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 Edmond
                      DELORMELUNEVILLE ET SON ARRONDISSEMENT
 Tome II
 1927
 CHAPITRE XIII -
                      LE CANTON DE BLAMONT
 Le Canton de Blâmont compte 33 Communes, peuplées de
                      7.741 habitants. (1)
 Des neuf Cantons de l'Arrondissement, c'est donc le plus
                      riche en villages C'est aussi, de tout l'Arrondissement,
                      le plus riche en terres. Il groupe, en effet, 23.054
                      hectares, dont 9.763 sont terres arables, 5.946 des prés,
                      4.489 des bois. 3.456 hectares de terrains n'ont pas de désignation
                      spéciale.
 Sur les trente-trois communes, huit ont un territoire de
                      plus de mille hectares. Leintrey en a 1.543 ; après lui,
                      viennent: Domèvre, avec 1.479 hectares ; Embermenil, avec
                      1.408; Frémonville, 1.303. Six de ces localités ont plus
                      de 200 hectares de prés, dix, plus de 100, et trois, 100
                      hectares. Dix-neuf villages ont donc 100 ou plus de 100
                      hectares de prés.
 Bien que ce Canton ait eu le douloureux privilège d'être
                      compris dans la zone rouge, six Communes seulement ont
                      encore des étendues importantes de terres restées
                      incultes, représentant plus de cent hectares pour chacune
                      d'elles: Vého, avec 240 hectares; Emberménil, 241;
                      Domjevin, 182; Domèvre, 133; Vaucourt 133; Gondrexon,
                      115.
 Les terres font partie d'un vaste ensemble qui, dépassant
                      la Vezouze, au Nord, se prolonge, au Midi, jusqu'aux
                      Cantons de Badonviller et de Cirey, et s'arrête, à l'Est
                      et à l'Ouest, à des coteaux élevés. Le tout représente
                      une cuvette peu profonde, dont le fond est, en dehors des
                      vallées, surélevé par des coteaux arrondis. Les vallées
                      sont nombreuses et assez larges, en suivant. le cours de
                      la Vezouze, de la Blette, de la Verdurette et de leurs
                      affluents.
 Le sol est argilo-calcaire et, par endroits limités,
                      calcaire. Il est de culture laborieuse, mais fertile et
                      favorable aux bons rendements. 1.510 hectares sont consacrés
                      à la culture du blé 1.818 à celle de l'avoine, 234 au
                      seigle, 150 à l'orge (Statistiques de 1926). Avec les céréales,
                      les fourrages sont ses productions les plus communes. Dans
                      les fonds et le long des cours d'eau l'osier est très
                      cultivé et, qu'il soit façonné sur place ou transporté
                      en nature, à l'étranger, il est l'objet d'un commerce
                      actif et lucratif. Un seul village, Buriville, en fournit
                      1.000 quintaux annuellement.
 Les grands établissements industriels se comptent par
                      unités et ne se trouvent que dans les localités les plus
                      importantes.
 Les villages, agricoles, sont construits sur les cours
                      d'eau, le plus souvent sur des ruisselets.
 Le pays est sain, sévère par endroits, très riant
                      surtout dans sa partie sud. Il est desservi par trois
                      voies ferrés. Les routes sont très belles.
 Les villages portent les noms de :
 Arncnoncourt, Ancerviller, Autrepierre, Avricourt, Barbas,
                      Blémerey, Buriville, Chazelles, Domèvre-sur-Vezouze,
                      Domjevin, Emberménil, Fremenil, Frémonville, Gogney,
                      Gondrexon, Halloville, Harbouey, Herbéviller; Igney,
                      Leintrey, Montreux, Nonhigny, Ogéviller, Reclonville,
                      Reillon, Remoncourt, Repaix, Saint-Martin, Vaucourt, Vého,
                      Verdenal, Xousse.
 
