Semaine religieuse de Nancy -
14 avril 1928 - n° 15 - p. 234
HISTOIRE ET ARCHÉOLOGIE
[...]
Les Ermites au Diocèse de Toul (Suite)
Nous avons donné la liste des
ermitages de la Congrégation de Saint-Jean-Baptiste (12) ; celle
que nous allons présenter, des ermitages de la Congrégation de
Saint-Antoine, n'a pu être non plus dressée par ordre
chronologique d'affiliation; nous suivrons l'ordre topographique
adopté plus haut (13). Les renseignements nous font défaut, pour
préciser le chiffre des habitants de toutes ces solitudes (14).
LA ROCHOTTE. - 5 frères; SAINTE-MARIE-MADELEINE, de Flin (15). -
SAINTE-ANNE, de Deuxville-Lunéville. - 4 frères: SAINT-JEAN, de
Blâmont. - 2 frères; LES CROIX-FERRY. - 2 frères; LA MADELEINE,
près de Saint-Nicolas-de-Port. - 3 frères; ROMÉMONT - 2 frères;
SAINTE-GENEVIEVE, de Dommartemont. - 3 frères; SAINTE-BARBE, de
Charmes-sur-Moselle. - NOTRE-DAME DE GRACE, à Crevéchamps. - 2
frères : SAINT-JOSEPH, de Messein. - 12 frères : c'était, au
moment où fut rédigée cette statistique (1780 et 1786) le
noviciat et l'asile des vieillards de la Congrégation ;
SAINT-JEAN- BAPTISTE, de Frouard. - 2 frères; SAINT-EUCHER. - 2
frères; SAINT-GRAS. - 2 frères; SAINT-CLAUDE, de Thelod. - Les
ermitages de CHÈVEROCHE, que visita, si même il n'y séjourna
pas; le cardinal de Retz, quand, exilé en sa seigneurie du
Château-Haut de Commercy, il venait rejoindre, à Saint-Baslemont
(16), son co-seigneur du Château-Bas, Louis des Armoises,
gendre de la célèbre « Dame de Saint-Baslemont » (17). -
SAINT-JEAN DE ROUVEY - SAINT-GÉRARD, de Houéville. -
SAINT-PIERRE, de Choloy. - 2 frères; le VAL DES NONNES. - 5
frères, NOTRE-DAME DE PITIÉ, de Jainvillotte. - 2 frères;
VALROSE. - 2 frères; OFFRÉCOURT. - 2 frères; NOTRE-DAME DE CÉRUS.
- NOTRE-DAME DE BELLEFONTAINE. - 2 frères; SAINT-JOSEPH, de
Harréville. - SAINTE-ANNE, de Rouceux. - 2 frères :
SAINT-ANTOINE, de Rupt-aux-Nonnains, le seul qui fût situé dans
la région, pourtant considérable, du diocèse qui appartient
aujourd'hui au département de la Meuse.
En même temps qu'elle croissait en nombre, la Congrégation
s'organisait. Elle était gouvernée, non plus par un
supérieur-frère, - il ne paraît pas qu'elle eût compté des
prêtres parmi ses membres, - mais, au nom de l'Evêque, par un
Supérieur général, archidiacre ou chanoine de la Cathédrale, son
mandataire, et, sous l'autorité de ce supérieur, par un Visiteur
et un Conseil de quatre Définiteurs, assisté d'un Secrétaire,
tous sic élus pour trois ans et rééligibles par l'Assemblée
générale ou chapitre, qui se tenait vers le début de mai, et à
laquelle tous les ermites devaient assister, sauf motif sérieux
d'absence agréé par le visiteur. (Les Définiteurs devinrent,
dans la suite, des Visiteurs, sous l'autorité du Visiteur
général.)
Les ermitages étaient répartis en quatre districts, à la tête
desquels se trouvait l'un des définiteurs : les districts de
PORT, de BARROIS, de BOURMONT et de JORXEY (18).
Ils devaient vivre, non de quêtes, mais des ressources que
procuraient la culture de l'enclos et le travail. Une caisse:
l'Aumônerie, assurait des secours en cas de besoin.
