| Est-Républicain14 juillet 1924
 
 L'inauguration du Monument aux Morts de Blâmont
 La place, qui nous est 
				mesurée, ne nous permet pas de rappeler aujourd'hui le riche 
				passé de la ville de Blâmont à qui certains historiens 
				trouvèrent cette étymologie ingénieuse : Albus Mons 
				(Blanc-Mont).II faudrait nous reporter à l'époque mérovingienne pour en dire 
				complètement la glorieuse histoire. Ce n'est pas le moment. 
				Passons donc sous silence les vicissitudes de ce beau domaine, 
				qui vécut et se développa sous l'autorité de l'empereur 
				d'Allemagne, puis des évêques de Metz, en 1240, et des 
				seigneurs, suzerains du riche comté. Comme Deneuvre, dont nous 
				parlions il y a huit jours, Blâmont connut des périodes 
				alternées de prospérité, de grandeur et de misère. Cité 
				guerrière, elle saigna de toutes les invasions, dont la plus 
				cruelle, certes, fut la dernière, cette occupation qui dura de 
				1914 à 1918, séparant pendant quatre interminables années 
				Blâmont de l'unité française.
 C'est ce souvenir des angoisses et des malheurs passés que 
				Blâmont commémorait hier, en même temps qu'il célébrait la 
				mémoire de ses enfants, morts pour la patrie.
 La douce petite cité, si pittoresque, s'était parée de ses plus 
				beaux atours ; arcs de triomphe, feuillages, guirlandes, 
				trophées, mettaient partout leur note de gaité claire.
 Nous arrivons en même temps que M. le préfet et notre ami, le 
				sénateur Michel, à la mairie, où l'excellent camarade Lucien 
				Labourel, maire, entouré de son conseil municipal, attendait le 
				représentant du gouvernement.
 Un cortège aussitôt s'organisa, précédé par la fanfare et la 
				chorale de jeunes filles des établissements Mazerand, pour se 
				rendre sur la place où doit avoir lieu l'inauguration du 
				monument.
 Parmi les personnalités présentes à la tribune, nous remarquons 
				autour de MM. Labourel, Magré et Michel, qui viennent d'y 
				prendre place, MM. le général Penet, commandant le 20e corps 
				d'armée ; Georges Mazerand et de Warren, députés de 
				Meurthe-et-Moselle ; de Turckheim, conseiller général ; Derque 
				et Adam, conseillers d'arrondissement ; Campion, Bechmann ; les 
				conseillers municipaux ; presque tous les maires du canton ; le 
				docteur Hanriot ; Coulon, inspecteur primaire ; Piffert, maire 
				de Sarrebourg ; Maze, capitaine de gendarmerie,
 Dans la foule qui se presse devant le monument, maintenue par un 
				cordon de sapeurs-pompiers et de gymnastes de la société de 
				préparation militaire, nous remarquons nombre de physionomies 
				sympathiques et amies.
 Les familles des morts sont là, à un emplacement réservé. Des 
				drapeaux flottent ; ce sont ceux des vétérans, de l'A.M.C., de 
				la société de P. M. La fanfare l'Industrielle, si généreusement 
				prodigue de son temps et de son talent ; l'aimable phalange des 
				jeunes cantatrices de Cirey ; les martiales trompettes du 
				docteur Hanriot - n'est-ce pas ainsi qu'on les nomme ? - les 
				vétérans de 70-71 ; les enfants des écoles, les bras chargés de 
				gerbes fleuries, sous la direction de leurs dévoués maîtres et 
				maîtresses, MM. Thiaucourt et Frécot, Mlles No et Rouillon ; le 
				clergé ; tout le monde, tout Blâmont, est debout, présent dans 
				un grand geste d'hommage et d'infinie gratitude.
 La bénédiction du monument terminée, l'Industrielle joue la «  
				Marseillaise », cependant que l'on admire les nobles proportions 
				de la stèle de granit, oeuvre d'un sculpteur blâmontais, notre 
				bon ami François, ornée de la palme en bronze du souvenir et 
				couronnée par une Victoire portant une couronne de lauriers. Sur 
				les côtés de la stèle, on peut lire les noms des soldats, puis 
				des civils fusillés, des civils tués par le bombardement ou 
				morts en captivité. Ce monument, si simple et si beau, est un 
				témoignage irrécusable et complet des horreurs de la guerre au 
				pays lorrain.
 
