NDLR : Le mémoire
posthume
d'Edmond de Martimprey a été publié en deux parties, en
1890 et 1891. La présente page reprend l'intégralité de
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ÉTUDE HISTORIQUE - PRÉLIMINAIRES (1)
Emond de Boulay rapporte qu'en 1546, à la pompe funèbre de François, duc de Lorraine, deux chevaliers marchaient de chaque côté du cheval de bataille, représentant l'un le comte de Vaudémont et l'autre le comte de Blâmont, « lesquels comtes souloient jadis présenter l'armet et l'anse ou l'écu à ung duc de Lorraine, marchis, quand il entroit en bataille, comme les premiers et les plus anciens vasseaux de Lorraine (2). »
Ce témoignage du héraut d'armes, dont l'autorité en pareille matière est indiscutable, fait connaître le rang que les seigneurs de Blâmont occupaient en Lorraine. De plus, ils étaient compris au nombre des hauts hommes de l'évêché de Metz avec les comtes de Sarrebruck, de Salm, de Sarrewerden, de Bitche et figuraient aussi parmi les grands vassaux du duché de Bar. Possédant des états importants, ayant leurs forteresses, leurs troupes, leurs vassaux, leur conseil et leur cour, ces seigneurs jouirent d'une grande indépendance, et leur puissance fut assez considérable pour qu'ils ne craignissent point de faire souvent la guerre à leurs suzerains, l'évêque de Metz et les ducs de Lorraine- et de Bar. Cependant leur histoire est peu connue et les généalogies qu'on a publiées d'eux sont tellement fausses et incomplètes qu'elles ont été et sont encore la source de trop fréquentes erreurs (3) ; c'est ce qui nous a engagé à entreprendre un travail ayant, autant que possible, le mérite de l'exactitude (4).
Les seigneurs ou comtes de Blâmont peuvent se diviser en deux catégories la première comprenant les prédécesseurs de Ferry de Salm la seconde, ses descendants qui, ayant, adopté comme nom patronymique celui de Blâmont, forment ce que nous appellerons désormais la Maison de Blâmont.
D'autres familles ont, en Lorraine, porté le nom de Blâmont sans avoir aucun l'apport avec cette ce qui peut amener des confusions. La plus connue est celle de Neufchatel dont plusieurs membres portèrent le titre de sire de Blâmont (5), entre autres Thiébaut qui fut maréchal de Bourgogne au milieu du XVe siècle; comme seigneur de Châtel-sur-Moselle, de Blainville et d'autres terres composant la moitié de l'héritage des comtes de Vaudémont, il figure souvent dans l'histoire de Lorraine.
En même temps vivait Jacot ou Jacques de Blâmont, écuyer, qui fut bailli de Châtel pour le même Thiébaut de Neufchâtel de 1440 à 1458. Lui aussi était bourguignon et semble avoir appartenu à une ancienne famille originaire de Blâmont en Franche-Comté (6) il épousa suivant Husson Lescossois, Odette de Thuillières. de l'ancienne chevalerie lorraine, dont il eut une fille, Isabelle de Blaimont, mariée à Ferry de Ligniville, seigneur de Tantonville et de Tumejus.
Il y eut aussi une famille lorraine du même nom, de laquelle était Jean Blâmont, écuyer, seigneur de Phlin, vivant en 1492 et 1507, dates de deux dénombrements qu'il donna au duc de Lorraine : le premier, au nom d'Agnès de Vergney, sa femme, pour la moitié d'un pilon à chanvre et autres héritages sis à Cousance, le second pour le quart de la maison-forte et seigneurie de Phlin, un gagnage à Haironville, etc. (7). Sur les titres originaux il se nomme Jehan Blanmont, escuier », sans particule. Les sceaux qu'il y joignit subsistent, mais fruste ; sur l'un d'eux se voit encore un écu parti, dans le champ duquel on distingue quelques vestiges qui ne répondent pas exactement aux armoiries données par Cayon à une autre famille de Blâmont : « parti d'azur à trois étoiles d'or mises en pal, et d'or au lion rampant de gueules», car on croit y voir, à dextre, autre chose que les trois étoiles. Quoiqu'il en soit, ce Jean n'était certainement pas issu de la maison de Blâmont (8), aussi M. Lepage s'est-il trompé quand il a écrit qu'Isabelle de Chérisey épousa « Jean 1er de Blâmont, de la maison de Salm, père de Jean II de Blâmont » qui, en 1463, partagea avec Claude de Villers-le-Prudhomme, écuyer, le château et la seigneurie de Phlin leur provenant de Bertrand de Chérisey, leur oncle maternel (9).
En outre, on rencontre fréquemment dans les archives de Lorraine des personnages portant le nom de Blâmont, suivant l'usage de l'époque, parce qu'ils étaient originaires de cette ville ou y demeuraient ; nous citerons seulement:
« Bonus valetus, miles de Bladmont », homme d'armes (miles) d'Henry, comte de Salm, témoin d'une donation faite par celui-ci, au XIIe siècle, à l'abbaye de Saint-Sauveur (10).
« Carsilius de Blanmont, miles », témoin d'une donation du même comte à l'abbaye de Haute-Seille (11).
Raimbaud de Blâmont et Gauthier, son frère, qui donnèrent, en 1203, à la même abbaye les terres qu'ils possédaient à la Frimbolle, du consentement d'Henry, comte de Salm (12).
Mathieu de Blâmont, prévôt de Blâmont pour Ferry Ier ; il vivait en 1245 et avait un fils nommé Beruyart (13).
André, chevalier de Blâmont (« Andreas miles de Blanmont »), qui, avec son épouse « Mah. », ses fils Gérard et Thierry et sa fille « Draceleut », donna au
monastère de Haute-Seille les dîmes de Parux et ce qu'il possédait en ce lieu, du consentement de Jeanne, dame de Blâmont, pendant les octaves de Pâques, en mars 1258 (14).
« Coleis, filz de Jordain de Blanmont, qui fuit »lequel prit à bail, en 1313, des terres de l'abbaye de Saint-Sauveur. sises à Maizières, Millange et Videlange (15).
Thomas de Blâmont, religieux de Saint-Sauveur en 1314 (16).
Jean, dit Bellisel, de Blâmont, écuyer, dont la fille Comtesse était, en 1331, l'épouse de Bertrand de Pont-à-Mousson (17).
Bernard de Blâmont, curé de Gondrecourt, chapelain du seigneur d'Herbéviller, en 1367 (18).
« Jehan Blanmont, de Marsal », qui prêta une somme d'argent à Henry, sire de Blâmont, en 1407 (19).
Aubert de Blâmont, abbé de Haute-Seille, en 1447.
Aubertin de Blâmont, cuisinier de l'évêque de Metz, mort. en 1474 (20).
PRÉDECESSEURS DE FERRY Ier
On sait que sous le règne de la dynastie mérovingienne, l'Austrasie était divisée en duchés et en comtés, à la tête desquels se trouvaient des ducs et des comtes chargés de gouverner le pays au nom du roi. Ces grands officiers, nommés par le prince, pouvaient être changés et destitués à sa volonté et, s'ils mouraient dans l'exercice de leur charge, leurs remplaçants étaient choisis parmi ceux qui paraissaient les plus capables d'exercer leurs fonctions. A partir de Charlemagne, un changement survint dans cette organisation ; les fils commencèrent à succéder à leurs pères et, dans la suite, telle était la faiblesse des successeurs du grand empereur, que, l'hérédité des bénéfices étant générale, les ducs et les comtes, de simples gouverneurs qu'ils étaient auparavant, devinrent possesseurs de ce qui appartenait à l'État dans leurs duchés et comtés (21).
Tels furent sans doute les commencements du comté de Blâmont. Il était, en 962, entre les mains d'Oléard, comte de Blâmont, connu seulement pour avoir souscrit, cette année, une charte dans laquelle l'évêque de Metz donnait la vouerie de l'abbaye de Senones à Frédéric, duc de Lorraine. En 1002, Ulrich de Turquestein, seigneur de Blâmont, recevait de Berthold, évêque de Toul, la vouerie du monastère de Saint-Sauveur-en Vosges son fils Gérard, seigneur· de Blâmont, la reçut aussi du même évêque, C'est là tout ce que nous savons, grâce à Dom Calmet, sur les premiers seigneurs de Blâmont.
HERMAN Ier, comte de Salm. - Albéric de Trois-Fontaines nous apprend qu'Étienne, évêque de Metz, eut trois frères Thierry, comte de Montbéliard ; Ferry, comte de Ferrette, et Renaud, comte de Bar, et une soeur, dont il ne dit pas le nom, mariée à Herman, comte de Salm (22). Or, cet Herman, originaire des Ardennes, comme on le verra plus loin, était, dès l'an 1111, voué de Senones, ainsi que le prouve une lettre d'Adalbéron, évêque de Metz, déclarant que sur les plaintes des religieux, il avait condamné le comte à les indemniser des torts qu'il leur avait faits (23).
Étant étranger, Herman ne pouvait jouir qu'en vertu de son mariage de ce droit de vouerie et des domaines considérables que ses descendants possédèrent autour de Blâmont et de Senones ; il est remarquable, en effet, que dans les titres il ne prend que la qualification de comte de Salm, voué de Senones, ce qui semble indiquer que le comté de Blâmont et les autres terres, appartenaient en propre à la comtesse.
Quelle était celle-ci ? Elle n'est connue dans les documents authentiques que sous le nom d'Agnès, comtesse de Langstein (24); du passage d'Albéric, il s'ensuit qu'elle devait être fille du comte de Montbéliard; celui-ci possédait des fiefs si nombreux, qu'il ne serait pas étonnant que Blâmont et la vouerie de Senones lui aient appartenu et aient formé la dot de sa fille.
Hermann Ier vivait encore en 1130, où il fut témoin, avec Herman, son fils, d'une donation à l'abbaye de Senones (25) il mourut peu après. Agnès prit une seconde alliance avec le comte Godefroy, que nous croyons le même que ce « comes Godefridus de Castello » (Godefroy, comte de Castres) cité comme témoin dans la charte de fondation du prieuré du Moniet, près de Deneuvre en 1127 (26). Ce seigneur ne larda pas à la laisser veuve de nouveau, ainsi qu'il résulte d'un litre de confirmation accordé par elle, en 1138, à l'abbaye de Saint-Sauveur pour les biens que les religieux tenaient de la libéralité des comtes de Salm (« principibus Salmeis »), à Guiroville (faubourg de Blânont), Couvay, Blémerey, Herbéviller, Harbouey, etc., et dans lequel elle ajouta le don de l'église de Raon[-lès-leau] à l'intention des âmes de Villaume, son fils, qui y était enterré (« pro fîlio meo Willelmo, qui illic jacet ») et du comte Godefroy, son mari « comitis Godefridi, mariti mei (27) ».
Sa grande piété la porta bientôt à fonder dans ses domaines, auprès de Tanconville, un monastère qui fut appelé Haute-Seille et subsista jusqu'à la première révolution (28). C'est vers 1140, qu'eut lieu cet événement après lequel Agnès ne vécut plus que quelques années, qu'elle employa en bonnes oeuvres.
Il est peu probable qu'elle ait eu des enfants de son second mariage; mais elle avait donné au comte de Salm quatre fils, dont trois figurent dans l'acte de fondation de Haute-Seille avec la qualification inusitée à cette époque de consuls donnée aux deux premiers : ce sont Henri Ier, dont nous parlerons après ses frères, Herman II et Conrad ; le quatrième était ce Villaume qui fut inhumé à Raon-lès-leau.
HERMAN II, comte de Blâmont, figure avec son père en 1130 (29); Henri II, comte de Salm, son neveu, le rappelle, ainsi qu'Agnès, son aïeule, dans un titre de 1174 « Patrui mei comitis Hermanni aviaeque meae Agnetis » (30). Il était alors depuis longtemps décédé, ayant épousé, dit le P. Picart (31), Maihilde de Parroy, dont il n'avait pas d'enfants; son comté de Blâmont fit retour à Henry Ier, son frère.
CONRAD, comte de Langstein ou Pierre-Percée, portait ce titre du vivant de ses parents, notamment à la dédicace de l'église de Senones en 1124 (32); il fut aussi témoin, trois ans plus tard, de la fondation du prieuré du Moniet « Conradus, comes de Petraperceia (33) ». Il épousa Hawide, fille de Bencelin de Turquestein, de laquelle il eut : Hugues, qui figure avec ses parents, à la fondation de Haute-Seille; Conon, dit Conon de Turquestein, auteur d'une donation à la même abbaye et dans laquelle il nomme le comte Conrad, son père et sa mère défunts; il vivait encore en 1186 (34) ; Adélaïde, qui fit une semblable donation et ne parait pas s'être mariée (35). De tous ces enfants nous ne savons s'il y eut postérité, à moins que Conon n'ait laissé des descendants portant le nom de Turquestein; il est certain toutefois que, dès la fin du XIIe siècle, Pierre-Percée appartenait à Henri II, comte de Salm.
HENRI Ier, comte de Salm, Blâmont, etc., est déjà qualifié de comte de Salm et voué de Senones, du vivant de son père, dans un titre de 1125 (36). Dix ans plus tard, à la suite des malversations commises par lui dans le monastère qu'il devait protéger, il fut, sur les plaintes de l'abbé, cité à un concile tenu à Metz par l'archevêque de Trèves et, sur sa promesse de réparer ses torts, absous, de l'excommunication qu'il avait encourue (37). C'est là à peu près tout ce que l'on trouve à dire sur ce seigneur, qui cependant paraît avoir vécu jusqu'en 1149; il laissa deux fils, Henri, qui lui succéda, et Herman, mort jeune.
HENRI II, comte de Salm, Blâmont, etc., est connu d'abord par ses donations. faites à l'abbaye de Haute-Seille en 1174 (38), 1184, 1186 et 1203, et dont la troisième est importante en ce qu'il y mentionne son aïeule, son père, son frère, sa femme et son fils aîné : « Agnetem, comitissam de Langensten, aviam meam, Henricum patrem meum et Hermannum fratrem. Joatha, uxor mea, et filius meus Henricus » (39). Cette Joathe ou Judith était, selon Richer, la soeur de Ferry, duc de Lorraine (40).
Comme ses prédécesseurs. Henry II eut de longs démêlés avec les religieux de Senones il fit même construire du temps de l'abbé Henry (+ 1224), non loin du couvent et sur un terrain appartenant à celui-ci, le célèbre château de Salm « lequel nom vient d'un certain chasteau qui est au territoire d'Ardenne, d'où ledit comte et ses prédécesseurs sont issus (41) ». Cependant, il continua à résider principalement à Blâmont, jusqu'à ce qu'il en fut chassé par son fils Ferry, ainsi qu'on le verra plus loin. Le chagrin que lui causa cette indigne conduite, le mena rapidement au tombeau ; Richer nous apprend encore qu'il était très âgé et qu'il fut avec sa femme enterré à Senones, où se voyait leur mausolée.
Ils avaient eu deux fils Henry III, mort avant son père, en 1228, laissant un fils aussi nommé Henry qui continua la descendance des comtes de Salm et Ferry Ier, dont nous allons parler, lequel eut le comté de Blâmont et devint la tige de la maison de ce nom. Dom Calmet ajoute deux filles : Lorette et Judith qui doivent rester en dehors de ce travail.
FERRY Ier, SIRE DE BLAMONT.
Ferry Ier, a laissé dans l'histoire une triste réputation, s'il faut en croire Richer, moine de Senones, qui en parle longuement dans la chronique de ce monastère. Après avoir raconté la vie d'Henry II, comte de Salm, cet auteur ajoute
« Quand Frédéric, son fils, fut fait chevalier et le vit cassé de vieillesse, il fit ce que son frère comptait faire s'il eût vécu; il le chassa de Blâmont et, chose indigne, le contraignit à se rendre à pied, accompagné d'un seul serviteur, nu château appelé Pierre-Percée. Il fût allé de même jusqu'à celui de Salm, si l'abbé Baudoin ne lui eût prêté un cheval...
« Frédéric de Blâmont, ayant pris en mains le pouvoir. se montra pour ses sujets et voisins tel qu'il avait été pour son père et ses autres parents et causa particulièrement tant de maux à l'abbaye de Senones, que les religieux durent le faire citer en justice. Furieux, il redoubla tellement ses, violences envers l'abbé Baudouin et le monastère, que non seulement ils furent contraints de céder, mais lui confièrent la direction de leurs affaires et reconnurent même qu'ils l'avaient offensé. Il profita encore de leur faiblesse pour leur extorquer un acte en vertu duquel tout le Val de Senones devait lui obéir, à l'exception toutefois des domestiques de l'abbaye qui seraient réduits à deux charretiers, un cuisinier, un lavandier, un couturier et deux pêcheurs...
« Mais Dieu, qui rend à chacun selon ses oeuvres, punit Frédéric de ses méfaits même de son vivant car, dès l'époque où l'on commença à lui donner le titre de comte, jusqu'à la fin de sa vie, il ne put être libre de ses actes un an entier: ou bien il était détenu à Metz par ses créanciers, ou bien il souffrait de la fièvre et d'autres maladies ; il fut encore prisonnier de son neveu, le sire de Ribaupierre (42), qui réclamait sa part d'héritage. Bientôt, écrasé de dettes, il vendit à l'évêque de Metz, pour une certaine somme, le château de Blâmont avec le bourg, qui étaient auparavant de son franc alleu et les reprit de lui en fief... De plus. Dieu lui suscita un adversaire redoutable en la personne d'Henry, fils d'Henry son frère, qui exigeait une part du comté de Blâmont. Longtemps, il sut, par ses artifices, éluder ses demandes ; contraint enfin de s'exécuter, il lui abandonna Morhange, Viviers et les châteaux de Pierre-Percée et de Salm, ne conservant que Blâmont et le haut château le Deneuvre, duquel la mère du même Henry jouit jusqu'à sa mort, comme étant son douaire. Frédéric ne survécut pas au chagrin que lui causèrent ces pertes successives et, s'affaiblissant de jour en jour, il mourut peu âgé. »
On ne peut ajouter que fort peu de chose à ce récit, confirmé d'ailleurs par plusieurs documents authentiques. L'usurpation de Blâmont par Ferry doit avoir en lieu vers 1230 (43), et la vente qu'il en fit à l'évêque de Metz, douze ou quinze ans plus tard, car il promit, en 1246, de reprendre de lui Blâmont dès qu'il aurait fait la paix avec Henri de Salm (44). Il la fit l'année suivante et reprit aussitôt de l'évêque Jacques de Lorraine, son cousin, le château et le bourg de Blâmont, excepté ce qui mouvait du duc de Lorraine et de l'évêque de Toul (le dimanche avant la saint Martin 1347) (45) ; Jeanne, sa femme, avait fait les mêmes reprises, à cause de son douaire, deux mois auparavant (46). Il reconnut aussi (1248) tenir en fief, de Mathieu, duc de Lorraine, la moitié des bans de Domjevin et de La Frimbolle (47), promettant qu'après son décès, son second fils serait homme lige du duc « et à défaut de mâle, la femelle » (48).
L'abbaye de Senones ne fut pas la seule que Ferry opprima suivant Richer, les moines de Saint-Sauveur et de Haute-Seille eurent aussi beaucoup à souffrir de ses violences, et l'évêque de Metz fut obligé d'intervenir, en 1254, pour taire restituer à ceux-ci un troupeau de porcs que le seigneur de Blâmont leur avait enlevé après les avoir eux-mêmes maltraités (49).
