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Histoire du Blâmontois dans les temps modernes (IV)
 

Abbé Alphonse Dedenon (1865-1940)
Impr. Vagner, 3, rue du Manège (Nancy) - 1930

I. Le Comté de Blâmont, annexé au Duché de Lorraine.
II. La Prévôté et le Bailliage.
III. Le District et les Cantons.
IV. Le Canton actuel de Blâmont.

L'Histoire du Blâmontois dans les temps modernes est une source majeure d'information : tombée dans le domaine public en 2010, cette version numérique intégrale permet de faciliter les recherches, y compris dans l'édition papier publiée en 1994 par Office d'édition & de diffusion du livre d'histoire.
Le présent texte est issu d'une correction apportée après reconnaissance optique de caractères, et peut donc, malgré le soin apporté, contenir encore des erreurs.
Par ailleurs, les notes de bas de page ont été ici renumérotées et placées en fin de ce document.

NDLR :
L'abbé Dedenon a laissé dans ses carnets des notes manuscrites indiquant diverses corrections à apporter à ce texte.


QUATRIÈME PARTIE
Le Canton actuel de Blâmont

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Cliché A. MUNIER.
RUINES DU VIEUX CHÂTEAU DE BLÂMONT

I - Circonscription civile et religieuse du Canton actuel

1° La Constitution de l'an VIII

La Constitution de l'an III eut beau vouer haine à l'anarchie, elle n'en triomphait pas, même après cinq années d'essai. Celle que publia Bonaparte, en l'an VIII, fut plus efficace, puisqu'elle dure encore, sans changements importants. Ajoutons que le talent de Régnier contribua beaucoup à son élaboration. Les fonctions cessèrent d'être électives et le pouvoir central se réserva les nominations, sur présentation des assemblées électorales. La division administrative, comportant le département, Y arrondissement, le canton et la commune, fut ramenée à ce qui existe encore aujourd'hui; point n'est besoin de la décrire.
On aurait pu. faire du Blâmontois un arrondissement ; la petite ville le désirait et tenta des démarches en ce sens. Mais les vues du gouvernement furent tout autres; son territoire fut attribué moitié à Lunéville, moitié à Sarrebourg. Le canton de Lorquin, où l'on fit entrer, dès le début, les environs de Cirey, jusqu'à Nonhigny et Parux, et les environs de Réchicourt, fut bientôt reconnu trop vaste. On le sectionna en 1814, pour former celui de Réchicourt, qui s'étendit jusqu'à Igney, Moussey et Avricourt. On sait qu'en 1871, ces deux cantons furent annexés à l'Allemagne, sauf Igney, qui fut rattaché à Blâmont, et Cirey avec cinq communes, dont on forma le nouveau canton de Cirey.
Dans la partie donnée à l'arrondissement de Lunéville, il y eut deux cantons avec Blâmont et Baccarat pour chefs-lieux. On en sait la composition, qui n'a pas varié, sinon en 1874, quand Badonviller obtint une justice de paix propre. Les premières nominations eurent lieu en 1803. A Blâmont, le juge fut Thouvenin; son suppléant, Fromental, et son greffier, Chanel. Dans les communes, maires et adjoints furent aussi nommés par le préfet; à Blâmont, le maire fut Fromental, jusqu'en 1805.

2° Le Concordat

Le désarroi des paroisses fut plus long à disparaître. Le Concordat était promulgué; néanmoins la persécution continuait; les prêtres assermentés n'osaient reprendre les offices publics; quatre prêtres non jureurs disaient la messe en cachette (182); la plupart des cures étaient vides; ceux qui les avaient occupées étaient morts ou s'étaient éloignés, pour ne pas succomber à la misère. Le premier souci des autorités religieuses et civiles fut de dresser la liste des succursales et des annexes. Blâmont, chef-lieu du doyenné, eut le titre de cure de deuxième classe. Les anciennes paroisses furent dénommées suceur sales; les annexes ne devaient pas avoir de desservant résidant; toute chapelle non reconnue devait être fermée à tout exercice public du culte (183). Cette première mesure souleva de vives réclamations. Deux villages, Nonhigny et Chazelles, autrefois sans curé, devenaient succursales, c'était bien; mais huit, qui avaient eu un curé, retombaient au rang d'annexé, et l'on ne pouvait s'y résigner. Les gens de Remoncourt firent valoir leurs trois écarts et supplièrent l'évêque de leur garder Rondeau ; le maire et le curé de Xousse s'y opposèrent, si bien que Rondeau dut aller à Kerprich.
Vého réussit à devenir succursale, en 1804, à cause de sa population croissante. Reillon avait gardé son presbytère et y logeait un bon religieux, L'hôte, de Vého, qui était tout désigné pour être succursalier; mais Reillon n'avait plus son titre de cure et aucune raison ne le lui fit rendre. Le petit village dut se voir rattaché à Chazelles, à Vého, puis à Blémerey. Chazelles fut succursale jusqu'en 1806 seulement, et ne recouvra ce titre qu'en 1847. Halloville fut annexe d'Ancerviller, en 1822; Vaucourt, annexe de Xures depuis 1806, devint cure en 1840; Repaix, d'abord annexe de Gogney, retrouva un curé, en 1847, et eut Igney comme annexe.
Pourvoir toutes les paroisses de titulaires fut chose plus délicate encore. L'Evêque fut très bienveillant et tâcha de laisser en place les curés assermentés, en leur demandant un signe minime de soumission, avant de les réconcilier. Il aurait voulu aussi réintégrer les émigrés, mais les paroissiens ne le souffrirent pas. Ainsi Guillot s'étant représenté à Blâmont sur l'ordre de l'Evêque, la lettre suivante, écrite le 26 juillet, fit comprendre à l'autorité diocésaine que son ministère n'y serait pas fructueux. «  La paix et l'union sont compromises par le retour de l'ancien curé... il ne convient pas; la plus grande partie ne l'estime pas... » Le mieux, pour Guillot, était de ne pas insister et d'aller à Saulxures-les-Bulgnéville, où il mourut en 1818. Voinot comprit que Gillot était mieux qualifié pour Blâmont, et il se contenta de Frémonville, mais Gillot ne fut pas le candidat de l'autorité et il fut placé à Gondrexange. C'est seulement en 1804 que fut nommé le premier doyen, en la personne de Mathieu, ex-curé de Chamagne, émigré et zélé missionnaire dans les Vosges.
Les cures totalement vacantes n'offraient pas moins de difficultés. Rien n'y attirait. Les églises étaient délabrées, les presbytères avaient été vendus pour la plupart, l'esprit public était lamentable. L'évêché fit de nombreuses nominations, après lesquelles on voit ajoutée cette courte note : «  N'y est pas allé. » On peut même lire cette réflexion désolée : «  Il faudrait des gendarmes pour mettre en mouvement cet ancien clergé. » Jusqu'en 1820, le personnel ecclésiastique fut très instable.
Comment s'en étonner après une telle secousse ? Il y a lieu plutôt d'admirer que les paroisses aient retrouvé d'assez bonnes dispositions pour garder dans la suite leurs pasteurs jusqu'à leur mort.

