres 2356; pour l'avoine, on compte un résal comble, soit 180 litres. Le résal de Blâmont vaut 120 litres 605 et celui de Fénétrange vaut 142 litres 180.
Ailleurs, les grains se mesurent à la quarte. La quarte de Pont-à-Mousson vaut 88 litres 865, la quarte de Nomeny vaut 69 litres 8225, celle de Château-Salins vaut 69 litres 824, celle de Vic 63 litres 475, celle d'Essey-en-Woëvre 88 litres 865, etc...
A Toul, on mesurait les grains au bichet de 94 litres 9918.

G) Et comme le signale M. Pierre Boyé : «  ...cette fastidieuse nomenclature. fait abstraction des mesures en usage dans le Toulois, le Pays messin, le Verdunois, aussi nombreuses, aussi variées, qui pénétraient en Lorraine, surtout dans les zones limitrophes. C'était encore les vieilles mesures d'Alsace, du Luxembourg, de la Franche-Comté, qui étaient employées simultanément avec les mesures locales, sur les frontières et dans les enclaves. »
(La loi du 19 Frimaire an VIII (2 novembre 1801) prescrit l'usage exclusif du système métrique, mais devant la résistance des populations, un décret du 12 février 1812 a autorisé à nouveau l'usage des anciennes mesures. C'est seulement par la loi du 12 février 1837 que le système métrique devint définitivement obligatoire).

H) UNITÉS MONÉTAIRES. - Les valeurs monétaires s'exprimaient en livres, sous et deniers. Comme la livre française, la livre lorraine valait 20 sous et le sou 12 deniers. Mais il fallait 31 livres lorraines pour faire 24 livres, cours du royaume. Dès les premières années du règne de Stanislas, le Gouvernement français fait retirer de la circulation les pièces à l'effigie des ducs et la livre lorraine n'est plus qu'une simple monnaie de compte.

 

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