Ferry mourut peu après (50) et nous ignorons le lieu de sa sépulture. Richer dit qu'il était encore jeune, cependant il devait être âgé de plus de cinquante ans puisqu'il était déjà marié en 1225, où il transigea, au nom de Jeanne, sa femme, avec Vidric, abbé de Senones, à cause d'un terrain situé sur la côte de Crévic (in colle de Culvi) et dont ils se disputaient la possession (51), et qu'il fut, la même année, choisi comme arbitre par le sire de Ristes et le prieur de Flavigny (52).
Il avait épousé Jeanne de Bar, dame de Dombasle, fille de Henri II, comte de Bar, et soeur de Thiébaut II, comte de Bar, avec lequel elle et son mari firent, en 1242, un traité d'alliance défensive contre tous, l'évêque de Metz excepté, qui devait durer même si Jeanne mourait la première (53). Celle-ci était veuve en 1258 et portait alors le titre de dame de Blâmont (domina lohanna Albimontis) (54).
Elle se remaria dans la suite à Louis, comte de Chiny, et vivait. encore en 1295, où elle donna quittance à « son cher cousin Henry, comte de Bar, d'une somme de 500 l. de petits tournois qui lui étaient dus par le traité qu'elle avoir. fait avec lui pour la succession de ses père et mère et de ses frères Henry et Renaud de Bar » (55). Elle mourut probablement en 1299 et fut, sur sa demande, inhumée dans l'abbaye d'Orval (56).
Outre la terre de Bouligny-Amermont et la mairie de Piennes (57), qui composaient sans doute sa dot, Jeanne de Bar apporta dans la maison de Blâmont des droits à la succession de ses frères, dont le règlement, terminé seulement après sa mort, mit son fils Henry Ier en possession de la ville d'Étain (58) et de ses dépendances. Les fiefs de Corny, Jouy et Marly (59) que celui-ci céda, en 1263 ou 1265, au comte de Bar duquel ils mouvaient, moyennant 1,000 l. de provenisiens (60), venaient apparemment aussi de Jeanne.
Ferry Ier en avait eu trois fils Henri Ier, l'aîné, qui fut seigneur de Blâmont et dont on parlera après ses frères, Geoffroy et Thomas.
GEOFFROY DE SALM ne nous est connu que par ce qu'en disent le P. Benoît Picart et Dom Calmet (61) « Il déclara, en 1251, qu'il étoit homme lige de l'évêque de Metz et qu'il devoit le secourir contre le duc de Brabant, le comte de Luxembourg et tous les Allemands. »
Les mêmes auteurs ajoutent que son épouse fut Agnès, dont il eut Villaume de Salm, enterré à Raon-lès-Leau ; toutefois nous pensons qu'il doit y avoir là une confusion avec le comte Godefroy, Agnès de Langstein, sa femme, et Villaume, fils de celle-ci, lequel fut bien certainement inhumé à Raon-lès-Leau, mais avant l'année 1138 (62).
THOMAS DE BLAMONT entra dans les ordres et mourut évêque de Verdun. « Thomas, dit l'abbé Clouet (63), bien qu'ayant des frères aînés, n'entra dans l'Eglise qu'avec une certaine hésitation et après avoir essayé de la charge séculière et militaire de vidame de Reims ; c'est sous ce titre qu'il se désigne dans les premières chartes qu'on ait de lui à Verdun vers 1280; alors il prit une sorte de chevalerie des dames de Saint-Maur, pour laquelle elles lui donnent l'usufruit de leur domaine de Baleicourt avec promesse de prier Dieu pour lui, de son vivant et après sa mort s'il l'améliorait; ensuite il fut élu princier du chapitre et son influence aida probablement à faire élire abbesse de Saint-Maur, sa parente Marguerite de Bar. »
En 1284, il était à la fois vidame de Reims et princier de Verdun. « Vers cette année, raconte le Père Picart, les bourjeois ne Toul étant en guerre a-rec leur évêque Conrad, celui-ci fit un traité secret avec Thomas de Blâmont, princier de Verdun, qui s'engagea à lui fournir 40 hommes bien armés qui doivent être joints par autant que l'évêque avoit rassemblés et desquels le princier devoit avoir le commandement. Cette troupe se rendit sur le bord du fossé. vis-à-vis la porte qui communiquoit au palais épiscopal, laquelle devoit être ouverte par les domestiques du prélat mais les guetteurs les virent, ils avertirent les bourjeois qui les repoussèrent, le princier eut la cuisse percée d'une flèche et resta prisonnier dans la ville (64) » Les Toulois attribuèrent à l'intervention miraculeuse de la Vierge la délivrance de leur cité le récit de cette tentative se trouve encore dans le Cartulaire des archives municipales de la ville et parait assez curieux pour mériter d'être reproduit : « L'an de Nostre Seigneur mil ije iiijxx iiij, Thomas, princier de Verdun, frère de Monsr. de Blanmont et nepveu de Alp. comte de Bar, avec armes et multitude d'arméz, la vigile de la s. Mathieu, apostre, emmy la nuict; quand on chantait les Matines, avec nefz mises aux fosséz et par un lieu de murs lors désert, qui est entre les murs de l'église et le palais, entra en ladicte cité de Toul pour icelle subjecter ; mais quasi divinement révélé ce aux citains, iceux citeins avec armes résistèrent, renversèrent les portes de la maison de l'évêque et entrèrent dans la dite maison. repoulsèrent les ennemys quasi au point du jour, et d'iceulx ennemys les ungs furent noyez et les autres tuez, en nombre des mors occis XL et noyez sept : plusieurs des tuez estoient de Liverdun. Et fut tiré d'un traict d'arbalestre en la cuysse Monsieur de Blanmont dans les fossez en ressortant. Beniet soit Dieu qui délivra la cité (65). »
Cette équipée suffit à guérir Thomas de son goût pour les aventures militaires: depuis, en remplissant les devoirs de sa charge de princier, il se dévoua aux intérêts de ses parents, les comtes Thiébaut et Henry de Bar (66). Devenu en 1303, évêque de Verdun, de l'agrément du roi de France, il traita avec lui pour mettre l'évêché entre ses mains et fit même frapper des doubles tournois à l'imitation de ceux de France et sur lesquels le mot regalis était seulement remplacé par legalis (67).
Il mourut le 23 juin 1305 et fut inhumé dans sa cathédrale, en la chapelle de saint Martin, du côté droit on y voyait son mausolée orné de sa statue et de son épitaphe (68). Le tout a disparu aujourd'hui, on sait cependant que l'inscription placée sur sa tombe était ainsi conçue
“ Qui Salmone natus, in Barri stirpe creatus
« Urbis praelatus fuit hujus, adest tumulatus,
« Nomen ei Thomas Blamontis, Christe reponas
« Hunc infra zonas horum, quos jure coronas.
« Anno milleno ter centeno quoque deno
« Quinque minus dat humo baptizans hunc, bene sumo. »
Par testament, il avait laissé à son église les revenus des bois, moulin et étang de Lemmes (69), lui provenant sans doute de l'héritage de sa mère, à charge d'en distribuer tons les ans le tiers le jour de son anniversaire, la veille de la saint Jean-Baptiste ce qu'atteste le nécrologe des évêques de Verdun: « Decimo kalendas julii obiit reverendus iu Christo pater et dominus Thomas, episcopus virdunensis pro cujus anniversario habemus tertiam partem totius valoris molendini et stagni de Lemmes, quae valent quolibet anuo sexdecim rasa frumenti et decera libras in denariis (70). »
HENRY Ier, SIRE DE
BLAMONT.
Henry Ier est le véritable auteur de la Maison de Blâmont il abandonna complètement, en effet, le nom de Salm, que Ferry avait continué à porter- et modifia les anciennes armoiries de sa famille (71), pour adopter celles que ses descendants conservèrent depuis. C'est à lui que les sires de Blâmont durent la puissance et le renom dont ils jouirent jusqu'à la mort du dernier d'entre eux (72) batailleur infatigable, il fut presque toujours heureux à la guerre, aussi verrons-nous les princes rechercher son aide et soit alliance ; politicien habile, il sut marier ses enfants dans les plus illustres maisons et agrandir ses domaines, que son père lui avait laissés chargés d'hypothèques.
A la mort de celui-ci, Henry était encore mineur et fut mis en mainbournie ; on ne sait qui fut chargé du soin de sa tutelle (73) et en quelle année elle prit fin. Ce qui parait certain, c'est qu'il commença par imiter ses ancêtres en opprimant les monastères des environs mais il ne tarda pas changer de conduite et, dès 1269, sur les conseils de Ferry, duc de Lorraine, voulant réparer les dommages qu'il avait causés à l'abbaye de Senones dans les lieux de son domaine où les religieux possédaient des biens, - Domptail, Buriville, Hablainville, Pettonville, Mignéville, Ancerviller, Remoncourt et Leintrey, - il lui donna son moulin de Vaxainville et sa corvée de Chenevières, plus 140 livres de provenisiens, promettant de lui en faire expédier un acte en bonne forme, quand il serait chevalier et aurait un sceau. Louis, comte de Chiny, ratifia le don de ce moulin, sur lequel il avait des droits du chef de sa femme, mère d'Henry (74).
L'année suivante, pendant la guerre entre l'évêque de Metz et le duc de Lorraine, Henry accourut à l'aide de ce dernier, avec le comte de Deux-Ponts, et s'empara de plusieurs places, qu'il dut restituer en vertu de la trêve conclue au mois de février suivant (75). Les hostilités ayant recommencé presqu'aussitôt, Ferry III fit encore alliance avec le sire de Blâmont, qui s'engagea à le soutenir « contre toutes gens qui peuvent vivre et morir (76) » l'évêque fut vaincu et fait prisonnier, et le duc, voulant reconnaître les services de son fidèle allié, lui donna, entre autres choses, sa vigne « que siet on vignable d'Amance, c'est a savoir entre le chemin con vait d'Amance a Remereville et le sentier con vait d'Amance a Malaides », dont le vin avait sans doute de la réputation (77). Il fit ensuite la paix avec l'évêque, à condition que celui-ci satisferait aux réclamations du sire de Blâmont, son cousin (78) mais ces deux seigneurs, ne pouvant se mettre d'accord, s'en remirent à l'arbitrage de Gobert, sire d'Apremont, et, à son défaut, de l'évêque de Langres (1277) (79). La sentence qui suivit ne nous est point parvenue.
Une contestation s'étant élevée, entre Henry et le comte de la Petite-Pierre au sujet de leurs droits respectifs à Amenoncourt et à Igney, ce dernier, à la tête de quelques troupes, entra sur les terres de son adversaire et commençait à les ravager quand le seigneur de Blâmont accourut, le battit et le força bientôt à lui céder, par traité, ce qu'il possédait dans les villages en litige, comme indemnité de la somme de 200 livres de toulois à laquelle se montaient les dégâts causés. Le comte donna pour garants de l'exécution du traité, Henry et Burnique de Ristes, frères (1283) (80).
C'est à cette époque qu'eurent lieu les célèbres tournois de Chauvency, dont la curieuse relation, oeuvre d'un témoin oculaire, nous a été conservée (81). Le sire de Blâmont assista avec le comte de Chiny, son beau-père, et selon l'auteur, fut un des plus remarqués :
« Bien les cognu quant je les vi.
Cuens de Blanmont, voëz de Vi
Estoit li sire de la route(82) »
Plus loin,
« Dou premier dirai la manière :
Il est trestout d'autel menière
Comme on devise Lanselot.
Or, ne soit nus qui plus le lot
A cestui point, que c'est assez.
Bel et briement m'en suis passez.
Devant les dames droitement
Vint chevauchant molt cointement
Parez d'unes armes vermoilles,
A bien li sient a mervoilles
Là deux saumont d'argent battu (83).
A son escri sont en bastu.
Hyraut Tyois, hyraut Romant.
Tuit serveut de l'or estrument,
Et escrient : Blanmont ! Blanmont !
Et Balquenbert ! ainsi s'en vont.
Li un l'autre loue ses. menières,
Chantant en l'ombre des bannières.
Devant les dames sont passé,
Au chief dou renc sont amassé.
Son hiaume et sa lance aparoillent
Et les dames molt se mervoillent
De sa taille et de sa biauté,
Et dient c'une roiauté
Li déust Diex avoir donnée;
Que bien fust en lui assenée
En sens, en honor, en largesce,
En loiauté et eu prouesce (84). »
Ailleurs le poète donne au seigneur de Blâmont le surnom de Maucervel, que nous n'avons rencontré dans aucun autre document « Henris de Blancmont Maxcerviaus » (Vers 2652), « « Mauscerviaus » (Vers 2828), enfin
« En costé lui (Louis de Chiny) vi d'autre part,
Autre si fiers comme un lieupart,
Maucervet au vermoil escu
A deus saumons d'argent batu. » (v. 3150)
Bientôt après, Henry vint en aide au duc de Lorraine, qui guerroyait contre l'évêque de Strasbourg ; il fut témoin du traité de paix conclu entre eux en mars 1287 (n. st.) (85) et reçut du duc, pour le secours qu'il lui avait apporté, la suzeraineté du château d'Eschery et du Val de Liepvre (1289) (86).
Une guerre ayant éclaté entre Thiébaut, comte de Bar, et Bouchard d'Avesnes, évêque de Metz, Henry vint se joindre à l'armée de son oncle, lui amenant le comte de Linange, son beau-frère, le comte de Spanheim et nombre de chevaliers et écuyers d'Allemagne.
Quand la paix fut signée, le comte de Bar s'accorda avec lui au sujet des pertes de chevaux et des dépenses que les seigneurs allemands avaient faites à son service et lui remit une somme de 1500 livres de tournois, sous la promesse de les désintéresser (1287) (87). Thiébaut y ajouta bientôt le don de « la maison appelée la Folie », appartenant auparavant à Thierry d'Amel, et de ses dépendances en hommes, femmes, étangs et bois, du moulin et de l'étang d'Etain, à charge de foi et hommage ; en conséquence, le sire de Blâmont déclara, au mois de juin 1288, qu'il était homme lige du comte après l'évêque de Metz, le duc de Lorraine et l'évêque de Toul, et que celui de ses héritiers qui tiendrait ce fief, reconnaîtrait le comte de Bar pour son premier suzerain (88).
A peine tranquille de ce côté, Bouchard se trouva obligé de se défendre contre le duc de Lorraine. Celui-ci conclut un nouveau traité d'alliance avec Henry, qui s'obligea solennellement à Einville, en présence de ses féaux Jean, sire de Montfaucon, et Jean d'Oiselet, à aider, de tout son pouvoir, le duc contre l'évêque et à le recevoir, lui et ses gens, dans ses forteresses : ordonnant à tous ses vassaux d'agir comme lui, et promettant, s'il manquait à ses engagements, de renoncer aux 200 livres qu'il touchait, chaque année, sur la saline de Rosières (1289) (89). Les hostilités durèrent deux ans, et le seigneur de Blâmont reçut, en considération de ses services, la suzeraineté des château, bourg et ville de Fontenoy-le-Château que Ferry de Fontenoy tenait du duc (90), et tout ce que ce dernier possédait à Belrupt, à Bonvillet et au ban des Vallois (91).
Il fit ensuite son traité particulier avec Bouchard d'Avesnes, qui avait de graves motifs d'animosité contre lui, mais ce ne fut pas sans de longues hésitations ; déjà, l'évêque de Strasbourg, choisi par eux comme arbitre, avait déclaré qu'il devait reprendre de l'évêque de Metz Blâmont, Deneuvre et la vouerie de Vic (92) il fallut encore la médiation du duc Ferry, du comte de Salm et des abbés de Gorze, de Haute-Seille et de Salival pour l'amener à un accommodement qui fut enfin conclu, le mercredi après les Bures (février) 1291, sur les bases suivantes : Il déclara tenir de Bouchard, en foi et hommage, le château et le bourg de Blâmont de même que son père les avait repris de l'évêque Jacques, plus le château de Deneuvre, le bourg et toute la châtellenie située entre les rivières de Meurthe et de Vezouse, ainsi que la châtellenie comprise entre les rivières de Meurthe et de Mortagne, qui était un nouveau fief, réservant seulement ce qu'il tenait à Magnières ne dépendant pas de la seigneurie de Deneuvre, enfin la vouerie de Vic, excepté les droits de sa mère et du comte de Chiny, son « parâtre », lesquels devaient en jouir leur vie durant il consentit que l'évêque eût la garde de Haute-Seille et des granges de Gemmigny, de Gresson et d'Hernaménil (93) et qu'il prit ses hommes et femmes d'Azerailles au nombre de dix-sept. En indemnité de cet abandon, Bouchard lui céda ce qu'il possédait au faubourg de Laître à Deneuvre, sauf le prieuré du Moniet et à condition que la place voisine du château, en dessous des murailles du bourg, continuerait à demeurer vide pour l'utilité de chacun. Les granges de Chénois, Buriville, Pettonville, Mignéville et Ogéviller (94) restèrent en la garde d'Henry, qui eut le droit de prendre dans la forêt de la Moncelle tous les bois nécessaires à ses maisons et à son moulin de Deneuvre, outre l'usage du bois mort, qui fut reconnu à ses sujets de ce lieu. Il fut aussi convenu que les bourgeois de Blâmont et de Deneuvre pourraient pêcher dans la Meurthe, tous les jours à part le dimanche et le lundi, et que les marchands qui se rendraient au marché de Deneuvre, paieraient les droits de vente au seigneur de Blâmont, à moins qu'ils ne fussent habitants de Vacqueville. En dernier lieu, l'entrecours existant entre les bourgs de Blâmont et de Baccarat fut supprimé et les parties se quittèrent tous les dégâts commis des deux côtés, Ce traité fut confirmé, au mois de mai suivant, par l'archevêque de Trèves (95).
Lorsque Henry, comte de Bar, mécontent du roi de France, se préparait à l'attaquer, il voulut s'assurer l'appui du sire de Blâmont et, dans ce but, fit avec lui, au mois de décembre 1295, plusieurs traités. Par le premier, Henry et Cunégonde, sa femme, reconnurent que le feu comte de Bar, Thiébaut, leur ayant donné une rente de 200 livres à tenir de lui en fief, ils l'avaient cédée au comte Henry, leur cousin, ainsi que les intérêts en retard, contre paiement d'une somme de 3000 livres (96) ; le second est un acte de reprises donné au comte par le seigneur de Blâmont, du consentement de Cunégonde, qui les possédait en franc-alleu, pour les village et ban de Gogney et ce qu'ils avaient acquis à Amenoncourt (97) par le troisième enfin, Henry promit de servir le comte contre le roi de France, de sa propre personne avec ses gens d'armes à cheval, moyennant 2000 livres de tournois à lui remises et qu'il s'engageait à rendre si la guerre n'avait pas lieu, en donnant comme caution Jean de Bourgogne, frère du comte de Bourgogne (98). Au printemps suivant, dit Dom Calmet, le comte de Bar envahit la Champagne et, après quelques succès, fut fait prisonnier, ce qui mit fin à son entreprise.
