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Reconstruction  - 1921-1931

Voir aussi La reconstruction dans l'arrondissement de Lunéville - 1923


L'Immeuble et la construction dans l'Est
15 septembre 1921

Les grands travaux de l'Entreprise

L'extrême abondance des adjudications ne nous, a pas permis, dans notre dernier numéro, de faire passer notre chronique locale et régionale, à notre plus vif regret.
Aujourd'hui nous laissons de côte l'article préparé sur les questions du jour concernant l'entreprise et le crédit à la petite propriété, pour parler très brièvement des grands travaux annoncés - et déjà amorcés - par le gros emprunt de 15 millions pour les églises dévastées du diocèse de Nancy
Cet emprunt a été largement et rapidement couvert et nous croyons savoir que ces 15millions - sur les 50 nécessaires - vont servir incessamment à rendre au culte toutes les églises réparables de la région.
Les. crédits ouverts à chaque coopérative serviront à entretenir les chantiers, et donneront ainsi du travail assuré à nos entrepreneurs et aux ouvriers de nombreux corps de métiers.
Il importe, avant tout et par tous les moyens, d'empêcher l'arrêt des travaux dans nos campagnes, la désertion des chantiers et le chômage forcé de nos ouvriers.
C'est ce qu'ont très bien compris les promoteurs hardis de cet emprunt. L'argent étant disponible, ils vont en faire la répartition, d'accord avec la Préfecture et les Coopératives des églises, entre les communes qui ont adhéré à la Fédération.
Ce sont les communes suivantes, comprises dans les certificats globaux provisoires du Ministère des Régions libérées et dans les conventions d'annuités du Ministère des Finances :
Abaucourt, Armaucourt, Arracourt, Arraye, Audun-le-Roman, Bathelémont, Beaumont, Bernécourt, Bey, Bezange, Bouxières-sous-Froidmont, Brin, Bures, Chambley, Charey, Chazelles, Chenicourt, Clémery, Domèvre-sur-Vezouse, Dommartin, Doneourt, Euvezin, Fey-en-Haye, Gerbéviller, Hagéville, Halloville, Hamonville, Harbouey, Herbéviller, Jeandelize, Laix, Leintrey, Létricourt, Leyr, Limey, Magnières, Manoncourt-sur-Seille, Moncel, Montreux, Morville, Mouacourt, Mousson, Neuviller, Nonhigny, Pannes, Parroy, Parux, Phlin, Port-sur-Seille, Prény, Raucourt, Réchicourt, Reillon, Réméréville, Rouves, Serres, Sainte-Geneviève. Saint-Julien, Thiaucourt, Vaucourt et Xousse.
Avant de commencer les travaux de ces 63 églises, des formalités doivent être remplies et des études sérieuses faites par les architectes et les entrepreneurs.
Mais, dès aujourd'hui, nous tenons à bien prouver qu'il y a «  du pain sur la planche » et que, d'ici peu, les grands travaux de reconstruction seront commencés dans toute l'étendue du département de Meurthe-et-Moselle.
Ce sera bénéfice pour tous.
20 novembre 1921

L'Union des Coopératives de Reconstruction

L'assemblée générale de l'Union des Coopératives de Reconstruction de Meurthe-et-Moselle, qui ne s'était pas tenue depuis le mois de mars 1921, a eu lieu lundi dernier, dans l'une des Galeries Poirel, sous la présidence de M. le chanoine Thouvenin, assisté de MM. Michaut, sénateur ; Marin, député ; Gustave Simon, président du Syndicat des Entrepreneurs.
Dans la salle, très remplie, nous avons remarqué nombre d'architectes et d'entrepreneurs de Nancy et de là région.
Après les excuses de personnages officiels et les congratulations d'usage - rhubarbe et séné de tout groupement d'hommes aux honneurs - M. l'abbé Paul Fiel, secrétaire, a lu, d'une voix chaude, son rapport sur la situation de l'Union coopérative des régions dévastées.
Il ressort de ce rapport que notre département est en avance de deux ans sur les autres régions libérées, que la confiance règne, absolue, entre toutes les parties de la reconstruction et que le but des coopératives est de grouper les architectes et les entrepreneurs, pour faire sortir de leurs ruines, nos bourgades et villages dévastés.
Oeuvre gigantesque à coup sûr... mais oeuvre qui se fait et se fera, puisque, en 1922, notre département sera - à peu près - reconstruit.
M. Loucheur avait dans ce but (ah ! le bon apôtre... et nous l'avons dit à ce moment-là !) promis 23 millions par mois pour la reconstruction en Meurthe-et-Moselle ! Cette somme a été réduite à un total de 111 millions, qui ont servi à payer, purement et simplement, l'arriéré de 1920 (sic !).
Grâce à l'énergie du chanoine Thouvenin, on put obtenir 20 millions, grâce à des opérations financières et aux obligations sexennales.
L'Etat en affecta, au dire de M. de Mahuet, trésorier de l'Union,: 17 millions et demi pour la reconstruction non industrielle, en vue de liquider le passé, et dont le remboursement pouvait se faire avec des titres d'emprunts de l'Etat Ces obligations sexennales sont donc de véritables Bons de la Défense nationale ou mieux du Travail national. Les entrepreneurs les ont acceptées par patriotisme, comme mode de paiement.
M. Gustave Simon, très applaudi, dit que le montant des Obligations sexennales s'élève ou s'élèvera pour Meurthe-et-Moselle à 60 millions en tout, 56 millions affectées à la reconstitution non industrielle, dont 14 millions aux isolés et 42 millions aux coopératives. Sur 323 millions à dépenser en 1922, il y aura 260 millions à répartir en obligations.
Le Syndicat des Entrepreneurs met en vente les obligations sexennales.
M. Simon assure que l'organisme créé dans ce but, grâce à la publicité faite, a atteint presque entièrement son but, puisque l'ensemble des obligations sont souscrites. Un million (sur les trois demandés) a été vendu à la Coopérative des églises dévastées. D'autres sociétés en réclament encore, ainsi que les Caisses d'épargne, dont M. Didelon se fait alors le fougueux apologiste.
M. Simon dit que les entrepreneurs peuvent vendre eux-mêmes ces obligations qui sont d'un excellent rapport.
L'assemblée passe ensuite à la grosse et importante question des avances en nature aux coopératives, matériaux chez les fournisseurs du Ministère des Régions libérées et matériaux allemands.
M. Jacquemin fait un très long mais très compliqué rapport sur ce sujet. Ce rapport est ardu... il y est parlé des accords de Wiesbaden entre Loucheur et Rathenau, du rôle des architectes et des entrepreneurs, d'un double organisme français et allemand à créer pour ces échanges de matériaux, etc.
Ce que l'on a retenu de ce rapport, c'est qu'il y a quatre sortes de matériaux à utiliser : 1° dans les divers magasins de la zone dévastée (matériaux en stock à solder) ;
2° Une quantité infinie de matériaux commandés, à grands frais, par le Ministère des Régions libérées, matériel tout neuf;
3° Fournitures allemandes surtout en bois ;
4° Matériaux disponibles fournis en nature par l'Allemagne.
Tout cela est très beau en théorie... mais que difficultés de tout genre pour les sinistrés et les entrepreneurs, les communes et les coopératives, le jour où il faudra entrer en possession de ces divers matériaux.
Et surtout que de paperasseries en perspective, que de bureaucrates à payer grassement !
Nous reviendrons sur toutes ces questions, qui sont du plus grand intérêt actuel.
Mais ce bloc enfariné Loucheur-Rathenau ne nous dit rien qui vaille, et il nous semble, à nous et à beaucoup d'entrepreneurs présents à l'assemblée, que le vieil adage du fabuliste est plus vrai que jamais.: «  Aide-toi, le Ciel t'aidera ! ».
Tous ces beaux parleurs des ministères et des préfectures plaident d'abord pro domo... les sinistrés auront à se partager ce qu'ils pourront... s'il en reste.
C'est le mot de la fin de cette assemblée... où les muets avaient raison, mais n'osaient le dire..
E.B.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
27 novembre 1921

La Reconstitution

L'autre jour, par devoir professionnel, j'ai donc assisté à cette Assemblée générale de l'Union des Coopératives de reconstitution du département de Meurthe-et-Moselle.
On y a beaucoup parlé, beaucoup lu de rapports, beaucoup discuté dans le vide.
Des fonctionnaires de l'Etat exaltaient la toute puissante vertu de l'Etat-patron, industriel et commerçant; avec une fougue et une grandiloquence dignes d'un meilleur sort, des parlementaires faisaient à leur tour le procès de l'Etat, pendant, qu'amènes et souriants, des ecclésiastiques paraissaient optimistes en répétant la seule phrase de circonstance : «  Aide-toi, le ciel t'aidera ! »
Il a semblé à tous que les paroles les plus justes et les plus exactes avaient été prononcées par M. Gustave Simon, au nom du Syndicat des Entrepreneurs de la région lorraine.
M: Gustave Simon ne se perd pas en considérations ni en vagues hypothèses ; il sait ce qu'il veut et il le veut bien... et. il a prouvé une fois de plus qu'il était un véritable homme d'action, ne se payant ni de mots, ni de promesses ministérielles.
M. Simon a déblayé tout d'abord le terrain des obligations sexennales, en montrant que l'organisme spécial créé par le Syndicat des Entrepreneurs, pour valoriser immédiatement ces millions d'obligations sexennales, avait -vite et bien - mené son oeuvre à bonne fin.
Il faut de l'argent aux entrepreneurs pour acheter les matériaux et payer la main d'oeuvre ; il convient donc que les obligations sexennales soient immédiatement converties en billets de monnaie courante, si l'on veut, que la campagne de 1922 soit efficace et productive.
On vient nous dire que l'Etat a mis cette année 237 millions d'obligations sexennales entre les mains des sinistrés pour payer l'entreprise.
C'est quelque chose assurément... mais ce n'est pas assez, et ce n'est pas cela, avec toutes les chinoiseries administratives qui compliquent, les travaux des entrepreneurs, les plans des architectes et. viennent assommer littéralement les pauvres sinistrés qui n'y comprennent plus goutte.
Il fallait, entendre les doléances si justifiées de ces représentants autorisés des coopératives de reconstruction. Beaucoup sont découragés et veulent donner leur démission.
On leur cite des cas exceptionnels de rapide reconstruction : Vitrimont (l'or américain), Sainte-Geneviève, Ancerviller, etc.
Sans doute... mais les hommes énergiques et habiles qui siègent au bureau des Coopératives, se sont d'abord remués pour leur petite patrie et. ont obtenu largement les fonds nécessaires à ces importantes reconstitutions. Qui pourrait les en blâmer?
D'aucuns maugréaient à. l'assemblée et disaient : «  Honneurs et. Profits ! » C'est aller un peu loin.
L'humanité est toujours la même, et ces Messieurs coopérateurs ont voulu mélanger l'intérêt particulier à l'intérêt général.
Mais la grosse question- qui sera résolue comment ?- question jugée très grave par M. Gustave Simon, est celle des matériaux. On a vu ce qu'en a dit. M, Jacquemin. C'est très élastique et surtout cela est bien compliqué.
On avait cru, sur la foi des accords Loucheur-Rathenau à Wiesbaden, que l'Allemagne allait nous fournir gratuitement, et à titre de paiement en nature de ses 132 milliards de dettes, tous les matériaux dont la-France avait besoin pour sa reconstitution industrielle, immobilière ou agricole.
Si l'on a bien compris les discussions de l'Assemblée,... nos entrepreneurs devront acheter ces matériaux en Allemagne... à un prix moindre qu'en France, c'est entendu... et alors, ce sera la fermeture forcée de nos usines.
M. Simon l'a affirmé avec vigueur.
Il y a en France des stocks innombrables de marchandises achetées par l'Etat - sans parler des- stocks américains, gaspillés comme on sait - et ces stocks vont être vendus par l'Etat à des prix inférieurs... comme toujours.
L'Allemagne payera... ne cesse-t-on de nous dire, dans les discours ministériels, préfectoraux, parlementaires, etc. Payer quoi et comment, puisqu'elle parle de faire faillite à sa créance ?
Non, l'Allemagne ne payera pas... ou si peu.
On l'a bien vu jusqu'à présent... et nous sommes même contraints d'inscrire au budget de la guerre (6 milliards !) une forte somme pour l'entretien des troupes d'occupation en Rhénanie et en Cilicie.
En attendant.que, dans dix ou quinze ans- peut-être - les alouettes tombent toutes rôties du ciel boche, sous formes d'indemnités, de pensions, de dommages de guerre, débrouillons-nous comme nous pourrons, et travaillons de notre mieux à toutes les oeuvres de reconstitution de nos régions dévastées.
Que tel ou tel département se recueille et attende la manne gouvernementale, c'est son affaire ! Nous autres, ici, allons de l'avant et oeuvrons sans relâche, imitant l'initiative hardie et féconde de l'oeuvre des églises dévastées, demain celle des écoles et des mairies; remuons-nous, trouvons de l'argent par emprunts, par prêts, par pression constante sur le Gouvernement.
Mais avant tout agissons, vite et bien.
Les entrepreneurs lorrains ont montré les premiers l'exemple et ont ainsi prouvé ce que peuvent l'audace; la ténacité, le labeur sans trêve ni relâche.
Ils sont loin d'être au bout de leurs moyens d'action... la réussite de la valorisation immédiate des obligations sexennales en est une magnifique preuve.
C'est à eux, à leurs architectes connus, à tous nos gens de métier et de bâtiment, que les sinistrés doivent avoir recours, sans passer - ou le moins possible - par toutes ces complications administratives qui entravent le travail par des circulaires se contredisant toutes les semaines.
Le mot de la fin, le voici... cueilli à la sortie :
«  Je voudrais, disait un gros sinistré de la région de la Seille, que le Ministère des Régions Libérées soit au diable, avec tous ses fonctionnaires, qui drainent pour leurs énormes traitements le plus gros des ressources de la reconstruction !»
Beaucoup de sinistrés et d'entrepreneurs lorrains seront évidemment de cet avis.
ÉMILE BADEL.