II Sous le Premier Empire

1° Quelques serviteurs de Napoléon

Désormais le canton de Blâmont est fondu dans la grande famille française et ne présente plus d'histoire spéciale. Cependant, il garde une physionomie propre dont voici quelques traits principaux. La France triomphe, pendant que se déroule l'épopée napoléonienne, de 1804 à 1809, et le pays de Blâmont se relève lentement. Le budget du chef-lieu n'atteint d'abord que 2.000 francs; les fêtes officielles n'ont qu'un programme restreint; la société de musique, dirigée par l'organiste Debrun, ne reçoit que 214 francs, pour égayer les fêtes nationales et décadaires; une somme de 855 francs est inscrite cependant, en 1810, pour doter une rosière qui consentira à épouser un militaire réformé pour des blessures. Les ressources augmentant, l'entrain finit par renaître.
Les anciens soldats sont à l'honneur et leurs exploits passent de bouche en bouche. Il en est beaucoup et plusieurs méritent d'être signalés. Geoffroy, d'Amenoncourt, fut à Austerlitz, Iéna, Friedland, Mosaïsk et suivit jusqu'au bout les campagnes de Prusse et d'Autriche. Arrivé devant Hall, en 1806, il lance ses hussards dans les rues, pêle-mêle avec un régiment d'infanterie; les Allemands fuient; le capitaine les poursuit bien en avant de ses hommes; dans un carrefour quatre Prussiens le couchent en joue et il leur crie en allemand : «  Vous êtes morts, si vous faites feu ». Son geste est si résolu que les ennemis abaissent leurs armes et se rendent. Dans une autre action, il affronte, avec vingt des siens, le feu de quatre pièces d'artillerie et de deux bataillons d'infanterie ; il franchit heureusement la zone de leur tir, tombe sur les artilleurs, et veut emmener son butin, quand surviennent 800 hussards d'Oussudun. Il les charge avec fureur, en traversant leurs rangs, puis tourne bride pour revenir encore à l'assaut; il attaque le colonel et s'échappe sans blessure de ce stupéfiant corps à corps. On le retrouve en Espagne, à la veille d'Ocanna (juillet 1808). La bataille se prépare ; Geoffroy, chargé de faire une reconnaissance, s'approche assez près du camp pour comprendre que l'ennemi attaquera le lendemain. En se retirant, il tombe au milieu d'un état-major espagnol. Engager le combat serait folie; il essaye alors de semer l'épouvante; il crie de toutes ses forces : «  Escadron, en avant ! » et il charge avec fougue. Les Espagnols, le croyant en force, le laissent passer et vont donner l'alarme aux leurs. La nuit se passa, l'arme au pied, et la bataille fut perdue pour l'ennemi, peut-être à cause de cet incident. Une autre fois, à la Palma (1810), Geoffroy soutient, avec soixante-six des siens, le choc de six cents cavaliers. Il reçoit trois coups de sabre et ne quitte le terrain que le dernier. Guéri au bout de vingt jours, il est de nouveau sur la brèche à Puente del Canto, où il enlève seul une pièce de canon. Après la campagne d'Espagne, il se retrouve en Russie (1811). Devant les flots impétueux de la Gébora, l'armée se trouve arrêtée. Comme personne n'ose s'aventurer dans le fleuve, Geoffroy se précipite à la vue de tous, franchit heureusement le courant et s'écrie de l'autre rive : «  Camarades, les canons sont ici, il faut les enlever. » Alors plusieurs colonnes s'ébranlent, traversent les flots et mettent en fuite l'adversaire.
La retraite de Russie fut fatale à la Grande Armée. Geoffroy, grièvement blessé à Moscou, en novembre 1812, guérit difficilement. Pourtant il fit encore son devoir à Dresde, le 17 août 1813. Mais, dès ce jour, la fortune lui fut contraire. On croit qu'il fut alors emmené en captivité et qu'il mourut, sans pouvoir donner de ses nouvelles (184).
Le général Klein, déjà célèbre dans les Armées de la République, vit grandir son rôle et sa gloire aux côtés de Napoléon. Promu général et chef d'état-major, en 1799, il fit partie de l'Armée du Danube, sous les ordres de Jourdan et de Floche, et, à la tête de ses hussards, exécuta des charges fougueuses contre la cavalerie de Barco, au nord de Coblentz. Après avoir guerroyé, en Suisse, contre les Russes, et contribué à la victoire de Zurich, il revint à l'Armée d'Allemagne et se battit à Stockach, à Schaffouse, à Flohenlinden, et il serait entré à Vienne, si le traité de Lunéville n'avait arrêté les opérations (9 février 1801). La croix de la Légion d'honneur récompensa ses services, le 11 décembre 1803.
Dans la campagne de 1805, Klein reprit le chemin de l'Autriche, avec un régiment de dragons, et réitéra, ses exploits à Wertingen, à Albeck, à Merschen. Sa conduite fut alors si glorieuse que. Napoléon daigna écrire dans son dixième bulletin de l'armée : «  Le prince Murat a été très satisfait du général-Klein. » Pareil éloge équivalait à un titre de noblesse; il augmenta-l'ardeur de l'intrépide cavalier, qui décidément se surpassa à Austerlitz. La paix qui suivit permit au général de revenir à Paris et de contracter mariage avec Henriette-Marie-Thérèse d'Arberg, après avoir fait prononcer son divorce avec Marie-Agathe Pierron (1805). La guerre semblait nécessaire à son bonheur. Il reprit du service dans la Grande Armée, en. 1806, et contribua grandement à la victoire d'Iéna. Comme il parvenait à Vaisensée, ses 1.200 dragons tombent sur une masse de fuyards, qui forment l'armée du Prussien Blücher; ils s'apprêtent à leur barrer la route, quand leur chef se présente et certifie qu'un armistice a été conclu après Auerstsedt. Klein ne suppose pas qu'un officier puisse mentir et il le laisse passer. Mais le lendemain, la supercherie est découverte. Napoléon s'en indigne, et Klein n'a d'autre moyen de racheter son excès de loyauté qu'en infligeant, un peu plus tard, une défaite horrible à celui qui l'a trompé.
Ses hauts faits continuent en Pologne; mais son étoile va pâlir. Il sera blessé à Eylau (1807) et devra renoncer à la carrière des armes. De retour à Paris, il sera comblé d'honneurs à la Cour impériale et nommé sénateur et comte, en 1808. Sa vie se prolongera jusqu'en 1845 (185).
Les deux fils de cet intrépide général se montrèrent dignes de leur père. Ils grandirent à Herbéviller, sous l'oeil d'une mère généreuse et vaillante, puis s'enrôlèrent dans l'armée, en 1800, âgés respectivement de seize et quatorze ans. L'un, Arsène-Edouard, parvint au grade de chef d'escadron dans la Garde impériale, resta fidèle à Napoléon, même pendant les Cent Jours et se vit obligé de quitter l'armée, en 1816; l'autre, Charles-Joseph, moins heureux, fut tué au siège de Maëstricht, en 1809.
D'autres soldats, moins célèbres, méritent néanmoins d'avoir leur nom inscrit sur ce tableau d'honneur. Voici Joseph-François Lafrogne, dont la famille avait fourni des chefs à la Garde nationale. Il conquit brillamment les galons de capitaine et la croix d'honneur. Se trouvant en retraite à Blâmont, quand les Alliés firent invasion, il fut chargé par le Préfet de la Meurthe de former un corps franc, pour essayer d'arrêter l'ennemi. La petite troupe, organisée à Lunéville, allait se mettre en route, quand l'avalanche, arrivant plus tôt qu'on ne s'y attendait, vint la bloquer avant son départ. De retour à Blâmont, Lafrogne acheva sa carrière en 1855. Il était frère de François-Balthazar Laf rogne, qui fut notaire en 1813, député de la Meurthe de 1816 à 1826, et conseiller général jusqu'à sa mort, en 1846.
D'autres seraient aussi à mentionner, bien qu'ils soient moins célèbres, car il est peu de familles qui n'aient donné quelqu'un de leurs fils à ces bataillons fameux. Quelques-uns revinrent, et le récit de leurs aventures sur les routes de l'Europe émerveillait encore notre enfance; mais combien d'autres restèrent sur les champs de bataille ou dans les steppes de l'Est !

2° Passage de Marie-Louise à Blâmont

Nous n'avons pas à raconter comment fut conclu le second mariage de l'Empereur avec l'archiduchesse Marie-Louise d'Autriche. Cette alliance, appelée à réconcilier deux nations trop longtemps rivales, fut fixée au 2 avril 1810. Pour venir en France, la Princesse prit le même chemin que Marie-Antoinette (186) ; Blâmont la vit arriver le 24 mars. Toujours fidèle au souvenir des anciens ducs, la population se mit en frais pour la recevoir.
Un arc de triomphe formant portique fut élevé à l'entrée, du côté de Sarrebourg. Des guirlandes, des banderoles couraient de maison en maison jusqu'à l'hôtel de ville. Là, un autre portique de verdure, dressé par les jeunes filles, portait cette large inscription : «  Hommage de la ville de Blâmont à l'épouse chérie du grand Napoléon ». Trois fontaines jaillissantes projetaient, tout près, leurs gerbes de perles, que' recueillaient des bassins bordés de mousse. Jamais, sans doute, la parure de la coquette cité n'avait été aussi riche. Dès l'aube, les cloches et le canon annoncèrent la fête, et 10.000 personnes accoururent pour y assister. Les gardes nationaux de Blâmont et de Badonviller devaient former la haie. A l'heure voulue, un cortège imposant se porta à la rencontre de la berline impériale.
La réception eut lieu sur la place. Quand la voiture s'ouvrit, Marie-Louise apparut, souriante, et répondit aux vivats de la foule. Vingt-cinq maires étaient là, avec le clergé, les juges et les fonctionnaires de Blâmont, Badonviller, Cirey et Réchicourt. Le juge Thouvenin lut des vers ingénus; une jeune fille vêtue de blanc, coiffée en cheveux et ceinturée de vert, s'avança pour dire d'une voix tremblante : «  Madame, la bonté dont toutes les actions de Votre Majesté sont accompagnées nous rassure, au moment où nous avons l'honneur d'approcher de Votre auguste personne. Cette bienveillance nous fait espérer qu'elle ne dédaignera pas le faible hommage que des jeunes filles viennent déposer à ses pieds. Les filles des anciens sujets de votre illustre Maison ont un double droit de vous parler de leur dévouement. Leur est-il permis de croire, Madame, que Votre Majesté, arrivée sur le trône le plus éclatant de l'univers, daignera conserver quelques souvenirs de cette simple offrande et des humbles voeux qu'ils osent mêler aux acclamations générales excitées par sa présence ? »
Le maire fit ensuite un discours qui ne nous est pas parvenu. Alors, raconte Farquin, un villageois s'approcha et dit, en saluant : «  Madame, rendez bienheureux notre grand Empereur et surtout... donnez-lui beaucoup d'enfants ». Sur quoi, Marie-Louise, se tournant vers la reine de Naples, répliqua avec malice : «  Voilà un Français qui paraît bien impatient, qu'il attende au moins que je sois épousée ».
Ces instants furent trop courts. Les chevaux changés, le postillon claqua son fouet et la voiture partit vers Domèvre, à une allure rapide ; elle arriva, le soir même, à Lunéville. Pour finir la fête, la musique vint, à 7 heures, rassembler le maire, les notables, les gardes nationaux, qui parcoururent les principales rues en criant : «  Vive Marie-Louise ! Vive la Lorraine ! » Puis le bal fut ouvert et la première danse exécutée par le maire. Les pauvres avaient reçu une aumône extraordinaire (187).
Quelques semaines après, arrivait un cortège d'un autre genre ; il transportait, de Strasbourg à Paris, les restes du maréchal Lannes et du général de Saint-Hilaire. Blâmont fit bon accueil à la dépouille de ces braves; un service funèbre fut célébré, le 27 mai, et la Garde nationale rendit les honneurs. L'esprit public était attaché à l'Empereur.
A la naissance du roi de Rome, Blâmont délégua son maire, Batelot, pour porter à Paris «  l'hommage du dévouement sans bornes de ses administrés, avec leurs voeux pour le souverain et la santé de son épouse ». A cette occasion, le maire vit Régnier et lui présenta une pétition tendant à transférer à Blâmont le tribunal de Sarrebourg, en souvenir de l'ancien bailliage. Mais l'heure était mal choisie : on avait, à Paris, d'autres soucis, et l'affaire fut oubliée.