Celui qui désirait embrasser la vie d'anachorète et, à cet
effet, être reçu dans la Congrégation, devait, avant tout, se
présenter au supérieur général; en principe, il ne devait pas
avoir moins de 20 ans, ni plus de 45. S'il était agréé par lui,
il se rendait au Noviciat, installé, jusqu'en 1761, au Val des
Nonnes, et transféré ensuite à Saint-Joseph, de Messein. Là,
après quelques semaines de probation, il prenait l'habit, au
cours d'une cérémonie qui, pour se dérouler intime, dans une
humble chapelle, devant une assistance restreinte, n'en était
pas moins impressionnante. Elle était, du reste, présidée par le
supérieur général ou son délégué (19)
Après lui avoir fait subir un examen, sur les motifs qui le
portaient à s'engager dans l'état érémitique, et s'être assuré
qu'il en comprenait les obligations, le supérieur, en son
absence, consultait les frères et, si leur avis était favorable,
il le faisait entrer et lui disait :
« Nous voulons bien vous donner l'habit que portent les ermites
de la Congrégation de Saint-Antoine, pourvu que vous ayez une
volonté sincère de renoncer à vous-même, de vous donner à
Jésus-Christ, de vous charger de sa croix et de le suivre dans
le chemin de la pénitence. L'avez-vous cette volonté ? - Oui,
Monsieur, répondait le postulant, et j'espère de l'accomplir,
moyennant la grâce de Dieu, »
Le supérieur procédait, alors, à la bénédiction de l'habit,
selon les formules du Rituel. Puis, tandis que le postulant,
aidé par le visiteur et le maître des novices, premier
définiteur, quittait les vêtements séculiers, il lui adressait
ce paternel souhait : « Que Dieu vous dépouille du vieil homme,
de toutes ses mauvaises habitudes et de toutes ses inclinations
corrompues; et vous revête de l'homme nouveau qui se renouvelle
dans la connaissance de la vérité et se réforme sur
Jésus-Christ, qui est son modèle. - Ainsi soit-il ! » répondait
l'assistance.
Et le supérieur poursuivait, en lui imposant la robe d'ermite :
« Que Dieu vous revête de toutes ses armes, pour pouvoir vous
défendre des embûches el des artifices du démon que vous allez
combattre avec Jésus-Christ ! - Ainsi-soit-il »
En le ceignant de la ceinture de cuir : « Que la vérité soit la
ceinture de vos reins et que la justice soit votre puissance.
Ainsi soit-il ! »
En lui mettant le capuce : « Que Dieu vous revête de l'espérance
du salut, comme d'un casque, et de sa parole, comme d'une épée
spirituelle ! - Ainsi soit-il !»
En lui tendant les chaussures : « Que Dieu donne à vos pieds une
chaussure qui vous dispose à aller à lui, par les voies les plus
dures de l'Evangile, et qui vous rendent prêt à marcher partout
où sa sainte volonté vous appellera ! - Ainsi soit-il ! »
En lui jetant le manteau sur les épaules : « Que Dieu, surtout,
vous couvre de la foi comme un bouclier impénétrable, pour
éteindre tous les traits enflammés que le malin esprit enverra
contre vous ! - Ainsi soit-il ! »
Le supérieur, ensuite, lui imposait un nom de religion, de
préférence un nom d'anachorète : Pacôme, Hilarion, Sérapion,
Jérôme, Elie ... Colomban, Bruno, Romuald, etc ... et lui
recommandait de travailler à imiter les vertus de son patron. Il
terminait, en lui donnant l'accolade : « Que Dieu le Père et le
Seigneur Jésus-Christ vous accorde la paix et la charité, avec
la foi ! » Et lui, de répondre, avec ses nouveaux frères : « Que
la grâce soit avec ceux qui aiment Notre-Seigneur Jésus-Christ,
d'un amour pur et incomparable ».
Héros de la fête et témoins se sentaient appartenir vraiment à
un Ordre religieux; et ces formules, inspirées de paroles de
l'apôtre saint Paul, devaient se graver profondément dans les
mémoires, pour servir de thème, pendant une vie entière de
solitude, à de fécondes et réconfortantes méditations,
L'Institut portait que le noviciat devait durer douze mois, dont
huit après la vêture; en pratique, il n'en était pas toujours
ainsi ; le temps prescrit était souvent écourté de quelques
semaines. Il eût mieux valu, semble-t-il, qu'il fut allongé :
qu'était-ce qu'une année de formation, si remplie fût-elle, pour
toute une vie à passer dans l'isolement ! Mais, ou bien il
fallait, sans doute, céder la place à de nouvelles recrues, dans
l'étroite maison du Val des Nonnes, ou bien un ermitage, réduit
à un seul occupant, était à compléter sans trop tarder.
Après ces mois de probation, pendant lesquels non seulement il
était formé à l'oraison et aux vertus religieuses, mais encore
il apprenait à lire et à écrire, s'il ne le savait pas, et était
initié, si besoin était, à quelque métier, selon ses goûts et
ses aptitudes, le novice était envoyé en un ermitage, pour faire
l'essai de la vie érémitique, sous la direction d'un ancien,
homme de sagesse et d'expérience; et c'est seulement après
plusieurs mois de cette épreuve qu'il était admis à faire
profession, d'ordinaire le jour de l'Assemblée générale.
La formule qu'il prononçait, à la chapelle, en présence de tous
les capitulants, entre les mains du supérieur général ou de son
délégué, était conçu en ces termes :
« Je, frère..., fais voeu et promesse à Dieu, en votre présence,
Monsieur, et en la présence de tous les frères qui sont ici,
d'observer exactement cet Institut, que Monseigneur de Camilly,
notre évêque, a donné aux Frères Hermites de la Congrégation de
Saint-Antoine, dans laquelle, j'ai le bonheur d'entrer, et d'y
garder fidèlement la chasteté, la pauvreté et l'obéissance, tout
le temps que je serai attaché à ladite Congrégation, et que j'en
porterai l'habit. » (20)
Ce n'étaient donc que des voeux simples, dont celui qui les
émettait, prévoyait qu'il pouvait être relevé : sage précaution,
étant donné ce genre de vie, privé de bien des réconforts
qu'assurent à leurs membres les Ordres religieux.