La défaite de son allié ne porta pas atteinte à la considération dont jouissait le sire de Blâmont, car on voit, l'année suivante, Jean, duc de Brabant et de Limbourg, lui accorder une rente de 200 livres de petits tournois noirs, payable à Bruxelles, afin de pouvoir le compter au nombre de ses vassaux (99), et Guy, comte de Flandres et marquis de Namur, lui assigner pareillement, sur la recette de Namur, cent livres de rente, moyennant lesquelles il devait l'aider « en tous lieux encontre tous, en quelsconqs besogne ke che soit, soit en guerres queles ke elles soient et fors guerres, il et si hoir, hors mis ses signeurs, chest a savoir le eveske de Mies, le eveske de Toul, le duc de Loheraine et le comte de Bar, asquels il doit aidier lor terres a deffendre contre nous, mais il ne doit mie venir sour nous avoec ses desus dis seyneurs pour nous adamagier (100) ». Un peu plus tard. Jean, comte de Hainaut, de Hollande et de Zélande, voulant reconnaître « le bons et loyal serviche », qu'il avait reçu de « noble homme, nostre chier cousin et foyaule, monsignour Henry, signour de Blanmont,» lui octroya, par lettres datées de Valenciennes en
novembre 1302, à titre de fief, une rente de 120 livres de Hainaut, payable sur ses coffre, en attendant l'assignation qui en serait faite sur un fond de terre en Hainaut (101).
C'était l'époque des guerres que le comte de Flandres et ses alliés soutinrent contre la France (1297-1304) les détails qui précèdent démontrent que le sire de Blâmont dut y prendre, tout au moins pendant la première période, une part active (102). A son retour, il eut à réprimer des entreprises dont son absence avait été le signal c'est ainsi qu'il fit prisonnier Henry de Vadengenheim, qui se livrait à des déprédations sur ses domaines, et ne consentit à lui rendre la liberté que sous promesse de payer une rançon, dont fut caution Ferrion de Marsal (103). Il eut ensuite, avec Jean, comte de Salm, une querelle pour des motifs inconnus ; ces deux seigneurs en vinrent aux mains à Neuviller près de Badonviller, et le comte vaincu fut forcé de céder à son cousin ce qu'il possédait à Sainte-Pôle et de lui donner six hommes en remplacement d'un pareil nombre qui avaient été tués dans le combat (1301) (104).
Dans le courant de décembre, même année, le sire de Blâmont, Cunégonde, sa femme, Henry et Eymequin, leurs deux fils, fondèrent à Deneuvre, en l'honneur de saint Georges, une collégiale capable de subvenir à l'entretien de sept chanoines, dont un prévôt. La chapelle était déjà construite sur la place du marché ils y joignirent le terrain nécessaire à l'établissement d'un cimetière et la dotèrent des biens suivants tous leurs gerbages de Domjevin, vingt-huit quartes de blé à prendre sur les revenus de Reillon et de Gondrexon, vingt-trois quartes de seigle et seize d'avoine sur Brouville et Merviller, plus le patronage de la cure d'Azoudange et diverses rentes six quartes de blé et quatre de cire, assignées sur le moulin et le four de Deneuvre, et quatorze livres de toulois destinées à entretenir la lampe ; ils y unirent la chapelle du château de Deneuvre, à charge, par les chanoines, d'y célébrer la messe chaque jour pendant l'absence du seigneur et de chanter, à perpétuité toutes les semaines, une messe de Requiem pour le repos de l'âme de feu Valéran de Luxembourg, sire de Ligny, leur cousin (105), et, après leur mort, un service solennel le jour de leur anniversaire. Les droits de souveraineté, de garde et de nomination aux prébendes furent réservés par les fondateurs, en observant que, si leurs domaines venaient à être partagés entre leurs successeurs, le seigneur de Blâmont et celui de Deneuvre nommeraient alternativement aux canonicats vacants ; ils firent enfin participer à leur fondation Ferry, duc de Lorraine et les défunts Raoul, roi d'Allemagne, Thiébaut, comte de Bar, Guy, comte de Flandres, et Isabelle, sa femme, en reconnaissance des bienfaits qu'ils en avaient reçus (106).
Renaud de Bar, évêque de Metz, confirma, en 1306, le traité passé entre son prédécesseur Bouchard et le sire de Blâmont, à condition que celui-ci lui abandonnerait sa vouerie de Vic pendant tout le temps de son épiscopat contre la somme annuelle de 300 livres. Henry y consentit et promit, en son nom et en celui de ses successeurs, de secourir le prélat, en cas de guerre, moyennant une nouvelle rente de 100 l. sur les salines de Moyenvic et de Marsal (107). Voulant ensuite procéder au partage des forêts qu'ils possédaient indivisément dans les châtellenies de Turquestein et de Blâmont, ils nommèrent, à cet effet, quatre commissaires qui furent, pour l'évêque, Gérard de Warnersberg et Jean de Weneis et pour Henry, André de Parroy et Liétard de Brouville, tous chevaliers, et s'engagèrent à exécuter fidèlement leur décision (108). Ce n'est que huit ans après que ce partage fut terminé, comme on le verra plus loin.
Le seigneur de Blâmont avait été revêtu, on ne sait à quelle époque, des fonctions éminentes de sénéchal de Lorraine. Cette charge était alors la première du duché (109) et conférait à son possesseur des droits et des pouvoirs étendus, mais elle l'astreignait à de longs séjours près de la personne du duc et à de fréquents voyages pour son service. Ce fut probablement la raison qui décida Henry a s'en démettre et à la vendre, en février 1309 (v. st.), à Mathieu de Lorraine, fils du duc, avec l'agrément de celui-ci, pour 400 livres de petits tournois (110).
Désirant prévenir les difficultés qui pouvaient s'élever, après son décès, au sujet de. sa succession et de celle de son épouse déjà morte, il voulut que le partage en fût rédigé de son vivant entre ses deux fils, de manière à pouvoir changer lui-même dans la suite ce qui ne les aurait pas entièrement satisfaits l'un et l'autre. Ce document, important en ce qu'il donne l'étal des possessions du seigneur de Blâmont à cette époque, mérite d'être reproduit ici.
« Je Hanris, sires de Blanmont, fais savoir à tous. que je ai reswardei et considerei lou bien et bon proufeit de mes enfans Hanri et Emekin, et pour osteir toute matière de bestans qui pourroit estre ne en cheoir on temps à avenir entre mes dis enfans, pour raison de partaige de lour terres que encheues lour sunt de part dame Conegon, ma feme lor mère, dont Deus ait l'ame, et que encheoir lour devront de part moy après mon décès, par consail de preudomes et de bone gens et par lou consentement de mes dis enfans..., ordonne le partaige de ma terre et de la terre de ma femme desus dicte entre mes dis enfans, de la fourme que ci après s'ensuit :
« Premièrement, je vol que Hanris, pour raison d'aisneesse... ait Blanmont, lou chastel et la ville ferme et tout lou ban, ensemble les villes, les bois, les estans et les rivières que si après sunt nommées en homes, en femmes, en rentes, en censes, en waignaigès de chans et de preis et en toutes autres seignories, redevances et yssuees appartenans à Blanmont louboure, à Geuroville, à Viesmarchié (111) et aus villes de Barbaix la ville, l'estaing de Welvacourt (112), ensemble lou moulin, lou boix de Welvacourt et lou boix de Gehenloway (113), Halloville, Ancerviller, Badésemont (114), lou petit estaing de Halloville, lou boix aus dous bollais (?), lou Bouxat (115) devant
Ancerviller, Domèvre, Remoncourt, Amenoncour't, Ygneis, l'estaing d'Amenoncourt, lou boix d'Emenienboix et ceu que je ai à Lentreix d'omes (116), Autrepierre la ville, lou boix de Grantsalve (117), lou petit estaing de Rancogney (118), Barbezue (119) la ville, Reppaix et Assenzeis (120), l'estaing et lou moulin de Respaix, la bergerie, la veigne de Respaix, lou bois de Walle (121) et lou Haut Boix (122), lou boix de Heis (123), l'eslaing de Wazre (?), lou boix de Strions (124), Herbéviller et Sainct-Martin, la veigne de Herbéviller, Dongevin, Ruillons (125), Gondrexons, Chazelles, Framoville, lou moulin de Framonville, Harboey, Cyreis et ceu que je ai à Wallois (126), à Bonmoustier (127), à Bertimont et à Sainct-Sabvour (128), lou boix et l'eawe de Chastillon et les boix de dou Wal (129), la wouerie de Boenmoustier, Laffrenborne (130), Laforest, Bartremboix, Hatigney, Warconville (131), Nidichowe (132) et ceu qui appartient à ban de Leffrenborne en moulins, en boix et aultres choses, Ybeneis (133), Huetenges (134), Foukereis et les deimes de Gondrexanges, Guneis (135) et tous les ruis et rivières appartenans aus dis leus et aus dis bans, et encore la warde (136) de Sainct-Salvour l'abbaye et des appendizes, de Mouniais (137), de
Domèvre, de Ruillons, de Monsteruel (138), de Chanoy (139), de Remoncourt et de Fromonville et aussi Estein (140) et ce qui appartient à la terre d'Estein en toutes choses et toute la terre de Bouligneis (141) et quan qui appartient jusques à la wellance de onze cens livrées de terre à petis tourneis, et encores en le contei de Namur dous cens livrees de terre..., lesquels il tanrai du conte de Namur, en la contei de Hennalt (142) seix vins livrées de terres..., lesquels yl tanrai du conte de Hennalt, et encores les frans homes des fiefs wardains (143) de Blanmont.
« Je wuel que Emekin... ait... Denuevre (144) lou chasteil et lou bourc, avoec le leu con dit Laistre (145) et ceu qui appartient... et les villes. de Frubvmesny (146). Buriville et ceu que je ai à Herbéviller-Sainct-Germain (147), Ongiéviller (148), Reclonville, Bétonville (149), Hablenville, Fluns et lou Mesny (150), lou moulin de Fluns, la rivière de Fluns, lou boix de Mesny, Dousterne (151), Fonteignoy (152),Cruviller, Murviller (153), lou bois con dit la Weivre (154), lou Soulles (155), lou bois dou Bolay (156) et de Chenesoy (157), la Rappe que je ai acquestei aus hoirs Fourke de Monteigneix (158),lou boix de la Wevre oultre l'eawe (159), Rehéreis, Hadomeis, Warsienville (160), Bl'ouville, Brouvelete (161), Sainct-Clément, La Roenxe (162), Martincroix (163), la rivière dou leu et encores la terre de Morsperch (164). la wouerie de Wy (165), Blémereis, Wéhois (166), Magnonviller (167) et l'estaing de Blémereis et lou moulin et les trois pièces de boix qui sunt deleis, assavoir lou Garen et lou Bouxay dessus l'estaing, Monteigneix, fuers ceu que Clémence, ma fille, enporte par ses lettres de dowaire, encores lou bruel (168) de Dongevin con dit de Frisonviller et lou prei que fuit à Thierry d'Ongiéviller, encores Destors (169) et quinze Livrées de terre en la saline de Rozières, la veigne d'Amance et lou prée que ait fait et con dict à Meignières (170), encores dous cens livrées de terre... à duchiei de Brabant. et cens livrées. à contei de Flandre, encores les wardes des maisons de religion... à Dousterne, Bétonville, Buriville, Ongiéviller. Meignienville (171), Monteigneis et les warcles des chanonnes de Denuevre.
« Je vuel que ma fille, Aleis d'Assois, soit salve de la terre que elle tient en la terre de Blanmont, dont on n'ait fait point de mention devant, laquelle ly fuit délivrei pour son mariaige, laquelle je wuel qu'elle tieugne eu la fourme et en la menière que délivrei fut, c'est assavoir pour la somme de mil quatre cens livres de petits tourneis... comme Hauris puet la rachepter.
« Et vuel aussi que ma fille, madame Jehanne, soit salve de la terre que elle tient à Meignières et à Mazilley (172) et aus bans des dis leus, ensemble deix et sept livrées de terre à petis tourneis, que je li ai assignei à panre et à recevoir chascuu an, à termirie de Pakes, en la vente de Denuevre. et en la vente de Blanmont... lesquels chozes je ly ai assignei pour raison de son mariaige..., comme ses lettres lou diviseut..., laquelle terre Emekin pourai rachepter à ma fille Jehanne, se mari..., fuers la maison fort de Meignières et fuers l'acquest que je ai fait de Bertrang
d'Anserviller... et Arnol wowé d'Espinaulx... (173); Hanris ou sui hoirs pourroient rachetei..., se mari avoit. la maison fort de Meignieres..., et en recompensation de la ditte maison fort....,
Emekin..., aurait lou fied que Nicolas d'Amance tient de moy à Moveron (174).
« Et vuel encores et octroy que mes filles, après mon décès, aient et prengnent en mon héritaige tel droit et telle parson comme avoir deveront aus us et aus coustumes de Lohiereingne et wueil et octroy que Clémence, ma fille, ait et teingne franchement..., sans débat de Hanri et de Emekin..., tout ce que je ly ai assignei à Monteigneis et alours, ensi comme ses lettres lou devizent qu'elle en ait de moy.
« Encores est assavoir que comme messire Jehans de Wasschem, mes hons lieges, m'eust fait grans damaiges en bouctant lou feu en ma terre, en grevant mes hommes..., je ai saisi lou fied que il tenoit de moy... à Sainct-Steile (175), à Villers (176), à Buriville et à Frenbvmesny (177)... ; à la proière de... Conraud, éveske de Strassbourch..., je ai rendu à Conne, freire à dit... Jehan,... Sainct-Steile et Villers...
« Et ceste parson et toutes les convenances... cy dessus escrites, faicles, ordenées et devizées, ai je faict par... la voluntei de Hanri et de Emekin, frères, mes enfans dessus dis; et de Marguerite, femme dou dit Hanri. Et nous, Hanri et Emekins, frères, enfans doudit seignour de Blanmont, en aage et fuers de mainburnie, et je Marguerite, femme dou dit Hanri, vouIons... et agréons... la parson et toutes les convenances... cy dessus... escrites...
« Et pour ceu qae ce soit ferme chose et estable, je Hanris, sires de Blanmont devant dit, à la proière et à la requeste de mes enfans devant dis, ai mis mon saiel en ces présentes lettres. Et nous, Hanris, Emekins et Marguerite devant nommé avons proiet et requis, on nom de nous et de noz hors, à noz très chiers seignours... Renalt de
Bair,...éveske de Mes,... Thiébalt, duc et marchis de Lorhierrengne et... Andouair, conte de Bair..., que ils vueillent mettre leurs saiels en ces présentes lettres, avec lou saiel nostre très chier signour et père dessus dit. Que furent faictes l'an de grace Nostre Seignour mil trois cens et onze ans, lou samedi après la Trinitei, on mois de junet (178). »
A la suite de ce partage, Henry eut des difficultés avec Ferry IV, duc de Lorraine (179), à cause du château de Magnières qu'il avait fait construire depuis un certain temps (180) et dont il refusait l'hommage au duc, tandis que ce prince prétendait que le terrain sur lequel il s'élevait était, de toute ancienneté, fief du duché.
Mais bientôt, sur les conseils de ses amis, il reconnut avoir promis aux prédécesseurs de Ferry que, s'il y avait deux héritiers mâles de la seigneurie de Blâmont, l'un d'eux devait être homme lige du duc de Lorraine avant tout autre suzerain et tenir de lui les héritages qui mouvaient du duché ; il consentit, en conséquence, à faire ses reprises pour les fossés et le pourpris de la forteresse, ainsi que les francs alleus et autres biens qu'il possédait à Magnières, ajoutant qu'aussitôt son retour dans le pays, Eyme, son fils, deviendrait homme lige du duc et tiendrait en fief le château comme lui et sa fille Jeanne le tenaient, ce qui fut accordé l'an 1312, le dimanche après la Saint-Evre (septembre) (181).
Pour résister à l'évêque de Metz et au comte de Bar qui s'étaient ligués contre lui, le duc Thiébaut avait fait appel à Henry et celui-ci avait beaucoup contribué au gain de la bataille de Frouard (1308),dans laquelle le comte de Bar fut fait prisonnier (182). Voulant profiter des bonnes dispositions où le seigneur de Blâmont se trouvait à son égard, Ferry IV fit avec lui et Henry, son fils aîné, le 11 novembre -1313, un traité d'alliance par lequel ils promirent de s'aider mutuellement contre Renaud de Bar, évêque de Metz, pendant toute la vie de ce prélat le duc s'engagea de plus personnellement il ne pas faire la paix avec le comte de Bar et à ne pas le mettre en liberté sans l'agrément et le consentement de ses alliés (183).
Il est vrai qu'Henry avait de graves motifs d'animosité contre la maison de Bar, qui cherchait à le frustrer d'une partie de l'héritage de ses oncles Henry et Renaud de Bar ; en outre, durant la guerre, ses terres avaient beaucoup souffert, non moins que celles du duc, comme le montre un état, dressé à cette époque, des dégâts causés dans les environs de Deneuvre par « lez gens l'avesque de Mes que de mons. de Bairt » ; ainsi : à Gélacourt ils mirent le feu à l'église, emportèrent les cloches, détruisirent ou pillèrent plusieurs maisons ; à Badménil ils prirent des bestiaux et brûlèrent des maisons ; ils saccagèrent le « moustier » de Mazelure, incendièrent et pillèrent la cense
de Voivre ; à Glonville ils brûlèrent trois maisons et emmenèrent des bestiaux ; ils mirent le feu à Flin, l'église fut détruite et il y eut pour plus de 1000 livres de dégâts ; à Azerailles huit maisons furent livrées aux flammes ; à Olzey ils prirent tout ce qu'ils purent emporter ; La Frimbolle, Bertrambois et La Forêt furent incendiés et pillés, les églises détruites, le tout valant plus de 4000 l. ; à Marainviller, trente cinq maisons furent brûlées avec les meubles et les animaux qui s'y trouvaient, le curé fut « devesti tout nue », l'église « brisiet », les ornements et le calice enlevés, le tout estimé 2200 l. ils saccagèrent l'église de Saint-Pierremont et prirent le bétail et les meubles qu'on y avait renfermés, les femmes furent « devesti toutes nues », deux hommes furent tués, les dégâts se montèrent à 1500 1., « sens compteir lez homes mors » ; à Magnières ils brûlèrent la maison de « mons. Jaique Dorey » ; ils vinrent deux fois à Domjevin et prirent « bestes, mobles, bleif et vin » et tout ce qu'ils trouvèrent (184).
La paix fut conclue le 20 mai 1314, grâce à l'intervention de Louis, roi de Navarre. Le comte de Bar promit de payer au duc Ferry 90,000 l. tournois de rançon et l'évêque de Metz : de lui engager pour 10,000 l. les fiefs que le seigneur de Blâmont tenait de l'évêché ; d'annuler la sentence rendue à Vic contre Henry et qui le dépouillait de ces fiefs pour avoir porté les armes contre son suzerain enfin, de lui payer 4000 l. comptant avant l'élargissement du comte. Ce traité fut scellé par le roi de France, le roi de Navarre, son fils, le duc de Lorraine, le sire de Blâmont, l'évêque de Metz et le comte de Bar. Celui-ci dut encore s'engager, par lettres datées du jour de la Madeleine (22 juillet), à en faire exécuter toutes les conditions sous peine d'une amende de 40,000 marcs d'argent, dont moitié serait pour les rois de France et de Navarre et le reste pour le duc de Lorraine et le seigneur de Blâmont (185).