3° Le déclin de l'Empire

La désastreuse campagne de Russie ébranla l'étonnant prestige de Napoléon. D'abord, on était las de ses levées d'hommes, qui dévoraient tous les forces vives de la Nation. Puis on s'émut des souffrances qu'enduraient les survivants de la Grande Armée, quand ils furent rapatriés, en 1812. L'hôpital de Blâmont dut en recueillir un nombre considérable, pendant une longue année, et il ne fut jamais indemnisé. A Lunéville, il y en eut jusqu'à 2.000, qu'on fut obligé de loger dans un camp retranché. Enfin, le comble fut la nouvelle du désastre de Leipzig, bientôt suivi de l'invasion des vainqueurs (octobre 1813).
Le maréchal Victor et le général de Ségur, chargés de retarder le flot envahisseur, passèrent, l'un dans la vallée de Celles, l'autre à Blâmont, dans les premiers jours de janvier 1814 (188). Tout de suite après, survinrent les Alliés, qui pénétrèrent à Lunéville, le 14. Un corps était passé par Sarrebourg. sous les ordres de Vittgenstein ; trois armées arrivaient par la trouée de Raon, sous la conduite de Schwarzenberg.
L'occupation se prolongea jusqu'au 8 juin. On vit alors défiler à profusion les Bavarois, les Prussiens, les Saxons et les Russes. Leur discipline était passable, mais leurs exigences furent une ruine pour le pays. Les soldats étaient nourris par les habitants. Blâmont dut payer au commandant de place 25 francs par jour, pendant deux mois, faire les frais de son chauffage, de ses convois, et fournir le nécessaire à ces hôtes peu commodes; le pire fut la menace du typhus et d'autres maladies contagieuses (189). La mortalité prit soudain, à Blâmont, de telles proportions qu'on mit, d'urgence, à exécution le projet, depuis longtemps envisagé, de créer un nouveau cimetière, plus vaste que celui qui entourait l'église; Pour cela, un jardin, clos de murs, fut acheté sur la route de Barbas; il garde encore maintenant sa destination. Pour les militaires, qui décédèrent en très grand nombre, on choisit un champ, au lieudit : A l'Etang, non loin du chemin de Repaix. On l'appela cimetière Russe, mais, en consultant les registres, il apparaît que presque tous les morts furent des Bavarois ou des Prussiens.
Pour couvrir toutes ces dépenses, la ville emprunta 300.000 francs, qu'elle trouva sur place. D'autres villages subirent des calamités pareilles; Domèvre, en particulier, perdit, par suite du typhus, des habitants en si grand nombre, qu'on dut les enterrer aux Hayes de Mignéville. Partout l'invasion russe resta parmi les souvenirs les plus sombres du passé.
Les sévices contre les personnes furent plutôt rares. Le fait suivant, cependant, nous est conservé par un registre de Blâmont. Vers la fin de l'occupation, des paysans du voisinage s'organisèrent en bandes, pour tracasser l'ennemi. Rencontrant, un jour, aux abords de la ville, un convoi qui transportait divers effets d'un major russe, certains de ces partisans l'assaillirent et le dévalisèrent, sans toutefois blesser les conducteurs. Grande fut la colère du major, quand il l'apprit. Après avoir imposé une amende formidable, il menaça de brûler la ville, si on ne lui donnait pas satisfaction. Batelot, Lafrogne père et le docteur Lahalle coururent à Nancy, pour implorer le Préfet. Au lieu d'être écoutés, ils furent emprisonnés comme responsables et ne recouvrèrent la liberté qu'en versant la somme exigée, après l'avoir reçue d'amis complaisants. Les vrais coupables, ajoute le document municipal, furent recherchés; on soupçonna fortement un certain Michel Krick et un autre habitant de Blâmont, mais on n'eut pas de preuves convaincantes.
Malgré l'occupation, la nouvelle de l'élévation au trône de Louis XVIII (3 mai) parvint assez vite à Blâmont. Aussitôt fut affichée la proclamation suivante, sous la signature de Fromental, Pierron, Lahalle et Vaultrin : «  Confiance ! vos peines sont finies, espérez à l'avenir d'être plus heureux ! Un prince, qui a des droits à votre amour, remonte sur le trône de ses ancêtres. Comme tous les bons Français, ralliez-vous autour de ce trône antique. Vive le Ro i! Vive Louis XVIII ! » Une telle explosion de royalisme étonne à bon droit, de la part de Fromental ; il faut y voir surtout un effet de l'aversion qu'avait déchaînée l'Empire.
Le 23 mars 1815, Napoléon étant rentré aux Tuileries, après son évasion de l'Ile d'Elbe, Blâmont s'abstint de toute adresse à son égard. Lès officiers municipaux prêtèrent simplement le serment qui leur était demandé (4 mai), puis Batelot démissionna, quelques jours après; il fut remplacé, à la mairie, par Thomassin, du 30 mai au 20 juillet, puis par Balthazar Lafrogne.
A la fin des Cent jours, la déchéance impériale causa moins d'inquiétude que le retour des Bavarois. Ceux-ci, aussitôt entrés à Lunéville, le 26 juin, coururent arrêter partout la formation des corps francs, dévoués à Napoléon. Ils savaient que Viriot, de Nancy, et Brice, de Lorquin, s'efforçaient d'en équiper; ils leurs donnèrent la chasse (190). Brice fut cerné au milieu des Russes qui arrivaient par Sarrebourg, et dut se rendre à discrétion au général Orloff, à Frémonville, le 8 juillet.
Chaque village revit les exigences de l'invasion précédente. A. Blâmont, trois commissaires surveillaient la distribution des denrées réquisitionnées. On vit passer, en juin, la maréchale Barclay de Tolly, femme du grand chef de l'armée russe, et le Prince royal de Bavière, dont le dîner fut payé 11 ducats. Le 50e russe, cantonné du 27 juillet au 29 août, resta légendaire dans le pays, où l'on se redit encore sa facilité à user du knout et sa manie singulière de couper la queue des chevaux que le hasard lui faisait rencontrer. Cette occupation heureusement dura peu. Les Russes s'écoulèrent, dès le 21 décembre; pour le 17 janvier 1816, les derniers Bavarois avaient disparu. Le traité d'Aix-la-Chapelle, signé le 9 octobre, avait rétabli la paix pour de longues années.

III Sous les trois dernières Monarchies

1° Sentiments royalistes de la contrée

C'est avec une joie sincère qu'on vit, chez nous, Louis XVIII remonter sur le trône des Bourbons. Qu'on ne s'étonne pas de ce brusque revirement de l'opinion : le peuple était las des régimes précédents et désirait la paix. A Blâmont et dans les environs, la sympathie pour la monarchie fut plus marquée; dans la vallée de la Vesouze, au contraire, elle fut empreinte d'une réserve plus froide, probablement à cause de Lunéville.
Docile aux instructions du sous-préfet, M. de Moulon, notre petite ville se mit, dès les premiers jours, à supprimer ses aigles, cocardes et autres emblèmes impériaux; elle réorganisa sa Garde nationale (3 décembre) ; réalisa une souscription pour les besoins de l'Etat, qui produisit 6.443 francs, et renouvela son conseil municipal (191). Batelot fut maire et Fromental, l'aîné, juge de paix (8 janvier 1816). A l'anniversaire du 21 janvier, il y eut une émouvante cérémonie de réparation, que relate le registre des délibérations. Les dignitaires et la population y assistèrent sans exception. Le 25 février suivant, se présenta le sous-préfet pour apporter un drapeau à la Garde nationale. La fête fut grandiose. Après la revue du bataillon et la remise de son insigne, toute l'assistance se rendit à l'église. Le curé Mathieu expliqua longuement le sens de la bénédiction qu'il allait donner au drapeau blanc, et recommanda la fidélité à son égard ; la foule répondit à sa harangue, en' chantant à pleine voix : Domine salvum fac regem. Toute la soirée se passa ensuite en festins, en danses et en multiples réjouissances
A la date du 2 mai, nous trouvons, dans le même registre des délibérations, sous ce simple titre : Désaveu de l'attentat du 21 janvier 1793, plusieurs pages chargées de signatures. A la suite de celle du chevalier Gérard de Vivier, officier de cavalerie, on lit : «  Né le 25 janvier 1793, je n'ai pu donner mon aveu à la mort imméritée de Louis XVI, mais j'ai vécu avec le regret de ne l'avoir pas connu, et particulièrement de n'avoir pu le venger. » Aucun détail n'indique la raison, ni les circonstances de cette manifestation.
Les réjouissances du 15 juin, motivées par le mariage du duc de Berry, le futur Charles X, furent vraiment populaires. A la messe solennelle, le chant du Domine salvum fac fut accompagné d'une salve de pétards, tirés par les gardes nationaux, et le maire s'écria : «  Jurons, mes amis, de lui être toujours fidèles, de le défendre jusqu'à la dernière goutte de notre sang. » Dans la soirée, un brillant cortège parcourut les rues; le maire portait le buste de Louis XVIII et faisait crier : «  Vive le Roi ! Vivent les Bourbons ! Vivent les Augustes Epoux! » La joie la plus pure et la concorde la plus parfaite n'ont cessé de régner pendant ce jour d'allégresse, et la ville de Blâmont semblait ne former qu'une seule famille, ajoute le même registre. A voir des sentiments si spontanés, nous sommes loin, certes, de la Terreur blanche dont, au dire de certains auteurs, le spectre assombrit cette époque.
Cependant des calamités attristaient encore la région. Les récoltes étaient loin d'être satisfaisantes; la disette de 1815 s'aggrava en 1816; le blé se paya 120 francs le resal ; les pommes de terre, 40 francs; le pain, 5 francs la miche de huit livres. L'année 1817 fut meilleure et le marché aux grains fut rétabli. Une autre plaie consistait dans les rapines, commises par des vagabonds qui infestaient le pays. Pour les faire cesser, Blâmont organisa un corps de veilleurs de nuit, qui, d'heure en heure, faisaient la ronde dans les rues et dans les jardins. Ce service de garde ne cessa qu'en 1825, quand il fut reconnu inutile. La suppression de la conscription avait enchanté le peuple; mais cette joie ne pouvait durer; l'état des peuples réclamait une armée permanente. Une loi du 10 mars 1818 rétablit la conscription, et une autre, du 9 juin 1824, porta le service militaire à huit ans. Comme cette durée parut trop longue, on l'abaissa à sept ans, en 1832, et c'est la règle qui fut observée jusqu'en 1873.