Les voeux suivants ont été adoptés par l'Assemblée des Coopératives de reconstruction :
«  Considérant que l'expérience a démontré que l'Etat ne peut être ni constructeur, ni fabricant, ni acheteur, ni même détenteur de stocks, l'assemblée émet les voeux suivants : a) Que les magasins de l'Etat ne se réapprovisionnent plus en quoi que ce soit ; b) Que les stocks existants soient liquidés, au plus tôt, notamment par des cessions aux coopératives de reconstruction, aux sinistrés, et même à tous les acheteurs indifféremment ; c) Que pour les matériaux de construction, les entrepreneurs achètent directement chez les fournisseurs de l'Etat les matériaux ouvrés.
Considérant que, en Allemagne, les usines, les manufactures et les forêts sont intactes, l'assemblée émet le voeu que, grâce à une souple réglementation des bons de cession, les entrepreneurs des coopératives et leurs fournisseurs, groupés eu syndicat ou non, commandent directement en Allemagne les matériaux non ouvrés, et même parfois ouvrés, nécessaires à une prompte reconstruction des bâtiments détruits par la guerre. »
«  Que pour les matériaux demandés par les coopératives avant le 15 décembre, le prix de facture soit celui en vigueur à la date où les matériaux seront effectivement expédiés par les fournisseurs du ministère dés R.L., conformément aux demandes des acheteurs ; les dates d'expédition devant, en tous cas, être fixées dans les trois mois à compter du jour de la remise de la commande au ministère. »

Rendant compte de cette importante assemblée de nos sinistrés de Meurthe-et-Moselle, le Bulletin de la Banque Renauld apprécie ainsi l'effort lorrain :
«  Présidée par M. le chanoine Thouvenin, cette réunion aurait pu donner à un observateur étranger l'aspect le plus complet, du tempérament lorrain.
Fierté légitime des résultats obtenus, désir énergique de poursuivre la tâche jusqu'au bout : voilà ce qui se dégage du beau rapport de M. l'abbé Fiel
Recherche de l'effort utile, élimination des mouches de coche, coordination de toutes les bonnes volontés, officielles ou bénévoles, et surtout un profond bon sens : voilà ce que reflète la discussion, parfois serrée, toujours sérieuse et féconde en utiles suggestions.
Dans le beau pays de France, il n'est pas de plus beau pays que le beau pays meurtri de Lorraine. »
Nous souscrivons entièrement à ces conclusions de notre grand confrère financier, qui aurait pu ajouter-toutefois «  que les Lorrains (et non les étrangers), sont plus qualifiés que quiconque pour reconstituer leur beau pays de Lorraine, dans tous les ordres de reconstitution. »
On l'oublie trop en haut lieu.

Toujours concernant cette si importante question de la reconstruction, voici deux notes officielles très intéressantes :
«  Le groupe des maires des communes dévastées a tenu son assemblée générale à Paris. Il a été décidé de créer un Syndicat de Communes selon la loi de 1834, pour émettre un emprunt important, dont la première tranche serait réservée à la reconstruction des bâtiments scolaires et hospitaliers.
M. Loucheur, recevant les délégués des Maires, a approuvé leur initiative et leur a demandé de lui fournir dans la quinzaine des indications précises. Il espère pouvoir mettre à leur disposition les crédits nécessaires. Parlant du délai de reconstruction, il a déclaré qu'il entendait que tout fût fini dans 6 ans, mais qu'on ne pouvait raisonnablement espérer, l'abréger. »
«  M, Loucheur,. ministre des Régions libérées, vient de déposer un projet de loi tendant à faciliter l'application des dispositions sur le paiement par annuités des indemnités de dommages de guerre.
Aux termes de ce projet, tout sinistré ou groupement de sinistrés dont le montant de l'indemnité a été fixé, peut obtenir le paiement par annuités (15 à 30) si la somme fixée est au moins de 200.000 fr.
Le projet dispense de l'autorisation du tribunal civil pour la délégation des titres définitifs aux groupements constitués pour lancer des emprunts gagés sur les annuités. »
Malheureusement, il faut bien l'avouer, beaucoup d'entrepreneurs, beaucoup de sinistrés, n'ont plus guère confiance dans les paroles dorées et les promesses trop faciles du ministre Loucheur. Des actes vaudraient beaucoup mieux !


L'Immeuble et la construction dans l'Est
15 janvier 1922

La Coopérative des églises. - La Commission diocésaine des Monuments religieux, s'est réunie le 22 décembre, au siège social de la Coopérative.
Elle a accepté définitivement les projets de reconstruction des églises de Bures, Magnières et Réchicourt-la-Petite, que M. l'abbé Munier va présenter à l'approbation du Comité départemental des Bâtiments civils.
Elle a examiné des avants-projets pour les églises de Chambley (2e examen), Chazelles (2e examen), Parroy, Parux, Thiaucourt, et Vaucourt. Diverses observations ont été formulées, qui seront transmises aux architectes.
Depuis le 1er janvier, M. l'abbé Munier reçoit au siège social de la Coopérative (6, rue Léopold-Lallement), le vendredi, de 10 heures à midi, MM. les architectes qui auraient des communications à lui faire au sujet des projets d'églises.
C'est également au siège social de la Coopérative que doivent être adressés les projets et toutes les pièces administratives.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
29 janvier 1922

Pour les Églises dévastées
L'assemblée générale de la Coopérative de reconstruction des églises dévastées du diocèse de Nancy et de Toul s'est ténue la semaine dernière dans une des galeries Poirel, sous la présidence de Mgr de la Celle, assisté du sénateur Michel, du chanoine Thouvenin. le deus ex machina et d'un secrétaire-général de la préfecture.
55 communes sur 73 inscrites à la Coopérative étaient représentées. Dans l'assistance, nous avons remarqué de nombreux architectes et entrepreneurs, qui n'attendent que le moment voulu pour commencer les travaux, malgré toutes les entraves et chinoiseries administratives.
Le chanoine Thouvenin a signalé toutes ces formalités, qui feraient reculer les plus intrépides constructeurs, s'il n'y avait pas l'urgente nécessité.
Comme si le moindre clerc ne savait pas tout ce qu'il faut pour construire une église convenable et pratique ! Mais non! Il faut commissions sur commissions, civiles, religieuses, cantonales, préfectorales, etc., etc. C'est la misère pour nos braves architectes et pour nos entrepreneurs, énervés par toutes ces chinoiseries.
M. l'abbé Fiel, secrétaire de la Coopérative, a-fait l'historique de l'année écoulée et de l'emprunt de 15 millions (en plus de 280.000 francs de dons et un prochain héritage) couvert en six semaines. Un autre emprunt doit avoir lieu cette année pour les écoles et mairies détruites en notre département.
On assure que les travaux vont être entrepris pour les églises de Gerbéviller. Clémery, Ancerviller et Halloville.
Un emprunt collectif est lancé actuellement à Paris pour les églises des autres diocèses dévastés. M. le chanoine Thouvenin a donné lecture de l'état financier de l'oeuvre et M. le sénateur Michel â assuré la Coopérative de toute la sympathie de nos parlementaires.
M. Didelon a affirmé qu'il y avait au moins pour 5 millions de dégâts aux seuls bâtiments départementaux, en dehors dés églises.
Le chanoine Thouvenin espère que les accords de Wiesbaden joueront cette année et que l'on pourra obtenir pour 4 ou 5 millions de produits en nature allemands.
Sera-ce gratuitement ? Il y a lieu de l'espérer sans trop y croire. Qu'on se rappelle la récente assemblée des sinistrés de Meurthe-et-Moselle. Il faut agir... mais avec des garanties sérieuses et efficaces !


L'Immeuble et la construction dans l'Est
12 mars 1922

L'Exposition des Régions Dévastées

Ce fut pour beaucoup de visiteurs une véritable révélation au cours de cette première semaine. On n'aurait jamais cru à tant de dégâts tout d'abord, à tant d'efforts sérieux ensuite pour la reconstitution de nos villages. Seulement - de l'aveu de bien des gens - il aurait fallu, pour qu'une telle exposition fût complète, que l'on s'adressât à toutes les compétences, à tous les architectes et artistes lorrains, à tous nos industriels, à nos sculpteurs, à nos peintres-verriers, à nos écrivains et auteurs... au lieu d'appeler tant d'étrangers à la rescousse.
On voit bien, des maquettes de statues, de monuments, de villes, d'églises, de vitraux... mais de qui sont ces maquettes et ces dessins ? Où sont les oeuvres des Janin, des Benoît, des Robert, des Huel, des Finot, des Burlin, etc.? Qui donc a-t-on convoqué - des gens de chez nous - à cette importante manifestation de la reconstitution? Ces réserves faites (elles nous ont été soumises par nombre d'artistes et de praticiens qui, sans doute ne sont pas persona grata dans les fameux bureaux de la Préfecture et des Régions libérées), il convient de dire que l'Exposition de la Salle Poirel qui a rempli entièrement les trois galeries et qui fermera ses portes le 20 mars est une leçon de choses bien intéressante.
Il faudrait presque un volume pour raconter cette Exposition par le détail. Plusieurs numéros de l'lmmeuble n'y suffiraient pas, et nous devons nous borner et résumer en quelques lignes cet ensemble artistique, architectural, documentaire.
Les murs des galeries sont tapissés de plans, de tableaux, de cartes, de pièces de recensement, etc. On a pu se rendre compte ainsi des désastres causés et des travaux déjà accomplis depuis trois ans, malgré les entraves des commissions cantonales, des services administratifs, contre lesquels ne cessent de protester architectes et entrepreneurs... et surtout ministres.
Ou a vu comment le maire de Pont-à-Mousson a reçu l'autre jour M. Charles Reibel,l'actuel ministre des Régions libérées, lui demandant s'il y avait aujourd'hui deux catégories de Français, s'il y avait des sinistrés de droite et des sinistrés de gauche, et lui rappelant que certaines commissions cantonales- cette invention plus que stupide - traitaient les sinistrés en véritables accusés. Que n'a-t-il pas dit également contre le malheureux sort réservé aux isolés, c'est-à-dire aux milliers et milliers de sinistrés qui ne veulent pas passer par les fourches caudines des Coopératives ?
De ces Coopératives de reconstruction, les uns en disent beaucoup de bien, en font la panacée universelle et comme le pivot de l'avenir de la bâtisse. Soit, et nous ne contredirons pas les personnes très autorisées qui ont bien voulu nous montrer les avantages de ces Coopératives. Mais qui n'entend qu'une cloche n'entend qu'un son... et beaucoup d'isolés de Meurthe-et-Moselle - et non des moindres - sont venus nous déclarer que les Coopératives étaient le fléau et le poison des sinistrés.
Nous ne savons plus auquel entendre.
Il est certain qu'il y a du vrai dans la défense et dans la critique. Ne connaissant pas M. le préfet de Meurthe-et-Moselle, ne l'ayant jamais vu ni rencontré nulle part, nous n'avons pu connaître son opinion à ce sujet ni celle de notre jeune ministre qui, cependant, à la Chambre, a paru, défendre les droits des isolés, tous si intéressants et si sincères en leur fière indépendance.
Pour en revenir à notre Exposition des Galeries Poirel, nous y avons vu surtout l'effort des architectes se traduisant par des plans de villages, d'écoles, d'églises, de mairies. Il y a même un très beau plan en relief du futur Longwy-Haut, dû à M. Le Bourgeois, qui est un petit chef d'oeuvre.
J'avoue que les tableaux si instructifs de la première galerie ont longuement retenu mon attention. Tout serait, à publier, tout serait matière à de nombreux enseignements. C'est l'histoire de toute la reconstitution de notre département ravagé ; c'est la balance de ce qui existait en 1918 et de ce qui est en 1922. Tâche énorme.et qui fut l'oeuvre des maires, des curés, des architectes et des entrepreneurs de chez nous.
On doit s'incliner bien bas devant de pareils résultats et, malgré tant de justes critiques adressées par les sinistrés aux bureaux de la Préfecture, il convient, d'admirer ce travail de synthèse, accompli par les services d'architecture de cette même préfecture.
A la Galerie centrale de l'Exposition, on se croyait revenu aux beaux jours des Salons de peinture. Il y avait là tant de panneaux artistiques de nos architectes.
On a beaucoup admiré les projets d'églises de Jules Criqui, passé maître en la matière, la reconstitution de Longwy, certains cartons de vitraux, à côté d'autres, plutôt fantaisistes.
Nous avons remarqué également des oeuvres fort intéressantes des architectes Hornet,Cordier et Simonin, de Lunéville, Moitrier, J. Pilain, Deville,- Durieux, André, Marchal,. Mienville, Boileau, Rougieux, Thiébaut Berg, Schreiner, Vally, Fernand César, de Nancy, Varin, de Longuyon, Villemont, de Domèvre-sur-Vezouse, et des entreprises Giovannini Vercelli, Gayet et Fauvet, France-Lanord, etc.
Toutes ces oeuvres témoignent d'une grande maîtrise et d'efforts, considérables.
La troisième Galerie était une véritable exposition industrielle : meubles élégants de Majorelle, vases de Daum, de Gallé, grès de Mougin, faïences de Longwy et de Badonviller, cristaux de Nancy, etc.
Nos industries du fer avaient également envoyé de beaux-spécimens de leurs produits : Pompey, Perbal de Dombasle, Dieulouard, Joeuf, même du chocolat, même des cornets et bibelots de Mazerand, de Cirey, etc.
En somme cette belle exposition à montré ce qu'était notre département il y a.dix ans, ce qu'il est aujourd'hui et ce qu'il aspire à redevenir bientôt, sous l'impulsion puissante de nos architectes, de nos artistes, de tout le monde de l'entreprise et du bâtiment, sans oublier les admirables conseils municipaux de ces pauvres régions dévastées.
Je m'en voudrais d'oublier aussi les grands panneaux des églises dévastées du diocèse de Nancy, qui appartiennent à l'Evêché et qui ont été prêtés gracieusement à cette Exposition officielle.
A signaler également la très jolie et très confortable «  baraque » à quatre pièces, installée dans la galerie centrale... et qui, modèle du genre, ne manque naturellement de rien.
Des architectes nancéiens disaient, en la détaillant : «  Bien des ménages à Nancy seraient heureux d'en avoir une pareille !»
Je suis entièrement de leur avis, car l'ensemble en est porté à sa perfection... et, ma foi, l'on ne peut que souhaiter le sort de tous nos sinistrés... si, réellement, on les a dotés partout d'une pareille demeure provisoire.
Ce serait bien le cas pour eux de retourner alors la phrase célèbre : «  Nous n'avons pas à chercher une demeure future, car nous avons une habitation convenable et qui satisfait tous nos désirs et nos ambitions ».
Espérons que M. le ministre Reibel tirera des conclusions pratiques en visitant par le menu cette exposition nancéienne et lorraine. Ce sera la meilleure récompense de tous ceux qui ont coopéré à cette oeuvre si intéressante et si vraiment utile.
EMILE BADEL.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
12 mars 1922