Henry fit le même jour son accord particulier avec le comte au sujet de la succession de ses oncles, à laquelle il avait des droits par sa mère et dont il n'avait pu entrer en jouissance. Il fut convenu qu'il aurait, pour la part lui revenant, une rente de 300 l. tournois, en garantie de laquelle le comte lui engagea la ville et le ban d'Etain(186), se réservant la faculté de la pouvoir racheter quand il voudrait, en payant la somme de 5000 livres (187), et promit de lui restituer les deux villages de Piennes et de Bertrameix « desqueilz la meire au dit signour de Blancmont mourut tenens et prenens », lui permettant de faire construire une forteresse dans les terres qu'il tenait du comté à condition de lui en faire hommage (188).
De son côté, l'évêque de Metz s'était aussi arrangé, quelques jours auparavant, avec Henry, touchant leurs bois indivis des châtellenies de Turquestein et de Blâmont, dont le partage était depuis longtemps résolu. Il fut dressé sous la direction de Liétard de Broaville et de Mathelet d'Hattigny, chevaliers, et accepté par les parties en présence de nombreux témoins, entre autres Jean, comte de Salm, Burnique, sire de Ristes, Hugues de Vaudoncourt, bailli de l'évêché de Metz, Henry d'Herbéviller, bailli de Blâmont, Thierry d'Herbéviller et André de Parroy, chevaliers, Pélerin de Bourdonnay, écuyer, Renaud de Barbas et Thomas de Blâmont, chanoines de Saint-Sauveur. L'évêque eut les bois compris entre la Vezouse, la Sarre et le Donon jusqu'à une limite allant de la Sarre à la Vezouse en passant par Saulsenrupt ; à Henry échurent la partie de forêt située de l'autre côté de la Vezouse, plus les bois du ban de Bon-Moûtier jusqu'à ceux des abbayes de Saint-Sauveur et de Saint-Symphorien et encore les bois dits « La Belloye » et « Nehemoulin ». Ils réglèrent aussi la question des localités dites d'entre-cours Merviller, Criviller, Reherrey, Hadomey, Brouville, Brouvelotte, Hablainville et Vaxainville et décidèrent qu'elles seraient communes entre eux et auraient leur usage dans les bois de l'évêché de plus, l'évêque consentit que les habitants d'Azerailles et de Xaffévillers continueraient à payer les droits de vente au marché de Deneuvre et que les sujets du seigneur de Blâmont pourraient acheter aux siens tout le bois qui leur serait nécessaire (189).
Henry fit, à la même époque, un accord avec les religieux de Haute-Seille à cause des bois de Rappes et de l'Usuaire au sujet desquels il y avait contestation entre eux (190).
Le duc de Lorraine et le comte de Bar voulurent l'année suivante sceller leur réconciliation par un acte solennel et se promirent de s'aider mutuellement toute leur vie dans leurs guerres ; le sire de Blâmont fut compris dans ce traité, et les deux princes s'obligèrent aussi à le secourir contre ses ennemis (191).
Ces guerres continuelles ne lui faisaient pas cependant négliger le gouvernement de ses états c'est ainsi qu'en 1317, de concert avec Henry et Eyme, ses fils, il autorisa des lombards nommés Maillfroy, Merlin et Bartholomeu, de Montanier, à y établit, une sorte de mont-de-piété. Moyennant une redevance annuelle de 80 l. de petits tournois noirs, il leur permit de résider pendant dix ans dans la ville et châtellenie de Deneuvre, d'y « avoir hostel » et de « vendre, achater, prester et chaingier et de lour denieis gaignier, en toutes les manières qu'il lor plairet » ; s'engageant à ne laisser demeurer à Deneuvre d'autres « lombairs torquains ne cowessins ne juiers prestans » excepté le juif Vynant et deux autres familles juives, à les défendre même contre les censures de l'Eglise, à les laisser circuler en toute sécurité dans ses domaines et à les garantir de toute action judiciaire ; leur permettant de vendre, un an et un jour après l'époque du prêt, les gages reçus en nantissement et de pouvoir quitter ses terres pour aller s'établir ailleurs, quand bon leur semblerait (192).
A l'occasion des négociations terminées par les soins du roi de Navarre, on avait pu, à la cour de France, apprécier la valeur d'Henry et l'influence dont il jouissait ; aussi le roi Philippe V (193), voulant se l'attacher et pouvoir compter sur ses services militaires et ceux de ses successeurs, lui donna par lettres datées du mois d'août 1318, une rente perpétuelle de 300 l. tournois, assignée sur la ville de Chalaure-la-grande (194) et sur les revenus de la prévôté de Provins avec une maison dans la première de ces villes, pour tenir le tout de lui en fief et le service en guerre oui autrement, envers et contre tous, excepté le roi d'Allemagne, l'évêque de Metz, les ducs de Brabant et de Lorraine, les comtes de Hainaut, de Namur et de Bar, ses suzerains (195).
Cela n'empêcha pas le seigneur de Blâmont de certifier, le mois suivant, ainsi qu'Henry, comte de Vaudémont, et Vauthier, sire de Bauffremont, que le roi Philippe n'avait ni droits de souveraineté ni revenus à Neufchâteau et que les bourgeois de ce lieu ne devaient être tenus à rien envers lui, n'étant pas placés sous sa juridiction (196). A ce trait, on peut juger et de son désintéressement et de l'indépendance de son caractère.
Malgré les traités conclus précédemment, de nouvelles difficultés ne tardèrent pas à s'élever entre Henry et l'évêque de Metz à cause des bourgeois d'Epinal et de Baccarat et d'Henry de Fénétrange, qui avaient fait des dégâts sur les terres du sire de Blâmont. Celui-ci, après avoir usé de représailles aidé du comte de Sarrebruck, fit avec l'évêque Henry Dauphin, successeur de Renaud de Bar, une transaction par laquelle ils se tinrent réciproquement quittes de toute réclamation, réservant seulement les dommages provenant du sire de Fénétrange, qui furent remis à la décision d'un arbitre (197). Le jugement, rendu quatre ans plus tard par Jean de Hohenstein, condamna Henry de Fénétrange à donner les satisfactions qu'on lui demandait (198).
Henry resta depuis en bons termes avec Henry Dauphin pendant les quelques années qu'il occupa encore le siège de Metz ; il lui céda même la vouerie de Vic et ses dépendances, pour tout le temps de son épiscopat, moyennant une somme annuelle de 300 livres de petits tournois noirs et, en même temps, reprit de lui en fief une forteresse appelée Châtillon, qu'il venait de faire construire sur la Vezouse entre Blâmont et Turquestein, « laiqueile il disoit estre de son aleuf » (mars 1324, n. st.) (199).
L'évêque, sur le rapport de Jean, comte de Salm, reconnut, au mois de mai suivant, devoir à Henry, tant pour cette reprise que pour certains revenus de la vouerie de Vic, qu'il avait indûment touchés, 1200 l. tournois, dont il lui assigna le paiement sur les salines de Moyenvic et de Marsal (200).
Le bon accord qui régnait entre eux, et surtout l'attitude d'Eyme de Blâmont, qui refusait de faire ses reprises du duc de Lorraine pour Magnières, furent les causes d'une rupture entre ce prince et le sire de Blâmont. Après bien des réclamations suivies d'hostilités, ils scellèrent, en septembre 1324, un traité de paix par lequel Henry reconnut tenir ligement de Ferry IV les fiefs que son père ou lui avaient précédemment repris des ducs de Lorraine les bans de La Frimbolle, de Domjevin, de Saint-Clément. de Marainviller (201) et d'Azerailles, le château et la ville de Magnières, la ville de Mazelure et la vigne d'Amance, et promit de lui venir en aide dans sa guerre contre la cité de Metz, se réservant de borner son secours à vingt hommes d'armes (202) seulement, si l'évêque se joignait aux bourgeois. Le duc cependant n'obtint cette satisfaction qu'au prix de grands sacrifices et en donnant au seigneur de Blâmont 3000 l. tournois, en paiement desquelles il lui engagea d'abord pour 1000 l. ce qu'il possédait encore au ban d'Azerailles, à Flin, Gélacourt, Glonville et Badménil (203), lui assigna 100 l. de rente sur les salines de Rosières et donna les 1000 l. restant à Eyme de Blâmont du consentement de son père qui lui commanda de faire ses devoirs envers le duc chaque fois qu'il en serait requis (204).
La puissance d'Henry Ier était alors à son apogée. On voit, en 1326, la communauté de Vic lui demander son appui contre les bourgeois de la même ville, avec lesquels elle était en procès (205) ; l'année suivante, ce sont les sujets de l'évêché de Metz demeurant à Vacqueville, Montois (206), Veney, Brouville, Brouvillette, Reherrey, Hadomey, Hablainville et Azerailles, qui reconnaissent s'être mis « en la salve garde, protection et deffense de noble home et saige, Hanri, signour de Blanmont, toute sa vie durant », sous condition de lui payer deux sols tournois par feu chaque année, moyennant quoi il « les doit aidier, consillier et deffendre en bone foy com ses homes, centre totes gens, fors que contre l'evesque de Mes (207) ». En 1329 aussi, les habitants de Neuviller, Bréménil, Angomont et Allencombe, sujets de l'abbaye de Saint-Symphorien de Metz, se mirent sous la protection de « monsignour de Blanmont et Henri lou josne son fil » (208), pour la sûreté de leurs personnes et de leurs biens, sous l'offre de payer en une fois 100 l. tournois et 40 quartes d'avoine, plus une rente de douze messins par feu, promettant de ne commettre aucun. délit sur les terres du dit seigneur (209).
La guerre venait d'éclater entre le nouvel évêque de Metz, Adémare de Montil, et le sire de Blâmont à cause du refus par celui-ci de faire hommage au prélat pour les fiefs qui relevaient de lui. Les belligérants s'engagèrent, à cette occasion, à respecter réciproquement les villages d'Amenoncourt et d'Igney, dépendant de Blâmont, et ceux de Languenberg et d'Allemanges (210), appartenant à l'évêché (211).
Henry ne vit pas finir cette guerre, car il était déjà mort lorsque la paix fut conclue avec Adémare par Henry III, son petit-fils et successeur, en janvier 1332 (n. st.) ; le dernier acte que nous ayons de lui est daté de la veille de la saint Martin, c'est-à-dire du 10 novembre 1331 ; il y reconnut devoir à Henry d'Herbéviller 100 livres pour un cheval que celui-ci avait perdu à son service (212).
Il fut sans doute inhumé dans l'abbaye de Saint-Sauveur où Cunégonde, sa femme, avait choisi sa sépulture, ainsi qu'en le verra par son testament, et il est fort probable que c'est leur tombe qui, après avoir échappé au vandalisme révolutionnaire et être restée à Saint-Sauveur jusqu'en 1854, est venue prendre place au Musée lorrain (213). Ce monument les représente tous deux de grandeur naturelle, couchés fun près de l'autre. Henry est vêtu d'une colle de mailles recouverte d'un haubert sur son écu se voient deux saumons adossés ses pieds reposent sur un lion. Son épouse porte une longue robe et un voile retombant sur les épaules ses pieds sont appuyés sur le chien, emblème de la fidélité (214).
Cunégonde était fille d'Emich ou Eyme, comte de Linange.
Henry Ier l'épousa au plus tard en 1266 car, en janvier de l'année suivante, Emich s'engagea à secourir le duc Ferry contre tous, excepté Henry, sire de Blâmont, son gendre (215).
Elle lui apporta Gogney, une partie de la seigneurie de Morsberg (Marimont) et sans doute aussi Foulcrey, Ibigny et les dimes de Gondrexange, plus les parts que ses enfants possédèrent dans les seigneuries de Sarreguemines, Bidestroff, Hellimer, Rohrbach, Omersheim, Blidestroff, etc. (216). On a vu qu'elle était morte en 1311 ayant fait, au mois de mars -1302, un testament que voici
« Au nom du père et du filz et du Saint Esprit, Amen.
« Je, Connigons, dame de Blanmont establiz en mon bon sen et ma bonne mémoire, fais et ordonne mon Testament, sur dous cens livres de tornois, que mes très chiers sires, messires de Blanmont, mes maris, m'ai permis à donner, por donner et por deviseir, pour Deu et pour l'aime de mi et de lui, là où je vourai, et li pri mon très chier seignour, que por Deu espécialment et por l'amour qu'il ouct onclues à moi, qu'il veulle cest argent dessus dit délivrer et fairec délivrer à à tous cealz où celz miens testament lou divisent.
« Premièrement, je vueil et octroi que, se je avoie faittes nulles devises devant cest mien testament, où que ce fust, soit saielé ou désaielé, qu'elle soient de nulle valour devant cestuy testament.
« Après, je eslis ma sépulture à Sainct-Sauvor con dist eu Voig, se mes tres chiers sires, messires de Blanmout s'y accorde, et se doigne mon lict appara, c'est assçavoir un cousin, un chesnesuel, deus dras et lou millor coutor que je ai, ma milor cot.re et une sarge et mon millor cher et mes chevaulx de mon cher, se je en avoie nul au joui- de mon obit ; et vuel que tot ce que je ai devisei qu'il le vantent et qu'il mettent l'argent en aquast por faire pitance por Deu et pour le salut de mon aime et de l'aime mon signor et por faire chasnun an à tosjormais mon anniversaire ; et vuel que le jor con i ferat mon anniversaire que tuit li signor de ceans i soient et que chascun i chante por le salut de mon aime et pri aus signor de laiens por Deu qu'il voullent prier por mi.
« Après, je doigne aus signor de Haulte Selve quaitres livres rie torrois por pitance, por le salut de mon aime et de mou signor et lor pri pour Deu qu'il veullent prier por mi.
« Après, je doigne à Mahaut cinquante livres de tornois por li marier, c'elle ne l'est davant mon decept, et c'elle ne se vueilt marier, si vuent-je con li doigne por li aidier.
« Ancores, je doigne a Agnelz quarente livres, et vuel que ces quarente livres soient mises en la main dame Gertru, sa tante, pour ly donneir à son mariage ; et li doigne encores pour li aidier, vint livres de tournois, por contor et pour large et deus vaiches des millors que je ay.
« Et doigne à frère Hue de Bainville sexante solz de tornois, mon coufessor, et c'il défault de lui, je vueil con les doigne à celluy que serai mes confesseurs à jor que Dex ferat sou commandement de moy.
« Et doigne à l'église de Deuouvre quarente solz de tournois et aux prebtres vint solz ; à l'église de Blanmon, quarente solz et aux prebtres, quarente solz ; aux preschors de Tol, qnarente solz et aux cordelliers, quarente solz ; aux preschors de Mes-, quarente solz et aux cordelliers, quarente solz ; aux cordelliers de Salleborch, quarente solz ; aux dames de Viviers quarente solz ; aux cordelliers dou Nuefchastel, quarente solz ; à Moienmoustier, quarente solz ; au luminaire de Marainviller, vingt solz ; au luminaire de Linizei, dix solz ; à la pitance de Senonne, quarente solz ; à la pilance de Destivai, quarente solz ; aux dames de Vy, quarente solz ; aux mesiaux de Lynesei, quarente solz et une vaiche ; aux mesiaus de Blanmont, quarante sols et une vaiche ; au signor Marsille, cent solz et deus vaiches ; aux dames de Nancey, quarente solz ; aux siguors de Belprey, quarente solz ; à l'hospital de Remerimont, quarenlte solz ; à l'hospital de Salleborch, qnarente solz ; aux dames de la Belleestanche davant Mes, quarente solz por- faire mon service et por Deu qu'elles prient por moy ; aux pauvres de l'hospital de Marsau, quarente solz ; à Guyot, mon valet, cent solz et une vaiche ; à Connigate, cent solz et une vaiche ; à Connigate de Bagnerrot, sexante solz et une vaiche.
« Je doigne à Fedri, mon nepveu, ma couppe que li comtesse de Bair me donnat et le lais en la warde de mon signor et pri por Deu à mon qu'il le facet alleir aux escoilles et le vueille asseuer aux chainoinnes de Deneuvre ou aillors.
« Doigne à Ferry, mon clerc, une cope que bieu valoit douze livres, si pri à mon signor qu'il ly vueille payer, car messires l'ot et lai donnat à un chevallier ; et li daigne ma chappe de pers forée de condel.
« Et doigne à Elmeline, la damoiselle, ma fille de Borgoigne, vingt livres tornois pour son service qu'elle m'ait maintes fois faict.
« Et veul et octroi que Gertru ait ma robe blanche, c'est assçavoir cotte, corset, chappe et mantel; et veul que Mahaus ait ma robe de marbre (217) celi que je porte maintenant, c'est assçavoir cotte, lorquot et mantel.
« Et. doigne aux chanones de Deneuvre ma robe de vère, cote, lorquot, mantel et chappe, que je veul qu'il la vantent et mettent en acquast por faire mon anniversaire chascun an à tousjoursmaix et doigne aux rancluses de Hattigny mon mantel de gris cler et une vaiche.
« Et pri encor et requier à mon très chier signor, qu'il vuelle donner et asseurer a dame Gertru, ma damoiselle, à sa vie, seiz quartes de froment et seiz de soile, chascun an, la où il vorrat, en nostre terre.
« Et fais mes exécutors de cest testament et lor prie qu'il le soient et qu'il s'en vuellent travaillier et por Deu le facent et facent faire et accomplir totes ces choses dessus devisées. mon très chier signor et mary, Hanry, signor de Blanmont, portant que plus me fie en lui que homme dou monde et ma très chière fille, Marguerite, dame de Montagu, et panront consoil à dame Gertru de Provenchières et à signor Garsille, mon chappellain et vueil qu'il doiennent et deppartent mes robes de cendel et autres menues choses qui ne sont mies devisées en cest testament, à églises, à prestres, à pauvres gens
« Encores doignes avec tot dessus dit, aux filles monsignor Jacque de Herbéviller, que fut, ma robe de corde, cote, lorquot et corset ; et doigne encores à Agneil ma
l'obe de porpre, cote, lorguot, corset et mantel ; et doigne à dame Gertru trois vaiches et à Mahaut deus ; et totes mes autres bestes, vaiches, brebis et veilz, départiront mi exécutor, qui ne sunt mies devisées en cest testament, à esglises, à prestres et à pauvres gens et aillors, là où il lor semblerait que mieult soit empliés ; saulf que je vuel encores que li coupe que Madame de Flandres me donnat, qu'elle soit vendue et que on facet faire deux calices, s'en soit li uns aux chanoines de Deneuvre et li autre là où il semblerait mes exécutors qu'il soit mieux emploié.
« Et est encore assçavoir que si ma fille Marguerite ne pooit estre ne entendre en cest testament que oultre, monsignor et li y poroient mettre et apeller ma fille de Grancé ou aultre tel ou lour plairoit.
« Et portant que tot ce dessus devisei et escript soit ferme et estable, ai je saelé cest present testament de mon saiel et des saielz aux dessus dis exécutors mon très chier signor dessus nommé et Marguerite, ma fille ; que fut fais et escris l'an de grace mil trois cens et deux ans, on mois de may, le di mange après la feste sainct Urbain. »
« Scellées de trois seaux cire verte sur doubles queues de parchemin. » (218)
Cunégonde avait donné à son mari plusieurs enfants : deux fils, Henry· II et Eyme Ier, dont nous parlerons après leurs soeurs, et six filles Adélaïde, Clémence, Isabelle, Jeanne et deux autres nommées pareillement
Marguerite (219).