 L'appel des morts
 C'est un vétéran de 70, M. Prosper Mantout, qui fait l'appel des 
				morts, liste de douleur, émouvante et terrible, éloquemment 
				évocatrice du martyrologe de Blâmont :
 Petit Auguste, Petit Emile, Petitfils Camille, Pierreville 
				Auguste, Pierson Jules, Pinoit G., Pichely Paul, Pister Joseph, 
				Pister René, Poucher Henri; Théret Charles, Thomas P., Tonnaire 
				Henri, Toubhans Arthur, Toubhans Pierre, Trabac Camille, Welcker 
				Edmond, Welcker Pierre, Wongkoefft Georges, Godchot Paul, Gonand 
				Hubert, Gruber Emile, Hertz Louis, Holstein Achille, Jardel 
				Aimé, Knapp Valentin, Lallemand Constant, Lercher Auguste, 
				Macaire Auguste, Marin Louis, Masson Emile, Merciot Alfred, 
				Moitrier Pierre, Noisette Eugène, Nordon Robert, Obelliane Paul, 
				Perrin Auguste, Adam Joseph, Bernard Gustave, Blanchet Louis, 
				Blum Gaston, Campion Robert, Chatel Henri, Chenal Léon, Chenal 
				Marcel, Clèves Camille, Colin Félix, Coster Alfred, Daguindeau 
				Auguste, Daverio Louis, Depoutot Camille, Duchamp Paul, Faivre 
				Aimé, François Charles, Géhin Georges.
 Civils fusillés. - Barthélemy Charles, Beaupert Eugène, Cuny 
				Aline, Fouël Louis, Magnier Victor.
 Civils tués. - Barbier Marie, Bertrand Marie, Boudot Jules, 
				Hertrich Alexis, Mozimann Catherine, Wongkoefft Jules, 
				Wongkoefft Maria.
 Civils victimes de faits de guerre. - Colin Charles, Georgel 
				Célestin, Martin Constant, Tiha Edmond.
 Les trompettes qui, avant le tragique appel, ont ouvert le ban, 
				le ferment maintenant, puis les enfants des écoles interprètent 
				une cantate.
 
 Les discours
 
 M. CAEN
 Au nom du comité d'érection du monument, M. Caen remit à la 
				municipalité ce symbole du souvenir.
 Au nom de la section de Blâmont, de l'Association des mutilés et 
				anciens combattants, M. Caen s'incline avec une profonde émotion 
				devant ce monument élevé à la plus pure des gloires : celle du 
				sacrifice.
 
 M. LABOUREL
 M. Lucien Labourel, maire de Blâmont, rappelle les heures 
				d'enthousiasme et de déchirement de la mobilisation, puis les 
				terribles épreuves des premiers combats.
 «  Dès les premiers jours, dans les combats qui se déroulèrent à 
				nos portes, tombent les premières victimes. Puis la lutte 
				s'étend, nos corps de couverture, auxquels appartiennent presque 
				tous nos jeunes gens, sont transportés successivement sur tous 
				les points menacés et, partout, c'est le même héroïsme qui 
				arrête le flot envahisseur, le contient pendant quatre longues 
				et pénibles années et, enfin, d'un dernier élan victorieux, le 
				rejette hors de notre sol. Mais, hélas, à chacune de ces étapes 
				marquées de nouveaux exploits, s'allonge la liste funèbre, 
				rançon de tant de gloire. Et cinquante-çinq de nos jeunes 
				concitoyens dorment épars sur l'immense champ de bataille.
 «  Si quelques-uns possèdent une tombe où une mère, une femme, un 
				fils peut aller s'agenouiller, combien d'autres mêlent leurs 
				cendres à celles d'autres martyrs inconnus. Ce monument leur 
				tiendra lieu de tombe, personnifiera leur mémoire. Tous ceux qui 
				pleurent un être cher pourront s'y arrêter et nous tous, nous 
				pourrons nous y recueillir, adresser nos pensées émues et 
				l'expression de notre reconnaissance éternelle à ceux qui, mêlés 
				à des centaines de milliers d'autres héros ont, par leur sublime 
				sacrifice, libéré notre belle France, nous ont conservé nos 
				libertés, nous ont rendu nos foyers.
 «  A cette liste de héros s'ajoute la liste, bien longue aussi, 
				des tristes victimes de l'invasion. Seize habitants tombèrent au 
				cours de 1 occupation. Les uns fusillés, comme Louis Foell mis 
				au mur de l'hôtel de ville, comme M. Barthélémy, ce vieillard 
				abattu à sa fenêtre, comme Aline Cuny, accusée d'intelligences 
				avec nos troupes. D'autres, amère dérision, frappés par les obus 
				français égarés.
 « Et les dates gravées sur le granit : 1914- 1918 nous 
				rappelleront la durée de l'occupation, plus de quatre années au 
				cours desquelles la population demeurée sous la domination 
				ennemie eut à endurer les pires souffrances, les plus cruelles 
				humiliations. Mais, ni la botte qui pesait lourdement, ni la 
				misère, ni les tortures morales, ne purent abattre sa confiance 
				et son courage. Et malgré les éva- i ouations successives qui, à 
				chaque départ, arrachaient de nouveaux membres aux familles 
				inquiètes, laissant ceux qui restaient un peu plus abandonnés, 
				la foi dans les destinées immuables de la Patrie demeura entière 
				jusqu'au bout. Cette population a bien mérité l'éclatant 
				.témoignage d'admiration que lui a décerné le pays. »
 M. Lucien Labourel, applaudi par ses vaillants administrés, 
				termine en disant : «  Nous aurons maintenant les noms de nos 
				héros toujours présents dans les yeux comme leur souvenir était 
				déjà gravé dans nos coeurs. »
 