Liste des Coopératives de Reconstruction approuvées dans le département de Meurthe-et-Moselle

Chaque coopérative a généralement son siège social à la mairie ; dans le cas contraire, où pour celles groupant plusieurs commues, nous indiquons le siège social en italique.
Abaucourt, Alamont, Amance, Amenoncourt, Ancerviller, Angomont, Ansauville, Anthelupt-Hudiviller-Deuxville-Flainval (mairie d'Anthelupt), Armaucourt, Arnaville, Arracourt, Arraye, Athienville, Audun-le-Roman, Autrepierre.
Baccarat, Badonviller, Barbas, Bathelémont-les-Bauzemont, Bayonville-Vandelainville (mairie de Bayonville), Ban-de-Bazailles (mairie de Bazailles), Beaumont, Bernecourt, Bey-sur-Seille, Bezange-la-Grande, Bionville, Blémerey, Bonviller, Bonvillers-Mont (mairie de Bonvillers), Bouillonville, Bouxières-aux-Chênes, Bouxières-Lesménils (presbytère de Bouxières-s.-Froidemont), Bréménil, Brin, Bruville, Bures.
Chambley, Champenoux, Champy-Vittonville (mairie de Champey), Charey-Dommartin (mairie de Charey), Chazelles, Chenicourt, Chenières, Cirey, Clémery, Coincourt, Courbesseaux, Crevic, Cutry.
Dampvitoux, Deneuvre, Dieulouard, Domêvre-sur-Vezouse, Domjevin, Domprix-Avillers (mairie de Domprix), Doncourt-Beuveille (école de Doncourt), Doncourt-les-Conflans, Drouville.
Ecoles et mairies du département (préfecture de M.-et-M. Nancy), Eglises du diocèse (26, rue Léopold-Lallement, Nancy), Emberménil, Eply, Essey-et-Maizerais, Eulmont, Euvezin.
Fenneviller, Fey-en-Haye, Fillières, Flirey, Fraimbois, Fresnoye-la-Montagne.
Gerbéviller-Haudonville (mairie de Gerbéviller), Glonville, Gondrecourt-Aix-Affleville-Bechamps (mairie de Gondrecourt-Aix), Gondrexon, Grand-Failly, Grosrouvres.
Hagéville-Champs, Halloville, Hamonville, Han-sur-Seille (mairie de Arraye-et-Han), Hannonville-au-Passage, Haraucourt, Harbouey, Hénaménil, Herbéviller-St-Martin, Hériménil, Hoéville, Hussigny-Godbrange.
Igney.
Jarny, Jeandelincourt, Jeandelize, Jezainville.
Laître-sous-Amance, Landres, Laneuvelotte, Laneuveville-aux-Bois, Lanfroicourt, Leintrey, Létricourt, Leyr, Limey, Lironville, Lixières (n° 4, à Lixières, chez M. Lombard), Longwy.
Maidières-Montauville, (presbytère de Maidières), Mailly-Phlin, (mairie de Mailly), Maixe, Malavillers, Mamey, Mandres-aux-Quatre-Tours, Manoncourt-sur-Seille. Mars-la-Tour, Mazerulles, Migneville, Moivrons, Moncel-sur-Seille, Montigny, Montigny-sur-Ghiers, Montreux, Mont-Saint Martin-Longlaville, (Mont-Saint-Martin, chez M. Thomas), Mont-sur-Meurthe, Motfontaine-et-Laix (mairie de Morfontaine), Morville-sur-Seille, Mouacourt Mouaville, Murville.
Neuviller-les-Badonviller, Noers, (mairie de Longuyon), Nomeny, Nonhigny, Norroy-les-Pont-à-Mousson.
Ogéviller - Reclonville- Fréménil (mairie d'Ogéviller), Olley, Onville, Ozerailles.
Pagny-sur-Moselle, Pagny-sur-Mosëllë «  La Pagnotine », (mairie de Pagny-sur-Moselle), Panne, Parroy, Parux, Petit-Failly, Petitmont, Pierre-Percée;Pont-à-Mousson «  Fonderies», (bureau du président aux Fonderies), Pont-à-Mousson «  Saint-Jean » et Pont-à-Mousson «  Saint-Laurent» (mairie de Pont-à-Mousson), Pont-à-Mousson, «  Saint-Martin », (34, rue Gambetta, Pont-à-Mousson), Port-sur-Seille, Preny, Puxieux.
Raucourt, Rechicourt-Juvrecourt, (mairie de Rechicourt-la-petite), Rehainviller, Rembercourt-Jaulny (mairie de Rembercourt), Remenoville, Rémérèville, (ancienne, école de Réméréville), Remoncourt, Repaix, Rogéville, Romain, Rouves, Rozelieures.
Saint-Ail, Saint-Baussant, Sainte-Geneviève, Saint-Julien-les-Gorze, Saint-Marcel, Saint-Maurice; Saint-Pancre-Gorcy, Saint-Pôle, Saint-Supplet, Sancy, Saulnes, Seicheprey, Serres, Sornéville, Sponville.
Thézey-Saint-Martin, Thiaucourt, Thumeréville, Tronville.
Union des Coopératives, (6, rue Léopold-Lallement, Nancy).
Val-et-Châtillon-Saint-Sauveur, (Mairie de Val-et-Châtillon), Valhey, Vallois-Magnières, (mairie de Vallois), Vandières, Vaucourt, Vého-Reillon, (mairie de Vého), Verdenal, Viéville-Vilcey, (mairie de Viéville), Villers-la-Montagne, Villers-les-Moivron; Villers-sous-Preny, Ville-sur-Yron.
Waville-Villecey, (mairie de Waville).
Xammes, Xonville, Xousse.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
19 mars 1922