 BLAMONT
 
 Le chef-lieu de Canton, qui porte ce nom, est une petite
                      ville coquette, de 1.347 habitants, riche d'un long et
                      beau passé.
 Bâtie sur la Vezouze, au centre d'une région fertile et
                      bien cultivée, dont les Petites Vosges ferment l'horizon
                      elle conserve des restes historiques d'un réel intérêt.
 Vue à quelques centaines de mètres de distance, de la
                      voie ferrée Lunéville-Blâmont-Badonviller, elle se détache,
                      étalée sur la prairie dans laquelle serpente une rivière,
                      et limitée par deux collines, l'une à droite,
                      l'autre à gauche. Ses maisons sont dominées à gauche,
                      par un important édifice, une ancienne demeure palatiale,
                      et au-dessus, par des ruines élevées ; à droite, est
                      son église.
 Le première impression, favorable, que laisse cette
                      petite ville vue ainsi à distance, s'accentue quand on
                      y pénètre ; ses rues sont bien tracées et propres, ses
                      maisons sont cossues, certaines luxueuses. Blâmont
                      respire le calme et le silence.
 Il est d'accès facile, étant desservi par deux voies
                      ferrées et une très belle route. Il n'est qu'à 30
                      kilomètres du Chef-Lieu de l'Arrondissement, Lunéville.
 
 Il a ses historiens :
 MARTIMPREY de ROMÉCOURT, s'est attaché à l'Histoire
                      de ses Seigneurs, de ses Sires.
 LEPAGE a dépouillé un dossier important d'Archives
                      relatives à la ville et cependant lui manquaient ceux,
                      anciens, de la Seigneurie de la Cité, qui, comme il nous
                      l'apprend, avaient été détruits lors de l'incendie
                      de 1636.
 Quoi qu'il en soit, il est intéressant de le suivre, dans
                      la description qu'il nous donne des Chartes, des actes de
                      donation, des ordonnances, des règlements
                      d'administration locale, des redevances, en particulier
                      de celles des maîtrises, des «  hanses », des bouchers,
                      boulangers, des marchands ambulants ; des serments des
                      Seigneurs et des habitants, de l'état de; la forteresse
                      à diverses époques, etc. Il nous apprend, qu'en 1624,
                      notre illustre graveur lorrain, Jacques Callot, séjourna
                      à Blâmont et que le Duc de Lorraine Henri lui assigna
                      une redevance en nature, de 900 réseaux, moitié blé,
                      moitié avoine, à prendre sur la recette du domaine de la
                      Prévôté, «  pour lui donner sujet de s'arrêter au
                      pays, en considération de son art de graveur en taille
                      douce » (O. C., p, 157).
 M. É. AMBROISE, dans son livre sur les Vieux Châteaux de
                      la Vezouze, nous a donné maints détails curieux sur Blâmont
                      et son Comté.
 L'Abbé BERNHARDT, dans son étude sur Baccarat, a
                      longuement parlé des Comtes de Blâmont, voués de
                      Deneuvre, et a recueilli sur eux, des documents inédits.
 Enfin, M. J. COLIN, en 1920, a consacré un opuscule
                      surtout aux Industries et aux Oeuvres Sociales de cette
                      ville. (2)
 