2° Eléments nouveaux de prospérité

A partir-de 1820, l'essor fut rendu à toutes les activités. Les profits agricoles ramenèrent le bien-être dans les villages, et les bénéfices du commerce rétablirent la richesse dans la petite ville. Blâmont, redevenu bourgade affairée et industrieuse, se montra plus que jamais soucieuse de progrès et de distinction, désireuse d'égaler les grandes villes par l'élégance de sa société bourgeoise. Partout reprirent les pratiques chrétiennes, remises en honneur par les missions. On redressa, aux abords des chemins, les croix abattues. On rendit aux clochers leurs voix de bronze : trois cloches à Blâmont, en 1829; autant à Verdenal et à Autrepierre, en 1821.
On fit aux églises les aménagements nécessaires : un bâtiment tout neuf à Nonhigny, en 1820; une nef et une tour à Frémonville, en 1827; une nef à Verdenal et à Vaucourt, en 1832; un presbytère à Autrepierre en 1827, et une maison d'école au même lieu, en 1830.
A Blâmont, les locaux de l'hospice devenaient insuffisants : ils furent agrandis, en 1827. Ceux de l'hôtel de ville surtout criaient misère : ils furent remplacés par l'édifice actuel, dont le dessin est dû à l'architecte Jeandel.
Le budget, porté à 9.707 francs de recettes, en 1828, permit de réorganiser la compagnie des pompiers et de restaurer les fontaines, ainsi que les pavés des rues. Tous les services communaux se virent ainsi redressés l'un après l'autre.
Cette bonne administration fut l'oeuvre de Christophe Batelot. A sa mort, en 1825, son fils, Charles-Marie-Jacques, lui succéda comme maire (192), et fut aussi soucieux des intérêts de tous. Il fit placer le buste de Louis XVIII sur la fontaine de la place Royale, et celui de Régnier, sur la fontaine appelée Massa, située en face de la rue de Domèvre. Il fut enlevé par une mort prématurée, en 1829. A ses qualités de magistrat, il joignait les talents d'un industriel entérite. Il avait établi, au Moulin-des-Champs, en 1826, une taillanderie ou Forge, qui porta-au loin le renom de Blâmont par ses produits estimés.
Cette époque voyait éclore des initiatives industrielles, qui s'appuyaient sur des inventions toutes récentes et qui eurent du succès. Les tanneries étaient en plein essor; elles seraient encore florissantes, si les procédés modernes n'avaient tué les entreprises restreintes.
Le tissage mécanique fut essayé, en 1825, par Martin et Horrer, tous deux cousins de Batelot. Ceux-ci avaient acheté les dépendances du château et y avaient établi des métiers. La production avait ainsi doublé, mais la mode devint défavorable aux étoffes de droguet, et le marché ne demanda plus que les cotonnades coloriées. Il leur fallut abandonner l'entreprise, après un demi-succès. Cependant la voie était ouverte, et les frères Lémant, israëlites, y installèrent des aménagements nouveaux, qui comprenaient à la fois filature et tissage. Leurs procédés réussirent et progressèrent tellement que, vers 1850, ils transportèrent leur matériel à Val-et-Châtillon, et y créèrent une vaste usine qui grandit de jour en jour. Leur exemple fut suivi par des industriels, dont les produits avaient moins de vogue, en particulier par les faïenciers de Badonviller et de Domèvre. Leurs établissements, transformés en filatures, fournirent du travail pendant plusieurs années, puis sombrèrent, vers 1850, pour des raisons diverses.
Loin de rester indifférente à ce réveil économique, l'agriculture chercha aussi à perfectionner ses méthodes et son outillage. Il n'était bruit alors que des progrès réalisés par le savant agronome Mathieu de Dombasle, dans sa ferme modèle de Roville. On alla voir sa charrue perfectionnée et étudier sur place sa méthode de dressage pour les chevaux, question capitale en un temps où les diligences jouaient un si grand rôle. L'idée vint d'établir des concours, et Blâmont fut choisi pour le lieu de la première réunion, à la date du 22 août 1824. Ce fut une fête extraordinaire, dit l'Annuaire de 1825, par le nombre des concurrents, le choix des poulinières et le brio des courses; douze prix de 1.000 francs furent distribués; parmi les gagnants figurent Spire, Helluy et Bella, de Blâmont; tous les autres sont de la région de Sarrebourg.
Les pouvoirs publics avaient soin d'encourager tous ces progrès. On sait qu'en 1820, le sous-préfet de Lunéville fonda une Société agricole, qui fut comme le prélude du Comice agricole réorganisé, le 26 novembre 1846, sur les bases actuelles (193). Les caisses d'assurances contre l'incendie, fondées depuis peu, entrèrent dans les moeurs; Blâmont paya sa première prime pour les bâtiments communaux en 1821. L'Etat songea enfin à multiplier les routes, pour faciliter les transports. Il en fit une, en 1826, entre Ogéviller et Baccarat, par Hablainville. Une autre fut demandée entre Dieuze et Baccarat, mais on hésita, jusqu'en 1832 pour en fixer le tracé; finalement on en créa deux, vers 1834, l'une partant de Bourdonnay, par Vaucourt et Vého, pour rejoindre, à Ogéviller, la route de 1826,-.l'autre, passant par Moussey, Igney, Blâmont, Domèvre et Merviller. Le rapport, qui fut présenté à ce sujet par le maire de Blâmont, dresse un vrai bilan industriel de la région, en établissant que cette route rendra service aux plâtreries de Maizières, aux forêts de Réchicourt, aux scieries et verreries de Cirey, aux faïenceries de Hablutz, Frémonville, Badonviller, Domèvre et Pexonne, aux fabriques d'alênes de Badonviller, Petitmont et Saint-Sauveur, aux fabriques de drap de Gogney, à la blanchisserie de Sainte-Agathe, aux deux filatures de Domèvre, aux forges et taillanderies de Blâmont, aux moulins de la Vesouze, à la poterie de Tanconville, aux carrières de grès de Cirey, du Val et de Parux. Deux ans plus tard (1836) fut créée la route de Blâmont à Cirey et à Saint-Quirin ; en 1845, celle de Blâmont à Badonviller; en 1848, la rectification de la route nationale par Saint-Georges, pour éviter la funeste descente de la Haye-des-Allemands, et, en 1860, la route d'Ogéviller à Badonviller, qui était déjà en projet pendant la Révolution. Ce fut la dernière. Désormais l'attention fut attirée plutôt vers les canaux et les chemins de fer.
Le règne de Charles X, assez favorable en somme, sombra brusquement dans la journée du 30 juillet 1830. Pendant que la Révolution grondait à Nancy et qu'à Lunéville s'affichaient des préférences non douteuses pour le nouveau régime, Blâmont se tint calme et attendit.