 M. DE TURCKHEIM
 Le conseiller général de Biâmont exalte les vertus de ceux qui 
				se sont sacrifiés pour nous et déclare que les Lorrains 
				réclament l'application stricte du traité de Versailles. Ce 
				n'est pas, dit-il, le moment de laisser tomber nos armes !
 
 M. GEORGES MAZERAND
 Fréquemment applaudi, le sympathique député de Lunéville, parle 
				des souffrances stoïquement supportées par la population de 
				Blâmont :
 «  Le destin de votre commune l'a liée étroitement aux grands 
				événements de l'histoire de la France et de la Lorraine. Par sa 
				situation géographique, Blâmont a subi le contrecoup de toutes 
				les luttes, heureuses ou malheureuses, qui se sont déroulées 
				pour la possession de notre chère province.
 «  Il a supporté en maintes occasions avec une même résignation 
				douloureuse tous les maux de la guerre ; faisant abstraction de 
				ses propres dommages il n'envisagea toujours que ce seul but : 
				la victoire des armes françaises !
 «  L'issue de la guerre de 1870 atteignit fortement Blâmont, : il 
				échappa certes à la mutilation, mais devenu ville frontière, il 
				assista, impuissant à l'arrêt de son essor économique, dans 
				l'impossibilité d'écouler ses produits vers la Lorraine annexée, 
				désormais fermée par les prohibitions douanières... Le silence 
				et le recueillement succédèrent à l'ancienne activité... Puis 
				les années passèrent, Blâmont avait repris un peu de son 
				ancienne prospérité ; et à défaut du mouvement, de l'agitation 
				des villes de grosse industrie, connaissait les douceurs d'une 
				existence paisible.Cette quiétude paraissait devoir durer quand 
				la France se vit imposer aux derniers jours de juillet 1914 la 
				guerre qu'elle souhaitait éviter depuis quarante-quatre ans, 
				même au prix de ses intérêts et de ses patriotiques espérances ! 
				Dès la première heure, Blâmont n'avait pu s'illusionner sur son 
				sort.
 «  Vos mobilisés rejoignaient en toute hâte leurs corps 
				d'affectation, la population dans un calme admirable attendait 
				les événements.
 «  Nos troupes avaient dû reculer à 10 kilomètres, vous saviez 
				l'invasion inévitable. Elle se produisit dès le 4 août sans coup 
				férir, avec cette méthode que les Allemands allaient apporter 
				dans la conduite des opérations. Cela dura treize jours 
				consécutifs pendant lesquels vous avez traversé des instants 
				d'affreuses angoisses.
 «  Mais l'atmosphère s'éclaircissait soudain : nos soldats 
				avaient repris l'avantage en quelques points et au début de la 
				seconde quinzaine d'août vous paraissiez libérés !
 «  Hélas ! la trêve fut de bien courte durée. Tandis que tant de 
				villes et villages du département étaient définitivement 
				préservés des souillures de l'occupation, Biâmont, le 22 août, 
				retombait comme Cirey sous un joug de fer qui ne devait finir 
				qu'à l'armistice:
 «  Le long supplice se développa ainsi qu'un mal implacable qui 
				s'insinue dans un organisme avec des alternatives d'apaisement 
				et d'aggravation.
 «  Selon le procédé cher à nos ennemis, vous étiez traités avec 
				plus d'indulgence, on dit, acquise par la longue tradition des 
				vertus chevaleresques que j'ai tenu à mettre en relief !
 «  En 1922, le gouvernement décerna à Blâmont la croix de guerre 
				: ce faisant, c'est au courage, au sang-froid des habitants 
				qu'il rendit un témoignage éclatant !
 «  Vous n'aviez pas eu seulement à déplorer l'assassinat de 
				plusieurs personnes : le hideux cortège de ces horreurs a été 
				complété par la mort d'inoffensifs habitants tués par les 