 Pour retrouver l'origine de Blâmont dans notre Histoire
                      Lorraine, nous devons la rechercher ailleurs et plus loin
                      que dans les Chartes du Moyen Age. Une route romaine le
                      reliait au nord des chemins passant par Niderhoff. Car
                      Niderhoff était traversé par la voie militaire qui, du
                      Donon, allait rejoindre celle de Metz à Strasbourg. De Blâmont,
                      un embranchement s'échappait vers Avricourt et un autre
                      vers Ancerviller.
 Je ne sache pas qu'on ait trouvé, à Blâmont même, des
                      ruines romaines et des restes antérieurs à la Période
                      Gallo-Romaine.
 Il est question de son pagus, dans un acte de donation à
                      l'abbaye de Senones, en 661 ; puis dans une lettre d'Evêque
                      en 938, et encore dans un partage entre Charles le Chauve
                      et Louis le Germanique, au XIIe siècle (GROSSE).
 Au Moyen Age, c'est une ville forte. Ses Comtes, ses
                      Sires appartiennent à la branche cadette des Comtes de
                      Salm-Salm ; Ils portent sur leurs armes les mêmes, «  Saumons » que ceux de la branche aînée, mais sans
                      crossettes.
 Hommes de guerre vaillants, ambitieux, querelleurs, (3)
                      habiles à saisir toutes les occasions qui leur étaient
                      offertes de développer leur puissance, voire à les faire
                      naître, ils poursuivent avec esprit de suite, la réalisation
                      de leurs desseins. Ils s'appuient sur une troupe solide,
                      que tous les habitants de leurs villages doivent fournir,
                      aussi leur seigneurie est-elle bientôt la plus compacte
                      et la mieux organisée de la région.
 Ils ne prennent pas part aux Croisades, qui ont anéanti
                      tant de Chevaliers et ruiné tant de leurs biens; ils ne
                      consentent pas à faire profiter leurs bourgeois de la Loi
                      libérale de Beaumont. et, quand Charles le Téméraire dévaste
                      la Lorraine, leur alliance familiale, avec le Bourguignon
                      les met à l'abri de ses déprédations.
 Puissants et forts, ils sont recherchés par les
                      Religieux, dont les possessions entourent leur territoire
                      et même, par places, le segmentent; ils sont leurs
                      protecteurs désignés, leurs voués. L'Évêque de Metz
                      les compte parmi ses suzerains, ce qui ne les empêche pas
                      d'être sans cesse en lutte avec lui, ce qui ne les arrêta
                      pas davantage de construire, près de leur Place Forte de
                      Deneuvre, la haute Tour des Voués et d'élever, à courte
                      distance de leur Forteresse de Moyen, le Château Fort de
                      Magnières, qui est pour celle-là une menace constante.
 Grâce à leur politique avisée, peu scrupuleuse et
                      ferme, ces Sires, organisateurs et réalistes, arrivent
                      bientôt à posséder l'un des Comtés les plus
                      importants. de la Lorraine. Il avait l'étendue du Canton
                      actuel. L'Assemblée Nationale ne l'a pas subdivisé.
 Le plus illustre de ces Sires, celui auquel on donna le
                      nom de Grand, fut Henri Ier. Son tombeau a été retrouvé
                      dans les
  Sceau de Henri Ier
 d'après Bernhardt
 ruines de l'Abbaye
                      de Saint-Sauveur ; c'est l'un des monuments les plus beaux
                      que possède le Musée Lorrain. C'était un guerrier
                      entreprenant et superbe. On dit qu'ayant pris part aux
                      tournois célèbres de Chauvency, où son élégance, sa
                      taille, sa beauté, la richesse de son costume et celle
                      des hommes de sa suite, avaient impressionné la noble
                      assistance féminine, et quand ses hérauts d'armes clamèrent
                      son nom et son titre, «  les Dames moult se merveillèrent
                      de sa taille et de sa beauté. et dirent: «  Une roiauté
                      il dut Diex avoir donné. »Après Henri Ier marque Thiébaut Ier, son petit-fils, qui
                      porta à l'apogée la fortune du Comté. II est en lutte
                      constante avec les Évêques et s'agrandit aux dépens de
                      ses Parents.
 Thiébault II, allié du Téméraire, ne prend pas part à
                      la bataille de Nancy. S' il est épargné par les
                      Bourguignons. il n'échappe pas à la fureur dévastatrice
                      des Suisses et des Allemands, venus au secours du Duc de
                      Lorraine. René II. Son Château est pris d'assaut et la
                      ville est rançonnée (1477).
 Du temps de René II, le dernier Comte de Blâmont Olry,
                      évêque de Metz, concède à ce Duc son Comté, à
                      condition que les franchises de ses habitants soient
                      sauvegardées. La cession (1503) donna lieu à un cérémonial
                      imposant, à des serments, que Lepage a signalés. Après
                      signature de l'acte, on se rendit à la Porte Bas de la
                      ville, proche de la halle, vers le bourg. Là, le
  Portrait de Christine de Danemark
 d'après une médaille de la Monnaie
 Dessin E. DELORME
 