La 2e aux Architectes

Il nous faut revenir sur cette Exposition si intéressante de la Reconstitution dans nos Régions dévastées, car elle comporte de nombreuses leçons de choses, à Nancy et ailleurs. Il y a d'abord-un hommage à rendre à nos architectes lorrains - que nous avons cités - et parmi lesquels tous les visiteurs ont distingué les oeuvres si prenantes et si vivantes de MM. Charbonnier, Deville, Mienville, Lavocat, Le-Bourgeois et Rougieux.
C'est ensuite un regret à formuler, regret très amer de voir le peu d'empressement des Nancéiëns à visiter ces galeries Poirel, pourtant gratuites et publiques tous les jours.
On y rencontrait à peine une vingtaine de personnes au cours des longues après-midi, alors qu'on aurait dû en voir des centaines. Mais cette exposition était trop sérieuse pour la masse qui n'aime que les jeux, danses, sports et spectacles... tout, sauf ce qui est vraiment intéressant et digne d'élever les esprits et les coeurs.
N'insistons pas sur ce pénible sujet dans le détraquement universel où nous vivons et nous agitons... in ipso movemur et sumus !
Il convient mieux d'exalter la haute maîtrise de nos vaillants architectes nancéiëns et lorrains, qui ont entrepris avec tant de foi et d'ardeur la reconstruction dé nos pays en ruines, églises, écoles, mairies, maisons de fermé ou d'habitation, etc.
Il faut donc s'arrêter longuement devant les plans de reconstitution de Igney, Amenoncourt, Autrepierre, etc., si bien présentés par M. Lavocat.
J'ai déjà signalé et j'y reviens aujourd'hui avec plaisir... les deux plans, magnifiques et complets, de la reconstitution de Longwy. Cette vieille forteresse lorraine, de l'extrême pointe de notre département de Meurthe-et-Moselle, a été anéantie par un ouragan de mitraille boche. Il faut la relever de ses ruines, pas la forteresse, mais la ville haute, et créer une cité moderne, une ville-type, là même où il y avait des remparts, de vieux -bastions, tout un appareil militaire des temps préhistoriques de Louis XIV et de Vauban.
C'est pourquoi il convient de féliciter les architectes qui vont créer un Longwy tout neuf au sommet de l'éperon jadis emmuré par Vauban.
M-. Le Bourgeois et M. Antoine ont exposé deux plans, un en relief qui situe fort bien l'ensemble de toute l'agglomération longovicienne, un autre à là sépia, avec toutes les indications nécessaires, l'emplacement des maisons, des monuments, des places publiques et des larges avenues plantées d'arbres.
Voici la Mairie, le Palais de Justice, l'église Saint-Dagobert II, roi d'Austrasie et fils de saint Sigisbert; voici le Théâtre fort élégant, le Collège, l'Hôpital, les Ecoles, même un Stade et un vaste terrain des Sports, en dehors de la ville - Messieurs les massacreurs de la Pépinière de Nancy.
L'ensemble de ce plan du futur Longwy séduit et charme le regard, et l'on n'a guère l'idée de supputer le nombre considérable de millions qu'il faudra pour arriver à mener à bien ces projets grandioses. Pourtant c'est bien à quoi il faudra songer avant même d'entreprendre une seule levée de terre et la construction du premier monument public.
On avait parlé des matériaux boches, des produits en nature boches et de la main d'oeuvre boche:., mais, d'une part, nos Lorrains et nos sinistrés n'en veulent point... et ils ont bien raison... et d'autre part, les fameux accords de Wiesbaden entre Loucheur et Rathenau ne jouent pas... et ne joueront guère, a dit M. Poincaré.
N'avons-nous pas assez de nos ouvriers français dans le bâtiment et dans tous les métiers de l'entreprise?
Au lieu de dire un peu naïvement à la Chambre qu'il manquait en France plus de 300.000 ouvriers du bâtiment, le bon Charles Reibel aurait mieux fait dé se renseigner auprès de nos divers Syndicats nancéiëns... et il aurait vu qu'il faisait fausse route. Il a «  tapé » tant qu'il a pu sur les bureaux de son ministère, mais il n'a supprimé aucun poste, n'a remercié aucun budgétivore.
Aussi, tenons-nous de source sûre qu'une - dirons-nous cabale ? non - certaine effervescence se produit chez les sinistrés dits «  isolés » contre le ministère des R.L. et que M. le ministre Reibel pourrait s'en apercevoir avant peu.
Pas de matériaux boches pour reconstruire, pas d'ouvriers boches non plus, puisque nos entrepreneurs, ont assez de main d'oeuvre française et italienne, assez de gens expérimentés et bons travailleurs qui veulent se donner tout entiers à la remise en état de nos régions dévastées.
Pour en revenir à notre exposition et à nos architectes, il y a lieu de signaler encore les intéressants projets de fermes et établissements agricoles, les redressements de villages lorrains (si faire se pourra!) les remembrements de cadastre, etc.
Il y a aussi beaucoup de projets d'églises neuves. On leur a fait le reproche de ne pas être assez dans le style lorrain, de trop sacrifier à l'élégance, aux fioritures. Ce reproche est assez fondé pour d'aucuns. Les architectes qui ont dressé, ces beaux plans d'églises d'humbles petits villages, ont-ils jamais su ce qu'était une église de village, en ont-ils étudié le symbolisme liturgique, en ont-ils jamais construit une seule ? J'en doute un peu, envoyant certains projets d'intérieur, certaines sacristies, plus vastes que la moitié de l'église, certains clochers d'une élégance raffinée et quelque peu grêle. Je sais bien qu'il faut faire du moderne, ne pas toujours créer, du néo-gothique à la Vautrin, ni du romano-byzantin qui ne cadre guère avec le ciel de notre pays, témoins les églises Saint-Nicolas et Saint-Mansuy de Nancy, très intéressantes en elles-mêmes, mais pas de chez nous.
Une église de village ne comporte pas tant de splendeurs architecturales. Il faut consulter les curés, les gens qui pratiquent les églises, sans retomber cependant dans ces pauvres églises-granges dont nos villages ont été infestés après la guerre de trente ans et pendant tout le 18e siècle.
M. Paul Charbonnier, qui est notre architecte départemental et des Monuments historiques et qui connaît tant de vieilles églises si intéressantes pourrait, à cet égard, donner à ses honorables confrères, bien, des renseignements et bien des conseils expérimentés.
Refaites nos églises, Messieurs les architectes, mais avec foi, avec art, avec amour et en vous inspirant surtout des traditions de chez nous.
EMILE BADEL.
P. S.- Ces lignes étaient écrites lorsque nous avons reçu une lettre de M. Deville, architecte en chef des Régions libérées nous disant, qu'à son grand regret, il n'avait pu obtenir le concours d'autres artistes lorrains que MM. Prouvé, Colle et Gorre.
Nous le regrettons autant que M. Deville,.. mais si l'on avait demandé directement à chaque peintre ou sculpteur lorrain sa précieuse collaboration- par l'intermédiaire de la Société des Artistes lorrains - tous l'auraient accordée de grand coeur.
Nous pouvons dire que telle ou telle maquette de Monument aux Morts de la Guerre: était prête pour la Salle Poirel... si on l'avait demandée. Nous en parlons certes assez souvent.
Quant à dire que le Ministère des Régions libérées, avec ses innombrables, coûteux et inutiles services facilite la reconstruction.:, des milliers de sinistrés lorrains se permettent d'en douter. J'arrive de Dieulouard où j'ai vu et touché du doigt, l'incurie, l'incohérence, la lenteur dans les travaux... où l'on dépense cent francs pour rectifier un chiffre de 0 fr. 80 sur une quittance des fameuses Coopératives, etc.,.etc. !
E.B.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
4 juin 1922

Les Coopératives des Églises dévastées

La Commission des Monuments religieux, dans une récente réunion, a étudié, en deuxième ou troisième examen, les projets des églises de Bouxières-aux-Chénes, Bouxières-sous-Froidmont, Brin, Chazelles, Mouacourt, Réméréville et Vaucourt, modifiés suivant ses indications, et les avants-projets du premiers projets des églises de Bérnécourt, Moncel-sur-Seille et Raucourt.
Dans la même séance, elle a examiné et approuvé le projet d'agrandissement de l'église d'Auboué, et étudié les monuments aux morts de la guerre projetés pour l'église Saint-Vincent-Saint-Fiacre de Nancy et pour l'église de Clémery.
Sur la convocation de M. l'abbé Thouvenin, président de la Coopérative, les Conseils municipaux de Bathelémont, Parroy, Mouacourt, Bezange, Vaucourt, Leintrey, Gondrexon et Vého, se sont réunis, pour examiner avec les Curés, M. Deville, architecte départemental, M. Hornet, architecte expert spécialisé près des commissions cantonales de l'arrondissement de Lunéville et M. l'abbé Fiel, secrétaire de la Coopérative, les projets de reconstruction des églises de ces communes (emplacement, plans, devis et, s'il y a lieu, participation financière de la commune).
Pour l'Emprunt départemental, la Coopérative a envoyé aux maires des communes dont les églises sont dévastées une circulaire, des formules d'engagement et des bulletins de renseignements. Copie de cette circulaire a été adressée aux curés.
Le Conseil a approuvé là demande provisoire du président qui a fait inscrire à la préfecture la Coopérative des églises pour 10 millions ; cette somme sera, même insuffisante si tous les maires adhèrent à la proposition ; il faudrait près de 15 millions pour achever les 63 églises de la première série environ 6 millions pour les 16 églises de la seconde série et 2 ou 8 millions pour celles qui pourraient encore venir à l'a Société. On ne compte pas les églises réparables.
Les frais de l'emprunt seront d'environ 7 0/0; les entrepreneurs et les architectes consentent une commission de 5 0/0 sous la condition du paiement dans le mois. Les 2 0/0 restants seront couverts partiellement par les offrandes, les dons, les legs, la subvention de l'Union et les autres bonis de la Coopérative.
Aussi, la Coopérative des Eglises a-t-elle demandé dix millions sur le produit de l'emprunt départemental, car cet emprunt est destiné à hâter la reconstruction de tous les bâtiments non industriels : maisons particulières, mairies, écoles ou églises.
D'ailleurs, les frais de l'emprunt qui seront à la charge des sinistrés seront très faibles, surtout pou les membres des Coopératives.
Aussi la participation au produit de l'emprunt départemental paraît avantageuse pour la reconstruction de toutes les églises, même de celles qui bénéficient de l'emprunt diocésain de 1921.
Puisque la Coopérative demande des fonds sur le produit de l'emprunt, elle fera une grande propagande en faveur de l'émission publique et, après entente avec l'administration, elle organisera, comme pour l'emprunt diocésain, des bureaux de souscription auxquels les catholiques sont invités de préférence à souscrire des obligations, dès que les formalités seront remplies.
Aux 79 églises déjà confiées à la Coopérative vient s'ajouter celle du Sacré-Coeur de Nancy dont la demande est agréée. Quelques autres adhérions sont encore possibles.
Les opérations d'emprunt en 1921 se solderont par un bénéfice. Mais on a à craindre parfois des insuffisances dans les indemnités fixées par les commissions cantonales ou des dépassements dans l'embellissement ou l'agrandissement des églises. Pour éviter tout déficit, la Coopérative a présenté, devant les tribunaux civils, cinq demandes d'achat d'indemnités de dommages de guerre : déjà trois autorisations ont été données; Volontiers la Coopérative
achèterait encore des indemnités, à condition que le remploi soit imposable ou du moins difficile pour les titulaires et que le prix de vente soit avantageux. La loi autorise même la Coopérative à recevoir, sans frais de timbre ou d'enregistrement, les indemnités à titre de dons ou de legs.
Dans une autre séance, MM. Deville, architecte départemental, Janniaud, architecte spécialisé près des commissions cantonales et l'abbé Fiel, secrétaire de la Coopérative des églises, ont été reçus par les Conseils municipaux de Port-sur-Seille, Clémery, Manoncourt-sur Seille, Raucourt, Abaucourt, Létricourt, Chenicourt, Arraye et Leyr, qui, d'accord avec les curés et les architectes, ont approuvé le projet de reconstruction des églises de ces communes.
La Commission des bâtiments civils s'est réunie à la préfecture et a approuvé les plans de reconstruction et les devis des églises de Blémerey, Parroy, Hénaménil, Mouacourt et Vaucourt.
Le montant de l'indemnité a été définitivement arrêté par la Commission cantonale de Lunéville-Nord pour les communes d'Arracourt, Bures, Serres et Rechicourt, et par la Commission cantonale de Blâmont pour les églises d'Emberménil, Xousse et Herbéviller. Pour ces sept communes, on attendra le projet de marché, pour commencer les travaux.
Une assemblée générale des adhérents de la Société coopérative de reconstruction des Eglises du Département de la Meuse à laquelle assistaient un grand nombre de délégués des communes sinistrées et des prêtres desservant les paroisses dont la plupart n'ont plus d'églises, a eu lieu ces jours derniers à Verdun.
M. Schleiter, Président de la Coopérative, a donné quelques détails sur les opérations de l'Emprunt de 200 millions qui fut couvert en cinq jours.
La Coopérative de la Meuse s'est vu allouer sur le montant de cet Emprunt la somme de 15 millions qui, tout en étant une faible partie des dommages causés aux églises, permettra néanmoins de remettre en état toutes celles qui sont debout et ne demandent que des réparations et aussi de commencer à construire quelques-unes de celles qui sont détruites.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
16 juillet 1922

Les Coopératives des Eglises

Plusieurs réunions ont eu lieu ces jours derniers où l'on a rappelé aux architectes les formalités préliminaires à là fixation de l'indemnité, par les Commissions cantonales :
1° Soumettre un avant-projet à la Commission diocésaine des monuments religieux;
2° Après approbation, le projet doit être soumis au Comité des Bâtiments civils avec un devis descriptif et estimatif;
3° Sur le rapport de ce Comité, signé par le Préfet, la Commission cantonale fixe l'indemnité nécessaire pour un édifice «  de même caractère, de même importance, de même destination, et offrant les mêmes garanties de durée » ;
4° Dès que la Commission cantonale a statué, l'architecte prépare un marché pour l'entrepreneur avec un escompte ou rabais minimum de 5 0/0 pour paiement au comptant. Ce marché est signe par le président de la Coopérative des Eglises.
La Coopérative, la Préfecture et les Commissions cantonales font toute diligence, dès qu'elles ont les dossiers ; par contre, elles ne peuvent que constater et déplorer le retard d'un certain-nombre d'architectes. Si les projets et devis, étaient fournis, toutes les indemnités devraient être fixées par les Commissions cantonales, pour le 15 juillet prochain.
Communes pour lesquelles l'indemnité de l'église est fixée, et où les travaux sont commencés ou vont commencer :
Ancerviller, Arracourt, Arraye, Bernécourt, Blémerey, Bures,.Cercueil, Chenicourt, Clémery, Domèvre-s.-Vezouse, Emberménil, Gerbéviller, Haîloville, Héhaménil, Herbéviller, Laix, Lesménils, Leyr, Manoncourt-sur-Seille, Mouacourt, Neuviller-les-Badonviller, Nonhigny, Parroy, Port-sur-Seille, Réchicourt-la-Petite, Sainte-Geneviève, Serres, Sornéville, Thiaucourt, Vaucourt, Veho, Xousse.
Communes dont l'église doit passer à la Commission cantonale sous huitaine :
Abaucourt, Armaucourt, Brin, Chazelles, Harbouey, Montreux, Réméréville.
Communes dont le projet d'église a été soumis à la Commission diocésaine :
Angomont, Audun-le-Roman, Bathelémont, Bouxières-aux-Chênes, Bouxières-sous-Froidmont, Chambley, Fey-en-Haye, Gondrccourt-Aix, LétricouiL'Magnières, Moncel-
sur-Seille, Morville-sur-Seille, Parux, Raucourt
Dès que les architectes de ces dernières églises auront conformé leurs projets aux observations de la Commission diocésaine, ils devront les adresser, accompagnés d'un devis, à celui des trois experts spécialisés.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
30 juillet 1922