3° La Société bourgeoise sous la monarchie de juillet

Louis-Philippe fut vivement approuvé, quand il rétablit la Garde nationale, supprimée en 1828 par Charles X. Aussitôt Blâmont consacra 1.800 francs à l'achat de 150 fusils, de tambours et autres instruments de musique; les gardes payèrent eux-mêmes leur uniforme. Un ordre, venu de Paris, en mai 1831, établit son règlement. Le bataillon cantonal, comprenant 596 hommes, fut divisé en huit compagnies : trois de 100 hommes à Blâmont, une de 96 à Frémonville, une de 53 à Barbas et à Verdenal, une de 53 pour Autrepierre, Repaix et Gogneey réunis.
Le bel enthousiasme du début fut de courte durée. En 1838, toutes les compagnies furent réduites de moitié, et encore, pour éviter double emploi, elles durent incorporer dans leurs rangs les sapeurs-pompiers. Voici les noms des officiers, élus pour trois ans, en 1840 : chef de bataillon, Julien Lafrogne ; porte-drapeau, Louis Duchamp ; capitaines, Mézières et Rousselot, de Blâmont, Hatton, de Frémonville, Dedenon, d'Autrepierre, Hovasse, de Barbas, Cosson, de Verdenal. Ces milices, que les malicieux couplets de Nadaud ont rendues fameuses, servirent surtout à parader dans les banquets et à constituer un auditoire pour les discours officiels. Elles plaisaient néanmoins à la bourgeoisie de ce temps, et c'est avec peine que le peuple les vit disparaître, quand le décret du 11 janvier 1852 restreignit leur nombre aux seules villes importantes, comme Lunéville.
Louis-Philippe affectait des manières bourgeoises qui contribuèrent beaucoup à sa popularité et lui valurent un chaleureux accueil dans toutes les visites qu'il fit en inaugurant son règne. Nos régions eurent le bonheur de le recevoir, en juin 1831. A Lunéville, ce fut le 16. La principale cérémonie fut une revue de toutes les troupes qui composaient son remarquable camp de cavalerie ; le défilé des cuirassiers fut particulièrement impressionnant. Aux côtés du Roi figuraient les jeunes ducs d'Orléans et de Nemours, ses deux fils, le maréchal Soult, ministre de la guerre, le maréchal Gérard, le comte d'Argout, ministre du commerce, les généraux Baudrand et Athalin, ses aides de camp.
En se rendant à Phalsbourg, le lendemain, la Cour traversa Blâmont et s'y arrêta. La réception que lui fit la petite ville est restée légendaire dans le pays, et les circonstances de cette journée mémorable ont fait l'objet de maints récits pittoresques, bien capables d'émerveiller nos jeunes oreilles. Une foule immense se massait sur la place; les villages atteignaient alors le chiffre maximum de leur population ; toutes les rues étaient encombrées de calèches, de chars-à-bancs, des véhicules les plus divers. La Garde nationale au grand complet et revêtue de son imposant uniforme présentait les armes. Quand le Roi fut descendu de son carrosse, le maire, Adrien Lafrogne, se présenta pour lire son compliment.
Les politesses du Roi à l'égard de deux notables de Montreux, Aubert et Fromental, à qui Sa Majesté serra la main, furent très remarquées. Ce dernier, en guise de salutation; avait récité cette stance, qui n'a rien du lyrisme de Lamartine :
Fêtons le passage
Du Roi juste et sage.
C'est l'ami des hommes.
Oui, tous, tant que nous sommes,
Fêtons le passage
Du Roi juste et sage.
Un autre assistant, s'adressant à Mlle de Montauban, avait imaginé un quatrain non moins lyrique:
Vive Louis-Philippe et son auguste race !
Adoptons pour toujours le chemin qu'il nous trace;
Avec les sciences, la paix, les bons beaux-arts,
Nous aurons du commerce aussi les bonnes parts.
Le Roi entendit avec bonhomie et sans sourciller ces poésies naïves, pendant que son entourage se déridait franchement. Chaque jour, du reste, lui donnait l'occasion de savourer ces improvisations populaires. La fête fut trop courte en sa sincère cordialité. Le brillant cortège reprit aussitôt sa marche, au milieu des vivats enthousiastes. Pour caractériser l'aisance de ce temps et l'administration débonnaire de ce règne, les anciens répétaient volontiers que ce fut l'époque des pièces de cent sous.
Malgré l'incontestable progrès de l'agriculture et de l'industrie, nombre de personnes partaient alors vers l'Amérique, pour y faire fortune. Etait-ce la conséquence d'une population trop abondante, ou l'effet d'un courant d'émigration, comme il en souffle parfois ? Peu importe. Ce mouvement ne dura guère, et les déceptions furent fréquentes. S'il y eut quelques colons heureux - les fameux oncles d'Amérique - la plupart des émigrants revinrent bientôt, plus pauvres qu'avant leur départ.
Dans la mère-patrie, du reste, on était servi à souhait. Des édiles intelligents et probes dotaient la ville de Blâmont de toutes les améliorations désirables : réverbères à huile, pour l'éclairage des rues (1833), écoles de filles agrandies (1835); subventions pour l'hôpital et pour l'Association des Dames de Charité; création d'une synagogue et d'un cimetière pour la communauté israélite (194).
A cette époque, on eut peu d'épreuves à subir. En 1833, apparurent des cas isolés de choléra. Le 14 juillet 1846, une grêle terrible ravagea le canton, surtout Gondrexon et Remoncourt. La nuit du 16 août 1847 vit s'allumer à Blâmont un violent incendie, qui dévora sept maisons de la rue des Voileurs, et jeta sur le pavé dix-huit ménages, composés de soixante-deux personnes.
A l'activité déjà fiévreuse vinrent s'ouvrir des champs nouveaux, au grand profit de la richesse publique et du bien-être général. La rumeur populaire annonçait la création d'un canal destiné à unir la Marne au Rhin. Où passerait-il et qui en bénéficierait ? Le Blâmontois s'y crut un instant intéressé, mais ce pays fut jugé trop accidenté et la région des étangs lui fut préférée. On décida qu'à partir de Dombasle le canal remonterait la vallée du Sanon, passerait au large de Réchicourt et de là gagnerait Sarrebourg. Les travaux commencèrent en 1835. Les services d'une voie navigable peuvent s'étendre au loin; ils semblent cependant avoir peu contribué à la prospérité de notre industrie locale.
Une invention plus merveilleuse ne tarda pas à captiver l'attention des esprits. Ne parlait-on pas de chars de feu, capables de traîner, sur des voies ferrées, des charges énormes et à une vitesse inusitée ? Des expériences, faites autour de la capitale, paraissaient concluantes.
En 1838, le Ministre saisit les Chambres d'un projet de ligne reliant Paris à Strasbourg. Trois ans se passèrent sans qu'on pût soupçonner la direction qu'elle prendrait, ou même si Nancy serait sur son parcours. Enfin, en 1841, ce dernier point fut décidé. Aussitôt Lunéville offrit 1000.000 francs pour que la voie traversât son territoire, au lieu de suivre le canal vers Einville, comme il en était question. Blâmont, à son tour, s'empressa de faire savoir que, n'ayant pas d'argent, il donnerait volontiers une partie de ses forêts, pour bénéficier de ce nouvel agent de progrès.
En 1842, les Chambres approuvèrent le trajet par Nancy, en réservant le mode à adopter pour la traversée des Vosges, difficulté paraissant très considérable à ce moment.
Trois projets furent alors présentés. Un premier songeait à emprunter la vallée de la Moder, par Vïc, Dieuze et Sarralbe; mais le voisinage de la Bavière parut au génie militaire un danger réel, qu'il fallait éviter, et l'on n'en parla plus. Un second voulait gagner la Bruche, par Raon et Schirmeck; mais il réclamait un tunnel de 13 kilomètres sous le Donon, et ce travail parut alors impraticable. Un troisième projet proposait de rejoindre Saverne, en utilisant la trouée de la Zorn. Il y avait encore là nombre de difficultés, cependant elles furent jugées moins ardues. Restait à préciser le trajet entre Lunéville et Sarrebourg.
Dans sa séance du 29 août 1843, le Conseil général de la Meurthe estima qu'il convenait de remonter la Vesouze. La municipalité de Blâmont se hâta d'appuyer cet avis, en indiquant deux moyens de gagner Sarrebourg, à savoir : passer par Saint-Georges, ou par La Frimbole et Lorquin. Ce parcours, pourtant rationnel, fut rejeté pour des raisons inavouées. Des familles influentes de Cirey, Blâmont et Bénaménil, craignirent, dit-on, le renchérissement du bois nécessaire à leurs industries; les paysans, ajoute-t-on encore, redoutèrent pour leurs récoltes la noire fumée des locomotives. Toujours est-il qu'à partir de Marainviller, le tracé s'engagea dans une région maussade, pour atteindre Avricourt et Héming. Une halte était prévue seulement à Avricourt. Une autre fut demandée pour Réchicourt, en 1851. La station d'Emberménil fut concédée plus tard, et celle de Laneuveville-aux-Bois, vers 1895.
Commencés en 1844, les travaux furent activement poussés. Lyautey, ingénieur à Sarrebourg, fut chargé de la 4e subdivision, allant de Leintrey à Hommartin; du House, ingénieur à Nancy, s'occupa de la 3e, allant de Dombasle à Leintrey. Les premiers trains circulèrent en 1850, et l'inauguration solennelle, par le prince Louis-Napoléon, alors président de la République, eut lieu, le 18 juillet 1852. La pluie, ce jour-là tombait à torrents. Le Prince se contenta d'aller de Lunéville à Lutzelbourg et d'en revenir, sans même se montrer à la portière, puisque, par ce temps affreux, personne n'était venu pour le saluer.
Quand les progrès récents eurent substitué la houille au bois dans les puissants foyers des usines, Blâmont, et plus encore Cirey, regrettèrent de n'avoir pas accepté la voie ferrée. C'est pour réparer la faute commise, que la famille Chevaucher de Vadrôme voulut créer l'embranchement qui relie Cirey à la grande voie. Mais encore fallut-il ici décider si la nouvelle voie desservirait les importants villages de la Vesouze jusqu'à Marainviller, ou si elle rejoindrait Avricourt, point le plus rapproché. De vives discussions s'engagèrent, qui ne sont pas encore oubliées. Le sénateur Varroy trancha le débat en imposant la ligne la plus courte, qui compte seulement dix-sept kilomètres. Le tracé commença en 1866 et l'inauguration eut lieu, en mai 1870. La construction de la voie coûta 1.624.000 francs. La guerre suspendit son trafic jusqu'en 1872.
Quel régime, en ce siècle, a été capable de donner satisfaction complète ? Malgré sa popularité, le roi Louis-Philippe dut abdiquer et s'enfuit, le 26 février 1848, devant une révolution provoquée par la réforme électorale. Dès que cette nouvelle fut connue, la municipalité de Blâmont cessa ses fonctions; une commission provisoire fut nommée, le 11 mars, et Collesson remplaça Lafrogne à la mairie. Son premier acte fut de protester contre la suspension du juge de paix Vaultrin, mais sa démarche fut vaine, et Quintard fut envoyé pour rendre la justice jusqu'en 1851. Les élections du 4 juin reconstituèrent le corps municipal, avec Collesson pour maire et Spire et Cholet pour adjoints : le budget dépassait 25.000 francs.
Les arbres de Liberté furent de nouveau en faveur, et la plupart des communes s'empressèrent d'en planter. A Blâmont, la cérémonie eut lieu, le 9 avril, et passa inaperçue. Il en fut de même dans les environs, sauf à Leintrey, où se produisirent de graves désordres. Les partisans de Boiselle, maire suspendu, arrachèrent à deux reprises l'arbre de la Liberté, maltraitèrent Masson, le nouveau maire, et pillèrent la caisse communale. La justice intervint et, jugeant les gendarmes trop peu nombreux pour rétablir l'ordre, fit appel à cinquante hussards de Lunéville. Neuf des principaux coupables furent emprisonnés (195).Les fêtes de la Fraternité (28 avril) et de la Concorde (21 mai) n'eurent aucun succès et il n'en fut même plus question. Peu après, la suppression des ateliers nationaux provoqua des bagarres sanglantes à Paris. On apprit avec émotion que plusieurs enfants du pays y étaient mêlés. Boris, de Blâmont, capitaine au 52e de ligne, se couvrit de gloire, en combattant pour l'ordre, et fut récompensé par le grade de chef de bataillon. Marchal, de Merviller, sergent de grenadiers, fut promu sous-lieutenant, pour avoir pris un drapeau aux insurgés et forcé une barricade. Par contre, Vigneron Jules, d'Ogéviller, et Moniel, de Badonviller, se virent condamnés à la déportation, pour s'être trouvés parmi les factieux.
L'opinion de Blâmont ne se montra pas favorable à la République : rien n'y fut modifié à la suite du nouveau régime. Dans la plupart des communes, au contraire, les maires furent changés aux élections de juillet. Lorsqu'il s'agit, le 10 décembre, de choisir entre Napoléon et Cavaignac, notre canton prouva son bon esprit, en donnant 2.566 voix au premier et 410 seulement au second; nul autre canton n'émit un vote aussi sage. Le prince Napoléon ralliait les partisans de la Royauté et ceux de l'Empire, et n'effarouchait pas outre mesure les républicains, tandis qu'à Lunéville, ces derniers criaient sous les yeux souriants du sous-préfet : «  Vive la République ! Vive Napoléon ! » (196).
L'année 1849 fut marquée par la troublante apparition du choléra. Le fléau, heureusement, resta limité à trois foyers : Bertrambois, qui eut quelques victimes; Emberménil, qui eut 58 cas et 17 décès; Vého, qui eut 35 cas et 15 décès. Le reste du canton en fut quitte pour la peur.
Dès 1850, on pouvait deviner le changement de constitution que devait réaliser le coup d'Etat du 2 décembre 1851. L'autorité du Prince-Président était si bien assise que le pouvoir lui fut offert, peut-on dire, par la faveur du peuple. Le plébiscite recueillit dans notre canton 3.216 oui et 162 non. Après la proclamation de l'Empire, le second plébiscite de ratification fut plus unanime encore, puisque, sur 3.682 électeurs inscrits, 25 bulletins seulement furent réservés, 63 négatifs, et les autres affirmatifs. Mieux que tout autre indice, ces chiffres font connaître le véritable esprit de la contrée.