Ces voeux étaient renouvelés, chaque année, lors de l'Assemblée
générale ; et ils ne furent pas rares, ceux qui les renouvelait
ainsi 40, 50. 60 fois et même davantage : faisait-on déjà des «
noces d'or » et de « diamant » ? En tous cas, on remerciait le
Seigneur, et on redisait le mot : « O beata solituda, sola
beatitudo ». Si on l'avait connu, on se serait appliqué, mais
dans un sens chrétien, ce vers de La Fontaine : « Solitude, où
je trouve une douceur secrète !»
François Blouet de Camilly, dont la formule des voeux faisait
mention, avait fait. compléter l'Institut, qu'avait approuvé
Jacques de Fieux. Maintenant que le temps avait exercé son
contrôle sur l'entreprise du frère Michel Legrand, il lui avait
semblé opportun d'en commander une nouvelle rédaction, revue et
augmentée. Et pour obvier à ce que « les ermites ne soient
ermites que d'habit... aimant le monde et les choses du monde,
sujets aux vices les plus grossiers... ou se laissent emporter
plus facilement aux péchés de l'esprit, à l'orgueil, à
l'ambition, à la colère, à la paresse »... (21), excès auxquels
avait entendu parer l'auteur de la première édition et qu'il
était bon de signaler de rechef, un « Mandement», en date du 3
septembre 1708. avait ordonné qu'on observât désormais les
prescriptions de cet Institut, mis au point, et enjoint à tous
les supérieurs de la Congrégation « de tenir la main à ce
qu'elles soient exactement suivies. » Une explication de
quelques articles fut donnée par l'évêque lui-même, dans
l'Assemblée générale, qu'il voulut tenir et présider, en son
palais épiscopal, le 2 septembre 1710 (22). Ainsi, les ermites
de la Congrégation de Saint-Antoine occupaient une place
appréciable dans les préoccupations pastorales du chef du
diocèse.
Mais tous les habitants des ermitages ne s'étaient point
affiliés, tant s'en faut, à l'une ou à l'autre des congrégations
existantes. De plus, un bon nombre, suivant un abus tenace,
s'étaient « revêtus eux-mêmes de l'habit d'ermite, sans en avoir
la vocation, ni les vertus»; ils « le déshonoraient par leurs
moeurs corrompues, scandalisaient le public, profanaient les
saintes retraites dont ils s'étaient emparés et en faisaient des
retraites de voleurs et de brigands» (23).
Voulant remédier à ces abus, François de Camilly s'appliqua « à
ne souffrir, ni admettre d'ermites, qu'ils ne soient de bonne
vie et de moeurs irréprochables, et qu'ils n'aient subi des
examens et passé des épreuves », qu'il avait jugées nécessaires
(24), entre autres, un séjour de quelques semaines au Val des
Nonnes, sous la direction du maître des novices. Une ordonnance
du 14 janvier 1716, donna corps à ce règlement, leur prescrivit
le port d'une robe grise, ne descendant que jusqu'aux genoux,
pour qu'on les distinguât des membres des deux congrégations;
l'assistance régulière aux offices et aux catéchismes de la
paroisse; le travail, qui devrait fournir leurs moyens
d'existence ; leur interdit les quêtes hors de la paroisse et
les soumit à la visite des dignitaires de la Congrégation de
Saint Antoine (25). Dans la pensée du prélat, les «
gardes-chapelles » - tel était le titre qu'ils prendraient
dorénavant - devaient constituer comme un « second ordre »
séculier du « premier ordre » régulier des ermites.
Un arrêt de la Cour souveraine, du 4 avril de la même année,
pendit cette ordonnance obligatoire, dans toute la partie du
diocèse qui appartenait aux duchés de Lorraine et de Bar (26).
Quoique l'acte épiscopal n'en ait point parlé, à partir d'une
époque que nous ne pouvons préciser, une Assemblée des
gardes-chapelle se tint, jusqu'en 1750, au Val des Nonnes, une
quinzaine après le chapitre des ermites (27). Ce fut,
semble-t-il, sur l'initiative de M. Vatelot (+ 1748), car
l'institution ne lui survécut pas; il y eut encore deux
assemblées, en avril-mai 1749; mais, l'année suivante, le
registre porte que quatre gardes-chapelle assistèrent à
l'Assemblée générale de la Congrégation, et ne mentionne pas
d'autre réunion. Il n'est même plus question, dès lors, de
gardes-chapelle, dans les procès-verbaux. La dépendance, établie
par François de Camilly, s'était émancipée; et les ermites
libres reparurent, si tant est qu'ils se soient laissé confondre
avec les simples gardes-chapelle.
(A suivre)
E. M.
(12) Voir Ch. V.
(13) Voir Ch. III.