Les Travaux des Églises dévastées

La Commission diocésaine des Monuments religieux a examiné les projets des églises de Bey, Bezange-la-Grande, Cutry, Eply, Gondrexon, Haraucourt, Jeandelize, Lanfroicourt et Reillon.
La Commission chargée d'étudier, avec les municipalités et les Curés, les préliminaires de la fixation de l'indemnité pour les églises (emplacement, projet, devis, etc...) vient de terminer sa mission. Les Conseils municipaux de Pannes et de Hussigny et les Curés de ces paroisses ont délibéré avec MM. Deville, architecte en chef de la Reconstitution, l'abbé Fiel, secrétaire de la Coopérative des Eglises, Janiaud et Sirven, experts spécialisés, sur des questions particulières dont la solution est en bonne voie.
Dans ses deux dernières réunions, la Commission départementale des Bâtiments civils a examiné et accepté les projets des églises d'Angomont, Audun-le-Rôman, Bathelémont,Bôuxières-aux-Chênes,Bouxières-sous-Froidmont, Cutry, Gondrecourt-Aix, Gondrexon, Létricourt, Morfontaine, Reillon. Ces dossiers ont été envoyés aux Commissions cantonales qui fixeront l'indemnité définitive.
Cette dernière liste porte à 60 le nombre des églises pour lesquelles toutes les formalités sont terminées, et où les travaux peuvent et doivent être commencés. C'est le fait des architectes qu'il n'en soit pas ainsi pour toutes les églises, et c'est le voeu de tous, comme l'a rappelé le ministre Reibel.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
29 octobre 1922

La Commission départementale des Bâtiments civils a admis les projets de reconstruction des églises de Champenoux, Charey, Dampvitoux, Hamonville, Leintrey, Létricourt, Lironville, Pannes, Parux, Phlin, Prény, Rouves et Saint-Julien-les-Gorze.
Elle a ajourné l'examen du projet de l'église de Limey.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
5 novembre 1922

La Mitoyenneté dans les Régions dévastées

Avant la guerre, les procès de mitoyenneté soulevaient rarement des discussions de principes : tout avait été plaidé; les décisions étaient nombreuses et il suffisait d'ouvrir un recueil de jurisprudence pour y trouver la solution des contestations que peut faire naître l'existence d'un mur séparant deux voisins.
Mais la hausse des prix, les dévastations ont tout bouleversé. Les lecteurs de ce journal se souviennent du problème qui se posa à propos du rachat de la mitoyenneté : l'acheteur devait-il rembourser la valeur actuelle du mur ou le coût de construction ? La Cour d'appel de Paris vient de clore la discussion. Le ministre des Régions libérées, dans une réponse adressée à un parlementaire, fait allusion à certaines difficultés que la réparation des dommages de guerre peut faire naître entre copropriétaires d'un mur mitoyen : allusion discrète et peu compromettante qui n'est que le conseil aux deux copropriétaires de se mettre d'accord et, à défaut d'entente, de s'en rapporter aux tribunaux... qui résoudront conformément au Code civil le problème suivant :
«  Lorsqu'un mur mitoyen a été détruit par les faits de la guerre et que chacun des propriétaires a reçu une indemnité égale à la moitié de la valeur de ce mur, le sinistré qui veut reconstituer le mur peut-il contraindre l'autre attributaire à coopérer à la reconstruction, lorsque ce dernier
veut remployer dans un autre lieu ? »
Ici deux articles du Code semblent s'opposer : l'article 655, qui porte que «  la réparation et la reconstruction du mur mitoyen sont à la charge de tous ceux qui y ont droit et proportionnellement au droit de chacun », et l'article 656, qui ajoute : «  Cependant tout copropriétaire d'un mur mitoyen peut se dispenser de contribuer aux réparations et reconstructions, en abandonnant le droit de mitoyenneté, pourvu que le mur mitoyen ne soutienne pas un bâtiment qui lui appartienne. »
Voici un sinistré qui est copropriétaire avant la guerre d'un mur mitoyen et qui veut remployer dans un autre lieu. Ne pourra-t-il pas alléguer que la liberté de remploi est absolue et qu'elle ne doit pas subir d'autres restrictions que celles qui résultent de la loi sur les dommages de guerre ?
Cette solution paraît contraire à la notion juridique de l'indemnité de dommages de guerre.
Lorsqu'un individu abandonne son droit de mitoyenneté sur un mur existant, il cesse d'être copropriétaire du mur. Or, d'après les principes certains de la loi du 17 avril 1919, l'indemnité touchée par le sinistré qui veut remployer, remplace en quelque sorte la moitié du mur dont il était propriétaire avant la guerre : on-dit qu'en cas de remploi, il y a subrogation de l'indemnité allouée à l'objet remployé.
Et de même qu'avant la guerre un copropriétaire n'aurait pu renoncer à la mitoyenneté sans abandonner la propriété de la moitié du mur, il ne pourra le faire en notre cas sans renoncer à l'indemnité ; sinon, tout se passerait juridiquement comme s'il emportait sa moitié de mur.
Un sinistré qui reçoit l'indemnité afférente à sa part de mitoyenneté devrait donc l'affecter à la reconstruction du mur mitoyen, si le propriétaire voisin qui veut reconstruire un mur identique au mur détruit veut le contraindre à coopérer à la reconstruction de ce mur.
Cette solution paraît conforme au droit et à l'équité : il est juste que si l'un des sinistrés, quoique ayant touché les frais supplémentaires correspondant à sa part de mur, décide de s'éloigner, il coopère à la reconstruction du mur et n'en laisse pas toute la charge à son voisin.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
12 novembre 1922

[...] M. Deville, architecte des Régions libérées, n'est pas de chez nous, mais de Nantes en Bretagne, et cela se voit tout de suite à ses reconstitutions d'églises pour Halloville et Ancerviller, églises qui seront bien dépaysées en Lorraine, tout comme son phare destiné à un Monument aux Morts pour Baccarat.[...]


L'Immeuble et la construction dans l'Est
11 février 1923

Dans le même ordre d'idées, et pour son dévouement aux oeuvres de reconstruction, M. l'abbé Paul Fiel, aumônier de l'Ecole Professionnelle de l'Est, secrétaire-général des Coopératives de reconstruction a été, en moins d'un an, nommé : chevalier du Mérite agricole, Officier d'Académie et chevalier de la Légion d'honneur. Honneurs rapides mais combien justifiés, en attendant le canonicat que lui a annoncé publiquement le sénateur Michel le jour de l'inauguration du village d'Ancerviller, reconstitué par sa ténacité. Il n'est, en effet, que de vouloir, pour arriver.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
15 avril 1923

On vient de poser la première pierre de l'église de Harbouey, près de Blâmont. Cette église, brûlée en 1914, sera reconstruite sur les plans,de M. Joseph Lhôte et l'entreprise est confiée aux soins de la maison Pagny, Colin et Bouf, qui a promis d'aller très vite.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
6 mai 1923

Les Eglises en reconstruction

A l'heure où va être lancé un nouvel et dernier emprunt pour la reconstitution des églises, il est intéressant de voir où en sont, en mai 1923, les travaux déjà effectués par la Coopérative des Eglises dans l'arrondissement de Lunéville.
Sont commencés et plus ou moins avancés les travaux dans les églises de Serres, Arracourt, Bezange-la-Grande, Réchicourt, Parroy, Hénaménil, Bathelémont, Vaucourt, Blémerey, Veho, Reillon, Gondrexon, Chazelles, Nonhigny, Angomont, Harbouey.
Sont presque terminés les travaux de maçonnerie, et même de couverture, dans les églises de Bures, Mouacourt, Emberménil, Xousse, Ancerviller, Herbéviller, Halloville, Neuviller, Gerbéviller.
Sont terminées et livrées au culte les églises de Domèvre et Magnières.
Les travaux ne- sont encore pas commencés dans les églises de Leintrey, Parux, Badonviller.
Nous ne parlons pas des églises qui furent restaurées, comme Petimont, par les coopératives locales, sans l'intervention de la Coopérative des Eglises.
C'est là, on le voit, un formidable travail accompli. L'an prochain, les édifices religieux seront à peu près entièrement terminés partout en Meurthe-et-Moselle.
Il est bien probable que les églises dévastées de nos villages seront plutôt rétablies que celles de Nancy, Saint-Nicolas, Varangéville, Dieulouard, Pont-à-Mousson, qui ont surtout souffert dans leurs belles verrières, entièrement détruites par les bombardements allemands.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
20 mai 1923

La Reconstitution en Meurthe-et-Moselle au 31 Mars 1923

COMMISSIONS CANTONALES

Six commissions cantonales seulement restent en exercice : celle de Nancy-Nord, qui est devenue commission départementale de liquidation et à laquelle seront renvoyées toutes les affaires non résolues par les commissions dissoutes ; celles de Domèvre-en-Haye (2e) et de Blâmont (2e), chargées de la fixation des indemnités, en matière d'expropriation dans la zone rouge; en plus celles-d'Audun-le-Roman, de Briey et de Conflans, qui disparaîtront sous peu.
Les commissions ont rendu 185.245 décisions, qui attribuent comme indemnité 982 millions en perte subie et 3.130 millions en frais supplémentaires et qui se rapportent à des demandes
s'élevant à 1.472 millions en perte subie et 4.625 millions en frais supplémentaires.
Il reste à examiner 2.389 demandés se montant à 703 millions en perte subie et. 2.174 millions en frais supplémentaires; ces demandes concernent surtout de gros dommages industriels,
miniers, forestiers, etc.

TRIBUNAUX DE DOMMAGES DE GUERRE
Ils ont rendu 13.362 décisions: il reste à statuer sur 3.187 affaires concernant principalement des mineurs.
Seuls subsistent encore les tribunaux de Nancy (pour Nancy, Lunéville et Toul) et de Briey.

EXTRAITS DE DÉCISIONS - TITRES
179.546 extraits de décisions sont parvenus à la préfecture; ont été envoyés à Paris, 173.008 extraits concernant 3.021 millions d'indemnités. Les titres reçus représentent 2.879 millions.
INDEMNITÉS PAYÉES
Reconstitution industrielle 1.257.000.000
Mines 128.000.000
Reconstitution non industrielle 1.552.000.000
Total : 2.937.000.000

Dans la reconstitution non industrielle, nous trouvons : 788 millions en espèces pour les immeubles bâtis, 20 millions en indemnités converties en titres de rente, 29 millions en titres payables par annuités, etc.

EMPRUNT DÉPARTEMENTAL 1922
En chiffres ronds, le montant des frais est de 13 millions, celui des ressources générales de 4 millions; il reste 9 millions à répartir sur 94.050.000 francs de titres de créance, soit 9,59 %.
L'adhérent qui ne bénéficie pas de ristourne d'entrepreneur et d'architecte subit, une perte de 9,59 %; celui qui profite de toute la ristourne (5 % de l'entrepreneur et 0,50 % de l'architecte) supporte 4 % de frais. Ces chiffres pourront subir quelques modifications lors de l'arrêté des comptes.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
5 août 1923

La Coopérative des Eglises

Les membres de la Coopérative des Eglises dévastées de Meurthe-et-Moselle se sont réunis ces jours derniers, à Nancy, pour entendre le rapport annuel.
Nous en extrayons ce passage, qui est de nature à intéresser nos lecteurs :
Situation financière. - Dans le premier semestre, il a été versé six millions et demi pour la construction, actuellement on paye près de deux millions par mois ; néanmoins la trésorerie est régulièrement alimentée par les fonds d'emprunt et les crédits d'Etat qui arrivent à peu près normalement. Les entrepreneurs apprécient beaucoup ces paiements au comptant, c'est-à-dire ordinairement dans les 48 heures et parfois dans les 24 heures du dépôt de la demande. Au 30 juin, on disposait de treize millions en espèces, en bons et en obligations.
Situation morale. - La Coopérative a admis Dampvitoux, 1922; Authelupt, Flirey et Mignéville en 1923. De nombreuses demandes d'affiliation viennent de lui parvenir. Elle a admis Lanfroicourt, Morfontaine, Saint-Baussant et Seicheprey et les églises d'Einville, Gondrecourt, Landres, Longwy-Bas, Noviant-aux-Prés, Pierre-Percée et Saffais, dont la réparation ou la reconstruction n'est pas terminée.
Toutefois, le produit des emprunts étant réservé aux églises pour lesquelles l'émission a été faite, les travaux pour les églises nouvellement admises devront être payés surtout en obligations décennales et la perte qui en résultera devra être supportée par la commune et par l'entrepreneur et l'architecte qui seront payés au comptant. On a écarté certaines demandes concernant du mobilier ou des immeubles par destination : les communes non admises pourront sans doute obtenir de l'argent sur les nouveaux crédits accordés par l'Etat à notre département.
On a examiné ensuite la situation nouvelle des églises classées comme monuments historiques, situation révélée par une récente discussion au Parlement.
Un sénateur avait demandé pourquoi on ne réparait pas rapidement les monuments historiques classés parmi lesquels sont rangées beaucoup d'églises.
Voici la réponse du ministre Reibel : «  Si un monument est classé comme historique, il appartient au service des Beaux-Arts seul d'en assurer la restauration à l'aide de fonds qui sont votés par le Parlement à cet effet... Il est absolument impossible que les Commissions cantonales donnent aux communes des indemnités au titre des dommages de guerre pour réparer les édifices classés comme monuments historiques... Chaque fois que je trouve des églises, classées alors qu'elles n'auraient pas dû l'être, je conseille aux communes d'en demander le déclassement au service des Beaux-Arts. Quand elles seront déclassées, les Commissions cantonales pourront accorder des indemnités de dommages de guerre et on pourra faire les réparations nécessaires. »
Honoraires d'architectes. ~ Les architectes reçoivent 5 % d'honoraires pour la construction. Faut-il les leur accorder pour les vitraux, les bancs, les autels, l'installation électrique, l'horloge, les cloches, etc.?
«  En principe, toutes les fois que la fourniture n'a pas exigé des travaux spéciaux, tels que dessins, devis, surveillance, en un mot, ce que l'architecte doit faire dans l'exercice de sa profession, aucun honoraire ne lui est dû... Si le concours de l'architecte a été demandé, l'honoraire peut être modéré quand il s'agit d'objets ne nécessitant qu'un dessin mais se répétant un grand nombre de fois, comme c'est le cas pour les bancs...
Il ne peut y avoir de règle générale, mais il faut une entente avec l'architecte à propos de chaque édifice. »