                      délégué du Comte Olry, Gaspar de Muhlen, remit, aux
                      Commissaires de René II, les clefs de la ville; il en fit
                      autant à la Porte du Haut; «  que de longtemps n'avait été
                      ouverte », puis à la Porte du Château : on sonna la
                      grosse cloche et il y eut des manifestations
                      d'enthousiasme. Mais, si les habitants furent
                      scrupuleusement maintenus en franchise du temps de René
                      II son successeur, le Duc Antoine, ne tint pas parole (4).Le Château, demeure seigneuriale, était le douaire des
                      Veuves des Ducs (1545). Christine de Danemark, veuve de
                      François Ier l'habita; elle l'avait fait reconstruire.
                      D'anciennes gravures, que Lepage signale, rendent bien
                      compte, en particulier de son étendue, de la hauteur du
                      bel édifice, des tours qui le flanquaient, de son
                      ornementation extérieure. C'est une splendide demeure
                      partiale de style gothique.
 En 1548, la Reine de Hongrie vint à Blâmont. A cette
                      date, on reprit les fortifications du Château et de la
                      Ville.
 En 1567, à l'occasion des fiançailles de Renée de
                      Lorraine avec le Duc de Bavière, on y donne des fêtes
                      magnifiques : tournois, courses de bagues, combats à la
                      barrière, festins, danses, etc.. fête qui entraînent
                      des dépenses considérables.
 En 1593, la Reine Catherine de Médicis avait séjourné
                      à Blâmont, avec le Roi Henri II, le Duc d'Anjou, le
                      futur Henri Ill, et le Duc d'Alençon.
 
 Blâmont a subi trois sièges, J'ai déjà parlé de celui
                      que lui fit René II, en 1477.
 Siège de 1587. - Le Duc de Bouillon avec des reîtres
                      allemands, protestants, envahit la Lorraine et se présente
                      devant Blâmont. Mathias Klopstein, issu d' une famille
                      noble et catholique d'Allemagne, qui avait servi, dans ce
                      pays, sous les ordres du Comte de Vaudemont, fils de
                      Charles III, se porte au secours du Gouverneur Thomas
                      Koecler et amène dans la Place deux compagnies de gens
                      d'armes. En vain, les ennemis, en grand nombre tentent
                      l'assaut du Château : ils sont repoussés et continuent
                      leur marche vers l'Ouest du pays.
 Siège de 1636, - Le Duc de Saxe Weimar, à la tête
                      d'une Armée Suédoise, atteint Blâmont. C'est encore
                      un Klopstein, le neveu de Mathias, qui défend la Place.
                      Il fait mettre le feu à la ville, pour en ruiner les réserves.
                      L'ennemi le presse; il donne plusieurs assauts, qui sont
                      repoussés. Les Suédois éprouvent des pertes cruelles.
                      Ils finissent par se rendre maîtres du château, si
                      vaillamment défendu. Furieux d'avoir éprouvé une si
                      grande résistance, ils massacrent les défenseurs et
                      pendent Klopstein à la porte du Château.
 Blâmont avait, au XVIe siècle, plusieurs enceintes ; une
                      pour le Château Fort et ses dépendances, une pour le
                      bourg et une pour le faubourg. Chaque enceinte avait ses
                      Portes et ses Tours. Lepage nous parle des Portes d'Azie,
                      d'en Bas, d'en Haut, de Vesse, Vaize ou Voize (Vezouze) ;
                      des Tours de la Vènerie, Jacquot, Régnault, de
                      l'Horloge, du Quartier du Châtelain. Il y avait deux
                      ponts; l'un réunissait les deux faubourgs.
 Les principaux défenseurs du Château Fort étaient des
                      Archers, formant une Compagnie de 50 hommes, maîtres et
                      compagnons compris. Ces Archers, pour continuer à
                      s'exercer au maniement de leur arme, reçoivent une
                      somme annuelles équivalant à 25 francs et de plus, en
                      Carême, un demi-cent de carpes à prélever dans les étangs.
                      La Chronique nous dit qu'il y avait, à Blâmont, de 1555
                      à 1580, une Fabrique d'Armes et d'Arquebuses, dans
                      laquelle le Duc de Lorraine Charles III s'approvisionnait.
 Nous possédons plusieurs belles gravures représentant Blâmont
                      et son Château. Pour ma part, j'en connais trois. Elles
                      montrent l'enceinte de la ville, avec ses murs peu élevés,
                      flanqués de tours de hauteurs différentes et non
                      couvertes, ses maisons et ses Couvents (5); puis, sur un
                      monticule, un groupe de tours très hautes, les unes
                      rondes, d'autres carrées, couvertes de toitures à pans,
                      et des dépendances.
 Au-dessous du Château Fort, à peu de distance, avec une
                      façade principale tournée à l'Est, on voit la demeure,
                      palatiale.
 L'enceinte est en partie conservée, avec les deux tours
                      qui flanquent la porte d'entrée. (6) Entre celle-ci et le
                      Château Fort, se voient la Maison seigneuriale et des
                      jardins.
 De la Forteresse, il reste à l'Ouest, deux hautes
                      tours, réunies par des murs élevés, et au Nord, en
                      bordure de la voie ferrée, trois autres tours robustes,
                      également réunies par une muraille en partie écroulée.
 Avant la guerre dernière, le propriétaire de l'immeuble,
                      M. Burrus, a eu la bonne pensée de faire assurer des réparations
                      à la Forteresse, sans en changer le caractère. Il fut
                      moins heureux pour la restauration de la Maison
                      seigneuriale. Dans les
 