(14) Les chiffres que nous donnons figurent l'effectif normal,
qui ne fut pas toujours atteint. - La plupart sont de CHATRIAN
(La Lorr, mon., supr. cit.) Le manuscrit est de 1786, et l'
Auteur, en ceci, semble bien informé; car il donne une liste de
70 ermites, correspondant exactement au total des effectifs
indiqués pour cette époque.
(15) Cet ermitage, qui fut de Saint-Antoine (Ordonn. de Lor., I,
294) passa, dans la suite, à Saint-Jean-Baptiste (Arch. M.-M;,
E, suppl. 2131) et disparut avant la fusion des deux
Congrégations.
(16) Saint-Baslemont, c. de Darney, Vosges.
(17) L'abbé IDOUX, dans son importante étude sur les Ermites de
Chèvreroche, p. 185 et sq. Mem, Soc. Arch. Iorr. 1910, examine à
fond cette question; il opine pour la vraisemblance de la
visite; mais il ne croit pas à la tradition que Retz se serait
retiré là, pendant quelque temps, pour y écrire des chapitres de
ses Mémoires.
Chèvreroche fut des premiers à s'agréger à la Congrégation. Nous
avons vu (Ch. V) que le frère Agathon, son supérieur, en était
le supérieur général, en 1702. Toutefois, le rôle de ce frère ne
parait pas avoir été aussi considérable que le suppose M. Idoux
(loc. cit.)
(18) Port et Jorxey étaient les titres, l'un, d'un archidiaconé
et d'un doyenné; l'autre, d'un doyenné de l'archidiaconé de Vôge.
(19) Institut..., p. 98 et sq.
(20) Institut, p. 110.
(21) Mandement... en tête de l'Institut infra citandus.
(22) Cette explication est publiée à la suite de l'Institut, p.
356.
(23) Ordonnance, publiée à la suite de l'Institut, p. 369.
(24) Ibid., p. 10.
(25) Ibid., p. 368
(26) lbid., p. 374.
(27) Nous tirerons les détails qui vont suivre du Registre de la
Congrégation de Saint-Antoine (1747-1789), conservé aux Archives
de Meurthe-et-Moselle, H. 2352 ... sauf toutefois indications
spéciales.
Semaine religieuse de Nancy -
12 mai 1928 - n° 19 - p. 301
HISTOIRE ET ARCHÉOLOGIE
Les Ermites au Diocèse de Toul (Suite)
Plus dociles et plus
persévérants furent les membres de la Congrégation de
Saint-Antoine. La plupart se montrèrent dignes se la sollicitude
dont leurs évêques les entourèrent : Scipion-Jérôme Bégon, après
Camilly, et Claude Drouas de Boussey, après. Bégon. Nous en
trouvons le témoignage, dans la Notice de la Lorraine, où Dom
Calmet écrit, à propos du Val des Nonnes, en 1756 : « Les ermites
répandus dans tout le diocèse de Toul s'y rassemblent toutes les
années, quelquefois au nombre de quarante. Ils ne font que des
voeux simples ; ils vivent, dans cette solitude, avec beaucoup
d'austérité, s'occupant du travail des mains et ne buvant du vin
qu'une fois la semaine. » Et, surtout dans ce qu'écrit des
solitaires de Sainte-Anne, près de Lunéville, Valentin Jamerai-Duval,
qui fut -employé, chez eux, cinq années durant, se ses 18 à ses
23 ans. « Je n'ai jamais vu les traits de la rustique simplicité
mieux exprimés que sur leurs visages et dans leurs manières.
Leur langage répondait parfaitement à leur extérieur : rien de
plus inculte et de plus négligé. Quant à leurs sentiments, ils
n'étaient pas aussi massifs que leur personne. Mais la nature
leur avait donné un grand fonds de bonté et de candeur, joint à
une santé robuste et à une admirable aptitude pour les travaux
de l'agriculture. A la vérité, ces bonnes gens n'entendaient
rien à parler de la vertu : ils se contentaient de la réduire en
pratique, sans daigner s'en apercevoir et sans se soucier que le
public y fît attention... Je puis dire avec sincérité que les
pénitences et les macérations que je leur ai vu pratiquer, m'ont
convaincu de la possibilité de celles qui m'avaient effrayé; en
lisant la vie des Pères de la Thébaïde. Sans parler des trop
fréquents Jeunes au pain et a l'eau et de l'usage de la haire et
du cilice, pendant le travail et au milieu des chaleurs de
l'été, j'ai vu de ces solitaires qui couchaient sur la dure,
même en temps de maladie, et, malgré la rigueur de l'hiver, la
tête et les pieds nus, et n'ayant qu'un bloc de bois pour
chevet. Un autre, qui ne vivait que de fruits et de légumes,
craignant que leur saveur naturelle ne fût un piège du démon,
pour le porter à la sensualité, avait soin d'en prévenir les
amorces, soit en mêlant des cendres avec ses aliments, soit en y
versant de l'eau dans laquelle il avait fait tremper les osiers
dont il fabriquait des corbeilles, infusion aussi amère que
l'absinthe, faite pour le supplice du goût» (29). Ce VALENTIN
JAMMERAI était ne à Arthonay, en Champagne, le 24 avril 1695,
d'un pauvre laboureur émigré d'Irlande.
