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Histoire du Blâmontois dans les temps modernes (III)

 

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Abbé Alphonse Dedenon (1865-1940)
Impr. Vagner, 3, rue du Manège (Nancy) - 1930

I. Le Comté de Blâmont, annexé au Duché de Lorraine.
II. La Prévôté et le Bailliage.
III. Le District et les Cantons.
IV. Le Canton actuel de Blâmont.

L'Histoire du Blâmontois dans les temps modernes est une source majeure d'information : tombée dans le domaine public en 2010, cette version numérique intégrale permet de faciliter les recherches, y compris dans l'édition papier publiée en 1994 par Office d'édition & de diffusion du livre d'histoire.
Le présent texte est issu d'une correction apportée après reconnaissance optique de caractères, et peut donc, malgré le soin apporté, contenir encore des erreurs.
Par ailleurs, les notes de bas de page ont été ici renumérotées et placées en fin de ce document.

NDLR :
L'abbé Dedenon a laissé dans ses carnets des notes manuscrites indiquant diverses corrections à apporter à ce texte.


TROISIÈME PARTIE
Le District et les Cantons

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PANORAMA DE BLÂMONT cliché WEICK.

I - LE DISTRICT

1° Son organisation

Après avoir aboli les institutions anciennes, la Constituante élabora de nouveaux cadres administratifs et provoqua un remembrement général de la France. La mesure, décrétée le 9 janvier 1790, eut son exécution dans l'année même; elle fut prête à fonctionner dans le Blâmontois dès le 29 juillet. Les légistes du pays eurent hâte de l'établir ce qui prouve qu'elle répondait à leurs voeux.
Le District, division du département, était réparti en cantons, et avait à sa tête un Directoire et un Tribunal. Le premier, chargé de la prompte exécution des lois, comportait six bureaux ; le second, établi pour juger au civil et au criminel en premier ressort, avait une Cour que nous décrirons plus loin. La brigade de la maréchaussée devait prêter main forte aux magistrats. Plus tard, furent institués des Comités, dont l'intervention fut plutôt gênante. La grande innovation qui séduisait le peuple était d'avoir à désigner, par Y élection, les titulaires de toutes les charges publiques, sans en excepter aucune.
Le District de Blâmont, situé entre ceux de Lunéville et de Sarrebourg, s'étendit à toute la région qui est proprement le Blâmontois, c'est-à-dire à la région de la Haute-Vesouze. C'était la première fois que, débarrassée de toute enclave et dotée d'une homogénéité complète, cette circonscription correspondait aussi parfaitement à ses bornes géographiques. Il y manquait toutefois Domjevin, Emberménil et Vaucourt, qui furent rattachés à Lunéville, et, par contre, on y avait ajouté Réchicourt-le-Château, Moussey, Foulcrey, Avricourt, Gondrexange, Ibigny, Richeval, Saint-Georges, qui auraient pu être attribués à Sarrebourg.
Le Directoire fut ainsi composé :
Président : Didier Florentin (126), jusqu'à 1794; Catabel (127), jusqu'à 1795-
Vice-Présidents : Michel et Vaultrin Nicolas (128), jusqu'à 1792 ; Pacotte et Hanus, jusqu'à 1795.
Procureur : Louis Laurent, jusqu'à 1792; Fromental, aîné, jusqu'à 1799.
Greffier en chef : Mercier, jusqu'à 1799.
Secrétaire en chef : Lafrogne, jusqu'à 1794.
Membres: Mayeur, François, Fromental, Vaultrin, jusqu'à 1792: et Mayeur, François, Thouvenin, Dumont, Hanus, jusqu'à 1795.
Les bureaux avaient comme désignation :
1° Administration ou correspondances, tenu par Thouvenin, puis par Mercier ;
2° Contributions ou Payements : Dumont;
3° Domaine et Enregistrement : Pacotte. On créa, en 1795, un bureau annexe, les Hypothèques : Benoit, venant de Rambervillers;
4° Police administrative, civile et militaire : Thouvenin ;
5° Travaux publics et Bienfaisance nationale : Hanus ;
6° Impositions indirectes (supprimé en 1795) : Henrion.
L'hôtel de ville étant trop petit pour loger tous ces services, chaque chef aménagea son bureau chez lui. Mais quand le couvent des Capucins fut devenu propriété nationale, on les y réunit tous. Les fonctionnaires recevaient un traitement, variant entre 1.200 et 1.800 livres, suivant le prix du pain. Le Procureur ou l'Agent national, à partir de 1793, eut 2.500 livres ; le Président et ses deux Assesseurs, 2.000 livres.
Le Tribunal comprenait :
Un président: Laplante, jusqu'à 1792; Charles Regneault, jusqu'à 1793; Laplante, jusqu'à 1795;
Un vice-président : Pacotte;
Quatre juges : Thomas, Hertz, de Blâmont ; Germain, de Moussey ; Crouvizier, de Neufmaisons ;
Un commissaire national : Joseph Regneault (129) ;
Un greffier en chef : Marcel.
D'après un rapport de 1791 (130), le Tribunal eut si peu de place aux Capucins qu'il lui fallut installer son greffe chez Louis Fromental, parti aux armées. Il n'y avait pas de maison d'arrêt ou de détention; on utilisait pour cela l'ancien corps de garde de la ville. Mais, sous la Terreur, les poursuites se multiplièrent et on aménagea en prison des locaux attenant à la gendarmerie, qui avaient appartenu aux Religieuses de Notre-Dame. C'était un réduit misérable, dont la toiture s'effondrait. Chaque prisonnier devait y payer ses repas ; s'il était insolvable, le geôlier saisissait le secours que la Nation attribuait aux pauvres.
Le District avait été subdivisé en Cantons, pour assurer une exécution des lois meilleure et plus prompte. L'usage démontra l'inutilité de ce rouage, et la Constitution de l'an VIII le supprima. Ce qu'il avait de spécial, était la Justice de paix, pour les causes ordinaires ; on y avait prévu aussi un Conseil général, semblable à celui des communes, mais il ne fut jamais constitué. Dans notre district furent établis six cantons (131) :
Blâmont, avec dix communes : Ancerviller et Josain (132), Barbas, Domèvre, Frémonville, Gogney, Halloville, Harbouey, Repaix, Verdenal et Grandseille. Le juge fut Marotel, puis Laplante; le greffier, Nicolas Daiche; l'huissier, Jacquemin. Quatre assesseurs furent pris dans différents villages.
Badonviller, avec douze communes : Angomont, Bréménil, Couvay,
Fenneviller, Neufmaisons, Veney, Pierre-Percée, Neuviller, Pexonne, Saint-Maurice, Sainte-Pôle, Vacqueville.
Juge : Mangeon ; greffier : Lesaint.
Cirey avec : Bertrambois, Hattigny, Frakelfing, Niderhoff, Nonhigny, Montreux, Parux, Petitmont, Raon-les-Leau, Saint-Sauveur, Turkestein, Val-de-bon-Moutier avec Châtillon.
Juge: Louis Fromental, jusqu'à 1792; Thirion, an III; Crance, an V; l'Hôte, an VIII. Greffier : Crance, puis Troppinot.
Leintrey avec : Amenoncourt, Autrepierre, Blémerey, Chazelles, Gondrexon, Reillon, Remoncourt, Saint-Martin, Vého, Xousse.
Juge : François. Greffier : Petitfils, tous deux habitants Autrepierre.
Ogéviller avec : Brouville, Buriville, Fréménil, Hablainville, Herbéviller, Mignéville, Merviller, Montigny, Petlonville, Reclonville, Reherrey et Vaxainville.
Juge : Charpentier. Greffier : Voinot.
Réchicourt avec : Avricourt, Foulcrey, Gondrexange, Igncy, La Haye des Allemands, Moussey, Richeval et Saint-Georges.
Juge : Germain. Greffier : Marcel.
La commune fut comme la cellule à la base de l'organisme national.
La loi lui accordait :
1° Un maire, assisté d'un procureur qui, en 1793, fut appelé agent national, d'un secrétaire, d'un greffier et d'un trésorier;
2° Un conseil municipal, d'au moins dix membres;
3° Un conseil général formé des notables, dont le rôle principal était d'élire à tous les emplois, même minimes, de l'ordre ecclésiastique, militaire et civil.
Le corps électoral comportait trois degrés : citoyens actifs, électeurs, grands électeurs, ayant chacun leurs attributions. Pour chaque élection, il y avait une réglementation méticuleuse, compliquée de serments et d'actes religieux qui devaient en relever le prestige,
Cette réforme passionna d'abord le peuple, qui voyait là une grande conquête. Certaines séances durèrent un jour et une nuit (133), A Ogéviller, le 6 juin 1790, on vit défiler 455 votants dans une assemblée primaire; à Blâmont, pour le choix des grands électeurs, en 1791, il fallut s'y reprendre à deux fois : le 17 juin et le 24 juillet. Puis on se lassa bientôt d'un système, que les uns trouvaient trop aristocrate, et d'autres trop démocrate. A Badonviller, par exemple, en 1795, une séance de vote ne réunit que cinquante-trois votants, c'est-à-dire la moitié des électeurs inscrits. Ce milieu, du reste, se montra, dès le début, réfractaire aux moeurs électorales, car une de ses délibérations porte, déjà, en septembre 1789, que «  les assemblées de communauté n'auront plus lieu qu'une fois par an et le dernier dimanche d'octobre, parce qu'il est difficile de se réunir et qu'il y a trop de tumulte dans cette occasion. » (134).
Les premiers corps municipaux furent constitués en février et mars 1790. A Herbéviller, Foulcrey, Barbas et Repaix, les curés furent nommés maires, mais ils ne gardèrent l'écharpe qu'une seule année. Ailleurs, les autorités locales furent choisies parmi les notables du lieu. Elles furent peu discutées dans l'ensemble et restèrent à leur poste pendant toute la Révolution.
A Blâmont, il n'en fut pas ainsi et l'on y vit des compétitions très vives. Thomas de Mitry, nommé maire en 1790, tint habilement le gouvernail sur une mer houleuse, jusqu'en août 1791. Mais soudain il disparut pour aller, au grand étonnement de la population, s'enrôler parmi les ennemis de la République, Par réaction, la petite cité se jeta dans les bras de Claudon, démagogue intrigant, dont nous avons déjà dénoncé les menées et qui fut porté à la mairie, dans une heure d'exaltation malsaine, le 4 septembre 1791. Ce délire coûta cher. Pendant dix-sept mois, ce ne fut à l'hôtel de ville que violence, désordre, incohérence. Le calme ne revint qu'avec Vaultrin, Hertz et Benz, qui tinrent l'écharpe, l'un après l'autre, de 1792 à 1795, en conjurant bien des orages.
La vie communale aurait reçu de la Constituante des améliorations appréciables, si le programme en avait été mieux réglé, mais comme il embrassait trop, la plupart de ses belles promesses restèrent vaines.
Ainsi, la Bienfaisance publique fut un leurre, avec ses hospices nationaux, ses ateliers de travail, ses distributions de semences et d'outils. D'autre part, la Garde nationale dégénéra en comédie, avec ses cadres factices et ses parades burlesques (135). L'Ecole publique elle-même, est restée comme une ébauche prématurée, bien qu'elle fût assez goûtée. L'instruction, du reste, ne manquait pas dans notre pays. Les règlements diocésains obligeaient les paroisses à tenir une école ouverte, au moins pendant l'hiver. Blâmont et Badonviller étaient les mieux outillés à cet égard. Outre l'école communale, les garçons pouvaient y suivre une classe de latinité (136). Les filles avaient des pensionnats florissants, tenus par les Religieuses de Notre-Dame et par les Annonciades, sans compter les classes plus populaires des Vatelotines. Avricourt et Amenoncourt, grâce à la générosité d'un sieur Deviot, d'Avricourt, avaient eux-mêmes essayé d'un, cours supérieur de filles, dirigé, par une Religieuse de la Doctrine-Chrétienne.
La Convention eut des ambitions plus vastes, en matière d'enseignement. D'après les lois imaginées par Romme et Bauquier, chaque commune, même petite, devait être pourvue d'une classe gratuite et obligatoire pour chaque sexe séparé. Or, tout manquait pour cela : le personnel, les locaux, le temps et l'argent. Il y eut pourtant des essais, comme en témoignent certaines pièces d'archives, ce qui prouve qu'on y tenait, mais ces tentatives furent partout infructueuses.
A Leintrey, on avait envoyé une institutrice, âgée seulement de vingt ans; les habitants, la jugeant trop jeune, font savoir au District qu'ils désireraient plutôt confier leurs filles à l'instituteur, donnant une garantie plus sérieuse (1793); la réponse assez sèche du Directoire est qu'il faut s'en accommoder, puisque l'autorité l'a trouvée bonne; la pauvre demoiselle n'en fut pas moins forcée de s'en aller,
A Reclonville, le traité passé avec l'instituteur a été renouvelé, en 1793, dans des termes identiques à ceux qui étaient en usage sous l'ancien régime.
Un rapport décadaire de 1793 mentionne que l'école est mixte dans tous les villages du District, que Blâmont a trois écoles et que Badonviller en a deux, dont une de filles.
On remarquera l'à-propos et la modération du Directoire de Blâmont dans les questions qui passionnaient alors l'opinion, comme elles le font encore aujourd'hui. Catherine Hartmann, institutrice de Blâmont, s'étant mis en tête de vouloir transporter sa classe dans le presbytère devenu vide, en 1794, fut priée, sans détour, de laisser son école là où elle était, puisque ce local avait été suffisant pour les Soeurs Vatelotines. Une même réponse fut faite aux instituteurs de Domèvre et d'Herbéviller, pour une tentative semblable. Pierre Masson, autre instituteur de Vacqueville, auteur de remontrances quelque peu insolentes, toujours pour le même sujet, n'obtint de Fromental qu'un billet fort bref, l'avertissant que, dans le temps présent, chacun devait songer à marcher droit (137).
Toute cette oeuvre scolaire ne devait pas tarder à s'effondrer. Aussi, dès 1795, n'y avait-il plus d'école ouverte qu'à Blâmont, Badonviller, Domèvre et Herbéviller. Le manque de maîtres en était cause, plus encore que les circonstances, réellement peu favorables. Et comment le regretter ? L'école n'était plus qu'un foyer de propagande républicaine ; les manuels, alphabets, catéchismes, qu'on y introduisait, ne devaient plus que «  faire sucer à l'enfant les principes révolutionnaires avec les rudiments de la langue ». L'auteur de ces brochures, faut-il le dire, était un enfant de Blâmont, le citoyen Thiébaut, devenu chef de bureau au Directoire de Nancy. Il inonda le pays de ses productions, et on retrouve de lui plusieurs lettres, où il se plaint que ses envois ne sont pas payés. Le Directoire de Blâmont les recevait, en effet, avec dédain, ou les dirigeait vers Badonviller, pour s'en débarrasser. Il n'en est pas moins vrai qu'à la longue l'esprit public se pervertit, au contact des sophismes dont ces libelles étaient remplis, et qu'il fallut de nombreuses années, après la tourmente, pour dissiper les préventions qu'ils avaient semées.