  Château fort de Blâmont au XVe Siècle
 Dessin de E. DELORME, d'après une gravure du temps
   Costumes des Habitants du Blâmontois au XVe siècle d'après
                      des gravures du temps
 Dessin de E. DELORME
 
 
   Ruines du château fort (Etat actuel)
 Façade ouest avec ses deux tours, l'une a été restaurée
 
 
   Façade nord avec deux de ses tours, la troisième est
                      masquée
 Dessin de E. DELORME, d'après nature
 
                      tours qui répondent à ses extrémités, on peut se
                      rendre compte de l'épaisseur primitive des murs. Mais
                      l'édifice
                      a perdu son caractère gothique.Cette demeure seigneuriale est aujourd'hui, grâce à
                      l'initiative de M. A. de Turckheim, transformée en une
                      Maison Maternelle, qui, dans des conditions d'hygiène
                      et d'organisation remarquables, hospitalise de 80 à 100
                      enfants abandonnés, de 18 mois à 3 ans. Celle oeuvre,
                      digne d'être visitée, est tout à l'honneur de son créateur
                      et de ses collaboratrices.
   La Demeure Seigneurale (état actuel)
 Dessin de E. DELORME
 
                      De l'enceinte, de la Ville, du bourg, qui s'était développé
                      au bas de la colline (le Blanc Mont), sur le haut de
                      laquelle la Forteresse avait été bâtie, il reste
                      encore, dans les jardins du côté de l'Est et aussi au
                      Sud, des vestiges que la Ville aura certainement à coeur
                      de conserver,La plupart des maisons de Blâmont accuse les caractéristiques
                      des reconstructions des XVIIe et XVIIIe siècles.
                      Quelques-unes ont été édifiées au XVIe. Tout le
                      faubourg a des maisons du XVIIIe siècle.
 Sur la grande place de la ville, la Porte d'un Hôtel est
                      du XVIe siècle ; deux portes d'une maison du XVIIIe siècle
                      sont ornées de sculptures hardies, élégantes et
                      remarquables. Cette maison fait un angle de la grande
                      place.
 En face de l'Eglise est une maison du XVIIIe siècle. Sa
                      porte d'entrée mérite d'être remarquée. Enfin, dans
                      une habitation située vis-à-vis du Cimetière, ont été
                      conservés des débris d'un Établissement Religieux
                      (statue, socles).
 L'église actuelle n'est pas comprise dans «  l'ancien
                      bourg », qui s'arrêtait à la Vezouze. Elle a été élevée,
                      dans le faubourg de Giroville, à l'emplacement de l'Église
                      primitive, dont on parlait déjà au XIIIe siècle et qui
                      avait souffert de l'incendie de 1636. Ce faubourg avait été
                      alors ruiné.
   Porte de l'Hôtel des Vosges
 Dessin de E. DELORME, d'après nature
 
                      L'Eglise nouvelle est de construction relativement récente,
                      C'est une ogivale élégante, surmontée de deux tours.Elle renferme des sculptures sur bois du XVIII" siècle,
                      qui font partie de nos richesses archéologiques régionales.
 La chaire en bois sculpté peut être comparée, quant à
                      son aspect général et à sa décoration, à la chaire de
                      l'Église Saint-Jacques de Lunéville, tout en étant
                      moins majestueuse. C'est la même caisse historiée, le même
                      ciel ; ce sont les mêmes guirlandes. Le dessin, que j'ai
                      pris d'après nature et que j'en donne, me, dispense d'une
                      plus ample description.
 Les deux Confessionnaux sont admirables. Ils proviennent
                      de l'Abbaye de Domèvre et sont l'oeuvre du Sculpteur FRANÇOIS,
                      que
 