Il avait 10 ans, quand son père mourut, laissant sa veuve et ses
nombreux enfants dans une détresse extrême. Pour soulager sa
mère, il se mit « en condition » et, ayant changé plusieurs fois
de maîtres, il fut amené, par les hasards de sa vie errante -
disons mieux : par la Providence - près de Deneuvre, à
l'ermitage de la Rochotte. Le frère Palémon, qui en était le
surveillant, l'accueillit avec bonté et, le voyant intelligent
et avide de s'instruire, lui enseigna le peu qu'il savait : il
nourrissait l'espoir qu'il entrerait, quand il aurait l'âge, au
noviciat, et les dispositions du jeune domestique encourageaient
cette confiance.
Mais, au bout de deux ans, en 1713, le charitable frère fut
envoyé à Jainvillotte, où il devait mourir, en 1768, à l'âge de
84 ans, après soixante-cinq ans de solitude. Sainte-Anne (29)
n'était pas très loin : la communauté, composée de quatre
ermites. pourrait utiliser son protégé. Il confia donc Valentin
au frère Martinien, surveillant de la maison, qui l'engagea
comme pâtre, pour garder le troupeau. Cette occupation monotone
luilaissait des loisirs : il les employa à satisfaire la passion
de l'étude qu'il sentait grandir en lui. A l'école de l'un des
solitaires, le frère Zozime, en peu de temps, il apprit à écrire
et se familiarisa avec- les premiers éléments de l'arithmétique.
Il parvint à se procurer des ouvrages de géographie, d'histoire
et autres branches des connaissances humaines; assis au pied
d'un arbre, dans la forêt de Vitrimont, il étendait sur l'herbe
se cartes, ouvrait ses livres et, sans perdre de vue le troupeau
confié à sa vigilance, il poursuivait son instruction.
En 1715. dans une partie de chasse, le duc Léopold le surprit,
lisant un volume; il l'interrogea, fut. frappé de ses réponses
et songea un instant, à le tirer de son humble condition; il se
contenta, toutefois, de lui envoyer quatre louis. Il ne songeait
plus au jeune pâtre, si friand de lecture, quand le comte- de
Vidampierre, gouverneur de ses fils, qui avait fait une
rencontre analogue et éprouvé le même étonnement, le lui
présenta, deux ans plus tard, et le recommanda à sa
bienveillante attention.
Vidampierre l'avait trouvé, gardant ses bêtes et vaquant à
l'étude, dans un étroit vallon. de la forêt; en considération de
cela, le duc- ajouta à son nom patronymique, celui de DUVAL.
Envoyé à l'Université de Pont-à-Mousson, il y fit, en peu de
temps, de rapides progrès... Bref, il devint conservateur de la
bibliothèque nouvellement formée, au château de Lunéville,
professeur d'histoire, de géographie et d'antiquités, à
l'Académie, sorte d'école supérieure pour les fils de la
noblesse lorraine et les jeunes étrangers qui fréquentaient la
cour. Il suivit à Florence le fils de Léopold, François III,
devenu duc de Toscane, de par le Traité de Vienne, en 1737, et y
reprit ses fonctions de bibliothécaire du palais; enfin, il fut
appelé à Vienne, où le même François, époux de Marie-Thérèse et
empereur d'Allemagne, les charges de la direction de
l'importante collection de monnaies et de médailles qu'il venait
de rassembler. Mais nullement ébloui par toutes ces faveurs, le
savant bibliothécaire, l'érudit numismate, n'oubliait point les
humbles ermites pauvres et ignorants, qui l'avaient si
paternellement accueilli. Nous ne tarderons pas à le constater.
(A suivre.)
E. M.
(28) Oeuvres de Jamerai Duval, I, p. 77 et 80. - C'est de ce
recueil que sont tirés les détails biographiques qui vont
suivre.
(29) Il s'agit de Sainte-Anne, près de Lunéville. Le texte du
contrat a été publié dans le Journ. Soc., Arch. lorri., 1680, p.
141.
Semaine religieuse
de Nancy - 7 juillet 1928 - n° 27 -
p. 451
HISTOIRE ET ARCHÉOLOGIE
Les Ermites au Diocèse de Toul (Suite)
Valentin Jamerai-Duval
n'avait guère connu, durant les sept années qu'il vécut sous
leur toit, que les anachorètes de la Rochotte et de Sainte-Anne;
Dom Calmet ne fait l'éloge que des solitaires du Val des Nonnes.
Mais nous avons un document authentique, officiel, peu suspect
de complaisance, qui nous permet de généraliser cette louange et
de l'étendre jusqu'à la suppression de la Congrégation touloise,
par l'Assemblée nationale constituante : c'est le registre des
délibérations de l'Assemblée générale annuelle (30). Le premier
tome en est perdu; mais le second nous renseigne sur la vie que
menèrent les ermites de 1747 à 1789.