2° Premières vexations révolutionnaires

SPOLIATION DE LA CLASSE NOBLE

C'est le vent d'égalité qui porta les premières atteintes à l'ordre social, en s'attaquant à la noblesse. Par la loi du 19 juin 1790, tous les titres et privilèges anciens furent abolis et tous les Français furent confondus dans le même rang de citoyens. Après ce prélude, d'autres mesures plus violentes vinrent frapper la personne et les biens des ci-devant nobles. Vraiment ceux-ci avaient lieu de ne plus se croire en sûreté. Dès l'été de 1790, beaucoup partirent en exil. De ce nombre furent : l'abbé Laugier (138), qui se rendit à Florence, où il avait un canonicat; le seigneur de Prémont (139); Mathieu de Sailly (140), seigneur de Repaix; Simon de Bussène, mort bientôt après; Armand Duplessis de Richelieu, seigneur de Réchicourt; Pierre Hue d'Ogéviller; le prince de Salm, etc.. Tous disparurent de divers côtés, sans songer à une opposition qu'ils savaient inutile.
L'exode, un instant interrompu, reprit en 1791. Thomas de Mitry, maire de Blâmont, s'engagea dans l'armée de Condé, au mois d'août. Henri de Bault, son beau-frère, s'absenta aussi peu après et fut réputé émigré (141). Léopold-Armand Febvrel partit en laissant à Blâmont sa femme, Thérèse Mayeur, et son fils Léopold. Celui-ci trouva un emploi dans les bureaux du District et, par cette preuve de civisme, put sauver son patrimoine. Charles Vinyot-Desmolins, ou plutôt Deshayes, rentier à Sérolle, eut ses biens vendus en décembre 1795 (142). De Cheville abandonna sa ferme de Montreux (143).
A côté de ces noms figurent, on ne sait pourquoi, sur la liste des émigrés, d'autres noms de personnes plus modestes, telles que : les deux frères Joseph et François Simonin, perruquiers à Blâmont; les deux, frères Barbier, de Remoncourt, peut-être compromis avec de Laugier; Henry et Martignon, de Badonviller, qui, en rentrant, purent prouver qu'ils avaient servi aux armées ; Jean Pierron, fils du tanneur de Blâmont, qui s'enfuit à Strasbourg, pour un motif inconnu, et dont l'escapade valut à son père l'incarcération, en vertu de la loi des Suspects; l'abbé Brazy, de Badonviller, qui démontra que son absence avait été constatée par un passeport valable, quoiqu'elle se fût prolongée au delà du temps fixé; Gérard et Martin, de Neuviller, qui, prenant peut à la suite d'un délit vulgaire, partirent au delà de la frontière et dont les biens allaient être confisqués, quand les supplications de leurs femmes obtinrent l'indulgence du tribunal ; François Louis, de Bertrambois, déserteur, mais à l'abri des sévérités de la loi, parce qu'il ne possédait rien ; Pierre Martin, de Saint-Maurice, autre soldat, accusé d'émigration et menacé de confiscation, mais dont la femme put prouver qu'il était mort dans une prison de Vesoul, où l'avait conduit un délit de droit commun. Le cas de Gabriel Regnault, dit Chatillon, mérite d'être cité.
Il fut maire de Rosières-aux-Salines, jusqu'en 1792. Or, pour sa convenance, il vint résider à Chatillon, qu'il possédait depuis 1772. Il fut dénoncé par des gens malveillants, pour avoir abandonné son poste, alors que la Patrie était en danger : ce délit lui faisait encourir la confiscation. Obligé de se disculper devant le tribunal de Blâmont, il s'y prit de telle façon qu'il obtint le remboursement d'une créance, vraie ou fausse, s'élevant à 24.000 livres, qui lui permettait de retrouver l'avoir de son frère, maire de Saint-Nicolas, réellement émigré.
Cette liste est sans doute incomplète. Elle montre, du moins, la variété des cas qui exposaient aux sévérités de la justice. Elle prouve aussi la souplesse, pour ne pas dire la clémence, des administrateurs blâmontais. Ils surent mener de front les poursuites légales nécessaires avec les liquidations, les gestions épineuses de biens ou de bois non vendus, les lotissements qui devaient rendre les achats plus abordables.
Au sujet d'affaires si délicates, on retrouve seulement deux remontrances du Département et on ne compte aucune plainte émanée du District. Les rapports décadaires disaient vrai, quand ils énonçaient cette remarque assez fréquente : «  Les biens des émigrés se vendent de mieux