ADELAIDE DE BLAMONT épousa le comte Simon, dit le jeune, seigneur d'Erstein, fils de Jean Ier landgrave d'Alsace et au sujet duquel Schoepflin écrit « Ad d. VI id. maii an. MCCCVIII, Symundus comes, dictus jungherr (domicellus), ecclesiae S. Arbogasti decimas in Castineto contulit. Symundus in niatrimonio habuit Adelheidem de Blanckenberg, quae filiam marilo dedit Aguetem, Johanni comiti Habsburgo-Laufenburgensi nuptam, et apud Clarissas Argentiuenses dein vidua vixit monialis. Agnes usque ad an. MCCCXLVII in chartis occurrit (220). » Ce qui veut dire : Le 6 des ides de mai 1308, le comte Simon, dit le damoiseau, donna les dîmes de Châtenois à l'église de Saint-Arbogast. Il fut conjoint à Adélaïde de Blâmont qui lui donna une fille, Agnès, mariée à Jean, comte de Habsbourg-Laufenbourg, et, devenue veuve, se fit religieuse au monastère des Clarisses de Strasbourg. Quant à Agnès, elle paraît dans les archives jusqu'en 1347.
La preuve de ce qu'avance cet auteur se trouve : d'abord dans le partage de 1311, où Adélaïde figure sous le nom d' « Aleis d'Assois » (221) Henry, son père, y rappelle qu'il lui a assigné, pour son mariage, sur la seigneurie de Blâmont, des biens valant 1400 livres puis dans une transaction de l'an 1332, où il est dit que Henry sire de Blâmont, devait avoir entre autres choses Fremonville et son moulin « sens la part le conte de Hassebourch », et plus loin qu'il jouirait du ban et de la juridiction de Fremonville, Halloville, l'étang de Vilvaucourt, etc., « fuers la partie de la justice qui appartient à conte de Hassemborch ès villes dessus nommées (222). » D'autre part, on v oit dans la généalogie de la Maison de Habsbourg que Jean Ier, comte de Habsbourg et landgrave de Cleggovie, épousa Agnès, fille de Simon, landgrave d'Alsace, de laquelle il eut Godefroy, Rodolphe, Jean II et Agnès ; or, par acte du vendredi après la saint Pierre et saint Paul 1363, Rodolphe, comte de Habsbourg, tant en son nom qu'en ceux de Jean et de Godefroy ses frères, vendit à Jean, comte de Salm, et à Marguerite de Blanckenberg (Blâmont), sa femme, la moitié -des villages ci-après, situés dans la seigneurie de Blâmont, qui leur provenait de leur mère Agnès de Blâmont (223), savoir Imelingen (lmling), Utingen (Hattigny), Fremetingen (Fremonville), Herboytingen (Harboué), Syretingen (Cirey), Gutmunster (Bon-Moâtier), Laffreborne (La Frimbolle), Bartrenborsch (Bertrambois), Badesemont, Halewiler (Halloville), la moitié des moulins de Fremetingen et de Villevacourt, etc., et huit livres de rente sur le péage de Blâmont, le tout pour la somme de 1500 florins d'or de Florence. Le consentement des frères de Rodolphe est annexé à l'acte (224).
CLÉMENCE DE BLAMONT figure au partage de 1311 où se trouve rappelée l'assignation que son père lui avait faite d'héritages situés à Montigny et ailleurs. Elle devint, peu après, l'épouse de François d'Herbéviller, seigneur d'Herbéviller-Lanoy depuis la mort de son père et possesseur du château de Lanoy ; c'est ce qui résulte d'un titre daté du jeudi après la Nativité N. S. (Noël) 1316, dans lequel « Henri, sire de Blâmont, déclare qu'il y a eu mariage entre Clémence, sa fille, et François, écuyer, fils du seigneur Henri de Sancy, chevalier, son bailly ; du gré de ses enfants, il donne, en dot, à sa dite fille, la moitié du moulin de Fliens (Flin), etc. (225) ».. Les deux époux vivaient encore ensemble en 1345 où ils fondèrent, à l'honneur de la Vierge, une chapelle dans l'église d'Herbéviller. s'en réservant le droit de patronage et la présentation du chapelain (226).
ISABELLE DE BLAMONT fut mariée, en mai 1296, à Eudes de Grancey, damoiseau, fils aîné de Guillaume, sire de Grancey, d'une des premières maisons de la Bourgogne (227). Aussitôt après, Pierre, sire de Bourlémont, Eyme, sire de Faucogney, Etienne d'Oiselet, sire de La Villeneuve, Jean, sire de La Fauche, Jean de Bourgogne, Renier de Choiseul, Charles, sire de Juvigny et Jean, dit le Vaillant, de Chenoncourt, déclarèrent que le sire de Blâmont ayant promis de donner à sa fille, tant pour sa dot que pour son douaire, 6000 livres de petits tournois, ainsi qu'il était spécifié au contrat, cette somme se devait payer, du consentement des époux, entre les mains de Guillaume, sire de Grancey, qui s'était engagé à la restituer, dans le cas où son fils mourrait sans enfants ; c'est ce dont ils se portèrent garants, promettant, si Guillaume n'en faisait la restitution, de se rendre à Neufchâteau, trois semaines après que le sire de Blâmont les en aurait requis, pour y demeurer en otage jusqu'à l'entier remboursement des 6000 livres (228).
Isabelle est mentionnée, en 1302, dans le testament de sa mère, qui la nomme « ma fille de Grancé » (229) ; elle vivait encore en 1329, car on trouve, à cette date, une « Obligation de dame Isabelle de Blammont (de Albomonte), dame de Grancey, et d'Eudes, son fils, damoiseau, seigneur de Grancey, par laquelle ils hypothèquent leur seigneurie de Selongey pour une somme de 687 florins d'or qu'ils ont empruntée de deux marchands lombards demeurant à Pontailler (230). »
JEANNE DE BLAMONT était encore fille en 1311 et l'on voit, par le partage de cette année, ce qui lui avait été attribué en dot afin de faciliter son mariage, notamment le château-fort et le bourg de Magnières avec leurs dépendances. Burnique, sire de Ristes, chevalier, auquel appartenaient en partie Lunéville et les villages environnants, obtint sa main en 1322 ; les nouveaux époux promirent aussitôt au seigneur de Blâmont, en présence de Jean et d'Henry, sires de Bayon, d'Henry et de François d'Herbéviller, chevaliers, et de Thierry, curé de Repaix, de le recevoir dans le château de Magnières: lui et ses gens, toutes les fois qu'il le jugerait utile et de lui rendre la forteresse s'ils ne voulaient exécuter cette condition (231). Ils s'obligèrent l'année suivante, dans le cas où ils la lui rendraient, à restituer aussi les meubles qu'il y avait laissés et dans le curieux inventaire desquels on remarque seize arbalètes à deux pieds, une arbalète à tour, deux autres arbalètes, trente espingoles, une douzaine de dards, 6000 carrelets pour arbalètes à deux pieds, 200 pour arbalètes à tour, 300 pour espingoles, trois fers de prison, soixante-trois écuelles d'étain, deux plats à barbe, dix tapis de poils de chien, etc. (232).
Burnique de Ristes, qui descendait des anciens comtes de Lunéville, était un guerrier renommé ; il mourut sans enfants en 1343 et fut inhumé dans l'église du monastère de Beaupré fondé par ses ancêtres, où se voyait autrefois son mausolée. Son épouse fut sans doute ensevelie auprès de lui, suivant l'obituaire de cette abbaye, qui mentionne, au mois de juillet, l'anniversaire de « Mesire Burnique, sgr de Riste, chevalier, et Jeanne de Blâmont, sa femme (233).»
Au mois de décembre 1343, Jeanne, étant veuve, admodia à Raoul, duc de Lorraine, pour une rente viagère de 500 livres de tournois, tout ce dont elle jouissait, titre de douaire constitué par son mari, aux lieux de Lunéville, Viller, Ménil, Moncel, Mont, Mortagne, Xermaménil, La Math, Bois de Mondon, Florémont, Bussang, Le Thillot, le Pertuy d'Essaye, Saint-Maurice, Saulxures,La Bresse, La Feigne, Bellefontaine, Longchamp, etc. (234), et aux bois de Mondon et de la Moncelle (235).
Elle mourut au plus tard en 1351, ayant fondé, dans l'église de Mont, une chapelle au sujet de laquelle on lit dans l'Etat du temporel des paroisses « Il y a, dans l'église, la chapelle de Saint-Césaire, fondée en 1347. »
MARGUERITE DE BLAMONT, celle qui semble l'aînée des deux soeurs du même nom, fut unie, avant l'an 1300 (236), à Ferry de Lorraine, sire de Brémoncourt et de Plombières, fils du duc Ferry III (237). Un ne sait rien de sa vie ; le P. B. Picart place sa mort au 4 juin 1310 et l'Obituaire de l'abbaye de Beaupré au 3 septembre, sans indication d'année « Obiit dame Marguerite. femme messire Fridric de Brémoncourt, chevalier. » Celui-ci la suivit bientôt dans la tombe, d'après le Nécrologe de la même abbaye. lequel, dit le P. Picart, contient ce qui suit « Illustre prince Ferri, sgr de Brémoncourt et de Plombières, mourut le 8 octobre 1312 et fut inhumé au cloître avec sa femme Marguerite, fille de Henri, comte de Blâmont, laquelle mourut le 4 juin 1310 (238). »
MARGUERITE DE BLAMONT, que l'on peut confondre avec la précédente, devint la femme de- Jean de Bourgogne, sire de Montaigu, fils de Hugues, comte de Bourgogne. En 1296, Henry, sire de Blâmont, et Cunégonde, son épouse, permirent à Jean de Bourgogne de reprendre du duc de Lorraine ce qu'il avait acquis à Fontenoy-le-Chàteau et au ban de Châtenois, qu'il tenait auparavant d'eux en fief, stipulant que, si leur fille Marguerite, femme du dit Jean, mourait sans enfants, celui-ci devrait reprendre d'eux aussitôt les fiefs en question (239).
Marguerite est rappelée dans le testament de sa mère qui la nomme « ma fille de Borgoigne » et la charge de faire exécuter ses dernières volontés. Elle était veuve alors et s'intitulait comtesse de Ferrette et dame de Montaigu (240).
Henry de Bourgogne, ayant emprunté à Henry, sire de Blâmont, 400 livres, lui donna comme caution du remboursement sa mère, Marguerite, dame de Montaigu, fille du dit seigneur de Blâmont (1314.) (241). Elle vivait encore en 1335, suivant le traité fait entre Edouard, comte de Bar, et sa cousine « Madame Marguerite de Blancmont, dame de Montaiguy», au sujet de la terre de « Frasnes » (242)
Son fils Henry fit: dit-on, son testament en 1340 et il est évident qu'il mourut avant elle, car le Nécrologe de l'abbaye de Faverney contient cette mention « Obiit domina Margarita de Albomonte, comitissa de Ferrette et domina de Montaigu, que dedit nobis, pro se et pro domino Henrico de Burgundia, filio suo, lertialn partem de cubario Balain (243). »
HENRY Il DE BLAMONT, dit le jeune, est mentionné dans la charte de fondation de la collégiale de Deneuvre en 1301.
Après avoir contribué à la victoire que le duc Ferry remporta sur le comte de Bar, il fut fait chevalier vers le milieu de l'année 1313, n'ayant jusqu'alors porté que le titre de damoiseau ; cependant il était déjà marié deux ans auparavant, lors du partage fait par son père entre lui et Eyme, son frère, et nous avons vu de quoi se composait le lot qui lui fut attribué. Ce partage ne les ayant pas satisfaits, il y eut, en mai 1318, une transaction par laquelle ils convinrent qu'en raison de la donation à lui faite par son père et consentie par son frère, pour son droit d'aînesse, Henry prélèverait, par préciput, ;500 livres tournois de rente sur les revenus de la « pleinne terre de Blâmont », qui devait rester commune entre eux, plus le château de Blâmont et même, s'il était porté sur la lettre de donation, celui de Deneuvre ; dans le cas contraire, ils auraient chacun la moitié de ce château comme des villes de Deneuvre et de Blâmont.
Ce qui fut agréé par leur père et scellé par eux, en présence de Burnique, sire de Ristes, de Simon, sire de Parroy, d'André ne Parroy et de Geoffroy de Dombrot, chevaliers (244).
Henry II mourut peu de temps après et il est certain que ce fut avant l'année 1322 (245)- Il avait épousé Marguerite de Montfaucon, soeur de Jean de Montbéliard, sire de Montfaucon au comté de Bourgogne, à laquelle son beau-père céda pour son douaire, en décembre 1311, la maison de Bouligny avec 500 livres de tournois dont il chargea Geoffroy de Dombrot de faire l'assiette, priant le comte de Bar, de qui relevait ce fief, d'y donner son consentement (246). Deux ans plus
tard, eut lieu, entre Jean de Montbéliard et Henry de Blâmont, damoiseau, un arrangement où l'on voit que la dot de Marguerite, soeur de Jean, fut de 3000 livres, sur lesquelles 1500 furent versées comptant (247), et que Renart de Bourgogne, comte de Montbéliard, et Henry de Bourgogne se rendirent caution du reste, pour lequel Jean de Montbéliard assigna à son beau-frère une rente de 150 livres sur les villages d'Avouldrey et de Flangebauche (248), à condition de lui en faire hommage (249). Le sire de Blâmont dut aussi, selon la coutume, assigner à sa bru 150 livres de rente en garantie des 1500 que son fils avait reçues comptant et en chargea de nouveau Geoffroy de Dombrot qui lui attribua les revenus d'Herbéviller, Blémerey, Autrepierre, Barbezieux et Verdenal, excepté l'étang et le moulin de Blémerey (250).
Marguerite de Montfaucon eut, à la mort de son époux, la mainbournie de ses enfants ; c'est en cette qualité qu'elle donna à Pélerin de Bourdonnay, son écuyer, cent livres à prendre sur les terres de Marimont et de Sarreguemines et leurs dépendances, Budestorff (Bédestroff), Haillimer (Hellimer), Rorebach (Rohrbach), Owrexemach, Blibestorlf, Onmrexam, Wrexehawe, sur la vente de Sarreguemines et sur Mengues (Mégange) Grunich (Grening) et Grulanges (Guirlange) (1327) (251). On lit dans Moréri (252) que Marguerite de Montfaucon, dame de Blâmont fut mariée au marquis de Bade il est possible qu'elle ait pris une seconde alliance mais, si ce fait est exact, il n'a dû avoir lieu que postérieurement à l'an 1336 où nous la verrons fonder, avec Henry III, son fils, une nouvelle prébende an chapitre de Deneuvre.
Henry II en avait eu deux fils Henry III et Thiébault Ier, qui furent successivement seigneurs de Blâmont et dont nous parlerons après avoir épuisé ce que nous savons d'Eyme Ier et de sa descendance, et sans doute une fille, Cunégonde de Blâmont, laquelle épousa, dit Moréri, Gauthier, sire de Ray, qui vivait en 1341 et fut père de Jean II, sire de Ray (253).
EYME DE BLAMONT (254), second fils d'Henry Ier, fut appelé Eymequin tant qu'il n'eut pas reçu l'ordre de chevalerie c'est sous ce nom qu'il est désigné dans l'acte de fondation de la collégiale de Deneuvre et dans le partage de 1311, qui l'enferme l'énumération des terres qui devaient composer son lot (255).
Nous avons vu son père le désigner, l'année suivante, pour tenir du duc de Lorraine ceux de ses fiefs qui mouvaient du duché, principalement le château de Magnières, promettant qu'Eyme, alors absent, en ferait ses reprises dès qu'il serait de retour mais celui-ci, malgré les prières et les menaces de son père, se refusa à faire ce qu'on attendait de lui. Un conflit allait éclater entre le sire de Blâmont et Ferry IV, quand ils résolurent de s'en remettre au jugement de Jean, sire de Bayon, et de Liébaut de Rosières, sire de Ligniville, qui décidèrent qu'Henry devait obliger son fils à reprendre du duc la forteresse de Magnières selon l'engagement qu'il en avait pris, sinon Eyme pourrait y être contraint par la saisie de ses biens. Poussé par son fils, le seigneur de Blâmont refusa de se soumettre à cette sentence ; il eut, pour ce motif, une guerre qui ne se termina qu'en 1324, où il reconnut tenir le château de Magnières du duc. Eyme reçut de ce prince, à cette occasion, un don de mille livres et promit de remplir désormais ses devoirs féodaux (256).
Sa mort eut lieu vers cette époque, car depuis il n'est plus fait mention de lui (257). Il s'était marié à Isabelle de Saint-Dizier sur laquelle A. du Chesne donne les détails suivants « Ysabeau de St Dizier, fille de Guillaume, seigneur de St Dizier et de Ieanne de Chalon, dame de Vignory, eut de la succession de son père les terres d'Orville et Humbescourt (258), sises en Champagne; et du côté de sa mère celles de Rouvre (259) et de Montenot-sur-Salins, auec le tiers de la Saulnerie [de Salins] (260) et fut mariée à Aimé de Blammont, chevalier, seigneur de Vlingnières, Aduoué de Vic, qui laissa d'elle deux filles seulement...., sauoir Marguerite... et Ieanne... (261) ».
Au nom de ses enfants, cette dame fit, en 1332, avec Henry III, sire de Blâmont. son neveu, deux transactions ; dans la première, qui était relative aux meubles des châteaux de Blâmont, Deneuvre et Châtillon, elle est dite femme de « monsignor Eyme de Blanmont qui fut » (262) ; la seconde nous la montre agissant en qualité de dame de Blâmont « tant cum en la moitié de la ville de Blanmont, pour la raison de la mainburnie de mes enfans Emekin, Jehanne et Marguerite», au sujet des 500 livres de rente qu'Henry réclamait avant partage (263). On la rencontre encore dans des titres de 1339, où elle donna quittance de 20 livres à compte sur une plus grande somme que Raoul, duc de Lorraine, son cousin, lui devait sur la saline de Rosières, et permit de faire couper, en ses bois de Saint-Clément, la quantité nécessaire à une poêle à faire le sel (264) ; de 1346, à côté d'Eymequin, son fils, et de 1351 où elle est qualifiée, ainsi que dans le précédent, de dame de Montenot ; on y voit que son douaire comprenait une partie de la seigneurie de Domptail (265).
Elle avait donné à son mari trois enfants Eymequin, Jeanne et Marguerite.
EYMEQUIN (266), SIRE DE BLAMONT en partie, était encore sous la tutelle de Nicolas de Salm, lorsqu'il fit, en 1342, avec Henry III, son cousin germain, le partage des villes et seigneuries de Blâmont et de Deneuvre (267).
Le peu qu'on sait du reste de sa courte vie n'offre guère d'intérêt (268) jusqu'au 5 avril 1346, où Isabelle de Saint-Dizier et Eymequin, sire de Blâmont, écuyer, son fils, reconnurent avoir reçu du duc Raoul 500 livres de tournois pour le rachat de leur part dans la gagère du ban d'Azerailles, réservant les cent livres qu'ils touchaient annuellement sur la saline de Rosières (269).