IV - Sous le Second Empire

1° Prospérité persistante

L'aisance et le progrès continuèrent sous le règne de Napoléon III, comme au temps de Louis-Philippe. Deux années, cependant, 1853 et 1854, furent mauvaises : les récoltes furent médiocres et le choléra fit de nouvelles victimes. La date de 1854 reste toujours terrifiante, à cause des brusques effets de ce mal asiatique. Blâmont compte trois décès ; Ancerviller, quarante-huit; Nonhigny, deux; Remoncourt, quatre; Frémonville, un. Les médecins prodiguèrent leurs soins; les soeurs de l'hospice coururent à Neuviller, Frémonville, Avricourt, partout où les appelaient les familles. Le fléau reparut deux ans plus tard, mais sans pénétrer dans le Blâmontois. La guerre de Crimée (1853) et la guerre d'Italie (1858) causèrent aussi quelques angoisses, mais ce furent les seuls points noirs dans une période de vingt années.
Les statistiques de la population, publiées par l'Annuaire du département, accusent les chiffres les plus élevés, vers 1848 : Blâmont, 2.521 habitants; Ancerviller, 789; Autrepierre, 333; Domèvre, 1.116; Domjevin, 530; Harbouey, 622; Herbéviller, 619; Leintrey, 664; Vého, 337. Depuis ce temps, le niveau ne cessa de s'abaisser.
Avec une population aussi florissante, le pays ne pouvait que présenter la plus vive animation. Aussi quelle allégresse dans la bruyante affluence des fêtes patronales, des séances de conscription, des jours de vente ou de marché. Chaque vendredi, Blâmont faisait l'effet d'une fourmilière affairée, se précipitant vers les Halles. Au point du jour, c'était le vacarme du marché aux petits porcs; peu après, le murmure confus de la vente du beurre, de la volaille, des oeufs; plus tard, le silence plus grave des opérations froidement calculées sur le blé et les autres céréales. Les ménagères avaient vite fait leurs emplettes et n'encombraient pas la rue, mais les messieurs s'attardaient plus volontiers, sauf à rentrer avec la face enluminée. Il fallait cela, croyait-on, pour faire marcher le commerce. De fait, il se brassait une masse d'affaires où le


Cliché PIERSON
EGLISE DE BLÂMONT

juge de paix, les notaires, le banquier, même les hôteliers avaient à intervenir, au grand profit de leur considération et le leur fortune.
La petite ville restait vraiment le centre de la région et montrait ce -que peuvent l'intelligence, le bon esprit et l'entente réunis. Elle eut,, du reste, la bonne fortune de posséder alors plusieurs hommes de haute valeur. Son maire, Emile Mathis de Grandseille (197), nommé en 1853, justifia pleinement la confiance de ses concitoyens et occupa son poste jusqu'en 1876. Chef indiscuté du parti royaliste, dénommé blanc, on peut dire qu'il personnifia l'esprit conservateur. Son nom a gardé toutes les sympathies. Le docteur Lahalle (198) fut non seulement un médecin savant et dévoué jusqu'à s'exposer à la mort au cours de l'épidémie de 1812, mais encore un agronome avisé, qui améliora la pomme de terre et la luzerne, vulgarisa le sainfoin à deux coupes, étudia la fermentation du. raisin, montra les avantages de l'irrigation pour les prairies et mérita, pour ses essais multiples, le grand prix de la Société d'Agriculture. Sa bienfaisance l'avait placé en si haute estime qu'aussitôt connue sa maladie, la foule courut à l'église pour demander sa guérison et lui fit, après sa mort, des funérailles triomphales. Le docteur Lesaint (199), son gendre, fut, comme lui, un praticien habile, un savant et un philanthrope. D'autres, d'une moindre renommée, tels que les Lafrogne, les Collesson, les Vaultrin, les Duchamp, les Rousselot, furent aussi des hommes bienfaisants et environnés d'estime.
Bon nombre de personnes s'appliquaient à rendre plus florissante l'oeuvre charitable de l'hôpital. Les legs Chatton, de Sailly-Pindray et Fidry avaient un peu relevé les ressources de cet établissement, en partie ruiné sous la Révolution et l'Empire, mais c'était encore insuffisant. La ville dut lui venir en aide, sous forme de subventions annuelles, qui furent constamment renouvelées depuis 1820. Un conseil d'administration, composé de sept membres, qui avait comme président, le maire, et comme receveur, le percepteur, fut chargé de gérer ses intérêts. Une Association de Dames de Charité (200) lui fut annexée, en 1838, pour distribuer des aumônes, en dehors du Bureau de Bienfaisance, qui existait depuis 1826. Grâce à tous ces concours, l'hôpital disposait, en 1840, de quatorze lits fondés, pouvait abriter gratuitement vingt orphelines et recevoir plusieurs malades ou infirmes payants.
Bientôt ses finances furent assez prospères pour permettre d'agrandir certains locaux insuffisants (1860) et de restaurer la chapelle actuelle, qui fut inaugurée solennellement, en avril 1866.
Il est juste d'attribuer aux Soeurs de Saint-Charles une part importante dans ces succès. Elles n'étaient que trois, au sortir de la Révolution : Soeur Monique Petit, qui mourut du typhus en 1813, âgée de 59 ans; Soeur Agnès Comtois, morte en 1808, âgée de 73 ans; Soeur Joseph Leclair, morte en 1828, âgée de.76 ans.
Les supérieures suivantes furent : Soeur Adélaïde Pant, dont la mort, en 1830, causa d'unanimes regrets; Soeur Odile Debord, morte en 1845; Soeur Denise Granier, qui obtint de porter à sept le chiffre de sa communauté. Toutes ses religieuses montrèrent un dévouement héroïque, en

1854, pendant l'épidémie de choléra. Elle mourut le 25 avril 1872. Lors de ses funérailles, les habitants rendirent à sa mémoire un hommage inoubliable de reconnaissance; l'infirmité cependant l'avait forcée à céder sa place à Soeur Philomène Nicolas, qui fut Supérieure jusqu'en 1878. Nous nommerons encore les religieuses qui reposent au cimetière, dans des tombes gracieusement concédées par la ville : Soeur Hélène Najean, morte en 1889; Soeur Anastase Garré (1892); Soeur Gabrielle Germain (1899) ; Soeur Eusèbe Vermerot (1910). Point n'est besoin de vanter les établissements de ce genre, car les miséreux ne sauraient trouver meilleur refuge que dans un asile situé dans leur pays natal, au milieu d'horizons connus, sous la garde de la charité religieuse.
Une autre entreprise eut aussi le don de susciter de magnifiques efforts et une entente unanime : c'est la construction de la nouvelle église. Depuis un siècle, cette oeuvre s'imposait, mais on la retardait, en remaniant, vaille que vaille, l'ancien édifice, resté, malgré tout, trop exigu.
Vers 1850, les murailles présentaient des lézardes inquiétantes, la toiture


Cliché A. MUNIER.
INTÉRIEUR DE L'ÉGLISE DE BLÂMONT

était vermoulue, et le clocher, si endommagé que la petite cloche, dite Fromental, s'en détacha, au risque d'écraser plusieurs personnes. L'Evêque de Nancy, en apprenant le fait, se hâta d'interdire la vieille église.
On décida de faire du neuf; mais en quel emplacement et dans quel style ? Ces questions passionnèrent l'opinion, sans hâter l'exécution. Les professeurs du collège donnèrent, un jour, à leurs plus grands élèves, ce sujet de dissertation : «  Indiquer les projets concernant la nouvelle église ; discuter le pour et le contre. » Jamais devoir de classe ne fut pris plus au sérieux. Un élève, plus tard l'abbé Melnotte, remporta le prix pour son plaidoyer en faveur de l'ancien emplacement. Sa thèse reflétait les sentiments de la population et sauvegardait les souvenirs du passé, mais elle ne prévalut pas. Le conseil municipal et le judicieux curé Mengin (201) décidèrent que la nouvelle église longerait la rue de Barbas, à une faible distance de l'ancienne et dans un milieu plus accessible. L'architecte Vautrin, tout épris d'art gothique, dressa des plans, dans le genre de ceux qu'il exécutait alors à Baccarat, sauf qu'il mit deux tours au portail. L'édifice n'en fut que plus majestueux.
Chacun voulut contribuer aux frais ; une souscription fournit 36.000 francs. Une dame Marie Comte fit un legs de 10.000 francs. L'abbé Marsal offrit 35.000 francs, réalisés par l'habile gestion de son collège. La ville prit le reste à sa charge en escomptant une subvention de l'Etat, qui fut seulement de 10.000 francs. Le tout coûta 100.000 francs. C'est pour concourir à cette oeuvre que, dans l'hiver de 1852, on imagina une cavalcade historique qui représenta le duc René II, venant prendre possession de sa bonne ville de Blâmont. Toute la contrée accourut pour la voir se dérouler, le 17 février 1853. C'était le lundi gras.
Héraut d'armes, trompettes, duc de Lorraine avec quatre pages, gouverneur avec quatre pages, d'autres personnages, tous ornés de costumes splendides, parcoururent les rues, au milieu d'une foule émerveillée. La journée fut splendide : un gai soleil faisait étinceler les frimas, et les trois capucins firent bonne recette en fermant la marche du cortège. En cette fête de carnaval, la petite bourgade se retrouvait toute lorraine et, ce qui est aussi bien, tout aristocratique dans ses goûts.
La première pierre fut posée, le 20 octobre 1852, et l'édifice fut achevé quatre ans plus tard. Dans l'intervalle, les offices furent célébrés dans la chapelle du collège. La bénédiction fut donnée par Mgr Menjaud, le 6 septembre 1856. Le curé-bâtisseur était rayonnant. Poète à ses heures, il servit à ses convives une longue pièce de vers, renfermant des compliments délicats pour toutes les personnes qui l'avaient secondé. Il sentait le poids des ans. Il crut pouvoir chanter son Nunc Dimittis, et demanda que son cher abbé Marsal devint son bras droit, pendant qu'il jouirait d'un repos bien mérité. Ses voeux furent exaucés et il resta curé honoraire jusqu'à sa mort, en février 1868.