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CHÂTEAU DE CHATILLON
Cliché du Pays Lorrain.

en mieux et les préjugés tombent » (144). Cependant les scrupules des acheteurs avaient beau disparaître et les enchères monter, la valeur du numéraire baissait et on allait à la faillite des assignats.

TRACASSERIES INFLIGÉES AU CLERGÉ PAROISSIAL

Au premier moment, ce fut presque une joie pour le clergé blâmontais d'abandonner à la Nation les revenus des bénéfices ecclésiastiques, en échange d'une pension qui paraissait devoir être plus importante et plus commode. L'abbé Grégoire et les légistes abondaient tous dans ce sens. Les curés se présentèrent donc, sans hésiter, au bureau de Pacotte, pour faire les déclarations exigées par la loi (145). A tous il était promis au moins 700 livres; dans des conditions déterminées, quelques-uns pouvaient espérer davantage.
Leur démarche eut lieu entre le 25 octobre et le 4 décembre 1790. La répartition par le Directoire fut terminée pour le 22 octobre suivant. Les payements commencèrent le 7 décembre, grâce à des avances que firent les agents du lieu, tant que la caisse départementale fut incapable de fournir les fonds.
Le désenchantement suivit de près, causé par l'affaire du Serment, dit Constitutionnel. Un arrêté royal, du 26 décembre, exigea sa prestation immédiate et indiqua, comme dernier délai, le dimanche 5 février. Tout le mois de janvier se passa en discussions. Les curés polémiquaient de presbytère à presbytère, privés de directives venant des supérieurs; les paroissiens et les autorités civiles conseillaient la soumission. Le dernier dimanche arrivé, les maires entendirent, à la messe ou aux vêpres, les déclarations des curés et les transmirent à Blâmont, pour être portées au chef-lieu du département. Il y avait alors dans le District, 57 curés ou vicaires astreints au serment; 28 le prêtèrent sans réserve (146); 25 y mirent des restrictions (147); 4 le refusèrent absolument (148). Notons que les maires du canton de Cirey forcèrent la note, en déclarant tous les curés assermentés, alors qu'ils avaient tous formulé des restrictions, et que le maire de Foulcrey présenta son curé comme insermenté, alors qu'il était simplement restrictionnaire. Pour tous, le serment voulait dire acceptation, mais à condition que l'acte ne serait pas déclaré contraire à la discipline catholique et romaine.
Très ennuyé, le Directoire de Blâmont attendit jusqu'au 17 mars, pour envoyer son rapport à Nancy, et il s'arrangea pour présenter comme assermentés, même les restrictionnaires; il n'eut ainsi que quatre déchéances à prononcer, et encore ne les fit-il pas suivre d'expulsion. Laurent et Richard restèrent dans leur paroisse jusqu'en juillet : Zuibel demanda son passeport pour Strasbourg et Cherrier ne fut pas inquiété dans son presbytère, à condition d'y subir un administrateur; peu après Rollin démissionna, pour devenir vicaire épiscopal de Strasbourg. C'était, en somme, trois paroisses seulement qu'il fallait pourvoir de titulaires; on eut recours à l'élection. Mais qui, dans la partie du District, auparavant messine, devrait donner l'institution épiscopale requise après l'élection ? Légalement, l'évêque de Metz ne le pouvait plus, et, d'autre part, la Meurthe n'avait pas encore d'évêque. Le Procureur général, consulté par Fromental, répondit, le 26 avril : «  Vous n'avez pas autre chose à faire que d'établir un administrateur, choisi parmi les prêtres cy-devant approuvés par les anciens évêques. » C'est ainsi qu'Igney reçut, deux jours après, François Marchal, ci-devant cordelier; Saint-Georges, Martin Oury, ex-capucin, et Réchicourt, Louis Simon, ex-bénédictin de Toul. Les autres élections de curés furent remises jusqu'après l'arrivée de Lalande, le nouvel évêque de la Meurthe, pour qu'il pût les confirmer (149).
L'avènement de l'évêque schismatique Lalande redoubla les ennuis réservés au clergé. Son intronisation eut lieu le 3 juin. Sarrebourg s'y porta avec enthousiasme; Blâmont y délégua sa garde nationale, qui revint peu enchantée d'attendre son indemnité pendant trois mois. Les autorités locales l'appuyèrent, puisque c'était l'évêque légalement nommé. Quand parut sa première lettre pastorale, le 29 juin, le désarroi fut complet. Un bref papal ou 13 avril avait éclairé les consciences catholiques et montré qu'il fallait arrêter les empiétements de l'Etat. D'autre part, engagé comme il l'était, le pouvoir civil ne pouvait se contenter plus longtemps d'une demi-soumission. Ordre fut donné d'épier sévèrement la conduite des curés dans cette circonstance; ceux qui accepteraient de lire au prône la lettre épiscopale, sans observation, seraient dits conformistes ; ceux qui opposeraient un refus ou feraient des commentaires désobligeants, seraient dits non conformistes. On donnait ainsi aux insermentés et aux restrictionnaires précédents le moyen de se racheter; les réfractaires, à n'importe quel titre, seraient irrémédiablement déchus et remplacés pour le 24 juillet. Les officiers civils devaient tout mettre en oeuvre pour assurer le triomphe de la loi. Fromental alla porter lui-même le document au curé de Blâmont ; d'autres membres du Directoire firent une démarche analogue à Autrepierre, Repaix, Amenoncourt, Barbas; partout la pièce fut remise, la veille au soir ou le matin même du dimanche, pour empêcher la réflexion ou l'entente; le choix fut laissé, pour la lecture, entre le dimanche 10 et le jeudi 14 juillet, fête de la Fédération.
Le résultat fut déconcertant pour les autorités et les populations. Les prêtres jureurs ne firent aucune difficulté; l'un d'eux cependant, Delorme, mit à sa lecture un sans-gêne qui la rendait inintelligible. Les habitants de Gondrexange lui demandèrent d'élever la voix, il répondit qu'à cause de son âge et de la longueur de la lettre, il se sentait incapable d'aller jusqu'au bout et qu'il achèverait à vêpres. Le cas de Cristallin, curé de Cirey, est plus étrange (150). Le rapport officiel dit que la lecture fut faite à la grande satisfaction de tous les paroissiens, le 14 juillet, et fut suivie d'une exhortation à la soumission aux lois. Or, on peut lire au registre de la paroisse, à la date du 22 mai 1800, sous la signature de ce même Cristallin, les lignes suivantes : «  Je déclare : 1° N'avoir fait que malgré moi la dite lecture et par crainte de trouble dans la paroisse, vu que les autorités l'exigeaient; je conviens avoir eu tort et manqué à mon devoir; 2° le ton, avec lequel je l'ai faite, manifestait assez ma douleur, ma répugnance, mon indignation. »
Tous les restrictionnaires protestèrent à nouveau, mais de diverses façons, contre l'injonction faite par la loi. Les curés d'Amenoncourt, d'Autrepierre, de Hattigny, désapprouvèrent simplement. Le curé d'Herbéviller déclara qu'il lisait uniquement pour ne pas causer de trouble; un murmure s'éleva dans l'église ; un jeune prêtre du lieu, Gley (151), se répandit en invectives contre l'évêque Lalande; d'autres ripostèrent; l'office s'acheva dans le tumulte.
Les chefs du Directoire furent bienveillants, en considérant ces cas comme une soumission suffisante. Ils durent cependant ranger parmi les refus formels les attitudes suivantes, qui leur furent signalées. Les curés d'Ancerviller, Repaix, Gogney, Ogéviller, Remoncourt, Moussey, Montïgny, Montreux, avaient obligé le maire ou le greffier à faire la lecture à leur place; le curé et le vicaire de Brouville avaient protesté qu'ils ne reconnaissaient comme évêque que Mgr de la Fare.
A Pexonne, les habitants étaient sortis pendant la lecture faite par le greffier. A Blâmont, l'incident avait tourné à l'outrage : pendant la grand'messe, chantée par le vicaire Litaize, Guillot avait fait son prêche, sans parler de la lettre, et les autorités avaient cru que la lecture était remise à la fin de l'office; mais quand le clergé fut rentré à la sacristie, personne ne revint au sanctuaire. Fromental alla demander raison de l'omission commise ; pour toute réponse le curé rendit le document. Il fallut appeler le greffier qui commença de le lire en face des bancs déjà vides; la dernière messe fut aussitôt commencée par le curé et décemment le procureur décida de faire reprendre, après vêpres, le malencontreux document.
A Foulcrey, ce fut autre chose : le curé prêcha contre la lettre qui devait être lue à vêpres. Par crainte d'une émeute, la Garde nationale s'était mise en armes. Quand le greffier eut pris la parole, un certain Jacques Tranche agita son chapeau et invita les assistants à sortir, par protestation. Le maire eut beau s'interposer; il fut insulté et dut lever la séance, tellement le tumulte était grand. Saisi de l'affaire, le tribunal fit les condamnations prévues par la rigueur des lois (152).
A la suite de ces actes entraînant la destitution, les curés insoumis n'attendirent pas d'être chassés par la force, mais prirent le chemin de l'exil, dès le 24 juillet. Presque tous gagnèrent d'abord Trêves, puis se disséminèrent dans diverses villes du Rhin ou se rendirent en Bavière (153). Leur sort fut partout pitoyable.
Pour les remplacer, les assemblées communales élirent, le 24 juillet, des religieux restés sans emploi depuis leur sortie du cloître. Blâmont fut ainsi confié à Voinot, enfant du lieu, ex-chanoine régulier sortant de Thiébauménil ; Igney, à Poirson, ex-cordelier ; Foulcrey, à Urbain, qui ne put y rétablir l'ordre. En août, Pélissier fut nommé à Montreux, à Montigny, à Neufmaisons ; il ne se plut nulle part et finit par échouer à Neuviller, où il se maria; Kippeurt alla à Hattigny. En novembre, Fromental accepta Herbéviller et Verniory, Gondrexange (154).
A cette date, le District comptait 24 curés intrus, dépourvus par là même de pouvoirs canoniques. Les populations semblent s'être peu préoccupées de cette irrégularité, désirant surtout la continuation du culte et le maintien des usages religieux. Elles ne se firent pas plus grand scrupule pour acquérir les biens ecclésiastiques confisqués et mis en vente. Cette affaire fut, du reste, adroitement menée, et c'est avec une satisfaction visible que le Directoire inscrivait dans ses rapports la formule consacrée : «  Les acheteurs des biens nationaux jouissent en paix de leurs acquisitions. » Pourtant toute cette besogne d'ordre religieux lui valut de nombreux ennuis, impuissant qu'il était à satisfaire les réclamations des paroisses, et, plus encore, les appétits d'un personnel plutôt disparate.