Il n'est plus fait postérieurement mention d'Eymequin, qui était pourtant fort jeune, n'ayant pas encore été créé chevalier. Tout porte à croire qu'il fut tué à la bataille de Crécy, le 26 août 1346, aux côtés de son suzerain, le duc Raoul, qui y périt, comme l'on sait, à la tête des troupes qu'il avait amenées au roi de France (270). Précédemment, il avait fait ses reprises pour les fiefs qu'il tenait de ce prince, l'acte, qui ne porte point de date, est ainsi conçu « C'est ceu que je Emequins, sires de Blanmont, tien de monsignour le duc : mai partie dou ban de Laffrembonne, c'est asavoir à Batrenboix, à La Forest et en la ville de Laffrenbonne ; item, ma partie de Dongevin ; item, ma partie dou ban d'Ezerauble (271), c'est assavoir de la ville d'Ezerauble, dou molin et de la ville de Fluns (272). Et toutes ces choses tien je ligement de monsignour le duc en après l'évesquede Més ; et se je Emequins, en poie plux trouer en bonne foy, ou li cas si assieret qui m'en enchoiet plus, ou mes sires li dus m'en ensougnet plus, avant bonnement aides en wel je faire devoir tant avant que on ne trowerait point de deffaut en moi. En signe de véritei, ai je mis mon saiel à plain en cest présent escript (273). »
JEANNE DE BLAMONT,
dame d'Eurville, Humbécourt, Montenot et du tiers de la saunerie de Salins, épousa, en premières noces, Henry de Faucogney, vicomte de Vesoul, d'une illustre maison de Bourgonne (274), au plus tard en 1348 on en trouve la preuve dans un titre du 2 octobre de cette année, par lequel ils promirent d'indemniser Thiébaut, sire de Blâmont, leur cousin, d'un cautionnement de 200 livres qu'il avait fait pour eux envers Burcard de Fénétrange et, en garantie, lui engagèrent les biens échus à Jeanne « après leu decept de nostre chier frère, monseignour Eyme de Blanmont, qui fuit, dont Deus ait l'ame (275). » Ils firent, le 9 février 1352, avec le même Thiébaut, un partage en vertu duquel Henry céda à son cousin ce qu'il tenait, du chef de sa femme, à Deneuvre et au faubourg de Laitre et reçut en échange ce que le seigneur de Blâmont possédait au chàteau et en la ville de Magnières et dans les lieux de Mazelure, Jolivet, Chanteheux, Maixe et Mortagne ; il conserva en outre Domptail, Buriville et Reclonville (276).
Jeanne était remariée à Brun ou Brunon de Ribaupierre ou de la Haute-Ribaupierre (277) dès l'an 1362, où le duc de Lorraine, ayant retiré des mains des héritiers de Conrad de Fribourg les fiefs que ce seigneur tenait de lui (278), en disposa en faveur de Brunon de Ribaupierre et de Jeanne de Blâmont, sa femme (279). Celle-ci ne vivait sans doute plus au mois de juillet 1372 puisque son mari, qualifié de seigneur de Magnières et de Romont, fit alors hommage au roi de France pour « Humbescourt, prévosté de Vassy, Rouvre, prévosté de Bar-sur-Aube, et la moitié d'Urville, partable avec Marguerite de Blâmont la jeune de Salm, sa soeur (280). »
Trois filles étaient nées de cette union : Alixend, mariée à Burcard de Fénétrange Jeanne, dame de Magnières, épouse de Folmar de Géroldseck puis d'Egon, comte de Kirbourg, lequel fit, en 1407, ses reprises du duc de Lorraine pour ce que sa femme possédait à Magnières (281) enfin Isabeau, dame de Montenot, d'Arc (282) et du tiers de la saunerie de Salins, conjointe à Guillaume de Vergy, seigneur de Port-sur-Saône (283).
MARGUERITE DE BLAMONT était, au commencement de 1347, l'épouse de Jean, dit le jeune, comte de Salm, seigneur de Viviers et de Puttelange. En cette année, « Adelette de Lichtenberg, dame de Salm, au nom de Jean de Salm, son fils, et de Marguerite de Blâmont., sa femme, comme mainbournesse de ses dits enfants et pour la rémission de ses péchés, quitte aux hommes et femmes de la ville de Blâmont et du Vieil Marché la mortemain: c'est à dire ce qu'on avoit coutume de prendre sur eux pour cause de morte main. Le jour de saint Gengoult en mai (284). »
Ayant fait, deux ans après, avec Thiébaut, sire de Blâmont, le partage des biens qu'ils possédaient en commun, Jean de Salm et sa femme en envoyèrent l'original à l'évêque de Metz en le priant de l'agréer et d'y mettre son sceau (285)- Ce traité, qui n'est point parvenu jusqu'à nous, fut suivi, en 1352, d'un échange par lequel Thiébaut abandonna ce qu'il possédait à Châtillon ainsi que les bois en dépendant à ses cousins, qui lui cédèrent en retour ce qu'ils avaient aux château, ville, ban et finage de Magnières, en hommes, femmes, maisons, rentes, justice, etc. (286). Nous avons vu Rodolphe, comte de Habsbourg, leur vendre, dans la suite, sa part de la seigneurie de Blâmont (287).
Après la mort de son époux, tué en 1368 au combat de Ligny, Marguerite se qualifia, comme douairière, de dame de Puttelange. La même année, elle partagea avec Jeanne, sa soeur, la succession d'Isabelle de Saint-Dizier, leur mère ; la seigneurie de Montenot et des rentes de Salins furent attribuées à Jeanne ; Marguerite reçut les terres « d'Orville et de Rouvres-devant-Bar (288). » Elle fit, en conséquence, ses reprises du roi de France pour « la moitié d'Urville-sur-Marne, partable avec Brun, sr de Ribaupierre, son frère, Humbescourt, Rouvre, Morancourt (289), Mathons (290), Messey (291), La Neufville » (292), qui lui provenaient de l'héritage d'Isabelle de Saint-Dizier (13 août 1372) (293).
Elle eut, quatre ans plus tard, une guerre avec les fils de Thiébaut, sire de Blâmont, qui l'accusaient, à bon droit parait-il, d'avoir, par ses intrigues, causé la mort de leur père, on ignore dans quelles circonstances ; le motif en aurait été l'état d'indivision dans lequel se trouvait alors la seigneurie de Blâmont. Les troupes qu'elle avait réunies furent complètement battues, et elle dut se soumettre par différents traités aux plus dures conditions, céder tout ce qu'elle possédait dans la ville et la seigneurie de. Blâmont et payer 8000 florins d'or pour la rançon des gentilshommes qui avaient été faits prisonniers en défendant sa cause (294).
Elle conserva toutefois Chàtillon, si l'on doit en croire :Meerisse (295), qui mentionne au nombre des titres de la chancellerie de Vic une reprise faite pour cette seigneurie à l'évêque de Metz par Marguerite de Blâmont, le dimanche avant la Saint Michel 1377.
HENRY III, SIRE DE BLAMONT.
Encore mineur en 1327 (296), Henry III ne portait que le titre d'écuyer et devait être fort jeune lorsque la mort de son aïeul le fit seigneur de Blâmont, sur la fin de 1331 (297). Son premier soie fut « par consoil de nous communs amis, de plusours nobles et saiges homes », de terminer la guerre que, depuis longtemps, Henry Ier soutenait contre Adémare, évêque de Metz. A cet effet, il fit avec le prélat un traité de paix (298), par lequel il consentit à lui faire les reprises qu'il réclamait, savoir pour le château et le bourg de Blâmont et leurs dépendances, tels qu'Henry, son aïeul et Ferry, son bisaïeul, les avaient repris autrefois, le château et le bourg de Deneuvre et toute la châtellenie, dont la partie située entre la Meurthe et la Vezouse était un ancien fief de l'évêché, tandis que l'autre partie, comprise entre la Meurthe et la Mortagne, était un nouveau fief reconnu par son aïeul à l'évêque Bouchard, plus le château de Châtillon et la vouerie de Vic. Adémare, de son côté, ratifia tous les traités faits entre ses prédécesseurs
Bouchard et Renaud et le seigneur de Blâmont, et déclara avoir cédé à Henry, pour une certaine somme, la suzeraineté du château de François, sire d'Herbéviller, chevalier, laquelle était une des causes de la guerre, réservant que celui-ci ne pourrait, en cas de guerre entre l'évêché et le sire de Blâmont, y recevoir l'un ou l'autre des belligérants pendant toute la durée des hostilités. Les parties se quittèrent enfin tous les dommages qu'elles et leurs alliés s'étaient causés (299) et prièrent Simon, comte de Salm, et Gaucher de Montil, frère de l'évêque, de mettre leurs sceaux au traité (janvier 1332, n. st.) (300). Quelques jours après, Adémare prit en admodiation de « noble damoisel » Henry, sire de Blâmont, la moitié de la vouerie de Vic pour le temps de son épiscopat, moyennant la somme annuelle de 100 livres assignée sur les salines de Moyenvic. (301)
Henry put alors s'occuper de certaines affaires au sujet desquelles il était en désaccord avec Isabelle de Saint-Dizier, sa tante, agissant au nom de ses enfants mineurs ; elles furent terminées dès la même année. Par une transaction du mois d'août, Isabelle reconnut le droit qu'avait Henry, comme représentant l'aîné de la maison, de prélever avant partage une rente de 500 livres tournois sur les revenus de la seigneurie de Blâmont (302).
Quatre commissaires Geoffroy -de Dombrot, François d'Herbéviller, Liétard de Montigny et Herman d'Ogéviller, désignèrent les biens qui devaient être affectés à cette rente : ce furent Fremonville et le moulin, excepté la part du comte de Habsbourg, pour 26 livres de rente, Halloville et Badesemont pour 12, Barbas pour 38, les étangs de Vilvaucourt, d'Halloville et de « Gerneis » (?) les deux bois de Vilvaucourt et la moitié du moulin pour 100, Repaix et Asenzey pour 47, Amenoncourt et Igney pour 30, le bois des Amenienbois pour 30, Leintrey et La Neuveville-aux-Bois pour 14, Reillon, Gondrexon et Chazelles pour 45,
Domèvre sans la garde des hiens de l'abbaye de Saint-Sauveur pour 52, Montigny et le moulin pour 45, sauf la garde des biens de l'abbaye de
Moyenmoutier, Foulcrey, le grand étang, le moulin, le petit moulin et le bois pour 40, enfin le moulin et l'étang de Repaix pour 15. Les termes du partage fait entre Henry II et Eyme devaient continuer à être en vigueur (303).
Ils firent de même, le mercredi après la Toussaint suivante, avec l'aide d'André de Barbas, Henry d'Herbéviller, Liétard de Montigny et Herman d'Ogéviller, un nouvel accord où il fut convenu : que tous les meubles se trouvant dans les
châteaux de Blâmont, Deneuvre, Chàtillon et ailleurs seraient partagés par moitié, notamment « les arbellestres, les quaireis et les baudreis » ; que les clefs de Blâmont et de Deneuvre seraient remises aux mains d'un gouverneur qui leur prêterait serment; qu'ils mettraient ensemble à Châtillon un châtelain, un portier et des gardes; que les forestiers de leurs bois indivis seraient nommés par chacun d'eux, et que les amendes seraient communes (304)
On sait que les seigneurs de Blâmont jouissaient d'une rente de 200 livres dans le duché de Brabant ; les intérêts n'ayant pas été payés depuis longtemps, Henry fit saisir certaines terres appartenant au duc, qui transigea avec lui en lui donnant 100 autres livres de rente à ajouter à celles qu'il avait déjà (mai 1334) (305).
Henry traita aussi avec Edouard, comte de Bar ; par lettres du mois de février suivant, ce prince déclara qu'ayant eu plusieurs guerres avec Henry (Ier) sire de Blâmont, son cousin, « tant pour feux boutés, chasteils prins et levés » il lui avait engagé les terres d'Etain et Saint-Maurice (306), avec leurs dépendances, et qu'il s'était arrangé avec.« Hanri fil dou fil deu davant dit monsignour Hanri » et avec Isabelle de Saint-Dizier et leurs aidants, de telle manière qu'ils demeureraient quittes les uns envers les autres de tout le mal qu'ils s'étaient fait. (307)
Henry et Marguerite de Montfaucon, sa mère, établirent par une charte du 5 mars 1336 (v. st.), une huitième prébende en leur collégiale de Deneuvre et, « considérans que, qui à l'autei sert, de l'autel doit vivre » donnèrent, pour cette fondation, six quartes de froment, six de seigle et autant d'avoine, plus six livres tournois à toucher chaque année sur leurs rentes de Domptail et de Fontenoy, le tout devant être rendu par les soins des « proudomme » de ces lieux en « l'ostel » des chanoines à Deneuvre, de même qu'ils le conduisaient jusqu'alors au château de ce lieu (308).
L'année suivante, éclata entre le duc de Lorraine et Henry, d'une part, et Geoffroy, comte de Linange, d'autre, une guerre dont nous ignorons les motifs. Nous savons seulement que la paix fut faite en septembre et que l'on nomma quatre chevaliers pour examiner les droits de chaque partie et les établir à la Saint-Martin suivante ; Gérard de Nancy, sire de Lenoncourt, et François d'Herbéviller furent désignés par le duc et par Henry ; Jean de Bénestroff et Renaud de Craincourt le furent par le comte ; tous devaient, en cas de contestation, se soumettre au jugement de Simon, comte de Salm. (309) Le seigneur de Blâmont n'eut sans doute pas à se plaindre du résultat des conférences qui suivirent, car il donna, quelques mois après, à son « ameis et fiaubles chevalliers, messires Fransois de Herbéviller», en considération de ses bons services, 10 livres de rente sur les revenus de Deneuvre (310).
Il faillit se brouiller en 1341 avec Adémare de Montil, à cause de ses sujets de Domptail qu'avaient attaqués les habitants de Moyen dépendant de l'évêché ; Jean d'Apremont, sire de Forbach, nommé arbitre, sut arranger cette affaire qui n'eut pas de suites (311).
Dom Calmet a relaté le célèbre jugement que. le sire de Blâmont rendit la même année contre un jeune seigneur de Ribaupierre, lequel était petit-être son beau- frère « Jean, seigneur de Ribeaupierre, dit-il, avoit arrêté Bencelin, abbé de Moyenmoutier et l'avoit fait conduire dans sou château où il l'avoit retenu jusqu'à sa mort. Le père de Jean ayant été demander sa grâce au duc, celui-ci nomma Henry de Blâmont pour terminer cette affaire et le seigneur de Ribeaupierre promit en son nom et en celui de son fils de s'en remettre à son jugement sous peine de 1000 marcs d'amende. Henry de Blâmont condamna le jeune comte de Ribeaupierre : 1° à payer 10 soudées de terres par an à l'abbaye de Moyenmoutier pour l'anniversaire de l'abbé Bencelin ; 2° à prendre la défense de cette abbaye, de ses biens et des personnes qui la composent, envers et contre tous ; 3° à se rendre pour la prochaine fête de Noël auprès du seigneur duc pour assister à une procession, revêtu d'une simple tunique, sans ceinture, tête nue et tenant en ses mains un cierge allumé; 4° à faire le pèlerinage de Saint-Thomas de Cantorbéry en Angleterre, à pied, un bourdon à la main et de n'en revenir qu'à l'ordre du duc Raoul. Ce jugement en date du samedy après la Saint-Nicolas de l'an 1341 (312). »
Dans la première transaction faite en 1332, entre Henry III et Isabelle de Saint-Dizier, on a vu que le partage fait précédemment entre Henry II et Eyme continuerait à être observé; il s'ensuit que les villes de Blâmont et de Deneuvre étaient restées indivises entre les deux branches de la maison de Blâmont, qui se trouvaient représentées, à l'époque où nous sommes arrivés, par Henry III et Eymequin. Une telle situation avait de graves inconvénients et devait donner lieu à de fréquentes difficultés aussi, le roi de Bohème, comte de Luxembourg, l'évêque de Metz, le duc de Lorraine, le comte de Bar et plusieurs de leurs parents et amis s'entremirent-ils pour amener les deux cousins à un partage qui fut conclu au mois d'avril 1342: Henry, en sa qualité d'aîné, conserva le château de Blâmont, mais il n'eut que la moitié de la ville dont l'autre partie devint la propriété d'Eymequin (313). Cet arrangement, aussi défectueux que le premier, fut cause, dans la suite, de bien des malheurs.
Bientôt après, Henry reconnut qu'il était homme-lige de Raoul, duc de Lorraine, avant tout autre, excepté l'évêque de Metz, et promit, en raison des grands honneurs qu'il en avait reçus, de le servir de sa personne, de ses hommes et de ses forteresses, - mais aux frais du duc dès qu'il loi faudrait sortir des murs de Blâmont, - envers et contre tous, sauf l'évêque de Metz, contre lequel on ne pourrait l'obliger à chevaucher ni à prêter ses forteresses (314).
Il se trouva mêlé à la guerre que ce prélat soutenait alors contre le comte de Bar c'est, du moins, ce qui résulte d'une déclaration de Simon, comte de Salm, portant que, « parmi certaines conventions qu'il a faites avec le comte de Bar, il doit commencer, quatre jours avant la Saint-Barthélemy (20 août), guerre ouverte à Henry, sire de Blâmont, et à ses aidants, pour son fait en chef et doit maintenir à la guerre 40 hommes d'armes et plus lorsque le cas le requerra, à ses frais et dépens, sauf que, si on y avoit pris de ses gens d'armes ou de sa maison, le dit comte les lui doit rendre et délivrer avec tous ses chevaux qui seront morts ou perdus, le tout aux us et coutumes du pays, etc. (315) ».
Cette lettre est datée du vendredi après la Saint-Pierre et Saint-Paul (29 juin) 1342 c'est le dernier document où figure Henry III il mourut donc jeune (316) peu de temps après, et, dans un titre du mois de janvier suivant, Thiébaut Ier, son successeur est déjà qualifié de sire de Blâmont. S'était-il marié ? c'est probable, mais non prouvé il parait certain toutefois qu'il ne laissa pas d'enfants. Quoiqu'il en soit, si Henry III se maria, ce fut vraisemblablement à Ida de Ribaupierre, soeur de Brun l'époux de Jeanne de Blâmont ; dans la généalogie de cette maison, il est dit en effet qu'Ida épousa 1° le comte de Blâmont, 2° le baron de Ramstein (317); or, si le fait est exact, nous ne voyons qu'Emequin et Henry III auxquels il puisse s'appliquer et nous avons lieu de croire que c'est plutôt à ce dernier.
THIÉBAUT Ier, SIRE DE BLAMONT.
Thiébaut Ier était majeur lorsqu'il succéda à Henry III, son frère. Bien que n'ayant trouvé nulle part l'indication du degré de la parenté qui existait entre eux, il nous semble impossible de concevoir le moindre doute à cet égard. En effet, Henry III était mort trop jeune pour avoir pu laisser un fils déjà majeur au moment de son décès on sait de plus qu'Eyme Ier n'avait eu qu'un enfant mâle, qui vivait encore ; Thiébaut ne pouvait donc être que le second fils d'Henry II et de Marguerite de Montfaucon (318). L'éloignement dans lequel il pouvait se trouver, comme il était d'usage à cette époque où les jeunes gentilshommes et surtout les cadets quittaient le château paternel pour aller, souvent au loin, près d'un seigneur parent ou ami, remplir les fonctions d'écuyer et se façonner au métier des armes, explique suffisamment pourquoi on ne le voit apparaître dans les archives de Blâmont que l'année où il prit possession de son héritage.