                      L'Eglise paroissiale
   Chaire provenant de l'Abbaye de Domèvre (XVIlIe siècle)
 Confessionnal provenant de l'Abbaye de Domèvre (XVIlIe siècle)
 Dessins de E. DELORME, d'après nature
 
                      le Monastère avait su s'attacher. Les jours des portes
                      sont encadrés d'arabesques résolument dessinées et, sur
                      les montants de ces portes, courent des guirlandes de
                      fleurs de grandeur naturelles, rendues avec une fidélité,
                      une habileté étonnantes, qu'il serait difficile de
                      surpasser. Ces confessionnaux ont été sculptés en
                      1762-63 (CHATTON).Je signalerai enfin, dans cette Église, un baptistère en
                      marbre, du XVIIIe siècle.
 La Mairie et la Halle sont comprises dans un même bâtiment
                      en bordure d'une place.
 Un Monument aux Morts, pyramide de granit, a inscrit les
                      noms des soixante-dix-neuf Victimes de la Grande Guerre.
 Blâmont avait autrefois des Etablissements Religieux
                      importants :
 1° Une Collégiale, fondée en 1636, détruite pendant le
                      siège de la ville, rebâtie en 1666 et aliénée pendant
                      la Révolution
 2° Un Couvent des Capucins, datant de 1627. Dans son
                      enclos était une tour de 15 mètres de hauteur, dépendant
                      des anciennes fortifications de la ville. Les Religieux la
                      firent raser.
 3° Un Couvent de Religieuses de la Congrégation, fondé
                      en 1629, qui était situé probablement à l'emplacement
                      de la Gendarmerie actuelle, de l'ancien Collège et de l'Ecole
                      des Garçons. La Chapelle est désaffectée depuis que le
                      Collège a cessé d'exister (J. COLIN).
 4° Un hôpital, dû à la générosité d'un bourgeois de
                      la ville et qui, depuis 1706, est desservi par les Soeurs
                      de Saint-Charles, La. Supérieure a mérité la Croix de
                      Guerre, pour sa belle conduite pendant les quatre années
                      de l'occupation allemande
 5° L'Ecole des Filles est un établissement ancien
                      restauré.
 Bon - Accueil. - L'ancien Couvent des. Capucins qu'on voit
                      dans la rue de ce nom, est une somptueuse demeure, entourée
                      d'un parc immense. Elle a été achetée après la
                      Grande Guerre, par le Comité de la Croix Rouge Américaine
                      et, grâce aux subsides de cette Société et à l'initiative du Docteur Hanriot elle est devenue une Oeuvre 
                      d'Hygiène Sociale, comprenant : un Dispensaire,
                      un Centre de Consultations pour les Nourrissons, une Salle
                      de Réunion avec Bibliothèque, un Théâtre pour 500
                      places,
                      une Maison de Retraite payante (J. COLIN).
 Si Blâmont a perdu de ses Industries anciennes: une
                      Fabrique de Draps, des Tanneries, Corroieries, Mégisseries;
                      il a d'autres Manufactures, qui sont prospères.
 En première ligne, il faut citer : l'important
                      Etablissement de la Maison E. Bechmann & Cie,
                      comprenant: 1° une filature, un tissage, une teinturerie
                      de colon, et 2° une fabrique de velours, façon soie.
 Les premières datent de 1825, la dernière de 1884.
 La fabrication du velours façon soie, due à l'initiative
                      de M. E. Bechmann, a importé en France une industrie
                      monopolisée, jusqu'à lui, en Angleterre et en Allemagne.
                      Elle a pris, dans la région une place considérable et a
                      nécessité la création d'Etablissements de Coupe, à Blâmont,
                      Badonviller, Ancerviller, Ogéviller, Harbouey, Domèvre.
 Cette coupe, qui s'exécute avec une instrumentation
                      toute spéciale et curieuse, est particulièrement délicate.
                      Le lenteur de l'opération explique, pour qui en a été témoin,
                      le prix élevé des produits obtenus.
 Une autre industrie intéressante se consacre à la
                      fabrication des fourches et outils de jardinage (Maison
                      Fensh & Labourel).
 Détruite par les Allemands, cette fabrique, qui datait de
                      1878, s'est rétablie avec tous les perfectionnements les
                      plus récents en machines-outils.
 L'industrie de la Broderie Perlée a des représentants à
                      Blâmont.
 Blâmont a 327 maisons. Il en avait 340, en 1836. Il a eu
                      jusqu' à 924 ménages, en 1526, ayant les guerres. En
                      1697, il n'avait plus que 327 habitants. Depuis cette époque,
                      sa population n'a guère dépassé 2.000 habitants.
 Son territoire s'étend sur 741 hectares, dont 325 sont
                      terres labourables, 143 des prés.
 