D'après ces « résultats», cette vie apparaît avoir été, en
général, pour le moins régulière. L'Assemblée se montrait très
stricte sur l'observance de l'Institut ; elle recommandait aux
visiteurs d'être « attentifs et sévères»; elle ne se faisait pas
faute de punir les manquements.
Pourtant, en cette succession de quarante-deux assises, ne
rencontrent que quatre répressions, pour fautes graves... et les
sujets, à certains moments, durent être de soixante-dix à
quatre-vingt.
En 1747, ordre est intimé à un frère qui avait été dépouillé de
l'habit d'ermite, l'année précédente, nous ignorons pour quel
motif, de prendre la robe grise et courte de garde-chapelle ; et
on « donne établissement» au frère Marcien, pour aller demeurer
à Saint-Jean, de Blâmont, avec ordre de faire sortir le frère
Isidore, qui devra, dans les trois jours, se présenter au
supérieur Vatelot, « sous peine d'être rasé et dépouillé de
toutes marques d'ermite, rayé de la Congrégation et relevé de
ses voeux, à cause de la vie désobéissante et scandaleuse qu'il
mène, depuis dix ans. - En 1760, le frère Benoît Hyacinthe
Montigny, de Saint-Mihiel, qui avait pris l'habit le 29 octobre
1747, mais n'avait pas été admis à la profession, est envoyé en
disgrâce, de Jainvillotte, à Saint-Claude, de Thelod, à cause de
sa mauvaise conduite. Il ne s'y amende pas. Le chapitre de
l'année suivante le condamne à venir faire un mois de noviciat -
nous dirions de retraite - au Val des Nonnes, « pour y reprendre,
à ses frais, l'esprit de son état », sous peine d'être exclu de
la Congrégation, et l'ermitage de Thelod serait fermé. Comme son
mois de retraite ne l'avait guère assagi, l'Assemblée de 1765
prononça son expulsion. Il lui fut interdit, en outre, d'être
garde-chapelle, à Thelod ou ailleurs, - En la même année 1760,
le frère Théodore est envoyé faire un stage de trois mois au
noviciat, à cause de sa conduite peu édifiante.
Les autres cas sont moins graves : ils témoignent de la forte
discipline qui maintenait l'esprit de l'institution. Nous les
citerons tous.
Les frères Onuphre et Pacôme ont fait du trafic, chose défendue
aux ermites : ils verseront 31 livres, à la caisse de
l'aumônerie, et le premier est transféré de Sainte-Anne, de
Rouceux, aux Croix-Ferry, de Rambervillers (1748) - Le frère
Sérapion, de Saint-Pierre, de Choloy, a bu et mangé chez un
séculier, sans nécessité : un mois de noviciat (1749). -
Plusieurs cas analogues. - Le frère Piamont, qui s'était
présenté avec son père, le 12 mars 1750, et avait été seul admis
ce jour-là, avait reçu plus tard, par mandat du chapitre., son
père, devenu ermite, comme compagnon, à Notre-Dame de Cerus.
Quelle faute commirent-ils, l'un ou l'autre ? L'Assemblée de
1757 lui ordonne de se séparer du vieillard au plus tôt, pour
aller demeurer, avec frère Anatoile, à Saint-Eucher, sous peine
d'être expulsé. - Au chapitre du 2 mai 1759, le frère Paul,
surveillant de Sainte-Geneviève, définiteur du district du Port
et un autre, dont le nom est illisible, demandent pardon à
genoux, « pour une démarche imprudente, pour ne rien dire de
plus, qu'ils ont faite » : ils avaient quêté et avaient été,
pour ceci, condamnés, par la Cour de Nancy, à demander à leurs
supérieurs d'être changés de résidence. Dans la suite, le frère
Paul sortit de la Congrégation, « pour quelque disgrâce » ; mais,
en 1777, il sollicita sa réintégration, qui lui fut accordée, «
étant donné qu'il s'était toujours bien comporté » (31). - Le
frère Siméon a quitté son ermitage, sans autorisation, pour
aller « refaire sa santé » : six semaines de « séjour » au Val
des Nonnes, complèteront la cure (1760). - Le frère Léon est
d'un caractère « peu sociable, entêté» : un mois de noviciat,
pour l'assouplir ! (1760, également). - Le frère Arnauld,
condamné à trois mois de Val des Nonnes, pour avoir désobéi, a
donné des marques de repentir : il est envoyé à Saint-Pierre, de
Choloy.
Outre ces sanctions, plutôt rares, des « avis charitables »
étaient donnés, à chaque assemblée, soit en termes généraux,
soit avec précisions de personnes, et les procès-verbaux
mentionnent que « les frères paraissent y déférer », A en juger
par l'insistance que l'on met à leur en rappeler l'interdiction,
plusieurs toutefois étaient quelque peu rétifs sur la question
des quêtes.