Comme Henry Ier, son aïeul, Thiébaut fut un guerrier célèbre; mais il ne possédait pas la prudence de celui-ci et, s'il eut souvent de succès, il connut aussi les revers et mourut en laissant l'ancien patrimoine de sa maison obéré, sillon amoindri, par les nombreux emprunts qu'il avait dû contracter.
Il est fait mention de lui, pour la première fois, dans une donation de Jean, roi de Bohème et comte de Luxembourg, du 31 janvier 1342 (v. st.), à « Thybaut, sir de Blancmont, nostre cousin », pour les services qu'il en avait reçus, de 1000 florins de Florence, moyennant lesquels celui-ci devint son homme lige après l'évêque de Metz, le duc de Lorraine et le comte de Bar, à charge de reprendre et tenir ligement de lui 100 livres tournois de rente sur son franc alleu (319).
Deux ans plus tard (3 janvier), il reconnut qu'il était homme lige du duc de Lorraine comme ses prédécesseurs ; cet acte est conçu dans les mêmes termes que celui donné par son frère (320).
Les bourgeois de Vic, ayant eu, peu après, de graves démêlés avec Adémare de Montil, leur évêque, se mirent sous la protection du duc Raoul, qui promit de les défendre contre tous, excepté Thiébaut de Blâmont, leur voué : le traité qui mit fin à ces dissensions (avril 1345) fut scellé par onze gentilshommes qualifiés d' « élus sur les commune criées de Lorraine » parmi
lesquels figuraient Thiébaut, sire de Blâmont, et Eymequin de Blâmont, son cousin (321).
Raoul était alors en guerre contre l'évêque de Metz ; Thiébaut fut un des seigneur que le roi de Bohème, nommé arbitre, s'adjoignit pour les conditions de la paix qui fut bientôt signée. En conséquence de ce traité, le duc donna à son « très ameis et féalz cusins, messires Thiebaulz, sires de Blanmont », en considération de ses, bons services et pour l'indemniser « de plusours damaiges que nous et nous gens aviens fait à li et à cez homes et subgis, on temps des guerres que noua aurnes à l'évesque de Més et à conte dé Bart », le château de Turquestein et toute la châtellenie avec les villages et bans en dépendant, à charge de foi et hommage et sous réserve de les pouvoir racheter en payant 2000 l. de petits tournois (322). Le lendemain, il lui donna encore la gagère du ban d'Azerailles, dont il avait fait le rachat à Henry III moyennant 500 livres, pour la tenir en fief comme celui-ci la tenait (323).
Ce prince étant mort à Crécy, la bonne entente qui existait entre lui et Thiébaut ne se continua pas avec la régente, Marie de Blois, sa veuve. Les habitants de Lunéville et de Deuxville furent la cause première de cette rupture, on ignore pourquoi ; toujours est-il que le sire de Blâmont, ayant pris les armes, tua ou blessa plusieurs hommes, en fit d'autres prisonniers et pilla des villages. Par traité du 23 mai 1347, la duchesse lui pardonna et promit de ne jamais faire aucune réclamation pour ces faits, à lui ni a ses « hommes et sugis, aidans, adhérans et coufortans » (324)
Cette preuve de faiblesse ne servit qu'à faire paraître Thiébaut plus puissant et, dès l'année suivante, on put voir l'abbaye de Saint- Remy de Lunéville se mettre sous sa protection, elle et ses biens, pour cinq ans, en payant une rente de vingt-quatre quartes d'avoine (325), les habitants de Saint-Clément, sujets du chapitre de Metz, implorer sa sauvegarde pour huit années, moyennant un resal et demi (261 litres) de même grain par ménage (326), et enfin l'abbaye de Senones lui promettre 40 quartes aussi d'avoine chaque année pour la- même raison (327).
En 1349, il guerroyait contre les « citains, manants et habitants » de Metz, avec ses alliés les comtes de Deux-Ponts, de Salm et de la Petite-Pierre, Trichmann de Linange comte de Réchicourt, Ferry de Linange, Jean, Bourcard et Olry, sires de Fénétrange, Hugleman, sire de Fénétrange et ses fils, Nicolas et Jean de Dagstoul (328). Durant cette guerre, l'évêque de Metz, la duchesse de Lorraine, Jean d'Apremont, sire de Forbach, et plusieurs autres prirent le parti de la cité et, bientôt contraint de traiter, le seigneur de Blâmont promit, tant en son nom qu'en ceux de ses alliés, de ne rien réclamer à l'évêque, à la duchesse, aux Messins et à leurs amis pour les dégâts qu'ils avaient faits sur ses terres et à renoncer à toutes les « wardes, bourgeries et commandises qu'il avait prises tant à l'évêché qu'au duché, depuis la mort de Ferry de Fénétrange (329). Il s'engagea de plus, avec François d'Herbéviller, à faire respecter la paix par Arnould de Saint-Epvre, son vassal, qui faisait des courses sur les terres de la duchesse (330).
Il ne tarda pas à prendre sa revanche: car, une nouvelle guerre ayant éclaté, l'année suivante, entre Marie de Blois et l'évêque Adémare, il prit parti pour ce dernier et, à la tête de 300 gens d'armes seulement (331), battit près de Pont-à-Mousson un corps de 700 hommes d'armes et gens de pied de Lorraine avec tant de bonheur qu'il en tua 160 et ne perdit qu'un seul des siens. Ce brillant succès a été soigneusement consigné par les chroniqueurs messins ; c'est d'abord le doyen de Saint-Thiébaut qui s'exprime ainsi « Le seignour Thibault de Blanmont, chevalier, qui estoit chavetaint ciaulx de Metz, conduisait les ardours ceulx de Metz qui estoient en tout CCC hommes d'armes et encontront bien DCC hommes d'armes que sergent a pied et se combatirent a eulx et les desconfirent ; et en y ot bien CLX des mortz de ceulx de la duchié, et de la partie de Metz n'en n'y ot que un tout seul, mais il en y ot plusieurs des bléciés et des navrés. ».Puis la chronique en vers
« Le sieur Thiebauld de Blanmont,
Noble chevalier de renom,
Pour aller brusler en Lorraine
Des Messains estoit capitaine.
Aux Messains advint une alarme
Des Lorrains sept cent hommes d'armes,
Dont sept en furent attrapés
Des Lorrains morts et extirpés.
Des Messains ne mourut qu'un homme,
Mais des navrés en y eut grand somme,
L'un bien joyeux:, l'aultre marri,
L'un meshaigne et l'aultre guerri. »
A la conclusion de la paix, Thiébaut profita des dispositions bienveillantes de l'évêque envers lui, pour en obtenir le règlement de certaines questions qui étaient restées pendantes entre eux, comme le moulin de Baccarat, la fourche patibulaire qu'il avait dressée devant ce bourg (332), les dégâts que lui et son prédécesseur avaient faits sur les terres de l'évêché, notamment pendant la guerre contre le comte de Linange, le sire de Ribaupierre et autres allemands (en 1337), etc. Adémare se trouva lui redevoir 2000 florins d'or et 2000. l. de petits tournois et, pour ces sommes, lui engagea les château et châtellenie de Turquestein avec l'avocatie du prieuré de Saint-Quirin, qu'il venait de retirer des mains de la duchesse à l'aide d'un emprunt fait au sire de Blâmont (333). Celui-ci conserva donc cette importante seigneurie; mais, comme Marie de Blois lui avait remboursé les 2000 livres pour lesquelles le duc Raoul la lui avait mise en gage, il reprit d'elle aussitôt, suivant leurs conventions, pour pareille somme, plusieurs fiefs qu'il possédait en francs alleux les villages de Gogney, Verdenal, Chazelles, Igney, Halloville et Badésemont, les voueries de
Domèvre et de Bon-Moûtier et ce qu'il avait acquis des héritiers de Renier de Hombourg avec les bois au-dessus d'Ibigny, les bois de Valle (Voile) ?, de Xermenberch, de Thiesselein près Cirey et le moulin neuf situé sur la Vezouse entre Blâmont et Barbezieux (334).
Pendant les deux années qui suivirent, Thiébaut semble être resté en paix avec ses voisins. Il les consacra aux soins de ses affaires de famille et fit, le 1er février 1351 (v. st.), avec Henry de Faucogney et sa femme, Jeanne de Blâmont, une transaction par laquelle il fut convenu ce qui suit : Il prendra ce que ses cousins avaient « en la ville ferme de Denneure, on bourc de Laitre davant Denneure on ban et on finaige.... item.... toutes les wagières de la ville ferme de Denneure que li dis sires Hanris de Falcoingneis, messires Eymes de Blanmont et messires Hanris, li yrans, sires de Blanmont, cui desur dit, avoient obligiet et mis en waiges », plus les 10 livrées de terre qu'Odewin d'Herbéviller tenait sur la vente de Deneuvre et tous les anciens hommages relevant de cette ville, excepté le fief que les héritiers « Fontainne de Sainct-Alâme » avaient à Domptail, excepté aussi Buriville et Reclonville qui devront demeurer à Henry ; après le décès d'Isabelle de Saint-Dizier, dame de Montenot, il aura ce qu'elle possédait pour son douaire en la châtellenie de Deneuvre, c'est-à-dire le marché de ce lieu, le bois de « la Wèvre » et des revenus sur le ban d'Azerailles et sur Flin, Le Ménil et Destord, à part la ville et le ban de Domptail qui resteront à Henry, à charge par lui de payer, dès à présent, à son cousin, une rente de 100 l. tournois, dont Jean de Salm et Marguerite de Blâmont, sa femme, devront être cautions ; il prendra encore « le boix que on dit à Saint Martinboix (335), le boix de Mondon, le boix dou Foily (?), le boix de Fay (336) » et tous les autres dépendant de la châtellenie de Deneuvre et enfin devra racheter les étangs d'Albe et de Grève (337) à ceux qui les tenaient eu gage. De leur côté, Henry et Jeanne emporteront tout ce que leur cousin possédait au château et en la ville de Magnières, pourpris, ban, finage, et ce qu'il avait « es villes de Maizelei, de Wehyvilleir, de Chanteheu, de Marchesi et de Murtane (338) » et dans les villages dépendant du ban de Mortagne en bans et finages, en hommes, femmes, rentes, tailles, en bois, moulins, rivières et étangs, plus « le don et le patronaige de la chapellerie de Mons (339), laquelle madame Jehanne de Blanmont, dame de Ristes, fondait en l'église de Mons » Thiébaut devra les garantir des réclamations de Ferry de Bayon (340) sur la ville de Maixe qu'ils pourront racheter à Simonin de Germiny, lequel deviendra leur homme ainsi qu'il l'était de leur cousin ; ils tiendront le quart du château de Magnières en fief du sire de Blâmont, comme celui-ci le tenait de leur soeur, Marguerite de Blâmont, et de Jean de Salm, son mari, et ne pourront le rendre à leur dite soeur ni à aucun autre sans le consentement de Thiébaut ; moyennant ce partage, ils seront libérés envers lui des pertes qu'il avait éprouvées en raison du cautionnement fourni pour eux à Brocard de Fénétrange, lui quittant les levées qu'il avait faites dans les lieux sus dits et sur la terre qu'ils possédaient à Étain, Bouligny et dépendances. Ce qui fut scellé en présence d'Henry, comte de Montbéliard, sire de Montfaucon, de Jean, sire de Faucogney, et de Gauthier, sire de Ray, chevaliers (341).
Il échangea aussi avec Jean, comte de Salm, et sa femme, Marguerite de Blâmont, ce que ceux-ci possédaient à Magnières contre sa part du château de Châtillon avec les bois et rivières qui en dépendaient (juin 1352) (342).
Adémare de Montil affectionnait beaucoup Thiébaut ; il lui en donna une preuve éclatante en le nommant gouverneur du temporel et lieutenant général des troupes de son évêché (343). C'est en cette qualité que le sire de Blâmont reçut le serment de fidélité des villes de Rambervillers et Baccarat (15 août 1353) et d'Albestroff (septembre) (344).
Grâce aux fonctions éminentes dont il était alors revêtu, ce seigneur eût dû se trouver dans une situation prospère ; on ne voit donc pas pourquoi il fut forcé d'engager à Poincignon Dieuamy, citain de Metz, en garantie d'une somme de 1700 livres que celui-ci lui avait prêtée « por estaindre plusors grans domages qui me venoient chascun jor et por racheter grant partie de mon héritaige qui se perdoit et aliénait fuers de ma main par cens et par debtes », les lieux de Bouligny, Amermont, Piennes, Bertrameix qui lui appartenaient « sens part d'autrui », la moitié de ce qu'il avait à Preutin, Domery, Bouvigny, Dommarie, Joudreville et dans la ville d'Étain et la moitié de Gouraincourt indivis avec l'évêque de Verdun, se réservant néanmoins le droit de pouvoir toucher, chaque année, 100 livres sur les revenus de ces terres, tant qu'elles resteraient entre les mains de son créancier (1356) (345).
Peu après, il fit ses foi et hommage, pour ces mêmes seigneuries, à Robert, duc de Bar, auprès duquel il se trouvait comme conseiller, avec une pension de 800 florins (346). Il prit, dès lors, la part la plus active aux affaires du Barrois c'est ainsi que les archives le montrent successivement guerroyant pour le duc contre l'évêque de Verdun (juillet-octobre 1358), négociant avec les habitants de Pont-à-Mousson révoltés (avril 1359), ménageant une trêve entre le duc et les seigneurs de Faucogney (juin), accomplissant des missions à Pont-à-Mousson (août), à La Marche (octobre), à Metz (décembre) (347), près du roi d'Angleterre (janvier 1360), dans le Brabant (février), etc (348). Robert le nomma enfin (avril), gouverneur de Saint-Mihiel et le chargea de diriger l'approvisionnement et la défense de cette place importante pendant la guerre contre les Anglais (349) ; il s'acquitta fidèlement de sa charge et pourvut la ville de tout le nécessaire (350) ; il paya même de sa personne dans plusieurs rencontres, entre autres dans une poursuite faite avec le bailli contre un aventurier nommé Geoffroy de Lutenges, écuyer, qui s'était emparé du bétail de Norroy-le-Sec, et où il fut fort maltraité.
Comme il avait fait des dépenses considérables, tant en voyages qu'autrement, pour le service du duc (351), il en demanda le remboursement et, ne pouvant l'obtenir, s'empara tout-à-coup de la forteresse de La Mothe, après avoir tué une partie de sa garnison, et la mit au pillage (2 juin 1362). A la nouvelle de cet événement, Robert mit des troupes sur pied et partit lui-même à leur tête pour aller reprendre la place : il fit en même temps mettre Etain en état de défense, à cause des possessions que le seigneur de Blâmont avait aux environs, et saisir les revenus qu'il possédait dans cette ville (352). La Mothe cependant ne lui fut rendue que le 17 juillet, à la suite, non d'un siège, mais de longues négociations. Cette restitution fut suivie d'une trêve, qui devait durer cinq semaines, et d'une conférence qui se tint à Pompey et ne semble pas avoir rétabli l'accord, car les hostilités recommencèrent jusqu'au 20 octobre, où Thiébaut, par l'entremise du duc de Lorraine, fit sa paix avec Robert (353) et le tint quitte de ce qu'il lui réclamait, à condition toutefois d'être indemnisé, dans le délai d'un mois, tant de la poursuite de Norroy que de certaines sommes que les gens du duc avaient induement perçues sur les revenus de sa terre d'Etain. Il promit eu outre de ne rien entreprendre contre le duché de Bar avant l'expiration du temps dans lequel satisfaction devait lui être donnée (354)..
Après avoir cessé de servir le duc de Bar, dans le courant de l'année 1360, Thiébaut était venu reprendre les fonctions que l'évêque Adémare lui avait confiées. A la mort de ce prélat, le chapitre le continua dans l'office de lieutenant général de l'évêché pour tout le temps de la vacance ; il prêta donc, le 5 juin 1361, serment entre les mains du doyen et en présence de ses chevaliers, Jean d'Herbéviller, Henry de Lannoy et Jean d'Ogéviller, et jura de bien gouverner le pays à ses risques et périls, de rendre un compte fidèle des recettes et des dépenses qu'il aurait faites, de ne remettre les forteresses de l'évêché à nul autre qu'au nouvel évêque et de n'associer personne à son administration sans le consentement du chapitre (355). Il était difficile de remplir cette charge consciencieusement sans froisser bien des susceptibilités ; Thiébaut eut des démêlés avec plusieurs seigneurs, particulièrement Geoffroy de Linange, comte de Réchicourt, qui, ne pouvant se faire payer d'une somme qu'Adémare lui devait, fit des courses sur les domaines du sire de Blâmont avec lequel il finit par convenir de s'en rapporter au jugement des cinq commissaires dont on a parlé et de se quitter réciproquement tout le mal qu'ils s'étaient fait (356).
Jean de Vienne ayant été élu évêque, Thiébaut lui présenta ses comptes (30 août 1362); il avait dépensé, tant du vivant d'Adémare que depuis sa mort, 12363 florins mais, comme il avait fait recette de 2363, il ne lui restait dû que la différence et encore, ajoute Dom Calmet, ne lui fut-elle payée qu'en partie, ce qui occasionna bien des hostilités entre l'évêque et le seigneur de Blâmont. Il est vrai que, selon le même auteur, celui-ci avait profilé de ses fonctions pour ajouter de nouvelles fortifications à ses villes de Blâmont et de Deneuvre, fiefs de l'évêché, et aurait ainsi dépensé une partie de la somme qu'il réclamait. (357)
Quelques mois plus tard, il était prisonnier en Alsace ; comment et pourquoi, c'est ce que nous n'avons pu découvrir- L'histoire est muette sur cet événement, qui n'est connu que par le document suivant « Lettre en parchemin par laquelle Louis Roder, dit Widenbosch, Obrecht, son frère, escuyer, et Gölze d'Inguenhem déclarent: que le noble seigneur Thiébault de Blâmont a esté leur prisonnier ; que, soubs la promesse des sieurs Nicolas de Boulach et de Jean de Boulach, son fils, de Strasbourg, de leur payer quattre mil florins au jour de Saint-Michel prochain, ils l'ont mis en liberté, luy et les siens, et se déportent de plus rien prétendre sur lur ny prendre aucun de ses biens, le déchargent de tous serments et hommages à eux fait ou à gens en leur noms. Ledit Röder, dit Widenboseh, a donné le sel de ses armes pour luy, son dit frère Obrecht et ledit Götze d'Inguenhem, le 7e jour de l'an mil trois cent soixante trois (358). »
Doit-on considérer ce fait comme une cause de la guerre que Thiébaut eut, l'année suivante, contre l'évêque de Strasbourg ? Il est difficile de ne pas y voir au moins une coïncidence (359). Le comte de Blâmont, dit Dom Calmet, se brouilla avec le comte de Salm, seigneur de Viviers (360), le sire Thibaut de Ravestein et l'évêque de Strasbourg, et, comme la partie n'étoit pas égale et qu'il vit bien qu'il ne pourroit soutenir longtemps une telle guerre, il songea à se fortifier par un secours étranger. Il appela donc à son aide les bandes d'aventuriers connus sous le nom de Bretons et commandés par un chef nommé
l'Archiprêtre ; ceux-ci accoururent au nombre de 40,000, dit-on (361), et à leur tête il ravagea les terres du comte de Salm et de l'évêque de Strasbourg et demeura trois semaines dans leur pays, sans que personne osât lui résister (362). » Nous ne savons comment se termina cette guerre, sur laquelle on ne possède pas d'autres détails, sinon qu'Olry de Fénétrange fut aussi attaqué par Thiébaut, qui envahit même le Barrois, pilla Horville et Dainville, menaça Foug (363) et prit la forteresse de la Tour-en-Woevre, qui appartenait au comte de Salm.