2° Les Ecoles et le Collège

Après la Révolution, le désir de s'instruire grandit de jour en jour dans toutes les classes de la région. Toutes les communes eurent leur école primaire, parfois logée misérablement, mais suivie tout au moins pendant l'hiver. Au milieu d'elles, Blâmont fut un vrai foyer de lumière, grâce à des concours multiples habilement utilisés. L'école primaire était encore mixte en 1807 ; Nicolas Charron, maître vénéré, la dirigeait depuis vingt-deux ans. Un voeu unanime réclama des classes séparées pour les filles. Le conseil, rappelant les traditions de bonnes manières, implantées par les Religieuses de Notre-Dame, obtint, après plusieurs démarches près du Préfet, qu'une soeur Vatelotine, avec l'aide d'une compagne, tînt une école pour «  enseigner la lecture, l'écriture, le calcul et les travaux manuels propres aux filles ».
Les deux premières maîtresses furent Soeur Aprône Robert et Soeur Louise Henry. Dès l'ouverture de leur classe, en 1808, elles eurent 130 élèves, dont 90 payantes. En 1812, une troisième Soeur fut appelée pour diriger les travaux manuels. On en demanda une quatrième, en 1827, et deux autres, en 1842. On songea à créer une salle d'asile, en 1845, et un cours supérieur, avec pensionnat, en 1849. La Congrégation de la Doctrine-Chrétienne se prêta volontiers à ces améliorations, et la ville donna, sans marchander, sou appui et ses subsides (202). De 1845 à 1880, l'enseignement congréganiste eut, comme émule, une institution libre, tenue par les dignes demoiselles Tanche (203). De ces deux maisons, qui d'ailleurs vécurent toujours en bonne harmonie, sortirent toutes les dames et demoiselles qui devinrent l'élite de la région.
L'enseignement des garçons fut aussi soigné que celui des filles et fut donné par des maîtres aussi recommandables. Ce furent Louis Tanche, de 1810 à 1832; Joseph Barthélémy, de 1832 à 1842; Michel, de 1842 à 1854; Charles Barthélémy, de 1854 à 1876. On crut utile, vers 1854, d'ouvrir aussi un cours supérieur, et les deux Frères Théodore et Hippotyte, de la Doctrine-Chrétienne, enseignèrent avec succès, dans des locaux ayant appartenu aux Capucins; mais la guerre de 1870 fit tomber leur entreprise. Le plus brillant effort pour développer la science fut sans contredit l'institution du Collège municipal, où, pendant un demi-siècle, la jeunesse de la région reçut l'instruction secondaire.
Cette initiative sembla aux édiles de Blâmont une suite naturelle de la classe de Latinité, qu'avait reprise l'Abbé Fidry (204), en 1802, et que continua l'abbé Lebon (205), jusqu'en 1819. Pour se conformer à la loi, la ville déclara qu'elle voulait ouvrir une école normale ou collège communal avec quatre maîtres laïcs. Louis Tanche, instituteur, en était nommé Principal. Mais, un an après, il fallut revenir à l'abbé Lebon, que l'on pria de choisir ses aides. Il prit des ecclésiastiques et réussit


COLLÈGE DE BLÂMONT
(ancien couvent des Religieuses de Notre-Dame)

assez pour songer à créer un Internat. La ville, entrant dans ces vues, acquit et aménagea progressivement les bâtiments des Religieuses de Notre-Dame. En 1827, il y avait dix-huit internes et quantité d'externes, dont les meilleurs enfants de l'école, admis comme boursiers de la ville. Les résultats furent tels que le conseil inscrivit sur son registre ce bel éloge du Principal : «  L'Abbé Lebon, prêtre plein de zèle et de talent, a fait fleurir le collège au plus haut degré. » Cependant, à bout de forces, le digne ecclésiastique dut abandonner sa tâche, le 7 mai 1833, et la céder à l'abbé George, puis à l'abbé Champion, neveu de Mgr Donnert, qui ne firent que passer. De 1837 a 1841, l'oeuvre périclita, au grand regret de la ville, qui voyait prospérer, au contraire, tous les collèges semblables au sien, à Vic, à Fénétrange et ailleurs.
Pour un suprême essai, le conseil s'adressa au vicaire qui, depuis quatre ans, se faisait apprécier aux côtés du curé Mengin, l'abbé Marsal (206), et lui laissa toute initiative, en lui promettant tous les subsides nécessaires. Sans plus tarder, l'actif Principal organisa salles d'étude et de classe, dortoirs, cours de récréation et même potagers. Il rêva d'une institution capable de faire obtenir le baccalauréat et chercha des maîtres compétents. Plusieurs furent remarquables : les abbés Guyot, Rolle, Gérard, Richard, Petitcolas. Le célèbre compositeur Marteaux y dirigea une fanfare, que l'on devine excellente. Le règlement fut celui d'un séminaire ; l'entrain à l'étude fut merveilleux, l'éducation soignée. L'uniforme comprenait la tunique militaire en. drap bleu de roi, avec col bleu clair et boutons d'or, ornés du chiffre B ; le pantalon de même avec bande bleu clair ; le ceinturon de cuir et le képi à la française avec galon d'or. On a dit que cette gent écolière fut parfois bruyante, voire même indépendante; la vérité est qu'elle n'eut point la crainte qui éloigne du maître et qu'elle usa entre élèves d'une franche camaraderie. Les quatre plus sages avaient le titre et le rôle de sergents et répondaient de l'ordre. Cette surveillance était suffisante et bien acceptée. Pour les offices religieux, on aménagea, en 1848, une magnifique chapelle, dont on peut encore admirer les nervures et les chapiteaux gothiques, malgré les mutilations de la dernière guerre.
Les plus beaux temps de cette institution sont compris entre 1840 et 1860; le nombre des internes s'élevait jusqu'à cent. Il en sortit un grand nombre de médecins, d'officiers, de notaires et d'autres personnalités importantes ; il s'y prépara une pléiades d'ecclésiastiques, qui laissèrent des noms vénérés dans le pays.
L'abbé Marsal fut remplacé, en 1856, par le jeune abbé Voinot, qui resta seulement deux ans Principal, et par l'abbé Hauteville, qui prit le titre de Supérieur (1858). Les études furent toujours bonnes, mais la discipline, dit-on, se mit à péricliter, pour avoir excédé de rigueur. Survint à Nancy Mgr Lavigerie, dont le désir d'innover est bien connu et qui voulut rendre diocésains tous les collèges communaux. La rentrée de 1863 se fit avec un personnel tout nouveau : l'abbé Gondrexon, supérieur; l'abbé Georges, directeur; l'abbé Gascon, économe, remplacé plus tard par l'abbé Blondot. Sans que le mérite des maîtres fût en cause, le collège alla en faiblissant jusqu'à la guerre; en 1869, il n'y avait plus que douze internes. A Vic et à Fénétrange, il en fut de même. La vogue était aux grands 1ycées ; les chemins de fer facilitaient l'accès des grandes villes; les gens de la province voulaient avoir mieux que les éléments locaux, qui leur avaient suffi jusque là.
Quand la guerre éclata, en juillet 1870, la date de la sortie fut avancée et il n'y eut plus de rentrée, du moins pour les ecclésiastiques. Pourtant, après l'occupation, en 1873, la ville voulut rouvrir un établissement qu'elle croyait toujours utile. Elle s'adressa à M. Gérardin, précédemment directeur d'un petit pensionnat à Insming, et lui donna comme aides M. Labourel et deux répétiteurs. Les études furent restreintes aux matières scolaires et aux rudiments des lettres. L'Internat fut peu fréquenté et en hiver seulement. Vers 1880, il fallut se résigner à fermer les portes d'une institution, qui n'avait pas manqué de gloire.