				bombardements, des décès prématurés consécutifs aux mauvais 
				traitements des otages et des prisonniers civils, crimes 
				inutiles, commis dans le sot espoir de l'intimidation, par des 
				ennemis aussi bornés qu'inhumains !
 «  A toutes ces malheureuses victimes que leur sexe, leur âge, 
				leur qualité ou même une méprisable pitié quand ils croyaient à 
				leur triomphe, avec une haine sournoise et des raffinements de 
				cruauté quand leurs troupes essuyaient quelque échec !
 «  Leur attitude était notre meilleur moyen d'information sur la 
				situation exacte de nos armées !
 «  Quelque pénible qu'ait été cette existence elle aurait été 
				supportable, vu les circonstances, si l'occupation n'avait donné 
				lieu dès le début à des représailles sanglantes suscitées par 
				les révoltes du patriotisme dé quelques-uns de vos concitoyens.
 «  Que vous ayez supporté la vue de tels spectacles et qu'ensuite 
				vous n'ayez ressenti ni le découragement ni la faiblesse, soit 
				dans les moments critiques de la guerre, soit quand vous 
				subissiez . d'autres deuils dans la personne de vos mobilisés, 
				voilà qui indique la qualité de votre caractère, votre force 
				d'âme, comme non-combattants enfin, auraient dû préserver, 
				j'aurais adressé aujourd'hui cet hommage suprême, si même je n'y 
				avais été convié par l'ordonnance de cette cérémonie....»
 M. Mazerand parle ensuite des difficultés de l'heure présente et 
				de nos angoisses patriotiques. Il conclut en ces termes :
 «  A Dieu vât ! s'écrient les marins. Calme et sans reproches, la 
				France démocratique, pacifique et loyale, ne veut que son dû et 
				l'observation du droit et de la justice pour lesquels elle a 
				combattu ! Nul pays n'est plus que le nôtre respectueux des 
				droits des autres nations. Aussi ne craint-il rien de leur 
				jugement impartial ! Celles qui transgresseraient les lois de 
				l'équité devraient tôt ou tard s'en repentir, et des agresseurs 
				renouvelant l'attentat de 1914 nous trouveraient unis et 
				résolus, prêts à la riposte et décidés à suivre en émules 
				fidèles la voie de ceux que nous avons glorifiés ici !
 «  Vive la France !
 «  Vive la Lorraine ! » (Applaudissements.)
 
 M. DE WARREN
 A son tour, M. de Warren vient rendre un pieux et éloquent 
				hommage aux grands morts grâce auxquels la puissance de 
				rayonnement de la pensée française continue à se répandre et à 
				produire ses effets bienfaisants sur le monde.
 A nous de continuer l'oeuvre de ceux qui se sont dressés pour 
				défendre le droit et la liberté.
 M. de Warren termine en exaltant la générosité française.
 
 M. LE SENATEUR MICHEL
 Des cantates et des sonneries de trompettes ont jeté leur notre 
				allègre à la fin de chaque discours.
 De sa voix haute et claire, l'éminent sénateur de 
				Meurthe-et-Moselle rappelle que dix années se sont déjà écoulées 
				depuis l'effroyable tragédie qui ensanglanta l'Europe. Dans une 
				improvisation chaleureuse, M. Louis Michel met en puissant 
				relief les enseignements du sacrifice de nos soldats : le 
				devoir, le souvenir, la reconnaissance.
 Développement magistral que la hâte d'un trop rapide 
				compte-rendu ne nous permet pas, malheureusement, de noter ,par 
				le menu.
 M. Louis Michel voit dans l'excellent esprit des générations 
				nouvelles et dans la fière énergie de la jeunesse lorraine, la 
				plus sûre sauvegarde du pays contre les tentatives d'agression 
				d'un ennemi qui se refuse à accepter sa défaite.
 «  Confiance, dit-il en terminant, confiance parce que les 
				vivants suivront l'exemple des morts ! » (Applaudissements).
 