 PERSONNAGES ILLUSTRES ou DE HAUTE NOTORIÉTÉ
 
 M. KLOPSTEIN. - Michel fait naître à Blâmont, en
                      1587, MATHIAS KLOPSTEIN, neveu du premier défenseur de la
                      ville. J'ai rappelé le rôle de ce Gouverneur de Blâmont,
                      pendant le siège de 1636, lorsque, attendant en vain des
                      secours, il l'incendia, se retira dans le Château-Fort
                      et, après avoir résisté à deux assauts soutenus par
                      des forces considérables, il fut vaincu et supplicié,
                      sans avoir songé à se rendre.
 Lepage nous dit qu'un portrait de Klopstein se trouvait,
                      en 1853, au Château d'Apremont, près de Saint-Mihiel. Il
                      est sans doute détruit. Le Château de Châtillon possédait
                      une autre toile représentant le siège de Blâmont par le
                      Duc de Saxe Weimar. Une note manuscrite relatait ce siège.
                      Les Blâmontais avaient des vêtements jaunes et rouges,
                      un étendard à fond jaune orné de croix et d'alérions
                      ; les soldats suédois, un uniforme bleu et un drapeau à
                      trois couronnes. (7)
 
 MASSON (CHARLES-FRANÇOIS-PHILIBERT), membre associé de
                      l'Institut de France, né à Blâmont en 1762, mort à
                      Paris en 1807, passa très jeune au service de la Russie.
                      Il y fut nommé Major et Secrétaire des Commandements du
                      Grand Duc Alexandre, qui devint Empereur de Russie. Paul
                      Ier le renvoya comme révolutionnaire.
 Il a écrit un Cours Mémorial de Géographie à l'usage
                      du Corps d'Artillerie des Cadets, 1787; des Mémoires
                      Secrets sur la Russie, 4 vol., 1802 et années suivantes;
                      des poèmes et un roman: 2 vol, 1802.(8).
 
 LOTTINGER, médecin et naturaliste du XVIIIe siècle,
                      collaborateur de Buffon.
 
 RÉGNIER (CLAUDE-AMBROISE), né à Blâmont le 5 novembre
                      1746, mort en 1814, fut l'un des personnages les plus
                      considérables de l'Empire. Sa dépouille eut les honneurs
                      du Panthéon, sous la Restauration.
 L'ex-avocat de Lunéville et de Nancy, l'ex-conseiller du
                      Prince de Salm-Salm, fut successivement membre de
                      l'Assemblée Nationale, de la Constituante, de la Législative,
                      puis Président du Conseil des Anciens, sous le
                      Directoire. Il avait été incarcéré pendant la Terreur.
                      Il devint l'un des principaux instigateurs du Coup d'État
                      du 18 Brumaire.
 Sous l'Empire, il est nommé Président du Corps Législatif,
                      Sénateur, Ministre de la justice, Duc de Massa,
                      Grand-Officier, puis Grand-Aigle de la Légion
                      d'Honneur.
 On a loué ses connaissances législatives étendues, ses
                      capacités administratives, son esprit d'équité, la sûreté
                      de son jugement, son amour de l'ordre. Il présida
                      la Commission chargée d'étudier la Constitution Impériale
                      et contribua à la Réorganisation des Institutions
                      Juridiques du Pays.
   Régnier, Duc de Massa
 Dessin de E. DELORME, d'après nature
 
                      Les galeries de Versailles, le Musée Lorrain possèdent
                      de ses portraits, en pied, en costume de Grand Juge. (9)
 RÉGNEAULT (CHARLES), né à Blâmont en 1755, avocat à
                      Lunéville, puis au district de Blâmont, fut élu député
                      à l'Assemblée Nationale (1789 à 1791). Arrêté pour
                      avoir protégé la fortune de plusieurs émigrés, il n'échappa
                      à l'échafaud que par suite de la chute de Robespierre.
                      Il fut ultérieurement attaché au Ministère de la
                      Justice et devint collaborateur de Régnier, pendant
                      quatorze ans. Il mourut en 1811.
 