L'Immeuble et la construction dans l'Est
11 novembre 1923

Au Salon de Nancy

D'une nouvelle visite aux Galeries Poirel, nous rapportons des impressions intéressantes... mais diverses.
[...]
M. Georges Janin sait depuis longtemps tout le bien que nous pensons de son vigoureux talent de peintre-verrier: L'Immeuble, depuis plus de trente ans, n'a cessé de s'intéresser à la vieille et si renommée maison Höner et Janin père et fils.
M. Janin - qui nous prépare de fort belles reconstitutions historiques et artistiques pour l'église de Dieulouard - expose à l'entrée des galeries une vaste composition de style moderne, pour l'église restaurée de Xousse. C'est, d'une part, saint Paul devant l'Aréopage d'Athènes (belle scène à riche composition) et, d'autre part, le Reniement de saint Pierre.
D'aucuns ont été un peu durs pour ces deux grandes scènes ; avouons qu'elles sont mal placées et qu'elles gagneront à être vues en place et de haut. Mais ce genre nouveau ne plaît guère en Lorraine, où l'on n'est pas pour les initiatives trop hardies, mais pour les belles traditions des siècles passés.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
27 janvier 1924

La Commission des Monuments religieux a examiné les plans du clocher de Bruley, du mobilier des églises de N.-D. de Lourdes, Bouxières-sous-Froidmont, Hénaménil, Herbéviller, Lesménils, Arracourt, Bernécourt, Brin, Chenicourt, Fey-en-Haye, Serres et Montreux.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
15 juin 1924

15 juin 1924
L'importante Maison France Lanord et Biçhaton a terminé les travaux de reconstruction de la plupart des villages de la région de Blamont, notamment Emberménil, qui a été solennellement inauguré l'autre semaine.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
6 décembre 1925

Les Eglises reconstruites

On annonce qu'après les églises de Flirey, Seicheprey et Badonviller, inaugurées ces jours derniers, il n'en reste plus que cinq à ouvrir au culte en 1926, peut-être même dans quelques semaines.
Il y avait 373 églises sinistrées en Meurthe-et-Moselle, dont 89 à peu près détruites. Toutes sont maintenant reconstruites ou restaurées.
Les cinq en retard sont: l'église de Flussigny, l'église Saint-Dagobert à Longwy-Haut, l'église de Leintrey, l'église de Mousson, enfin l'église de Nomeny, qui est un monument historique, confié au talent bien connu de M. Paul Charbonnier.
Cette dernière reconstruction sera terminée au cours de 1926.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
28 mars 1926

L'Assemblée des Coopératives des régions dévastées

Mercredi ont eu lieu a la Salle Poirel, les deux assemblées générales de l'Union des Coopératives de reconstruction en Meurthe-et-Moselle et de la Coopérative des Eglises dévastées.
De nombreux rapports, très ardus, il faut bien le dire, ont été lus et âprement discutés ; M. le préfet Magre a longuement parlé du prochain emprunt de cent millions et des 300 millions nécessaires pour terminer l'oeuvre de la reconstitution en Meurthe-et-Moselle.
Mais que de chinoiseries administratives ont été dénoncées, par MM. Thouvenin. Jacquemin et Voinier ! Et que de coups d'encensoir à l'adresse de Pierre, Paul, Jacques et Jean ! On est sorti de la Salle Poirel la tête bourrelée de chiffres et de billevesées, avec toutes les histoires fantastiques des subventions, titres, obligations de l'Etat.
Nous reviendrons longuement sur ces deux-assemblées, en ce qui concerne les architectes et les entrepreneurs, mis sur le gril dans tous les rapports.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
4 avril 1926

La Reconstruction en Meurthe-et-Moselle

Des entrepreneurs et des architectes, singulièrement agacés, des coups d'encensoir exagérés, assénés le mercredi 24 mars, sur la tête de tel ou tel «  reconstituant », ne se gênaient pas pour crier bien haut, à la sortie de la Galerie Poirel !
«  Mais le moindre grain de mil,
«  Ferait bien mieux notre affaire ! »
Nous sommes entièrement de leur avis. Tous les orateurs de la réunion des Coopératives, au début ou à la fin de leurs rapports si ardus, ont cru intéressant de s'encenser mutuellement de
parfums délétères quoique doux.
Mais autant en emporte le vent, l'aigre bise de notre pays lorrain, qui soufflait ces temps derniers et ne disposait pas les pauvres sinistrés à de bucoliques rêveries, comme à Toulouse, Carcassonne ou Bordeaux.
Certains Lorrains du bureau de ces Coopératives de Reconstruction - depuis qu'ils se croient des as, cultivent à leur tour l'hyperbole, que nos gens de la Meurtrie accueillent avec une ironique froideur, très significative. N'en disons pas plus qu'eux et restons avec eux. Donc l'Assemblée générale des Coopératives de reconstruction en Meurthe-et-Moselle a eu lieu le 24 mars dans une des galeries Poirel.
Il y avait 113 coopératives dûment représentées sur 183 en Meurthe-et-Moselle. Il y avait aussi de nombreux architectes et entrepreneurs, qui sont intéressés, à divers titres, à ces travaux de reconstitution que l'on voudrait voir terminés d'ici un an, au plus tard.
Mais pour cela, il faudrait encore 300 millions. L'Etat, d'une façon ou d'une autre, en titres, obligations, crédits divers, a promis 200 millions. Il reste au département à lancer un emprunt de 100 millions, avec tout d'abord, une première tranché de 65 millions, dont les modalités, un peu compliquées, ont été exposées en des rapports publiés par les journaux quotidiens.
On a appris qu'en 1925, une somme de 22 millions avait été seulement dépensée chez nous pour la réparation des dommages de guerre, alors que 207 millions avaient été consacrés à ces fins de 1921 à 1924.
Les différents rapports ont tous protesté contre les nouvelles mesures législatives qui réduisent et restreignent la part des sinistrés; on a protesté surtout contre les lenteurs administratives du contrôle et contre certains architectes et entrepreneurs qui tardent à donner les règlements définitifs.
L'activité des diverses coopératives de reconstruction en 1925 a plutôt été médiocre, alors qu'on aurait pu très bien liquider définitivement de nombreuses affaires. Quoi qu'il en soit, 1.700 comptes, sont déjà entièrement liquidés, et pour aboutir plus rapidement, un voeu a été émis par l'Assemblée, voeu que nous reproduisons ici :
«  Que l'Etat ni l'administration ne prenne aucune décision à effet rétroactif détruisant les décisions antérieures.
«  Que nul n'exige de formalité en dehors de celles qui résultent inévitablement des dispositions de la loi.
«  Que les services de contrôle simplifient et facilitent le règlement de toutes les affaires par une large interprétation des textes, n'hésitent pas - dans la mesure où cela n'augmente pas les charges de l'Etat - à engager leur responsabilité pour résoudre en équité toutes les difficultés de détail, surtout quand elles portent sur des sommes minimes, et aident par tous les moyens à la liquidation rapide des Coopératives de reconstruction de Meurthe-et-Moselle ».
En effet, et ce fut l'avis de tous les assistants, il convient d'en finir cette année avec toutes les Coopératives de Meurthe-et-Moselle, et avec cet énorme boulet de la reconstitution, que tous
nos malheureux sinistrés traînent depuis une dizaine d'années déjà.
Il est vrai que Meurthe-et-Moselle est un des départements les plus avancés, parmi les dix si gravement atteints par la guerre.
Une grosse question traitée ensuite, ce fut celle des dépassements de crédits. On constata que trop souvent il y avait eu des abus, surtout chez les gros sinistrés, au détriment des petits.
On a annoncé alors que le budget de l'Etat pour 1926 avait compris une somme totale de 6 milliards pour les régions dévastées, dont 1 milliard sera affecté exclusivement pour la reconstruction des bâtiments communaux, mairies, écoles, églises, etc.
M. le Préfet de Meurthe-et-Moselle, dans une de ces allocutions très serrées et très fines à la fois, dont il a le secret, avec son éloquence coutumière et pressante, a longuement parlé du projet d'emprunt départemental de 100 millions, voté récemment par le Conseil général.
Il a d'abord protesté - très malicieusement, du reste - contre le voeu de l'Assemblée, essayant avant tout de couvrir et de défendre l'Etat, en rappelant que l'Etat était bien forcé d'échelonner les payements sur une quinzaine d'années... alors que chez nous on a été trop vite.
M. Magre estime qu'avec les 300 millions mis, cette année même, entre les mains des sinistrés, on pourra régler enfin architectes et entrepreneurs, et en finir tout à fait avec l'oeuvre de la reconstruction de nos régions dévastées.
L'orateur a signalé aussi quelles avaient été les erreurs des sinistrés à différents points de vue, surtout lorsque beaucoup avaient cru devoir éluder les questions administratives, toujours si compliquées. D'où leurs embarras actuels avec le fisc qui, lui, ne perd jamais ses droits, et surtout n'oublie rien.
M. Magre annonce enfin qu'il a pu obtenir du ministre des Régions Libérées, pour l'exercice 1926, 35 millions en espèces, et environ 146 millions en obligations et titrés divers, sur les 300 millions nécessaires à l'oeuvre de la reconstitution en Meurthe-et-Moselle.
L'emprunt départemental de 100 millions (une tranche.de 65 millions tout d'abord, une autre de 35 millions ensuite) fera le reste, et Meurthe-et-Moselle sera le premier département fortement sinistré, ayant terminé toute sa reconstitution.
La question de cet emprunt a été l'objet d'un rapport très ardu de M. le chanoine Thouvenin, président des Coopératives de Meurthe-et-Moselle.
Le rapporteur a constaté que, si la reconstitution était fort avancée chez nous, le payement des travaux et des factures l'était beaucoup moins, au grand dommage de nos entrepreneurs.
Que peuvent ces Messieurs, pour payer les matériaux et leur main-d'oeuvre, avec des obligations qui sont fort dépréciées en banque ? Cette liquidation nécessaire est la raison principale pour laquelle le Conseil général a voté, une emprunt départemental, en titres d'annuités de quinze ans, correspondant à 100 millions d'indemnités.
Voilà donc un emprunt en cours, avec deux tranches, de 65 millions et de 35 millions. Ces 100 millions (une fois recueillis par l'adhésion des souscripteurs), seront répartis de la façon suivante par un groupement de sinistrés.
Ces sinistrés seront répartis en trois catégories dont la première à la priorité sur la seconde et la seconde sur la troisième.
Première catégorie. - Sinistrés directs qui ont subi des dommages en Meurthe-et-Moselle et qui reconstruisent dans le département des bâtiments non industriels.
Deuxième catégorie. - Cessionnaires réalisant les mêmes conditions.
Troisième catégorie. - Sinistrés directs (non industriels), qui ont des titres, de créance inscrits à la Meurthe-et-Moselle et qui remploient en immeubles par destination.
Les communes, même pour les indemnités déjà acquises, sont classées dans la catégorie des sinistrés directs.
Tout cela paraît bien compliqué... et c'est un rude travail de répartition qui va être à la charge du groupement en question, afin de mettre au point les droits de tous les adhérents.
Mais il faut d'abord souscrire à l'emprunt; et c'est le devoir immédiat de tous les sinistrés, coopératives et entrepreneurs.
Il y aura des frais à payer par les sinistrés, qui s'élèveront de 18. à 23 %, frais qui pourront être atténués, croit-on, par des ristournes accordées bénévolement par les architectes et les entrepreneurs.
Comme conclusion pratique, pour payer - tous ces frais d'emprunts, il y aura lieu d'y consacrer les boni des coopératives - et l'Union s'inscrit pour 1000.000 francs - et de déposer ces boni en banque.
Ajoutons que cette souscription toute spéciale, en faveur des coopératives adhérentes à l'emprunt, est ouverte au public, aux coopératives agricoles et naturellement aux sinistrés, même industriels, déjà payés en espèces depuis plusieurs années.
Toutes ces questions d'emprunt, de répartition, de frais, intéressent avant tout les 183 coopératives de Meurthe-et-Moselle.
Les modalités du prochain emprunt de 65 millions n'ont pas été données officiellement; elles le seront incessamment, avec le taux de l'intérêt offert aux souscripteurs.
En ce qui intéresse surtout nos lecteurs dans cette Assemblée des Coopératives de Meurthe-et-Moselle, nous avons été aises de voir-que l'on songe enfin à se liquider des travaux depuis longtemps exécutés par nos entrepreneurs. C'est évidemment fort intéressant, pour de nombreux sinistrés, d'avoir fait bellement reconstruire leurs immeubles en leurs propres villages et d'employer le surplus des dommages accordés, d'une façon très libérale (alors que ceux de bien des habitants de Nancy n'ont jamais été payés !) à faire construire de riches maisons de rapport en ville.
Mais faudrait-il tout d'abord régler les travaux terminés et payer les factures de nos entrepreneurs ! Nous en connaissons un - et combien sont peut-être dans ce cas - à qui il est redû de 200.000 francs par des sinistrés, aujourd'hui très à l'aise. Alors ?
C'est l'entrepreneur qui «  trinque » et qui est presque acculé à la faillite, comme certain du nord du département, à qui il était redû des centaines de mille francs et que l'on menaçait d'exécuter.
On voit que la question du futur emprunt est liée à de nombreuses considérations de justice et d'équité, vis-à-vis de tous les travailleurs du bâtiment. Oui, vraiment, le moindre grain de mil fera mieux l'affaire de nos gens, que tous les balancements d'encensoir qui ont fait hausser les épaules à toute l'assemblée du 24 mars dernier.