On voit combien furent injustes les accusations que porta,
devant Léopold, l'ancien visiteur général de la Congrégation de
Saint-Jean-Baptiste, le Père Hugues de Saint-François (32). Cet
homme, aigri par les disgrâces que son caractère violent et ses
abus de pouvoir lui avaient attirées, n'avait pu rester à
l'ermitage Saint-Arnould, où il s'était retiré, après sa
déposition, en 1717. Il était venu demander asile aux ermites de
Sainte-Anne, deux ou trois ans après que leur pâtre et
admirateur, Valentin Jamerai, les avait quittés. Son art
d'intrigue, lui ménagea la confiance ducale ; il en profita,
pour les desservir, auprès de Son Altesse, ainsi que ses anciens
subordonnés, assurant que, dans ces deux congrégations, il n'y
avait « pas un honnête homme»; que c'étaient « tous des fripons
et des coquins » (33).
Avec le contrôle des visiteurs et de l'Assemblée, l'autorité du
supérieur général et les retraites spirituelles, auxquelles,
depuis 1761, furent conviés les ermites, ce qui maintenait dans
les solitudes de la Congrégation l'esprit de régularité, c'était
l'excellente formation à la vie érémitique, que recevaient les
postulants, de la part des maîtres des novices, qui se
succédaient dans cette charge importante : le frère APOLLON, le
premier dont nos documents nous transmettent le nom et qui
cumula les fonctions de visiteur, de maitre des novices et de
secrétaire, jusqu'à l'assemblée de 1761, dont il signa ainsi le
procès-verbal : « Apollon, à présent simple ermite, déclaré
jubiley »; il mourut au Val des Nonnes, le 13 novembre 1764 - le
frère ZOZINE, « grand docteur en agriculture », qui avait donné,
à Sainte-Anne, « les premières notions d'écriture er
d'arithmétique » à Valentin Jamerai et qui ne resta en fonctions
que trois ans - le Frère ROMAIN qui, lui aussi, cumula, de 1767
à 1790, les charges de visiteur et de maître des novices. Né à
Dommartemont (34), Nicolas Ferry dans le siècle, vigneron de son
état et protégé du frère Paul, alors surveillant de
Sainte-Geneviève, il était entré à 21 ans, au noviciat, le 6
décembre1755, et le registre porte qu'il savait « lire, écrire
passablement bien et faire des paniers à dessert et autres
ouvrages. Il reçut l'habit, à l'assemblée du 4 mai 1756, fut
envoyé à Sainte-Anne (Lunéville) et prononça ses voeux à
l'assemblée du 19 avril 1757. - ces deux cérémonies ne se
faisaient plus qu'à la Messe d'ouverture du chapitre annuel.
Nous aurons à constater la vigilance et la fermeté de son
gouvernement.
Le recrutement des solitaires était relativement bien fourni :
deux ou trois, quelquefois plus, chaque année, et d'ordinaire
des jeunes gens ou des hommes dans la force de l'âge :
vignerons, cultivateurs, manoeuvres, maçons, tisserands,
tapissiers, cordonniers, fileurs de laine, fouleurs de bas, etc
... presque tous sachant lire et écrire convenablement ; venus
des Duchés ou des Evêchés, du Bassigny, de l'Alsace, même
d'outre- Rhin ; quelques-uns ayant du patrimoine. Un clerc
tonsuré, François Blanverlet, de Spincourt (35), qui avait été
quelque temps précepteur, fut admis, en 1767, et prit le nom de
frère Odilon. Nous ignorons s'il se prépara plus tard au
Sacerdoce.
Jamerai-Duval, malgré la distance qui le séparait d'eux, perdait
point le souvenir de ses bienfaiteurs. Ayant dû se rendre, de
Vienne, à Paris, pendant l'été de 1752, il profita de ce voyage
pour visiter les lieux où s'étaient écoulées, dans les
ravissements de l'étude, les années de son adolescence
besogneuse (36). Il vint à la Rochotte, puis, à Sainte-Anne, et,
frappé de la vétusté des humbles logis, il donna amplement de
quoi les réédifier. Son vieil ami, le frère Zozime, avait envoyé
à Saint-Joseph, de Messein; il monta l'y retrouver ; et il lui
parut, écrivit-il, « que la pauvreté de cette maison ne cadrait
nullement avec le charmant paysage où elle était située.» Il en
entreprit la reconstruction et en dressa lui-même le plan.
Et ce fut un couvent en miniature qui s'éleva, propre et
discret, de 1755 à 1759, sur cette côte ardue, à l'abri des
roches du vieux camp gaulois, parallélogramme de 80 pieds de
long sur 69 de profondeur, avec une cour, à l'intérieur. La
chapelle occupait le côté est, avec le choeur des ermites et la
sacristie; au rez-de-chaussée, le bâtiment de façade comprenait,
outre l'entrée, l'escalier et un corridor, la salle du Chapitre,
le réfectoire, la cuisine et une cellule; et les deux autres
côtés, une écurie, une orangerie, la chambre à four, des
halliers et autres dépendances. Dix cellules, un dortoir, une
chambre d'étranger et de vastes greniers occupaient l'étage.
Enfin de caves étaient susceptibles d'emmagasiner la récolte de
huit à dix jours de vignes (37).