DISPERSION DES ORDRES RELIGIEUX

La guerre faite à l'Eglise rejaillit fatalement sur les Maisons religieuses; les coups, que leur porta la Révolution, furent tout de suite mortels. Une enquête fut d'abord décrétée dans le but d'inventorier, dans chaque couvent, le personnel et les biens. On devait demander aussi à chaque religieux ses intentions pour l'avenir. La visite officielle eut lieu, chez les Capucins, le 27 avril 1790; leur nombre était de huit, dont trois frères; sept se déclarèrent résolus à vivre et à mourir dans leur état religieux; un seul dit qu'il reprendrait la vie séculière, s'il le fallait. A l'abbaye de Domèvre, on trouva, le 16 mai, douze chanoines réguliers, trois frères, deux prêtres affiliés ou oblats, un organiste laïc; tous étaient décidés à reprendre leur liberté, si la Congrégation était modifiée; l'Abbé de, Saintignon, alléguant son grand âge, sollicita la faveur de garder son quartier abbatial ; il vivrait retiré, à l'aide de sa pension (155).
Les Cisterciens de Haute-Seille, à la date du 4 novembre, étaient au nombre de dix; leur abbé était absent; tous déclarèrent leur intention bien arrêtée de ne jamais quitter leur monastère. Le couvent de Notre-Dame, à Blâmont, renfermait dix-sept religieuses de choeur, six converses et une affiliée; elles protestèrent énergiquement, le 3 septembre, qu'elles aimaient leur communauté comme un paradis. Les Annonciades de Badonviller exprimèrent les mêmes sentiments; on y compta dix-sept religieuses et quatre soeurs. Les trois ermites de Saint-Jean, à Blâmont, furent d'abord assimilés aux religieux et touchèrent deux trimestres de pension; mais une décision du Département annula cette pension, sous prétexte qu'ils n'appartenaient pas à une règle reconnue (156).
L'année suivante (1791) un décret nouveau, paru en janvier, ordonna de diminuer le nombre des résidences religieuses, déclarées trop nombreuses. Les Capucins furent donc sommés, le 20 janvier, de se réunir à leurs confrères de Lunéville; ils quittèrent Blâmont le 27 mars (157)
Leur maison, devenue propriété nationale, fut louée au Directoire; leurs jardins furent également loués, sous réserve que la location cesserait de plein droit, s'il survenait un ordre de vente.
Le 18 août, tous les Ordres religieux furent dissous; c'était la mort sans phrase : il n'y avait plus qu'à se disperser. Les Religieuses de Notre-Dame quittèrent, en pleurant, leur maison, dans les premiers jours d'octobre. Plusieurs demandèrent un passeport, pour retourner en Alsace, leur patrie; d'autres demeurèrent à Blâmont, ou dans les environs. Leur mobilier d'église fut porté à la paroisse, et leurs immeubles furent attribués au District, pour servir de grenier d'abondance, de magasin d'équipement, et même de prison. Les Annonciades subirent un sort pareil à Badonviller. Les Cisterciens de Haute-Seille ne cédèrent qu'à la force; Combette, Blondot et d'Hennezel émigrèrent; Claudon et Paquot acceptèrent d'être nommés à Saint-Georges et à Vézelise, après avoir juré. Le Directoire songea, un instant, à fonder un établissement de charité pour utiliser leurs immeubles ; mais il reconnut bientôt que leur éloignement les rendait impropres à une entreprise publique et il finit par les vendre par lots. Les Religieux de Domèvre furent les plus piteux dans cette tourmente. L'estime plutôt médiocre, dont ils jouissaient dans la contrée, se perdit tout à fait, quand on les vit sortir de leur couvent presque avec joie et sans attendre les derniers délais. Les uns regagnèrent leur pays natal, comme Thiesselin, vieillard de 82 ans, retiré à Dombasle; Hainaut, à Tantonville, où il ouvrit un pensionnat; Barrois, procureur, qui sera curé de Xirocourt, en 1803. D'autres rentrèrent dans la vie laïque, comme Wiollard. La plupart acceptèrent d'être curés constitutionnels, comme François, à Saint-Georges, Rollin, à Vého, etc.. Les terres et forêts de l'abbaye furent vendues par lots, à des dates diverses; les bâtiments furent réservés à la Nation pour servir de magasins à fourrages; les meubles prirent toutes sortes de chemins; les huit cloches furent expédiées aux fonderies de Metz; la bibliothèque, le buffet d'orgues, un confessionnal vinrent échouer à Blâmont; un autre confessionnal, avec quantité d'objets cultuels, resta à l'église de Domèvre. Les documents, qui concernent toute cette liquidation, font valoir, une lois de plus, la réelle habileté et la modération du Directoire blâmontais. Aussi ne reste-t-il dans les traditions aucun souvenir de violences ou de mécontentements se rapportant à ces circonstances.
Le District perdait ainsi un certain nombre de religieux, mais c'était pour en retrouver d'autres, qui rentraient dans leurs familles. La liste nous en est fournie par le rôle des pensions qui leur furent servies. C'étaient : Claude Collot, retiré à Petitmont, mort en 1792; Maldidier, à Saint-Martin; Lhôte, à Vého; Simon, à Réchicourt; Batho, ex-abbé de Saint-Nicolas-des-Près, à Verdun, retiré à Hattïgny; Voelfert, Krebs, Joeger, Hoefner, alsaciens, momentanément fixés à Blâmont; Christophe Dedenon, ex-minimé, à Autrepierre ; Receveur, à Domèvre; Thiry, ex-tiercelin, à Herbéviller; Milliani, ex-prieur de Fricourt; Gridel, ex-prieur de Saint-Christophe de Vic, à Vacqueville; Simonet et Mercier, à Badonviller; Maire, nommé curé à Chazelles ; Dieudonné, à Harbouey ; Muller, à Verdenal; Fiel, frère bénédictin, à Couvay; Marie Henry, annonciade de Bar, à Badonviller; Marie-Anne Nicolas et Jeanne-Baptiste Guigne, à Val-et-Châtillon ; Anne Dedenon, à Autrepierre, et d'autres sans doute, dont les noms nous échappent et sur lesquels Chatrian a laissé des notes précieuses. Tous furent admis à toucher la pension de 400 livres, que la Nation leur alloua jusqu'en 1797.

