Dans l'article Les
Sapeurs-Pompiers de Nancy - 1913 est évoquée une expérience en 1723
pour l'extinction des incendies, menée à Nancy pour le duc Léopold.
Le Jjurnal manuscrit (Bibliothèque nationale, nouvelles acquisitions n° 4567,
acquis en novembre 1890) du libraire Jean-François Nicolas (1710-1761)
regroupant quatre tomes, publiés par Christian Pfister dans les Mémoires de
la Société d'archéologie lorraine de 1899, nous donne la date exacte de
l'évènement (qui serait donc le 27 février 1723, et non le 17 comme l'article
précité l'indique par erreur) :
« Journal de ce qui s'est passé à Nancy, Depuis la paix de Ryswick conclue le
30 octobre 1697 jusqu'en l'année 1744 inclusivement.
[...]
Un particulier allemand, arrivé à Nancy prétendait avoir un secret pour éteindre
le feu en moins d'une minute. Pour en faire l'épreuve, on dressa le 27eme
février une maison de bois au milieu de la place de la Ville-Neuve, remplie de
matières combustibles auxquelles on mit le feu, qui fut éteint dans le moment,
le bois étant à peine allumé. L.A.R., Mgrs les Princes, les Princesses, le
Prince de Portugal et toute la cour étaient sur la place et ne furent pas trop
contents du secret de M. l'Allemand. »
Mais c'est Dom Augustin Calmet (1672-1757) qui en fait une relation plus
détaillée en 1757. Tient-il ces faits de documents regroupés par le libraire
Nicolas, puisqu'on connait leur proximité et la participation de Jean-François
Nicolas à différents ouvrages de Calmet (Bibliothèque lorraine, Notice
de la Lorraine...) ?
« Histoire de Lorraine - Tome VII
Augustin Calmet
1757
Livre L.
[...]
LXXXVII. Seau pour éteindre le feu en un moment. 1723.
Comme le Duc Leopold étoit en reputation de Prince généreux, liberal & curieux,
les étrangers qui avoient quelques talens singuliers, s'adressoient volontiers à
lui faire en sa présence des expériences ou des découvertes nouvelles. Un
Allemant s'étant presenté à ce Prince au mois de Février 1723, se vanta d'avoir
le secret d'éteindre le feu d'une maison embrasée, & cela dans une minutte. Son
Altesse Royal voulut en faire l'expérience dans la grande place de la Villeneuve
de Nancy. Il y fit bâtir une maison de sapin, remplie de paille & de fagots, on
y mit le feu, & quand la flâme fut bien allumée, l'étranger fit jouer son secret
& le feu s'éteignit aussitôt. Son secret consistoit en un tonneau de médiocre
grandeur, qui en renfermoit un autre beaucoup plus petit. Il remplit d'eau le
grand tonneau, & mit le feu au plus petit, qui étoit plein de poudre à canon, le
feu y prit aisément & fit sauter l'eau & les douves du tonneau extérieure, qui
dissiperent & éteignirent le feu en un moment. Le Duc Leopold, Madame Royale,
les Princes & Princesses, le Prince de Portugal arrivé depuis peu à Lunéville
étoient sur la place, & furent témoins de ce que je viens de dire. Le secret
auroit été fort utile, si on eût pû l'employer aux incendies ordinaires. Mais
comment porter une semblable machine dans une maison embrasée par un incendie
imprévû pendant la nuit, dans la ville ou à la campagne? »
Christian Pfister évoque aussi, dans son Histoire de Nancy, cet événement
qui se serait déroulé place du marché (d'où sort-il cette affirmation ?) le 27
février 1723., en citant Lionnois, qui se contente de reprendre Calmet, presque
mot à mot:
« Histoire des villes vieille et neuve de Nancy, depuis leur fondation,
jusqu'en 1788 - Tome III
Jean-Jacques Lionnois
Éd. Nancy, 1811
Expérience singulière faite sur la place en 1723.
Comme le Duc Léopold jouissoit de la réputation du Prince le plus généreux et le
plus curieux de son temps, tous les étrangers qui avoient des talens singuliers, s'adressoient à lui avec confiance, pour faire en sa présence l'essai de
leurs découvertes. Un Allemand vint au mois de Février 1723, se vantant d'avoir
le secret d'éteindre le feu d'une maison embrasée, et cela dans une minute. S.A.R. voulant en voir l'effet, fit construire sur la place de la ville-neuve
une maison de poutres et de planches de sapin, remplie de paille et de fagots, à
laquelle on mit le feu. Dès qu'il fut bien allumé, et que le Duc eut témoigné
que l'étranger pouvoit employer son secret, il le fit, et le feu fut aussitôt
éteint à la vue d'une multitude de spectateurs que la curiosité avoit attirés
sur cette place immense. S.A.R. étoit à une des fenêtres de l'hôtel-de-ville,
accompagnée de son auguste épouse, des princes et princesses de sa maison, et
du prince de Portugal, qui depuis peu étoit à sa cour. Malheureusement le secret
qui avoit si bien réussi dans cette baraque de planches, n'étoit pas praticable
dans un incendie imprévu. Il consistoit en un tonneau de médiocre grandeur, qui
en renfermoit un autre plus petit rempli de poudre à canon. Il remplit d'eau le
grand tonneau, et mit le feu au petit, qui fit jaillir l'eau et sauter les
douves du tonneau extérieur, lesquelles, avec la fumée de la poudre, éteignirent
le feu en un moment. »
On remarque que si Jean-François Nicolas évoque que Léopold et la cour ne «
furent pas trop contents » de l'expérience, Augustin Calmet et Lionnois nous
en donnent le motif sans évoquer le mécontentement du duc. |