Emile BADEL.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
5 septembre 1926

La Reconstitution des Eglises en Meurthe-et-Moselle

Sur 120 églises dévastées durant la guerre, dans le seul département de Meurthe-et-Moselle, il n'en reste plus qu'une seule, à l'heure actuelle, qui n'est pas encore livrée au culte, la belle et grande église à cinq nefs de Nomeny-la-Martyre, confiée aux soins des Monuments historiques et de leur dévoué architecte, M. Paul Charbonnier. Toutes les autres ont été reconstruites, en tout ou en partie par nos architectes lorrains, et certaines sont de petites merveilles d'art, le tout admirablement compris comme construction, aménagement, décoration.
Nous aurions voulu, au fur et à mesure qu'elles étaient solennellement inaugurées, décrire par le menu ces édifices grandioses, exalter l'oeuvre des architectes, des entrepreneurs, des divers artistes du bois, du fer, de la pierre, du verre; etc.
A défaut de ces invitations qui ont manqué, nous avons pensé tout de même que l'heure était venue de faire un tour dans toutes ces églises, en dépouillant simplement les dossiers, épures et plans de nos principaux architectes nancéiens, dont la maîtrise est reconnue de tous.
Et déjà, cette semaine, avant son départ pour quelques jours de vacances, nous avons eu le plaisir de voir, en ses bureaux du faubourg Stanislas, l'excellent architecte Jules Criqui, l'auteur de la nouvelle basilique de N.-D. de Lourdes au Montet, dont il compte élever la tour à près de 40 mètres l'an prochain, et le continuateur et restaurateur de l'église du Sacré-Coeur, si gravement endommagée par les obus de 380 de Hampont.
M. Criqui nous a confirmé ses travaux en ciment armé aux deux dômes du Sacré-Coeur, l'achèvement des tympans du portail, la restauration du pavé gonflé, la mise au point des fissures du côté est, des autels et du tombeau grandiose de Mgr Turinaz, qui va enfin avoir sa rue aux environs de N.-D. de Lourdes
Puis M. Criqui nous parle des vingt églises dévastées qu'il a restaurées ou entièrement reconstruites et toutes livrées au culte à l'heure actuelle.
Sous la dictée du maître architecte, nous voyons ainsi - comme en un brillant faisceau - apparaître les églises de la Seille, les régions de Toul, Lunéville et Briey.
Voici l'église d'Arraye, dont il restait un bas-côté roman, datant de 1872, et que M. Criqui a reconstituée en style roman avec abside, rayonnante, reconstruction des voûtes et. du clocher.
A côté, la chapelle de Han, entièrement refaite; puis l'église de Chenicourt, toute neuve sur plan carré, avec colonnes ; église romane avec bas-côtés, abside circulaire à cinq fenêtres, etc., un véritable joyau d'art dans cette vallée de la Seille qui subit toutes les dévastations les plus terribles.
Plus loin que Chenicourt, voici Armaucourt, avec la reconstruction totale du clocher et des voûtes sur l'ancien plan ; et puis Brin-sur-Seille, dont l'église fut complètement détruite et que M. Criqui a rétablie avec un curieux clocher à balcon, avec deux rampes latérales, église à trois nefs dans le beau style ogival du XIIIe siècle.
C'est enfin Champenoux, église autrefois si banale, qui a été refaite par M. Criqui, en collaboration avec M. Martin, architecte. Une seule nef, très large et fort élégante, de style gothique, avec toute une ossature en ciment armé, et dont l'habile et dévoué entrepreneur fut notre ami M. Gény.
Après la région de la Seille, le zèle et l'ardeur de M. Criqui se sont donnés large carrière dans la région de Pont-à-Mousson avec les églises de Lesménils, de Fey-en-Haye et la chapelle de Notre-Dame de Bouxières-sous-Froidmont.
Les Ménils, au lieu de son église-grange, a vu se construire une très belle église gothique, sans chapiteaux, sur plan carré avec des rudiments de transept, propices à la décoration sculpturale.
Fey-en-Haye, on le sait, grâce au zèle bouillant de l'abbé Christophe, est devenue comme la basilique du Bois-le-Prêtre et des milliers de poilus morts pour la patrie dans ces combats de géants qui durèrent quatre années.
L'église, très vaste, est du gothique flamboyant à trois nefs, avec un curieux clocher de côté qui donne un caractère tout spécial à cette oeuvre, admirée de tous.
C'est vraiment et avant tout la grande église des Soldats et des Héros du Bois-le-Prêtre.
Enfin, M. Criqui a refait entièrement, en stylé-roman, et en style gothique à trois nefs, l'église historique de Bouxières-sous-Froidmont, avec ses souvenirs antiques de la Vierge du Sureau et de Saint-Bernard.
De plus, en collaboration avec M. Schreiner, M. Jules Criqui reconstruit actuellement la chapelle du pèlerinage du Froidmont, au faite de la montagne, face à la vallée de la Moselle et à Pont-à-Mousson.
Cette chapelle, avec sa Madone, que vient de restaurer bellement Victor Huel, sera inaugurée le 8 septembre prochain. Elle est édifiée au-dessus de la fontaine miraculeuse de Sainte-Claire, dont la statue a disparu depuis la guerre.
Le zèle intrépide et l'érudition grande du bon lorrain qu'est le curé Balland, ont réussi à rétablir, cet antique pèlerinage de chez nous.
Nos bons architectes ont édifié une charmante chapelle gothique, très solide, avec autel pour la Madone de pierre polychromée, avec auvent porté sur deux colonnes, porte vitrée massive en fer, bancs de repos, etc.
Plus bas, dans le rocher, on rétablit aussi, au-dessus de la source millénaire où a bu saint Bernard, lors de la fameuse bataille du XIIe siècle, la chapelle de Sainte-Claire. On assure que des milliers de Messins s'apprêtent à venir, le 8 septembre, à cette restauration d'une grande tradition historique messine, barroise et lorraine.
Les travaux de M. Criqui, pour la reconstruction de nos églises dévastées, se sont poursuivis également dans la région de Lunéville-Blâmont, avec les églises d'Arracourt, style ogival du XIIIe siècle en grès gris; d'Herbéviller, près de Blâmont; de Serres, aussi en grès gris, de style roman avec-abside circulaire, la grande église d'Einvîlle-aux-Jards, dont le clocher a seul subsisté, église refaite en grès rose et à trois nefs ; les églises de Hénaménil, toute entière en grès rose, sur l'ancien plan, mais modifiée comme voûtes; d'Anthelupt, dont M. Criqui a refait les voûtes et tout le mobilier.
Dans le Toulois, le même architecte a refait les églises de Bernécourt et d'Hamonville: Bernécourt, de style roman à trois nefs, en collaboration avec M. Maurice Stein, l'architecte si connu de Toul ; Hamonville, une seule nef ogivale. Enfin le beau clocher de Bruley, en avant de l'église neuve des Demange, Migot et Loevenbruck, clocher qui n'a pas coûté moins de 200.000 fr. et qui vient de se terminer le 15 août, par la pose solennelle du magnifique tympan sculpté par Victor Huel.
Signalons enfin les deux églises refaites au pays de Briey par M. Criqui : Chambley, en collaboration avec M. Ferrand, architecte à Briey, une seule nef avec ossature en béton armé, de style ogival sans chapiteaux ; puis Auboué, dont le clocher de côté a été reconstruit totalement avec agrandissement de la nef.
Telles sont les belles oeuvres architecturales accomplies par M. Jules Criqui en moins de six années et qui ont consacré, une fois de plus, la haute maîtrise de l'excellent architecte nancéien, qui ne s'arrêtera pas en si beau chemin. Nous l'avons dit plus haut.
Combien nous aurions voulu assister à l'inauguration de tous ces édifices, les décrire par le détail, les reproduire même ici successivement et rendre ainsi à chacun l'hommage qui lui était dû.
Du moins, en attendant la suite, que ces lignes rapides redisent à tous les Lorrains notre admiration en présence de ces beaux édifices religieux, si rapidement reconstitués par la foi et la ténacité de tous sur le sol mutilé de notre chère Lorraine.
E. B.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
15 mai 1927