3° Le régime de la Terreur

LE MAIRE CLAUDON A BLAMONT

Le démagogue Claudon, que nous avons déjà signalé, déchaîna la Terreur à Blâmont, un an avant qu'elle ne sévît en France. On vit rarement chef de Club plus réussi. Ambitieux, autoritaire, jaloux, il était par surcroît illettré et naïf. Son auberge, à l'enseigne du Grand Cerf, avait une nombreuse clientèle. Poussé au conseil municipal par ses partisans, il se posa, dès la première séance, en vengeur des abus. Il en voyait partout : dans le partage des pâtis communaux fait l'année précédente, dans la conduite de la Garde nationale, dans la gestion du Directoire, trop partial dans sa répartition des impôts. Ses reproches parurent alors si effrontés qu'il fut sérieusement question de l'emprisonner, le lendemain, 13 novembre 1790. Heureusement pour lui arriva la nouvelle de la chute de Mirabeau, qui déconcerta les Girondins de l'endroit, habitués de la Croix-d'Or ou de la Poste-aux-Chevaux. La popularité de Claudon alla dès lors en augmentant. Au mois d'août suivant, le maire, de Mitry, eut le tort de passer à l'armée de Condé. L'occasion était belle de briguer son écharpe; le triomphe fut facile.
Mais il fallait gouverner et c'était là que nos juristes l'attendaient. Un homme de sa trempe devait fatalement s'enliser, en franchissant les passages difficiles, qui devaient bientôt se présenter. Une première sottise, qui le couvrit de ridicule, fut d'avoir permis à la Garde nationale son expédition burlesque à Turkestein, dans le but d'y découvrir des traîtres imaginaires (11 septembre 1791). Une autre maladresse, plus grave, fut de multiplier, pendant tout l'hiver, des vexations et dénonciations de toutes sortes contre les magistrats du lieu, à cause de leur prétendue apathie.
Ces menées soulevèrent contre lui une haine violente. Assistant un jour à une séance du tribunal, il se vit soudain assailli par un garde national qui avait sabre au poing. Ce fut un gros scandale ; l'agresseur était le frère de Vaultrin, vice-président du Directoire et procureur à ce même tribunal. Le maire offensé voulut une réparation et ne l'obtint pas. Econduit par la justice du lieu, il crut devoir recourir à celle de Nancy et même à celle de Saint-Dié ; toutes deux, après enquête, repoussèrent sa demande. Il voulut poursuivre jusqu'au Ministère, à Paris. Une sentence administrative, rendue sur la présentation d'un Mémoire imprimé relatant tous ses griefs (158), finit, le 17 novembre, par maintenir le maire dans sa fonction et sans amende, mais avec un blâme sévère «  pour avoir dépassé ses droits en maintes circonstances et injurié la municipalité ».
Cet antagonisme entre les autorités offrait parfois de singuliers contrastes. D'une part, Claudon était tout de feu pour célébrer les fêtes républicaines et accueillir les patriotes de passage; d'autre part, Fromental l'aîné et d'autres fonctionnaires méprisaient les arbres de Liberté, allaient banqueter chez des curés réfractaires, au lieu d'assister aux cérémonies officielles. Or toutes les préférences de la Préfecture allaient à ces derniers. Un soir, pour égayer des troupes se rendant aux armées, Claudon crut spirituel de faire brûler, sur la place, trois mannequins, représentant des partisans de Mirabeau et ajouta qu'il voudrait voir Mirabeau flamber lui-même. La riposte des légistes visés par cette boutade fut un réquisitoire accablant contre son imprudence (il aurait pu incendier la ville); contre ses maladresses dans l'attribution des billets de logement; centre ses invectives à l'endroit d'un sergent, nommé Vanier; contre ses absences trop nombreuses en raison de son commerce; contre son incompétence enfin, qui leur suggéra ce dédaigneux trait final : «  Au reste, quel crédit mérite un homme dont tout le savoir se borne à faire son nom, et encore l'écrit-il mal ? (159). C'est un violent qui, depuis 1789, n'a cessé d'injurier tous les Corps constitués, qui ne s'entoure que de Sans-Culotte comme lui et qui revient sans cesse à la même menace : «  Je vous ferai tous guillotiner ».
Même en pleine Terreur, pareille lutte devait mal finir; le crédit de Claudon se mit à décliner, puis, au premier glissement, il s'effondra. L'occasion se présenta, le 19 octobre. Un régiment, allant vers le Rhin, venait d'être annoncé de Domèvre. C'était l'usage que la Garde nationale se portât à sa rencontre, pour lui donner l'accolade et lui offrir ses services. Claudon, voulant peut-être se faire garder, refusa de la laisser sortir. Le commandant Rousselot et ses hommes, ne comprenant rien à cette défense, se mutinèrent et, sur le conseil du Directoire, désobéirent résolument. Le maire porta sa plainte à Nancy; mais, pour toute réponse, il fut informé que son ordre avait été inconstitutionnel et qu'il avait eu tort de le donner (8 novembre). Après ce désaveu, il n'avait plus qu'à quitter la mairie, ce qu'il fit sur le champ. Rentré dans l'ombre, il se tint coi pendant un an, puis se trouva de nouveau aux prises avec la justice. Un convoi de prisonniers, conduit par sept gendarmes, descendit chez lui en novembre 1794, et demanda à être hébergé. La note qu'il présenta fut trouvée exagérée et les passagers portèrent plainte. Il eut beau se disculper; le tribunal le condamna et lui infligea de la prison. Cette dernière aventure acheva de le déconsidérer; tous les comités qui l'avaient encore comme membre le rayèrent et il finit par la faillite.
Le reste du District ne connut pas tous ces troubles et ne perdit pas son calme en se prêtant aux nouveautés révolutionnaires. Badonviller et Cirey montrèrent seuls quelque enthousiasme à planter des arbres de la Liberté. Les jours furent, du reste, très sombres dans l'hiver de 1792 : le Nord envahi, les convois de volontaires se dirigeant vers Strasbourg, les violences affolées de la Convention, le procès de Louis XVI : c'était assez pour attrister et désorienter. La conduite de Germain Bonneval, d'Ogéviller, député à la Législative et: à la Convention, devenu Montagnard et régicide, celle de l'abbé Grégoire approuvant le vote criminel auquel il n'avait pu prendre part, furent des sujets de douloureuse surprise. L'année 1793 s'ouvrit et apporta chez nous, comme ailleurs, ses lois, ses décrets, ses comités, ses tyrannies. Toutefois les hommes qui durent appliquer ces mesures réussirent à le faire avec une sage modération, et c'est ainsi que parmi nous le souvenir de la Terreur est resté moins odieux.

[NDLR : le convoi de prisonniers n'est pas descendu chez Claudon en novembre 1794, mais le 15 septembre 1793. Claudon sera dénoncé pour ces faits le 24 novembre 1793, emprisonné et libéré en février 1794]