 M. LE PREFET
 «  Je suis reconnaissant à M. le maire, dit M. Magré, de 
				l'aimable insistance qu'il a mise à me demander d'assister 
				personnellement à la cérémonie d'aujourd'hui. J'y suis venu 
				d'autant plus volontiers que j'estimais que le préfet de 
				Meurthe-et-Moselle se devait de donner lui-même cette marque de 
				particulière sympathie à votre commune qui fut parmi celles qui 
				eurent le plus à subir tout le faix de la guerre, parce qu'elle 
				fut frappée non seulement comme toutes les autres dans ses fils, 
				dont le sang coula si abondamment pour le pays, mais aussi parce 
				qu'elle eût à deux reprises, à connaître avec les transes du 
				front de combat, toutes les humiliations d'une dure et si longue 
				occupation. Et par-ce qu'elle a été parmi les plus malheureuses, 
				il m'a semblé qu'elle avait droit auourd'hui, de notre part, à 
				une dilection plus attentive et plus attendrie. »
 M. Magré évoque en poète les joies de la paix et de la vie 
				française revenues. Il poursuit :
 «  Au coeur de cette fraîche et verte vallée de la Vezouze, votre 
				jolie et noble cité, fière des ruines qui la dominent et qui 
				attestent l'antique valeur de son altière forteresse et de ses 
				nombreuses enceintes, avait déjà eu, au cours des siècles, à 
				connaître des invasions et des dévastations. Retires, Souabes et 
				Suédois tour à tour y avaient apporté le pillage et l'incendie. 
				Plusieurs fois, elle avait vu ses maisons en cendres, sa 
				population décimée, ses défenseurs paseés au fil de l'épée ou 
				ignominieusement pendus, ses notables, ses magistrats emmenés à 
				la queue des chevaux de routiers voleurs et pillards. Mais, 
				depuis, des années de civilisation s'étaient accumulées et nous 
				pouvions penser que les hautes spéculations de l'esprit, en 
				affinant l'intelligence de l'homme, l'avaient doté d'une 
				conscience plus nette qui lui inspirerait désormais l'horreur de 
				l'injustice et de crime...»
 Hélas, il a suffi d'un seul coup de canon pour que l'âme 
				allemande retrouvât dans l'odeur de la poudre toute son 
				ancestrale barbarie.
 Et M. Magré, en termes émouvants, rappelle les heures 
				douloureuses de Blâmont et les assassinats par l'ennemi des 
				otages et des femmes. Il termine par une péroraison, magnifique 
				qui s'adresse «  à tous ceux-là dont il sent la douleur s'élever 
				de cette assistance recueillie pour aller éparse dans l'air qui 
				pleure au pied de ce monument. Qu'elle leur soit douce, cette 
				douleur, comme elle doit leur être une raison d'indicible 
				fierté, cette Victoire de bronze qui, sur cette pierre rayonnant 
				de leur gloire, dépose la palme sacrée. Que leur simple mais 
				grand sacrifice, dont le mérite ne saurait jamais être égalé, 
				nous serve pour toujours de leçon et qu'il nous guide et nous 
				soutienne sur le chemin des luttes nouvelles. » 
				(Applaudissements.)
 
 Le banquet
 Les discours sont, terminés. La musique joue. Le soleil, 
				implacable, flambe dans l'azur éblouissant.
 Les personnalités officielles se rendent à l'ancien collège où a 
				lieu l'inauguration des écoles, cérémonie dont nous parlerons 
				dans notre prochain numéro.
 Ensuite, tout le monde se rend à l'hôtel de ville où un fort 
				beau banquet est servi par M. Cuny, hôtelier.
 Déjeuner charmant, en dépit d'une chaleur accablante et 
				congestionnante, que clôturèrent deux toasts seulement, de M. 
				Lucien Labourel, maire de Blâmont, et de M. le préfet, qui fit 
				longuement acclamer le nom de M. Gaston Doumergue, président de 
				la République.
 Fernand ROUSSELOT.
 
 
					
			|  1924 (13 juillet) Le monument commémoratif élevé à la mémoire des Soldats et Civils victimes de la Grande Guerre
 |  1924 (13 juillet) - Inauguration du monument commémoratif élevé à la mémoire des Soldats et Civils victimes de la Grande Guerre
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