3° La Guerre franco-allemande

Vers la fin de l'Empire, l'esprit du Blâmontois s'était grandement modifié. Des rêves de liberté l'avaient détaché de Napoléon III, de sorte qu'au plébiscite du 8 mai 1870, il se trouva 107 bulletins nuls et 414 bulletins d'opposition, sur les 3630 inscrits et les 3.158 votants du canton. Non seulement les villages de la Vesouze se laissaient gagner à l'idée républicaine, mais aussi les autres milieux, plus attachés, jusque là, au parti Conservateur.
Arriva bientôt un cruel lendemain : la guerre déclarée le 15 juillet, et les hostilités commencées de suite.
Sur l'initiative de son maire, Blâmont vota, le 24 juillet, un secours de 1.000 francs pour les blessés, prépara cent lits dans le collège et attendit. La compagnie de la Garde mobile fut organisée par le capitaine Mézières et le lieutenant Genfeld.
On sait les pénibles résultats des batailles engagées, le 6 août, près de Haguenau, et la retraite précipitée du corps d'armée de Mac-Mahon. Le mardi 9, arriva, par la route de Sarrebourg, l'avant-garde, puis le gros des troupes vaincues. C'était une cohue lamentable de soldats de toutes armes, le visage hâve, sans ordre, la plupart sans fusil ou sans sac. Ce spectacle est toujours là dans nos yeux d'enfant. Les cavaliers, dont la mission était plutôt de protéger les fantassins, continuèrent leur route, et laissèrent ceux-ci camper à Blâmont pendant une nuit. Au petit jour, tous avaient repris leur marche, non sans avoir dévalisé auberges, boulangeries et épiceries.
Les fuyards étaient à peine partis qu'arrivaient déjà les Allemands. Le soir même, ils s'étaient emparés de tous les services municipaux et agissaient en maîtres. Leur avance méthodique fut si rapide que, le surlendemain, 12 août, à midi, un escadron de uhlans mettait pied à terre au centre de Lunéville.
Le dimanche 7, tous les conseils municipaux avaient dû être renouvelés, mais il ne sortit du vote que des conseils incomplets. A Blâmont, neuf membres élus constituèrent une commission provisoire, qui fut chargée de parer à toutes les éventualités. Chacun d'eux remplit son mandat avec tact et probité : c'est le témoignage qui se trouve annexé au procès-verbal de mai 1871, alors que finissait ce mandat.
Les troupes allemandes, passant en courant, durant tout le mois d'août, imposèrent ça et là des réquisitions brutales. Le Prince royal avait mis à la charge des communes les rations à fournir; soit deux francs par homme et par jour, et quarante-cinq francs pour les officiers.
Dès le 8 septembre, les troupes d'occupation s'installèrent dans le pays et logèrent les bureaux de leurs services à l'hôtel de ville de Blâmont. Le 15 septembre, le modeste bourg apprit avec stupéfaction qu'il lui faudrait payer une contribution annuelle de 30.907 francs, sans compter les impôts fonciers, qui devaient se lever à part, et les droits indirects, dont un tiers devait être servi aux Prussiens. Pour satisfaire à ces exigences imprévues, le maire, Mathis de Grandseille, obtint de ses amis un prêt à la ville de 20.000 francs. Au 31 décembre, les dépenses pesant sur les habitants atteignirent le chiffre effrayant de 99.300 francs. Peu après, il fallut payer la quote-part de la taxe imposée au département, puis celle de l'amende infligée à cause du pont de Fontenoy. Bientôt les charges de toutes sortes furent telles qu'elles dépassèrent sept fois la valeur globale des revenus fonciers. Le maire, Mathis, crut devoir implorer la clémence de l'empereur Guillaume, en faisant valoir la dette flottante de la ville, qui se montait à 50.000 francs, mais il n'eut pas l'honneur d'une réponse, et il fallut de nouveau recourir à un emprunt de 30.000 francs. Ces embarras financiers s'arrangèrent peu à peu, dans la suite, grâce à l'habileté de la commission municipale, grâce surtout au dévouement de MM. Mathis et Cholet, maire et adjoint, dont le nom ne peut-être oublié.
Les autres villages du canton eurent à résoudre des difficultés pareilles, bien que moindres. Mieux valaient ces plaies d'argent que la dévastations, les incendies ou les massacres, qui souvent viennent les aggraver : c'était la guerre et la France était battue.
La région, relativement préservée, fut prompte à se relever. En deux années, notre généreux pays sut se libérer de l'énorme dette des cinq milliards.
Blâmont subit, jusqu'au dernier jour, la présence des troupes allemandes d'occupation. Elles étaient logées dans des baraquements, dressés près du pont du Xa, dans la prairie qui borde la Voise. C'est le 2 août 1873 que les derniers de ces soldats repassèrent, dans la direction de Saint-Georges, une frontière non éloignée alors, mais aujourd'hui glorieusement reculée jusqu'au Rhin.


CONCLUSION

Nul ne s'étonnera de nous voir clore ici notre étude. Pour être incorporés à l'histoire, les faits ont besoin de lointain et il est toujours délicat de mettre en scène et de juger des personnalités qui peuvent encore exister.
De plus, notre région se trouve à un tournant décisif, qui en a grandement modifié l'aspect. Il est difficile, par exemple, d'établir un parallèle entre les temps que nous venons de décrire et le demi-siècle qui s'est écoulé après la guerre de 1870, tellement les idées, les moeurs et même les ressources matérielles ont changé. Ne faudrait-il pas abandonner notre optimisme, en constatant la mévente de la terre et de ses produits, la diminution de la population rurale par suite de l'abaissement de la natalité et de l'exode vers les centres industriels ? Le malaise agricole, causé par la rareté de la main-d'oeuvre, est particulièrement sensible dans notre région. La ville de Blâmont, elle-même, privée de ses tanneries et de sa forge, amoindrie dans sa population et dans son commerce, n'est plus l'industrieuse capitale d'autrefois. Quelles causes ont amené cette déchéance relative ? Il serait peut-être délicat de le rechercher. Mieux vaut, pour conserver l'union, qui est une source de force, exprimer le confiant espoir que Dieu ramènera, dans un avenir prochain, les prospérités et les joies, qui nous ont souri dans le brillant passé que nous venons d'évoquer.


(182) Hourdiaux à Foulcrey; Dedenon à Igney; Rondeau à Remoncourt, Saulnier à Harbouey.
(183) Archives de l'Evêché.
(184) Michel : Biographies Lorraines.
(185) Voir Dedenon : Notice sur le général Klein; Pays Lorrain, août 1930.
(186) Voir Pays Lorrain, 1910, p. 236.
(187) Extrait du Registre des Délibérations de Blâmont.
(188) Voir Benoit : Invasion de 1814 ; Mémoires du général comte de Ségur, III, p.103. - Bouvier : Les premiers Combats de 1814, p. 37. - Erckmann-Chatrian : L'Invasion ou le fou Jégoff.
(189) Voir Journal de la Lorraine et du Barrois, 6 mai 1814.
(190) Brice Nicolas Noël, né à Lorquin en 1781, était capitaine dans la Garde impériale en 1814. Il rentra dans l'armée en 1830, fut général en 1848. Il mourut à Nancy en 1861, commandeur de la Légion d'honneur. Voir Benoit ; Les Corps francs du Commandant Brice; Annuaire de 1852; Pays Lorrain, 1926.
(191) Il ne resta de l'ancien conseil que Lahalle, Pierron et Thomassin; furent éliminés Gérard, Fromental, Vaultrin, Jacquot, Mercier et Lafrogne ; furent élus à leur place Antoine, Batelot, Charron, Duchamp, Hertz et Matins.
(192) Né à Blâmont, en 1785, il épousa Louise Dufays et en eut deux filles : Catherine, mariée, en 1840, à Emile Mathis, de Grandseille, et Mathilde, mariée à Aymar le Harrivel de Gonneville, de Nancy. Son frère, Louis-François-Marie, se fixa à Saint-Maurice, vers 1820, et y exploita la forge de ce lieu, jusqu'à sa mort, en 1835.
(193) Le premier concours de ce Comice à Blâmont, eut lieu en 1847; il se renouvela chaque sept ans, puis chaque neuf ans après 1870.
(194) Cette Communauté comptait alors une centaine de membres; elle eut, pour ministres officiants : MM. Lévy, mort en 1870, et Marx, jusqu'à 1903. Herbéviller eut aussi des familles israélites jusque vers 1880; une cloche de l'église honorait le trépas de leurs membres, parce qu'elles avaient voulu participer aux frais de la sonnerie. D'autres éléments non catholiques sont aussi à signaler en divers lieux : à Blâmont, une colonie de Réformés de l'Eglise de Metz, au nombre de trente, amenée à Blâmont, vers 1841, par Gogelein, brasseur; une autre de la Confession d'Augsbourg, introduite vers 1848, toutes deux disparues bientôt après; à Herbéviller et surtout à Repaix, une colonie d'Anabaptistes, originaires d'Alsace, perpétuée jusqu'à nos jours.
(195) Petites Affiches de Lunéville, 8 avril 1848.
(196) Journal de Lunéville, 13 janvier 1849
(197) Emile Mathis, fils de Louis, propriétaire de Grandseille depuis 1814, fut capitaine de Pontonniers et d'Artillerie, chevalier; de la Légion d'honneur. Il se maria à Blâmont avec Catherine Batelot, qui lui donna : Claire-Marie, mariée à Charles Haldat du Lys; René, né en 1847, garde-général des forêts; Marie, mariée à Frédéric d'Hausen. Elu conseiller d'arrondissement après son père, puis conseiller général, de 1865 à 1874, il mourut à Blâmont, en mars 1889, âgé de 85 ans.
(198) Jean-Baptiste Lahalle, né à Vomécourt (Vosges), en 1776, étudiant à Strasbourg, élève à Paris du célèbre chirurgien Bichat, conseiller d'arrondissement vers 1815, mort en 1843. Sa biographie a été-publiée par le Docteur Lesaint, son gendre.
(199) Jules Lesaint, né à Azerailles; établi à Blâmont, vers 1825, après son mariage ; mort vers 1895; auteur de plusieurs rapports sur la science zoologique, notamment sur l'Hélix personnata et sur le saurien, dénommé par Meyer : Simosaurus gaillardotii.
(200) Cette association reçut, en 1869, un legs important de M. Vaultrin, pour l'habillement de vingt pauvres et pour l'achat de costumes devant servir aux premiers communiants.
(201) Joseph Mengin, né à Domjevin, en 1797, curé de Frémonville (1825), de Blâmont (1834) jusqu'à sa mort, très apprécié pour son humeur toujours plaisante.
(202) Ne pouvant nommer toutes les religieuses qui passèrent à Blâmont, il nous faut citer au moins les deux Supérieures, dont le souvenir reste vivant parmi les anciennes élèves : Soeur Hyacinthe Bonissant, si dévouée à ses enfants terribles, et Soeur Eudoxie, professeur émérite, dont les succès ne se comptaient plus. Les Blâmontais ne nous pardonneraient pas de ne pas mentionner aussi Soeur Bernardine Grandadam, la légendaire maîtresse d'asile, qui émerveilla et moralisa si bien leur première enfance.
(203) Elles étaient filles de Louis Tanche, excellent instituteur, qui préconisa le système dit : école mutuelle, consistant à faire répéter les leçons dans les cercles d'enfants de même force. Elles donnèrent à leur pensionnat le nom d'Ecole Mutuelle et Manuelle.
(204) Pierre Fidry, né à Metz en 1745, chanoine régulier, marié à Domèvre en 1794, réconcilié et veuf, se fait professeur à Blâmont et y meurt en 1826, âgé de 80 ans; a laissé tous ses biens à l'Hospice.
(205) Louis Lebon, né à Bezange-la-Petite, en 1790, vicaire de Blâmont, curé de Gogney de 1815 à 1841; mort à la Collégiale de Bon-Secours en 1871.
(206) Jean-François Marsal, né à Saint-Maurice, en 1810, vicaire de Blâmont en 1836, principal du collège, auxiliaire, puis successeur du curé Mengin, jusqu'à sa retraite, en 1877.

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