LES POURSUITES JUDICIAIRES

Le Comité populaire pour l'assistance des nécessiteux eut peu à faire à Blâmont. Sa boulangerie nationale, son grenier d'abondance, ses ateliers ouvriers ne servirent: qu'aux troupes de passage; l'hôpital et les familles suffirent à soulager les vrais pauvres. La Société populaire, destinée à renseigner les autorités sur les actes des citoyens, ne vécut que sur le papier. Le Comité de surveillance, plus tard, Comité révolutionnaire, fut franchement odieux, avec sa mission de surveiller les lettres, de provoquer les dénonciations, d'ordonner les arrestations par les gendarmes, tout comme les juges et sans contrôle. Il était composé de neuf membres, dont un président et un secrétaire (160); il se réunissait chaque jour, à 5 heures du soir, et même plus souvent, s'il le fallait; le décadi, la séance était publique et durait de 7 heures à 9 heures. Il fonctionna chez les Capucins, depuis le 14 avril 1793 jusqu'en mars 1795. La preuve qu'il ne fut qu'à moitié malfaisant, c'est qu'il y eut presque une révolte à Blâmont, lorsqu'il dut prendre fin et déposer ses archives, suivant la loi du 30 ventôse, an III. Cependant il compte à son actif une trentaine de poursuites, presque toutes pour des délits ordinaires : vols, propos injurieux, rapports avec les suspects ou les émigrés (161). Une accusation assez grave est portée, le 10 mai, par Joseph Oury, notaire, contre Barail, «  l'homme dont il faut le plus se défier, dit-il, puisqu'il envoie de l'argent aux émigrés ». Il y a grand émoi, d'autant plus qu'en même temps se déroule le procès de Laugier, pour le même motif. Le tribunal s'empare de l'affaire; l'inculpé donne ses explications que l'on reconnaît valables, et il échappe à la condamnation. De Laugier (162) eut le malheur de comparaître devant le tribunal de Sarrebourg ; celui de Blâmont n'eut à s'en occuper que pour fournir des écrits de l'accusé, comme pièces à conviction, et pour opérer la confiscation de ses biens; il eut peut-être trouvé le moyen d'être moins sévère. C'est Jordy, procureur de Sarrebourg, républicain exalté, qui mit tout en mouvement. «  Je possède, écrit-il à Fromental, le 23 avril 1793, une lettre de Laugier, écrite de sa main à d'Olone, par laquelle, il lui annonce des fonds; une lettre de change de 228 livres y était jointe. Braun, par l'entremise de qui cette négociation était faite, dénonce Laugier; ils sont tous deux coupables...» La justice de Sarrebourg acheva l'information et l'accusé ne put nier. Transféré à Nancy, l'infortuné s'entendit condamner à mort, le 19 frimaire, an X. Il fut guillotiné, le jour même ou le lendemain, sur la place de Grève, avec trois autres condamnés (163). La contrée apprit avec effroi cette exécution; sa femme et sa fille s'exilèrent, sans essayer de sauver leur avoir.
Un peu avant, deux prêtres, très appréciés comme vicaires à Ogéviller, subirent le même supplice pour d'autres raisons. C'étaient Collet, curé de Voinemont, guillotiné à Nancy, le 25 octobre, et Mangin, supérieur de Maréville, guillotiné à Mirecourt, le 15 novembre (164). Il faut ajouter un autre nom à ce lugubre martyrologe, celui de Marie-Thérèse Berclat, née à Herbéviller, femme de Joseph Jacquel, faïencier à Domèvre. Le lieu et la date de sa condamnation nous échappent, mais le fait est attesté par un rapport du procureur-syndic de Blâmont, à la date du Ier prairial, an II (21 mai 1795) : «  Il passe pour certain, écrit-il, que la femme Jacquel a été condamnée pour avoir distribué de faux assignats; aussi son bien doit être confisqué...» Le mari protesta que sa femme n'avait rien dans son entreprise, mais la loi l'emporta, après un an de démêlés, et la confiscation fut exécutée.
Les infractions étaient inévitables, étant donné la multiplicité des règlements économiques, militaires et autres, et leur allure draconienne et inattendue. Le brigadier Marchis et ses trois gendarmes étaient toujours en route; ils ramenaient parfois des prisonniers, après de troublantes enquêtes. Un certain jour, on les vit passer avec sept hommes, mutinés à Leintrey. Mais les juges examinaient les dossiers avec une sévérité plus apparente que réelle, acceptaient les explications plausibles et classaient les affaires. Ce stratagème n'avait pas échappé aux représentants du peuple, farouches inquisiteurs, dont le passage était toujours redouté : jamais ils ne réussirent à trouver nos administrateurs en défaut. Lacoste, en particulier, n'aurait pas été fâché de sévir contre eux. Il survint à l'improviste, un certain décadi de 1794, inspecta tous les services, épura plusieurs fonctionnaires et exila sept curés, qui lui avaient été dénoncés. Quand il se retira, il adressa des félicitations au Directoire pour son exactitude «  tout en regrettant que le pays fût toujours sous l'empire du fanatisme catholique ». Fromental eut cette fière réplique : «  Nous ne craignons pas de te dire que l'agent qui t'a dénoncé nos curés (c'était Jordy, de Sarrebourg) s'est conduit légèrement ; si quelqu'un de ces prêtres avait fait des tentatives pour troubler l'ordre, nous l'aurions su... Nous remettons à ta sagesse le règlement de leur conflit avec cet agent national, qui parait avoir du temps de reste pour s'occuper ainsi de Théologie. » (165).
Les arrestations suivies de transfert à Nancy n'eurent lieu que rarement et parce qu'on ne pouvait les éviter. Le 20 août 1793, l'ex-capucin Masson fut trouvé chez le curé de Barbas et conduit à Blâmont, puis à Nancy, où il fut emprisonné jusqu'en 1795. La dame Ervet, qui le tenait caché habituellement, fut emmenée avec lui, mais on ne retint contre elle que le délit d'avoir amassé plus de provisions que la loi n'en permettait et elle fut relâchée. Gley, d'Herbéviller, paya son attitude contre-révolutionnaire par une détention qui dura un an; il fut libéré, à force de démarches, mais uniquement comme travailleur s'engageant à se rendre utile. Fage, ex-noble du même lieu, resta emprisonné aussi jusqu'en 1795, pour des propos injurieux, sans qu'on eût égard à ses infirmités et à son grand âge. Pierre, curé de Sainte-Pôle, et Grosdy, curé de Reclonville, eurent le même sort, en juin 1794, pour avoir continué les offices divins, au mépris des lois. Ce dernier, peu qualifié certes pour être confesseur de la foi après la malédification que causaient ses excès de boisson, devint une charge pour le geôlier de la prison. Il en fut de même du malheureux Duban, ex-noble, arrêté pour ne pouvoir justifier de ses moyens d'existence. Comme tous deux étaient., incapables de payer leurs repas, ils furent dirigés vers les prisons de Nancy et y restèrent incarcérés jusqu'à la chute de Robespierre.
Si nous ajoutons aux précédents trois ou quatre soldats fautifs, réfractaires ou déserteurs, et autant de citoyens, compromis pour diverses raisons, nous aurons tout le bilan, relativement restreint, des victimes blâmontaises à cette sinistre époque.

LES MESURES D'ORDRE MILITAIRE

. «  La Patrie était en danger », c'est ce qui explique la rigueur des lois. Un premier appel aux Volontaires eut lieu en juillet 1792 : notre district fut taxé à 266 hommes; il en fournit 271. Tous les cantons ne montraient pas le même enthousiasme. Blâmont fut parfait avec ses 65 volontaires, parmi lesquels figuraient les fils des meilleures familles, comme François Florentin, Louis et Antoine Fromental. Badonviller fut aussi empressé avec ses 56 volontaires. Cirey n'en eut que 6. Le reste du contingent fut désigné par le sort parmi les membres de la Garde nationale, comme le voulait la loi. A Réchicourt, ce fut très épineux : aucun volontaire. Plusieurs villages, comme Igney, n'avaient pas de Garde nationale : comment tirer au sort ? On chercha à embaucher des domestiques. A Ogéviller, même difficulté. A Leintrey, 7 volontaires, dont 6 de Xousse ; mais il en fallait 23. Autrepierre, Chazelles, Reillon, n'avaient même pas envoyé de délégation. Un jeune garçon de Leintrey, désigné par le sort, allait donner sa signature, quand, sur un signe de son père, il s'esquiva; on ne put le retrouver. Un autre du même endroit, nommé Larue, eut aussi un mauvais numéro. Comme l'agent municipal voulait le lui porter, sa mère dit qu'il avait quitté le pays ; «  or, je suis sûr de l'avoir aperçu », certifia l'agent. L'élan patriotique des armées de la République a été beaucoup vanté; la réalité fut telle que nous venons de la décrire, au moins pour la première fois. Soyons justes cependant : une fois arrachés au sol natal, nos paysans retrouvaient toutes les qualités de la race.
Les recrues furent dirigées sur l'Armée du Rhin et partirent, le 2 octobre. On connaissait la reddition de Longwy et de Verdun, le recul jusqu'à Valmy et on craignait pour Nancy, quand, le 10 septembre, arriva de la Frimbole un exprès, annonçant que les Prussiens étaient à Sarrebourg. La Garde nationale prit les armes et se disposait à partir, quand on sut qu'il s'agissait d'une méprise : les fameux Prussiens n'étaient autres que des patriotes, égarés près de Phalsbourg, qui, en réclamant leurs rations, avaient oublié de se conduire à la française. La victoire de Valmy dissipa toutes les craintes.
Pendant tout l'hiver, des convois de toutes sortes défilèrent sur la route, à destination de Strasbourg. En mars, un second contingent d'hommes dut être levé : 200 pour le district, qui furent répartis en sept compagnies et élirent leurs chefs. Ils se mirent en marche, pendant le mois de mai. Un rapport de Fromental signale la gêne qu'en ressent l'agriculture : douze laboureurs devront cesser leur exploitation. Quelques exemptions accordées suscitent de vives protestations. Les anabaptistes prétendent que leur religion leur interdit de porter les armes; ils reçoivent cette réponse : «  L'égalité devant la loi n'a rien à voir avec votre religion ». Bien plus, comme ils avaient une façon particulière de porter la barbe, on s'avisa, quelque jour, d'en arrêter trois, parce que la Convention avait prohibé tous les signes extérieurs du culte.
L'été de 1793. fut plein d'alarmes, causées par les désastres de Wissembourg. Pour préparer le camp de Bitche, le district dut fournir deux compagnies de 98 travailleurs qui partirent en avril, sous les ordres de Poussardin, d'Angomont, et de Pacotte, de Cirey. De nouvelles levées d'hommes furent encore faites en. décembre et en mars 1794; la crainte des punitions faisait seule endosser l'uniforme. D'autre part, les ressources du pays s'épuisaient à force de réquisitions militaires. La guerre continua, mais dans le Nord, et c'est alors que l'Armée de Sambre-et-Meuse accomplit ses exploit. Puis l'hiver vint, l'inoubliable hiver de 1795, pendant lequel les privations et le froid causèrent tant de souffrances. En juillet fut conclue la paix séparée de Bâle.
Pour parer aux besoins de la guerre, le pays dut s'imposer des sacrifices de tout genre : dons patriotiques, travail forcé, fournitures d'animaux, de fourrages, de vêtements. Il fallut aussi déployer une activité qui ne s'était jamais vue : produire du salpêtre et du fer, fabriquer des sabres, des piques, des baïonnettes, tisser des étoffes, préparer des cuirs, des baudruches. Le Blâmontois participa largement à tous ces travaux et, la paix revenue, les continua, en les adaptant aux nécessités nouvelles.