 KLEIN (DOMINIQUE-LOUIS-ANTOINE), né à Blâmont en 1761,
                      mort à paris en 1845, se distingua à Jemmapes, et prit
                      part aux guerres de la Révolution, notamment aux
                      Campagnes de l'Armée du Rhin. Général de Division en
                      1799, il est Chef d'Etat-Major de Masséna, à la
                      bataille de Zurich. Il se signale pendant la campagne de
                      Prusse (1806-1807), en particulier à la Bataille
                      d'Eylau. Il prit sa retraite en 1808, fut nommé Sénateur
                      et Comte de l'Em-
  Le Général de Division Klein
 Dessin E. DELORME, d'après une gravure
 
                      pire. Appelé, sous la Restauration, à la Chambre des
                      Pairs, il y siégea jusqu à sa mort. (10)
 Ecarts, - A quelque distance de Blâmont, une Usine, dite
                      Usine des Champs, installée sur la Vezouze, a fabriqué
                      de la grosse quincaillerie.
 Ses bâtiments servent actuellement à une exploitation
                      agricole.
 Les autres écarts sont:
 LE CLOS ou CHALET SAINT-PIERRE.
 LE CHATEAU SAINTE-MARIE détruit par les Allemands, en
                      1914, est aujourd'hui restauré.
 La FERME SAINT-JEAN et la FERME DU CARREAU.
 
 (1) ANNUAIRE DE
                      LORRAINE, Meurthe-et-Moselle; Nancy, A. Humblot & Cie,
                      1926.La Statistique de 1915 attribuait à ce Canton 10.500
                      habitants.
 (2) MARTIMPREY DE ROMÉCOURT: Les Sires et Comtes de Blâmont,
                      Etude Historique : Journ. Soc. Arch. Lorr. T. XXXIX et
                      XLI, 4 pl.
 LEPAGE, AMBROISE, BERNHARDT: O. C
 J. COLIN : Notice sur Blâmont et «  Bon Accueil»; 1926.
                      Mazerand, Cirey.
 (3) Un de ces Comtes avait promis. de défier dans quinze
                      jours la Ville de Metz. Il fut vaincu près de Cirey, par
                      l'Armée Messine.
 (4) René II avait fait élever, au Comte Olry, un beau
                      tombeau dans la Collégiale de Deneuvre. J'ai dit que, en
                      1789, ce tombeau avait été brisé et ses pierres dispersées.
 (5) Ces gravures ne sont pas seulement précieuses parce
                      qu'elles reproduisent fidèlement l'aspect de la Ville, le
                      caractère de son Château et de ses maisons, mais parce
                      qu'elles figurent des costumes d'habitants (seigneurs et
                      manants). Elles ont été prises de la Côte de Barbas ou
                      de la vallée de la Vezouze. Le Musée de l'Arrondissement
                      montre des reproductions de ces gravures. Mon dessin est
                      une réduction de ceux que j'ai donnés au Musée.
 (6) Des sépias, reproduites par E. Ambroise, ont relevé
                      les ruines du Château, en 1828. Un dessin de la Bibliothèque
                      Nationale (Cabinet des estampes) représente les ruines
                      des deux Tours qui encadrent la porte d'Entrée.
 (7) LEPAGE, O.C. LALLEMENT LOUIS : Notes sur deux Tableaux
                      qui se trouvent au Château de Châtillon, près de Cirey
                      (Meurthe); Défense de Blâmont, 1636, etc. ; Journ. Soc.
                      Arch. Lorr., T. VII.
 (8) MICHEL, O. C.
 NDLR : il s'agit d'une erreur : Charles François Philibert MASSON
                      n'est pas né à Blâmont (54), mais à Blamont
                      (25).
 (9) PAUL DELAVAL : Un ministre Lorrain sous l'Empire :
                      Le Grand Juge Régnier, Duc de Massa ; 'Pays Lorrain',
                      1909, Bilbiographie et Portrait.
 MARTIMPREY : Régnier, Duc de Massa, et sa famille ;
                      Journ. Soc. Arch. Lorr. T. XXXV.
 MICHEL, O. C.
 (10) P. MARIN: La Grande Encyclopédie; Art. Klein.
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