L'Oeuvre de la Reconstruction des Eglises en Meurthe-et-Moselle

On se rappelle encore, surtout dans le monde des architectes et des entrepreneurs, qu'au lendemain de l'armistice du 11 novembre 1918, il y avait en Meurthe-et-Moselle des dégâts immobiliers, immenses, causés par la guerre, et évalués à des centaines de millions.
Rien que pour le diocèse de Nancy, 419 églises étaient détruites, mutilées, saccagées en tout ou en partie. 90 édifices étaient complètement en ruines, le tout pour une valeur estimée à plus de 70 millions.
On sait ce qui se passa ; comment nos architectes et nos entrepreneurs agréés se groupèrent pour la reconstruction des fermes, des villages, des maisons, des mairies, des écoles et des églises, et comment fut créée, grâce au zèle ardent et réfléchi du chanoine Thouvenin la Coopérative des Eglises de Meurthe-et-Moselle, alors qu'il était déjà président des Coopératives de reconstruction des villages.
M. le chanoine Fiel, de Nancy qui fut aussi, depuis 1920, l'une des chevilles ouvrières de ces Coopératives vient justement de publier une brochure très substantielle sur l'oeuvre merveilleuse accomplie par la Coopérative dé reconstruction des Eglises du diocèse de Nancy.
Nous y puiserons largement dans cet article pour bien montrer à nos lecteurs tout ce qui a été fait par cette coopérative qui va voir sa tâche à peu près terminée avec l'achèvement des travaux de reconstruction de la très belle église ogivale de Nomeny, monument historique.
L'idée de la Coopérative des Eglises fut lancée et le projet esquissé, le 16 janvier 1921, dans une grande assemblée, réunie à la Salle Poirel. Un tableau saisissant de M. l'abbé Renauld, un des vaillants pionniers de la reconstitution dans la vallée de la Vezouse, montra la misère, en même temps que l'intensité de la vie religieuse, dans les villages dévastés.
M. Louis Marin, député de Meurthe-et-Moselle, fit un éloquent exposé du projet qui, du reste, fut commenté par le chanoine Thouvenin lui-même. «  Nous avons à craindre, disait-il, que la reconstruction de nos églises soit ajournée, que les municipalités soient submergées par les formalités à remplir et les difficultés spéciales que présente l'application de la loi du 17 avril 1919; nous avons à craindre encore que les baraques cultuelles d'aujourd'hui ne se désagrègent rapidement, ce qui nécessiterait de nouvelles dépenses pour du provisoire, et donc un gaspillage ».
D'autre part, la construction de l'église, qui serait confiée de préférence à l'entrepreneur de là Coopérative locale, constituerait un volant lui permettant d'avoir de nombreux ouvriers (préparation et avancement des chantiers, fourniture des matériaux), qui pourraient aller des maisons particulières à l'église et inversement, ce qui accélérerait la reconstruction du village.
La coopérative des Eglises une fois fondée, le 15 mars 1921, on se mit à l'oeuvre pour trouver les ressources nécessaires, emprunts et indemnités de dommages de guerre.
Le 11 juillet 1921, l'Officiel publiait l'annonce de l'emprunt, et le même jour, le Crédit National remettait à la Coopérative des églises un titre de trente annuités correspondant au certificat provisoire de 15 millions.
L'émission fut ouverte, le 15 juillet, par une notice suggestive dont les sentiments élevés trahissaient le président de la Coopérative. Il fut couvert en six semaines.
Une commission extra-légale, approuvée verbalement par le Préfet, se rendit dans chaque commune, afin d'examiner, avec le Conseil municipal, le curé et- l'architecte choisi, les bases de l'indemnité, l'emplacement proposé pour l'église, et définir sommairement le caractère du nouvel édifice. Cette commission, imaginée par M. Deville, architecte en chef de la Reconstitution, et présidée par lui, était composée de M. l'abbé Fiel, secrétaire de la Coopérative des églises, et d'un expert spécialement désigné, dans chaque arrondissement, pour l'évaluation des dommages aux édifices civils et cultuels.
A la suite de cette réunion à la mairie, l'architecte étudiait le projet, le soumettait à l'agrément définitif du Conseil municipal, et l'adressait au président de la Coopérative, qui de son côté le présentait à la Commission diocésaine des Monuments religieux.
Après ce premier examen, c'est encore le chanoine Thouvenin qui, avec l'architecte en chef, déposait et commentait le dossier devant le Comité départemental des Bâtiments civils ; des instructions ministérielles permettaient de substituer ce Comité à la Commission spéciale prévue par l'article 12, pour les communes qui y renonceraient. Les conclusions de ce Comité, signées par le Préfet, et adressées aux Commissions cantonales par l'agent administratif, représentant l'Etat spécialement pour les édifices civils et cultuels, ont été adoptées sans discussion dans la plupart des cas. En moins de quatre mois, ce travail d'évaluation fut terminé.
Pour les 104 églises confiées à la Coopérative, l'indemnité immobilière bâtie était de 44 millions. Cette somme, a permis de reconstruire dés édifices cultuels de même importance et de même durée que ceux qui avaient été détruits.
Le succès de cette première Coopérative des Eglises de Meurthe-et-Moselle, incita les- autres départements sinistrés à faire de même et à former une sorte de fédération des coopératives.
On prit les directives suivantes:
1° Pour les emprunts, chaque coopérative devait grouper les certificats provisoires, ou les titres de créance de ses adhérents, passer une convention d'annuités avec le ministre dès Finances, et apporter ses titres d'annuité à l'Union, qui ferait l'emprunt et en répartirait -le produit, et les charges au prorata des indemnités apportées;
2° Pour les reconstructions, chaque coopérative diocésaine dirigerait les travaux dans sa circonscription ;
3° Si une coopérative diocésaine confiait: à l'Union son administration, la gestion, de sa tranche d'emprunt et la direction de ses travaux, aucun frais, ni aucune responsabilité ne. pourraient en résulter pour l'Union.
Après la réunion du 25 septembre, d'autres idées se firent jour, et le projet d'Union des Coopératives fut remplacé par celui d'une Société anonyme, dont le but serait de faire un emprunt global pour la reconstruction des églises dévastées de France, et de centraliser l'administration des coopératives diocésaines.
A l'unanimité, le Conseil d'administration de Nancy jugea ces tendances inquiétantes, et considéra- qu'il serait imprudent d'abandonner l'instrument légal, qu'était l'Union des Coopératives, pour la reconstruction des immeubles. En conséquence, il décida que la Coopérative de Nancy conserverait sa complète indépendance, et n'entrerait pas dans le groupement en formation. Cette décision, fut notifiée le 11 novembre 1921.
Alors notre Coopérative de Nancy commença à passer les marchés avec les architectes et les entrepreneurs.
Presque partout le marché devint un forfait; dans les rares communes où on ne l'obtient pas, on exigea le mémoire des travaux exécutés et le devis estimatif de ceux qui restaient- à faire ; en plus de cette sage précaution, on immobilisa, dans la proportion de 50 %, la somme allouée pour les immeubles par destination.
Ainsi toute surprise serait évitée, et les dirigeants de la Coopérative furent délivrés du cauchemar des dépassements financiers.
La liaison entre la Coopérative et les communes adhérentes a été faite par les maires, curés, entrepreneurs et architectes, qui toujours conférèrent fructueusement au bureau de la Salle Déglin.
Toutefois un certain nombre de questions ne pouvaient être étudiées et résolues que sur place, soit que la présence du maire, ou même de tout le Conseil municipal, fut nécessaire, soit qu'une expertise des lieux paraisse indispensable.
Indépendamment des déplacements pour des cas spéciaux, le bureau de la Coopérative a visité cinq fois les communes adhérentes. Au cours de la première, les Conseils municipaux ont été réunis, pour établir les bases de l'indemnité à demander à l'Etat, et le projet de reconstitution de l'église, d'après ce qui a été exposé plus haut; la seconde a été une sorte de contrôle de l'organisation des chantiers ; la troisième, une campagne pour demander que les marchés à la série soient transformés en forfait; la quatrième a eu pour but l'aménagement des crédits destinés aux immeubles par destination et au mobilier. Au cours de la cinquième tournée, le président en personne, avait pris le crayon du comptable, afin d'exposer, par l'éloquence des chiffres; la situation du compte de la commune à la Coopérative des églises, et proposer, une solution aux difficultés rencontrées.
Pour chacune de ces visites, les délégués du Conseil d'administration de la Coopérative des églises, furent accompagnés par M. Deville, architecte en chef de la reconstitution, qui, avec un empressement exquis, faisait un généreux apport de son autorité, de son goût artistique et de sa vaste expérience.

Les indemnités déléguées ou données à la Coopérative pour la construction et l'aménagement de 104 églises se répartissent de la façon-suivante :
Immeuble bâti: 45 millions 200.000 francs.
Matériel et mobilier: 9 millions 300.000. francs.
Les dirigeants de la Coopérative avaient pris l'engagement moral de payer les travaux au comptant, et pratiquement aucun marché ne fut signé sans que les ressources soient assurées pour en régler le montant : ce qui permit de satisfaire dans les quarante-huit heures les demandes de paiement.
Par application de la loi du 17 avril 1919, le sinistré qui remployait, devait être payé par l'Etat, dans les deux mois qui suivaient le dépôt de sa demande et de justification de travaux. Mais il était bien évident que la France, supportant seule le poids de la reconstitution des régions dévastées, devrait sérier les paiements, et même les retarder au delà du délai légal. Aussi les fondateurs de la Coopérative des églises avaient bien précisé qu'on demanderait peu à l'Etat, tant que la reconstruction des villages ne serait pas virtuellement terminée.
Les premiers paiements furent faits sur l'emprunt-de 15 millions contracté par la Coopérative des églises, ensuite sur une tranche de 11 millions prise sur l'emprunt de 90 millions contracté en 1922 par le Département de Meurthe-et-Moselle pour, la reconstitution et enfin une nouvelle tranche de un million et demi dans l'emprunt départemental 1926.
Il y a, dans la brochure de M. l'abbé Fiel, une page fort intéressante sur la question tant controversée de l'art dans nos églises et sur celle des vitraux religieux où sont passés maîtres, et maîtres de plus en plus appréciés, les artistes nancéiens Georges Tanin et Joseph Benoît et ses fils.
Citons quelques phrases de M. l'abbé Fiel :
«  L'architecte de l'édifice a été choisi sur une liste d'agréés spécialement par la Préfecture, pour la construction des édifices civils et cultuels, sur avis du Comité départemental des Bâtiments civils. Le projet, dressé par cet homme de l'art, était présenté par le président de la Coopérative à la Commission diocésaine des Monuments religieux, qui, dans bien des cas, imposa des retouches indispensables pour conformer les édifices aux règles de la liturgie.
Le dossier était ensuite transmis et présenté au Comité des Bâtiments civils, par le président de la Coopérative, qui, avec l'architecte en chef, commentait l'étude présentée, devant un aréopage de maîtres de l'Art et du Bâtiment. Il n'a pas dépendu que d'eux que les nouvelles constructions fussent toutes marquées d'un style personnel, et surtout d'un caractère régional, qui les adaptât au cadre et aux horizons lorrains. Trop souvent, pour des raisons de temps et d'opportunité, il a fallu accepter du pastiche ou des copies, à la vérité fort honnêtes, mais dont le moins qu'on puisse dire, est que le talent de l'auteur n'aurait, pas été embarrassé de faire mieux...
Quelques projets, sous l'impulsion de M. Deville, architecte en chef, de la Reconstitution, se sont nettement élevés jusqu'à des conceptions tout à fait personnelles, qui donneront une belle originalité artistique à notre époque. La plupart des édifices sont très présentables et ont belle allure. Il est facile de compter ceux qui seront réputés médiocres. »
Le même contrôle aurait pu s'exercer sur l'aménagement intérieur et l'ameublement des églises. L'article 14 des Statuts; de la Coopérative laissait au Conseil d'administration lé choix des architectes et des entrepreneurs. Il eut donc été conforme au mandat donné par les Municipalités, que la Coopérative choisisse, elle-même lés sculpteurs, ébénistes, peintres-verriers, décorateurs, statuaires, etc.. Une Commission technique et artistique, nommée par le Conseil d'administration de la Coopérative, aurait éclairé et dirigé le choix de l'ameublement, éliminé sans pitié la statuaire polychromée fabriquée en série et les chemins de croix burlesques. En faisant appel à de véritables artistes du. bois, de la pierre, du verre et du fer, on aurait eu, par suite d'importantes commandes, des prix de revient souvent inférieurs à ceux des commerçants spécialistes. Cette grave question n'a pas été méconnue du Conseil d'administration, toutefois c'est la-thèse de la liberté complète, laissée aux autorités locales, qui a prévalu. Libre à chacun de juger où était la vérité. (Evidemment ce fut un grand tort!)
Le vitrail, qui du reste joue un rôle important dans l'édifice, a été particulièrement discuté. Tout en ayant sur ce point une conviction nettement marquée, les dirigeants de la Coopérative ne l'ont imposée à personne. Le temps, du reste, qui, disent les Italiens, est «  un galant homme », uniformisera les jugements.
Nous pourrons revenir ici quel que jour sur cette importante question de l'ameublement des églises. Nous avions à Nancy assez d'artistes en tous genres : peintres décorateurs, sculpteurs, maîtres verriers, menuisiers d'art, ébénistes, ciseleurs en bronze, marbriers, etc., etc. sans qu'il fût besoin de s'adresser ailleurs, surtout à cette odieuse «  bondieuserie sulpicienne » qui continue à exercer ses ravages partout et qui fait pousser des cris de rage à tous les hommes sensés et à tous les gens de goût.
M. l'abbé Fiel termine sa brochure en rappelant la plupart des cérémonies officielles de la reconstruction des églises, notamment celle d'Ancerviller, son pays natal. Et il termine ce travail, historique au premier chef, par l'émouvante énumération des 104 églises reconstruites totalement ou partiellement, parmi lesquelles les églises classées de Longwy-Haut et de Nomeny.

Ce petit livre est une excellente contribution à l'histoire de la guerre en Lorraine et de la reconstruction en Meurthe-et-Moselle. Le savant, dévoué et très distingué chanoine doit en être chaudement félicité. Il a coopéré largement depuis sept ans à tous ces travaux, et il vient de mettre le sceau définitif à son oeuvre en publiant l'historique de cette reconstruction.
Architectes et entrepreneurs des régions libérées liront cette brochure avec le plus vif intérêt et ils la conserveront précieusement dans leurs archives. C'est une Page d'histoire émouvante entre toutes dans le martyre de la Lorraine, de 1914 a 1918.
Emile BADEL.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
29 mars 1931

La Société Coopérative de Reconstruction de Barbas a été dissoute par délibération de l'assemblée générale du 19 mars 1931.
Le Conseil d'administration est chargé de la liquidation de la Société.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
19 août 1931

La Société Coopérative de reconstruction d'Emberménil a été dissoute par délibération de l'assemblée générale du 4 août 1931. La liquidation de la société deviendra définitive si, dans le délai d'un mois, à dater de la présente publication, aucune opposition n'est faite par les voies légales.


L'Immeuble et la construction dans l'Est
4 octobre 1931

DISSOLUTION DE LA SOCIÉTÉ COOPÉRATIVE DE RECONSTRUCTION D'AMENONCOURT
La Société Coopérative de Reconstruction d'Amenoncourt a été dissoute par délibération de l'assemblée générale du 24 septembre 1931.
Le Conseil d'administration est chargé de la liquidation de la Société.

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