LES VEXATIONS ODIEUSES

Le décret du 29 août 1792 avait enjoint d'abolir tous les signes de l'Ancien Régime. Dans notre district, l'exécution de cette mesure fut retardée jusqu'en octobre 1793. Voici les faits. A Blâmont, les ci-devant nobles apportèrent leurs titres à la mairie, ou déclarèrent qu'ils n'en avaient plus; il. n'y eut pas d'incorrection; le rapport de Fromental finit par ces simples mots : «  C'est toute la caste nobiliaire ». A Herbéviller, Fage déposa, sans fracas, sa croix de Saint-Louis et ses papiers. A Chatillon, Regneault en fit autant. A Badonviller, le dernier des Bannerot eut un geste peu honorable. C'était en la fête de la Reconnaissance et des Bonnes-Moeurs (30 novembre 1793); en arrivant devant l'arbre de la Liberté, il déchira ses titres avec mépris, les piétina et les jeta dans un brasier, pendant que la populace criait : «  Vive la République ! Périssent les tyrans !» A Cirey, la foule fut prise aussi de délire, mais sans qu'il y eût aucun noble. Les armoiries furent partout mutilées, du moins, celles qui étaient visibles au dehors. Qui le croirait ? les colombiers succombèrent sous les coups de l'exécration universelle : les gens de Chazelles, par exemple, éprouvèrent le besoin de clamer, à toute la contrée, leur joie délirante «  d'avoir rasé un pigeonnier misérable, d'où partaient des nuées de vautours pour dévorer leurs moissons ».
Plus odieux furent les attentats contre le culte catholique : les fêtes et les offices étaient abolis, les églises fermées et pillées, les signes extérieurs de la religion renversés. D'après la loi, toutes ces mesures devaient être achevées pour le 9 novembre; dans le Blâmontois, ces impiétés furent retardées jusqu'au 23. Les gens impuissants laissèrent faire. L'église de Blâmont fut louée à Vaultrin, pour 155 livres; l'intention de ce magistrat fut, sans doute, de la soustraire à la profanation; aucune autre église ne fut ainsi cédée à un particulier. Toutes les sonneries furent réduites à une seule cloche, qui put continuer les tintements de l'Angélus. Tous les métaux précieux et les bronzes prirent le chemin des fonderies nationales; les ornements, les cordes même furent portés aux magasins d'équipement. La croix surmontant les églises fut descendue à Badonviller, à Ogéviller, à Leintrey, à Foulcrey. Cependant, à en juger par les écrits qui nous restent, les propos et les actes vraiment sacrilèges furent assez rares : à Leintrey, le curé afficha une joie patriotique, quelque peu déplacée, en-livrant ses vases sacrés, et, à Chazelles, l'agent national put écrire dans son rapport : «  On ne trouverait ici aucun signe du fanatisme, ni croix, ni statue, ni sur le clocher, ni à la campagne, ni devant les maisons. » La cloche de Blâmont cessa de sonner l'Angélus, le 4 avril 1794, après la défense formelle du farouche Bar.
Il parait difficile d'apprécier la conduite du clergé constitutionnel, placé en face de ces profanations. Les traditions locales sont aujourd'hui très effacées; d'autre part, les rapports officiels ont dû exagérer, par bienveillance, la note de la soumission silencieuse. S'il faut en croire ces documents, aucun curé de la région n'éleva de protestation. La loi prescrivit, en outre, le dépôt des lettres de prêtrise et l'abdication. Par ménagement, le Directoire blâmontais attendit un long mois avant de mettre ses curés en demeure d'exécution. Survint le représentant Bar, qui exigea une soumission immédiate (12 février 1794). Trois jours après, Fromental put écrire : «  Les prêtres sont en voie de renoncer à leurs fonctions anciennes; quatre ont remis leurs lettres d'ordination, à savoir : Oury, Voinot, Gérard et Henry, cy-devant vicaire à Sainte-Pôle, qui s'est marié à Thionville. » Un cinquième s'était décidé pour le 20 mars. Il fallut une autre circulaire, datée du 15 avril, pour réduire les récalcitrants. Fromental écrivit, peu après : «  Il faut agir sur les autres par persuasion, seul moyen de réduire l'esprit public; vingt-quatre démissions sont déjà parvenues sur quarante-huit. » Le but fut atteint onze jours plus tard, et il n'y eut que quatre refus. obstinés qu'opposèrent Marcaire, Laforge, Mirbeck et Grosdy. On remarquera que démission et abjuration ou dépôt de lettres de prêtrise étaient deux choses très différentes. La seconde put paraître une formalité de pure complaisance, que presque tous accomplirent dans le secret, sans grande conviction (166) ; la première semblait devoir entraîner la perte de leur allocation. Un état de Dumont, dressé le 27 juillet, put les rassurer à ce sujet; il se termine ainsi : «  Tous, même les cinq non-démissionnaires, sont amis des lois, tranquilles et dignes de leur allocation » (167).
Si le Directoire blâmontais usait ainsi de ménagements, les Représentants du peuple marquèrent leur passage par des sévérités implacables.
En février 1794, Bar fit partir Voinot et Gérard, en leur enjoignant de s'éloigner à vingt lieues de Blâmont, pour que leur présence ne favorisât plus, le fanatisme, Le premier n'eut que trois jours pour s'en aller; l'autre, son vicaire, et aussi gérant de l'hôpital, en eut quinze pour pouvoir régler ses comptes; tous deux se rendirent à Saint-Mihiel et n'en revinrent que plus d'un an après. Lacoste exila à Dijon sept curés, sur une dénonciation de Jordy (168). L'habile plaidoirie de Fromental fut impuissante à les sauver, et ils durent passer deux ans là-bas, sous la surveillance de la municipalité. Michaud renchérit encore, par son arrêté du 13 septembre 1795, en ordonnant :
1° De démolir, sur le champ, les chapelles écartées qui servaient encore aux réfractaires;
2° D'éloigner à quatre lieues de distance, au moins, tout prêtre ayant rempli des fonctions pastorales dans le district; il n'y avait d'exemption que pour les infirmes, les septuagénaires et les mariés.
Comme toujours, Fromental fut habile et bienveillant. En répondant, le 8 octobre, il constate avec emphase que la raison a fait assez de progrès pour empêcher les gens de regretter les prêtres, puis il propose d'accorder l'exception à quatre mariés (169), à quatre septuagénaires (170), et à cinq vieillards approchant de 70 ans (171). Il eut gain de cause. Pierre, de Sainte-Pôle, infirme et sexagénaire, pour avoir négligé de formuler sa demande, se vit arrêté, puis transféré aux Grandes-Carmélites de Nancy, où il resta jusqu'au 10 décembre. Les autres indiquèrent le lieu de leur retraite, pour pouvoir toucher leur pension (172).
On fait peser volontiers de graves reproches d'immoralité sur le clergé d'avant la Révolution. La vérité est que, dans notre Blâmontois, ces désordres furent plutôt rares. Il faut reconnaître que deux religieux de Domèvre et deux curés de paroisses assez éloignées furent des sujets de scandale. Les quatre prêtres qui se marièrent dans les circonstances que l'on sait sont une bien faible minorité; ceux qui retournèrent à la vie laïque, comme Fromental et Mirbeck, ne sont pas plus nombreux. Et comment ne pas plaindre des malheureux comme Grosdy, qui tomba à Badonviller dans la plus pénible vulgarité, et comme Beaulieu, qui, devenu aveugle, dut mendier son pain sur la route de Thiébauménil ?
Cette époque, pénible pour le clergé, exerçait des tracasseries pareilles sur les civils. Malgré la modération du Directoire, les amendes et la prison les menaçaient sans cesse pour des vétilles, des fraudes ou des retards dans les réquisitions, pour des négligences dans les travaux imposés. Finalement, chacun se lassa d'un régime de liberté qui en accordait si peu. Le représentant Genevois fut frappé du mécontentement général, quand il arriva dans la Meurthe, en décembre 1794, et son premier soin, pour apaiser l'opinion, fut d'accorder la liberté à tous les prisonniers qui n'étaient pas indignes de clémence (173). Cette accalmie, venant six mois après la mort de Robespierre, marqua chez nous la fin de la Terreur.