Cette heureuse campagne mit le sceau à la réputation militaire du sire de Blâmont. On vit, en 1366, les bourgeois de Remiremont, de concert avec le chapitre, donner pleins pouvoirs à « redouptey et puissant prince, monssignour Thiébau, signour de Blanmont, » pour ordonner tout ce qui serait nécessaire à la fortification de leur ville (364) puis Jean, duc de Lorraine, le charger de le représenter au traité de Vaucouleurs (365) et le nommer, le 6 décembre, lieutenant général de son duché « tant en roman paiix comme en Allemegne » avec promesse de l'indemniser des pertes et dépenses qu'il pourrait faire à son service (366). Il prit part ensuite à la guerre que le duc Jean eut contre les Messins et fut, ainsi que Hugues d'Haroué, choisi comme arbitre par les parties afin d'établir les droits et responsabilités de chacun (1er mai 1367) (367).
Il ne tarda pas à quitter la Lorraine pour se rendre dans le comté de Bourgogne, où il possédait, du chef de sa femme, des seigneuries importantes et dont il venait d'être nommé gardien (368). On a des sentences rendues par lui en cette qualité, en 1366, 1367 et 1368 (369) il parait encore comme témoin de deux actes passés en Bourgogne aux mois de juillet et septembre 1369, mais sans le titre de gardien (370).
Le duc de Lorraine était resté son débiteur de plusieurs sommes importantes ce fut sans doute pour s'en acquitter qu'il lui donna (1370) la seigneurie de Fougerolles, qu'il avait confisquée sur Hugues, sire du lieu (371). Cette terre, qui comprenait outre le château de Fougerolles les deux villages de ce nom et partie de ceux de Cornimont, Xoulce et du Val d'Ajol, convenait très bien par sa situation, au seigneur de Blâmont, en lui servant comme de trait d'union entre ses domaines de Lorraine et de Bourgogne.
Robert, duc de Bar, ayant été fait prisonnier par les Messins, Thiébaut oublia les querelles passées et se mit à la disposition de son suzerain malheureux. Mettant à profit la grande influence qu'il avait conservée à Metz, il contribua beaucoup à hâter la conclusion du traité de paix dont il fut un des signataires (août 1370) et se rendit même en otage dans cette ville avec le sire de Louppy et le fils du duc afin d'obtenir la mise en liberté de celui-ci (372).
Geoffroy de Linange, qui avait eu des démêlés avec le sire de Blâmont, son cousin, lui devait encore 240 florins d'or à cause d'un cautionnement fait pour lui; il fut contraint, afin de désintéresser son créancier, de lui engager, moyennant pareille somme, la châtellenie d'Ormes, indivise entre lui et Jacquemin, son frère, ne se réservant que la moitié des murs de la ville, de façon à conserver l'entrée et la sortie (1372) (373).
La vie de Thiébaut n'offre plus rien d'intéressant (374) jusqu'en 1376, où il fit deux transactions au sujet du château de Montby (375) qu'il avait occupé, comme étant à lui, malgré les réclamations de Jean-Guillaume de Montby, écuyer. Celui-ci promit, le 26 février, de ne rien demander des revenus que Thiébaut, « sires de Blanmont en Lorrenne », avait tirés de la terre de Montby et reconnut que la seigneurie voisine, de Gondrevaux, ne dépendait pas de son château et devait rester à Thiébaut seul, lui donnant comme cautions, Jean de Vergy, sénéchal de Bourgogne, Jean de Vienne, amiral de France, et Hugues, sire de Rigny (376). Un mois plus tard (21 mars), il déclara être débiteur envers le seigneur de Blâmont de 300 florins d'or, moyennant lesquels il était devenu son homme lige et devait le recevoir dans son château de Montby, chaque fois qu'il le demanderait (377).
On voit, le 24 juin suivant, Henry de Blâmont et ses frères faire la paix avec Marguerite de Blâmont, dame de Puttelange, leur cousine, contre laquelle ils venaient d'avoir une courte guerre en raison de la mort de Thiébaut, leur père, dont ils l'accusaient. L'état d'indivision où se trouvaient alors la seigneurie et même la ville de Blâmont, dont Marguerite possédait une partie, aurait été la cause de cet événement tragique (378).
Thiébaut Ier mourut donc en 1376, entre la fin de mars et le milieu de juin, âgé d'environ 65 ans, ayant épousé Marguerite d'Oricourt, dame de Savoyeux, fille de Guillaume de Vaire, chevalier, sire d'Oricourt (379), et soeur probablement de Jean, sire de Vaire, dont il sera question plus loin, laquelle lui avait apporté des terres considérables au comté de Bourgogne, comme la châtellenie d'Oricourt, la terre de Gondrevaux et sans doute la châtellenie de Vellexon (380); plus tard, la seigneurie de Vaire entra aussi dans la maison de Blâmont, grâce à ce mariage.
Il laissait, de son épouse, quatre fils: Henri IV, l'aîné qui lui succéda dans la seigneurie de Blâmont et dont on parlera après ses frères, Adémare, Thiébaut, Jean et trois filles, Jeanne, Marguerite et Catherine.
JEANNE DE BLAMONT épousa Conrad de Lichtenberg, issu d'une des premières maisons d'Alsace. Par son contrat de mariage, en date du mardi avant la saint Gall (octobre) 1365, Conrad, assisté d'Henry de Lichtenberg, son père, promit d'épouser Jeanne, fille de Théobalt, sire de Blâmont, et, moyennant sa dot, de renoncer, en faveur des frères de celle-ci à tous les biens tant patrimoniaux que féodaux, qui pourraient échoir à sa femme par succession ou autrement, se réservant seulement ses droits à défaut de mâles (381). Elle était veuve et dame de Lichtenberg en 1392, où elle répondit de la rançon d'un chevalier alsacien qu'Henry, sire. de Blâmont, son frère, tenait prisonnier (382).
MARGUERITE DE BLAMONT est connue par le partage fait, en 1378, entre les enfants de Thiébaut Ier et où il est dit qu'elle devait avoir, pour sa part de succession, le château de Turquestein, avec tous les villages en dépendant, et que, dans le cas où cette châtellenie serait rachetée, l'argent qui en proviendrait resterait sa propriété. Elle est encore rappelée, en 1408, dans le testament de Jean, son frère, qui lui laissa 1,000 francs sur sa succession.
CATHERINE DE BLAMONT est citée dans le même partage, qui lui attribua une rente de 80 florins, payable à raison de 20 fl. par chacun de ses frères elle était alors dame du chapitre de Remiremont (383). Dom Calmet dit qu'elle fut abbesse d'Epinal de 1384 à 1404, puis de Remiremont de 1404 à 1408, année de sa mort (384) elle ne se qualifie cependant encore, en que de « dame en l'eiglise de Remiremont », dans la donation qu'elle fit de ses 80 fl. de rente à Valburge et à Jeanne de Blâmont, ses nièces, aussi religieuses au même monastère (385), et il est certain que, si elle porta le titre d'abbesse de Remiremont, ce ne fut pas sans opposition, puisqu'elle dut résigner cette dignité vers le milieu de l'année 1412, en exécution des sentences rendues à Rome contre elle (386).
ADÉMARE DE BLAMONT apparaît dans un titre du 17 septembre 1377, par lequel il donna, au cas où il mourrait sans enfants, à Henry, son frère aîné, tout ce qui pouvait lui revenir de la succession paternelle dans les seigneuries de Blâmont et de Deneuvre, promettant de ratifier cette donation aussitôt leurs partages terminés ; ils le furent en 1380, et Adémare se trouva seul possesseur de la châtellenie d'Oricourt, des terres de Bouligny et Amermont, Amel, Senon et dépendances, de 100 florins de rente sur la seigneurie de Blâmont et de la moitié de la rente de Bruxelles (387). Il engagea, le jour même, à son frère Henry, moyennant 500 francs qu'il lui devait, ce qu'il possédait encore à Domjevin, Vého, Chazelles, Reillon, Gondrexon, Amenoncourt, Igney, La Neuveville-aux-Bois, Remoncourl, Gogney, Petitmont, Montigny, aux bans à Azerailles et de Saint-Clément, pour en tirer la moitié des revenus jusqu'à l'entier paiement de cette somme (388).
Il mourut peu après, car Thiébaut de Blâmont engagea aussi à Henry, en novembre 1389, ce qu'il avait à Bouligny, Amermont, etc., Amel et Senon, à lui obtenu par le décès d'Adémare de Blâmont, sire d'Oricourt, écuyer, leur frère (389). Rien ne fait supposer que ce dernier se fût marié il est certain, toutefois, qu'il ne laissa pas d'enfants légitimes et que sa terre d'Oricourt passa comme les autres à ses frères.
THIÉBAUT DE BLAMONT. Ce ne peut être que lui qui figure, en 1377, dans la donation faite avec Adémare à Henry, leur frère, sous le nom d'Henry dit Prévôt :
« Nous, Hanris dis Prévoust et Adémars de Blanmont, frères et enfans de monsignour Thiébaulx, seignour de Blanmont, que fuit... (390) » Les quatre fils de Thiébaut Ier dénommés dans un titre du mois d'octobre 1378 et dans le partage de l'année suivante sont Henry, Thiébaut, Adémare et Jean ; il semble donc bien difficile d'admettre que cet Henry fût un cinquième fils mort dans l'intervalle sans laisser d'autre trace.
Quoiqu'il en soit, Thiébaut de Blâmont est bien connu dans le second partage fait, en 1380, entre les cadets, il eut la châtellenie de Vellexon avec 223 florins de rente sur les terres de Blâmont et de Deneuvre, et la moitié de la rente de Bruxelles (391).
On l'a vu engager à Henry, son frère, en 1389, pour 1200 florins que celui-ci lui avait prêtés, tout ce qui lui provenait de la succession d'Adémare au duché de Bar. Il écrivit, la même année, à Jean de Fénétrange, qui avait ravagé ses terres en guerroyant contre le seigneur de Blâmont ; ses pertes se montaient, de ce chef, à 2,000 florins, et il le requit de l'indemniser ou de se rendre à la journée qu'il prierait le duc de Lorraine de leur assigner (392). L'année suivante, il fut arbitre d'un différend survenu entre son frère Henry et Jean de Vergy et rendit son jugement au château de La Garde, qu'il tenait alors avec la châtellenie en dépendant, par engagement de l'évêque de Metz (393).
En 1395, il eut avec Jean, son frère, à l'encontre d'Henry comte de la Petite-Pierre une guerre au cours de laquelle de grands dégâts furent commis de part et d'autre, « tant de feu bouteis, d'omes pris et navreis, comme aultrement» ; Adémare de Blâmont avait été la cause de ces hostilités, on ignore pourquoi. La paix fut conclue le 15 août le comte promit de. servir les deux frères dans une chevauchée à la tête de vingt lances, et de ne pas aller en l'aide d'Henry, sire de Blâmont, contre lequel ils étaient en guerre (394). De cette dernière querelle, causée par la succession d'Adémare, on ne sait rien de plus mais il est probable que le résultat n'en fut pas à l'avantage de Thiébaut, lequel engagea l'année suivante à Jean de Fléville bailli de Vosge, pour 400 francs, les trois quarts de Gondrexon, Reillon, Chazelles, Amenoncourt, Igney, Vého, Halloville, du ban d'Ancerviller et de l'étang d'Albe (395). Depuis cette époque, il n'est plus question de lui ce n'est qu'en 1408 que l'on apprend sa mort par le testament de son frère Jean, qui avait hérité de ses biens ; il n'avait donc pas laissé d'enfants légitimes et ne s'était peut-être même pas marié. Toutefois, il semble avoir eu un bâtard nommé Baudoin, légitimé plus tard par le duc de Bourgogne ; c'est sans doute lui qui figure sous le nom de « bâtard de Blammont » au nombre des 278 écuyers que Guillaume, sire de Châteauvillain, avait sous ses ordres à Beauvais, le dernier août 1417 (396).
JEAN DE BLAMONT, Ier du nom, eut en partage la châtellenie de Fougerolles, 100 florins de rente sur les seigneuries de Blâmont et de Deneuvre, le même revenu sur les salines de Moyenvic, la terre de France (Provins, etc.) et les voueries de Vic et de Neufchâteau (397).
On a pu voir qu'il était très attaché à son frère Thiébaut, sire de Vellexon, avec lequel il combattit le comte de la Petite-Pierre et même Henry, sire de Blâmont, leur frère aîné; aussi Thiébaut lui laissa-t-il, en mourant, tous ses biens ; c'est pour cela qu'il se qualifie de seigneur de Vellexon dans le traité dont il fut l'arbitre, en 1402, entre Thiébaut et Olry de Blâmont ses neveux, et l'évêque de Metz (398), et qu'il put engager au duc de Lorraine le tiers de la châtellenie de La Garde à raison de 500 florins (1404) (399) il était alors seigneur de Vellexon et de Vaire, cette dernière terre lui étant échue par le trépas de Jean sire de Vaire son oncle (400).
Il accompagna bientôt le duc de Bourgogne, Jean sans Peur, à Paris, et figure, avec le titre d'écuyer banneret, sur la liste des vassaux qui restèrent en cette ville auprès du duc, depuis le 19 août au dernier septembre 1405 (401) on le retrouve aussi dans une montre d'armes faite à la même époque avec sept écuyers de sa compagnie, qui étaient Quichelin de Monhart, Guiot du Mont-Saint-Léger, Gauthier d'Ochey, Jean de Beaumotte, Jean Lichart d'Asey, Arnoul de Villesambert et Jean de Haubervilliers (402).
Au mois de novembre, étant encore à Paris, il vendit, « pour son grant prouffit, sur ce bien conseillié, pourveu et advisé de son fait et de son droit et pour ses choses en mieux refformer », à Jean de Bauffremont, la nue propriété de la vouerie de Neufchâteau, qu'il tenait eu fiefs du seigneur de Montfaucon, avec les « droits, terres, cens, rentes, revenues, prouffiz. justice, seigneurie, fiefs, arrière-fiefs » en dépendant, excepté les rentes dues aux vassaux, moyennant la somme de 900 livres tournois ; il céda, d'autre part, à Philibert de Bauffremont et à Agnès de Jonvelle, sa femme, l'usufruit pour 300 l. (403).
Il donna, en 1407, son dénombrement au duc de Bourgogne pour la seigneurie d'Oricourt mouvant de son duché à cause du château de Faucogney et ses dépendances, Oppenans et Arpenans, le fief que Pierre de Salnoy, écuyer, tenait de lui à Autrey, près de Montjustin, « le fief de Clémence demeurant à Longeville-sur-l'Oignon, femme de feu Girard d'Orchamps, écuyer, pour ce qu'elle a à Oricourt des héritages tenant à Vuilleminot d'Oricourt et au bâtard d'Oricourt (404) ».
Jean le. de Blâmont fit son testament au château de La Garde, le 28 juin 1408. Ce document est précédé d'un long préambule dans lequel il expose qu'avant eu longtemps la guerre avec Henry, sire de Blâmont, son frère, et les fils de celui-ci, en raison tant de leurs partages que de la succession de son frère Thiébaut de Blâmont et de son oncle Jean, sire de Vaire, il les avait déshérités (405) ; mais que, sur les conseils du duc de Lorraine et en reconnaissance des services qu'Henry et ses fils lui ont rendus depuis, notamment lorsqu'il fut fait prisonnier par Jean de Neufchàtel, sire de Montaigu, il les a institués ses héritiers universels, au cas où il mourrait « sens hoirs de mon corps, nez et procréez en léaul mariage » et révoque, de la manière suivante, toute disposition antérieure :
« Je, Jehan de Blanmont, seignour de Vellesson et de Vaira faix savoir à tous moy estant sains de corps et de pensées, considérant les choses dessus dites, je ravocque, par ces présentes, tous testamens et ordonnances que par moy seroient ou poulroient estre faites davant la date de ces présentes, et les anichille et més dou tout au néant, sans ceu que à nulz jour maix, nulz aultres puissent demander ne quereller aulcunement, au contraire de ces présentes, en manière que ceu soit ou puisse estre, par fourme de droit, de coustume ou aultrement, que puisse nuyre a mon dit frère de Blanmont ne à mes dis nepveulx, ses enffans, pour autre aidier à l'encontre des choses dessus dites et devisées. Saulf et réservey, pour ma bien amée suer Margueritte de Blanmont, que mon dit frère, messire Hanry,signour de Blanmont, lui doit et sera tenus de donner la some de mille frans d'or et paier à dix ans, c'est assavoir chascun an cent frans... ; et les dis mille frans je donne et ai donney à ma dite soeur Margueritte, pour tout le droit que lui puet compéter, en quelconque manière que ce soit, en ma succession.... Et on cas, ceu que Deu ne veulle, que il advenoit que je yroie de vie à trespassement sens faire aultres ordonnances pour les ames de mon très chier frère messire Thiébault de Blanmont, de mon dit oncle, messire Jehan, seignour de Vaire, de moy et de mes prédécessours, j'ai ordonney et veulx et ordonne, par ces présentes, que mon dit frère est et serait tenus de paier mes debtes et aussi de donner pour les ames de nous les dessus dis et aussi pour paier mes servitours, jusque à la somme de deulx milles et cinqz cent frans d'or, par la forme et manière qu'il est dit et devisey plus plennement en une cédulle séellée de mon séel au plain en cire roge, laquelle on trouverait en ma huge avec ces présentes. Et pour faire et acomplir les choses davant dites, j'en charge mon frère davant dit en sa conscience et sus le péril de l'ame de luy.
« Et pour ceu que ceste mienne présente révocquation, ordonnance ou darnière voluntey heut force et vigour perpétuelle, j'ai supplié et requis à très hault et puissant prince et mon très redoubté seignour, -monseignour le duc de Lorherenne et marchis, qui veulle mettre son séel en ceste mienne présente révocquation... avec le mien propre séel et signe manuel de messire Waultrin WalIo, cure d'Embermesny et notaire imperial... Données le vingt et octime jour dou moy de jung, environ une hour davant midi, en mon chastel de La Garde, présent Jaique Dugnes, escuier, le petit Wichar et Regnaldin, prévost de Dongeving, ad ceu espécialment appelleis et requis, l'an de grace Nostre Seignour mille quatres cens et huit (406) ».
C'est vers cette époque que l'on doit placer sa mort, car Henry, son frère, disposa, le 10 août de l'année suivante, de la terre d'Oricourt en faveur de son fils aîné, lequel fit plus tard une transaction avec Guillaume de Vienne au sujet de la succession de Jean de Blâmont, chevalier, jadis seigneur de Vellexon et de Vaire.
(A suivre.)
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