« Peut-être, écrivait Duval à l'une de ses correspondantes, me
saurez-vous mauvais gré d'avoir été aussi généreux envers des
ermites que l'on regarde comme les pygmées de la vie monastique
; mais sachez bien que, si ces solitaires n'eussent été que des
moines, je n'eusse rien fait pour eux - ceci est bien du temps
de l'encyclopédie - mais n'étant que des paysans travestis,
nullement fondés aux dépens d'autrui, ne demandant rien à
personne, subsistant du travail de leurs mains et totalement
dévoués à l'agriculture, je me suis fait un plaisir de
concourir, avec eux, à parer cette innocente nourrice du genre
humain et à décorer des paysages, où il me semblait que la
nature et la paix avaient établi leur séjour. D'ailleurs ces
bonnes gens avaient un titre qui m'en a toujours imposé : ils
avaient été mes bienfaiteurs... et j'avais souvent abusé de leur
patience, en préférant ma volonté à la leur... » (38).
Sa reconnaissance n'obligea pas des ingrats. Quand sa dernière
heure eut sonné, ils consignèrent, sur leur registre, en guise
d'éloge funèbre, cette notice simple et touchante : « 3 novembre
1775, est mort M. Duval, bibliothécaire et antiquaire de S. M.
Impériale, qui est un très grand bienfaiteur pour les ermites,
ayant fait rebâtir Sainte-Anne, près Lunéville, l'ermitage de la
Rochotte, près Baccarat, Saint-Joseph de Messein et Notre-Dame
de Grâces, près Crévéchamps, et fait quantité de bienfaits à
différents ermites, de sorte qu'il a fait du bien à la.
Congrégation, pour environ quarante-cinq mille livres. C'est
pourquoi on prie tous les frères de se souvenir de lui, devant
le Seigneur, d'autant plus qu'il n'a été établi, ni fondations
de Messes, ni dit de prières, pour le repos de l'âme de ce
bienfaiteur. »
Si Duval avait reconstruit Saint-Joseph sur un plan relativement
vaste, c'est qu'on lui avait fait entrevoir que le centre de la
Congrégation y serait mieux placé qu'au Val des Nonnes. Aussi,
les bâtiments à peine terminés, l'assemblée du 22 avril 1761
décida que, dès juin, le noviciat serait transféré à Messein et
mis sous la direction du frère Zozime. Le chapitre de 1762 se
tint encore au Val des Nonnes; celui de 1763, également; mais il
y fut statué que, désormais, l'Assemblée générale se réunirait à
Saint-Joseph.
Cette nouvelle maison-mère, d'après une délibération du chapitre
de 1776, servit aussi à hospitaliser les vieillards de la
Congrégation, dans la mesure des logements disponibles: en même
temps que ces vétérans de la solitude y étaient « soulagés de
leurs infirmités et caducité », les novices « étaient accoutumés
à exercer la charité», envers leurs frères âgés et impotents.
Cette judicieuse considération dicta cette réunion des jeunes et
de vieux, qui serait aujourd'hui contraire au Droit canonique :
le noviciat, en effet, doit être absolument séparé du reste de
la communauté.
Le bénéfice de ce transfert fut complété par l'impression votée
en 1767, de l'Institut, tel que l'avait complété François Bleuet
de Camilly et tel que l'expérience d'un demi-siècle en avait
consacré la sagesse. Aux statuts eux-mêmes et aux mandements et
ordonnances qui les édictaient ou les interprétaient, on ajouta
une instruction sur la prière, une méthode de méditation et
diverses formules de prières... Et ce fut un joli volume in-12
relié en veau, de VIII et 388 pages, qui sortit, cette même
année 1767, des presses du libraire Monnoyer, de Neufchâteau,
sous ce titre : « Institut des Hermites du diocèse de Toul, sous
l'invocation de saint Antoine, premier père des solitaires.
Imprimé par ordre de Monseigneur ».
L'écu « d'azur au chevron d'or, accompagné de trois fers de
lance d'argent; au chef d'or, chargé de trois molettes de sable
» qui figure au frontispice, indique que l'approbation venait de
Claude Drouas de Boussey, alors évêque de Toul, oncle ou cousin
de Hector-Bernard Drouas, archidiacre, et vicaire général,
supérieur de la Congrégation.
La bibliothèque municipale de Nancy en possède un exemplaire,
qui appartint au frère Hilarion ermite à Notre-Dame de Grâces,
de Crévéchamps.
(30) Arch. de M.-et-M., H. 2352
(31) Il mourut à Sainte-Anne, de Rouceux, en 1781, âgé de 80
ans, après soixante années de solitude. (L. BOSSU, L'Ermitage d'Offrécourt)
(32) Voir Ch. V.
(33) Mémoires... d'Archottes, supr. cit.
(34) Dommartemont, c. de Nancy-Sud.
(35) Spincourt, arr. de Montmédy, Meuse.
(36) Oeuvres, II, p. 290.
(37) On peut encore aujourd'hui se rendre compte sur place de la
disposition.
(38) Lettre à Anastasie Socoloff. (Oeuvres, I, p. 156.) |