II - Les Cantons

1° Courte accalmie

Des innovations aussi radicales dans la société ne pouvaient être mises au point sans tâtonnements. Après la constitution de l'an I, vint celle de l'an III, puis trois coups d'Etat, le Triumvirat et enfin le Consulat; c'est tout le bilan du Directoire.
La réforme de l'an III (1795) supprima le district, comme rouage inutile, et confia son attribution au canton, qui fut rattaché directement au département. Ce coup porté à la suprématie de Blâmont lui fut très sensible, et toute la population de la petite ville s'unit en une protestation énergique, mais inutile. Dans chaque canton, indépendant de son voisin, il y eut un Directoire et une Justice de paix; cinq membres formèrent le Directoire, où le président et le commissaire ou agent avaient un rôle prépondérant (174). Dans le conseil communal furent créés l'agent municipal (maire) et un lieutenant (adjoint). Des rapports décadaires devaient renseigner le département sur tous les détails de la vie cantonale ou communale.
Imposer un système n'est pas le réaliser. On s'aperçut bientôt que, dans presque tous les cantons, manquaient les éléments indispensables au nouvel organisme, à savoir : les hommes compétents d'abord, puis les locaux, enfin le matériel nécessaire pour les réunions. Pressé de demandes, le département ne put que répondre à Ogéviller et à Leintrey que leur maison communale servirait de prison ou d'asile; à Réchicourt, qu'il conviendrait de louer à beaux deniers une partie du château. Il eut fallu partout des gendarmeries. Blâmont eut sa brigade, qui fut renforcée de neuf grenadiers pour les séances de conscriptions, toujours tumultueuses. Badonviller reçut aussi trois gendarmes, pour surveiller les défilés des Vosges, fréquentés par les déserteurs. Partout ailleurs, l'agent national dut faire les courses de police. On laissa les notaires, en leurs études précédentes, à Blâmont, à Cirey, à Badonviller, à Réchicourt. On établit enfin, en 1797, deux bureaux de l'enregistrement, à Blâmont et à Réchicourt. Tout ce régime, installé en décembre 1794, fonctionna jusqu'à la constitution de l'an VIII (1801).
Dans ce temps d'accalmie, les populations, lasses des parades républicaines, s'enhardirent à demander la réouverture des églises et le retour des prêtres exilés. Les lois n'étant pas abolies, les autorités ne purent accorder de permissions, mais elles se montrèrent tolérantes. A Ancerviller, «  une caste fanatique, écrit le maire Gérard, s'est mise en tête de rouvrir l'église et d'y indiquer des réunions au son de la cloche. Des femmes s'y rendent, r'habillènt les autels et chantent des cantiques, comme au temps de la cy-devant religion catholique; le tailleur, Voinson, est l'âme du mouvement, et le maître d'école, Fricot, partisan de ces pratiques, s'est permis d'introduire un mort à l'église et de chanter ses obsèques ». Le juge de Blâmont fit comparaître les délinquants et fut, malgré tout, bon enfant. Voinson, incapable de nier ou de se disculper, en fut quitte pour quelques jours d'arrêt; Fricot put établir que son père, et non lui, avait introduit le corps, et que, se trouvant là, par hasard, il avait, chanté des psaumes ; il fut invité à ne plus recommencer. A Badonviller, un certain Ory était chargé de sonner l'Angélus et avait la clé de l'église. Or, pendant qu'il montait à la tour, les fidèles se faufilaient dans l'église. Interrogé sur ce fait, il répond qu'il n'en peut mais et le juge se contente de lui recommander plus de vigilance. Des faits analogues se répétaient partout, ce qui n'empêchait pas les agents nationaux d'écrire en leurs rapports décadaires : «  Les lois sont partout respectées, et l'ordre a été rétabli partout où nous l'avions vu troublé. » Les gens de Blâmont, reprenant la semaine catholique, affectaient de passer le décadi en costume de travail et le dimanche en beaux habits, au grand scandale du comité révolutionnaire, qui, en février, lance un blâme violent «  contre les indifférents qui ne viennent pas au Temple faire l'office de la Décade avec la Société populaire et chanter des cantiques à l'Etre suprême ».
La poussée populaire fut telle que, le 31 mai, on obtint une certaine liberté des cultes. Sans que les lois précédentes fussent abrogées, il fut admis qu'après déclaration à la commune les cérémonies chrétiennes pourraient être célébrées dans les églises ou dans les maisons particulières. Aussitôt cette formalité fut remplie par les curés restés à leur poste, ou les religieux non exilés. Les prêtres éloignés ou emprisonnés rentrèrent et les. paroisses du pays revirent les anciens offices, comme l'atteste ce rapport de Dumont (25 avril) : «  Les prêtres choisis de préférence sont des prêtres constitutionnels ; dans l'église de Blâmont, louée à un particulier, on exerce la religion catholique, sans aucun signe extérieur; les communes des campagnes ont pris tout bonnement leurs anciennes églises pour y exercer le culte, et je n'ai pas cru devoir m'en mêler. »
En si bonne voie, les prêtres s'enhardirent à redemander leurs lettres de prêtrise, et, sur avis favorable du Procureur général, en date du 12 juillet, elles furent rendues sans difficulté (175).
Tous les esprits cependant n'admettaient pas également la tolérance, et l'irréligion officielle conservait ses partisans. Les lignes suivantes, de Fromental, écrites en 1796, laissent percer une pointe de jalousie qui nous étonne : «  Le culte public devrait se conformer aux règles du calendrier républicain; or, la tendance est de reprendre le culte catholique avec ses fêtes et ses dimanches... On échappe trop facilement à la loi du culte officiel, en faisant des offices privés, messes et vêpres, dans les maisons particulières. »
On en vint à un tel point de tolérance qu'au début de 1797 plusieurs prêtres émigrés essayèrent de rentrer dans leurs paroisses. Cherrier reparut à Réchicourt, Rondeau à Remoncourt, Claude à Herbéviller, Pierron à Blâmont (176). Mais leur séjour dura peu ; ils couraient trop de dangers. Chatrian était bien informé en écrivant de son exil : «  Les prêtres rentrent, on devient plus humain en France, c'est vrai; mais on n'est pas plus religieux; qu'est-ce qu'un pauvre prêtre quoesumus (quêteur) peut bien faire y revenir ? »
Leur retour fit cependant du bien ; l'exemple de leur courage réveilla la conscience de plusieurs prêtres jureurs, et, comme ils avaient des pouvoirs spéciaux des. évêques légitimes, ils purent réconcilier avec l'Eglise les schismatiques qui le désiraient. Cherrier rendit ce service à Lacour, d'Amenoncourt, qui eut dès lors une conduite tout à fait digne; Gillot et Thomassin, prêtres cachés à Blâmont avec titres de missionnaires apostoliques, en firent autant pour Voinot, Gérard et Cristallin. II fallut un certain courage pour persévérer dans ces rétractations, car la persécution religieuse recommença avec le coup d'Etat du 18 fructidor (5 septembre 1797).

2° Derniers sursauts de la Révolution

Le serment de Haine à la Royauté et à l'Anarchie, imposé à tous les fonctionnaires, fut la principale affaire de ce temps. C'était un acte anodin par lui-même, mais les circonstances le rendirent si odieux qu'au dire de Chatrian les magistrats eux-mêmes méprisèrent ceux qui le prêtèrent. Les prêtres du Blâmontois hésitèrent beaucoup avant de s'y soumettre. Thiry fit exprès le voyage de Nancy, pour consulter des hommes plus éclairés. On le retrouve quelques jours après, présidant un conciliabule, dans lequel une dizaine de ses confrères examinèrent la conduite à tenir. La plupart penchaient pour l'abstention, quand l'un deux, très subtil assurément, émit l'avis que, la Royauté et l'Anarchie étant des êtres de raison, elles n'entraient pas dans la catégorie des êtres dont la haine est défendue par la loi divine. L'argument fut péremptoire et dissipa tous les scrupules. Cependant-Lacour, Cristallin et Thouvenin persistèrent dans leur refus ; Voinot et Gillet furent mis hors de cause et ne furent pas inquiétés. Mais on reprit les tracasseries contre les autres réfractâmes et on recommença les visites domiciliaires pour les retrouver. Le chartreux Lottinger, né à Blâmont, fut condamné à être fusillé, le 6 avril 1798 (177); Cristallin et Thouvenin s'enfuirent de Cirey et de Badonviller. On rechercha, en vain, les deux Colvis, émigrés rentrés; on arrêta, le 9 janvier 1800, Philippe Savoy, émigré, rentré chez son frère, curé de Tanconville. On fit d'autres perquisitions, notamment le 18 juillet 1798 et le 29 mai 1799, qui furent sans résultat.
Un rapport du 8 décembre 1798 fait un tableau navrant de l'état des paroisses : quatre prêtres seulement pour le canton de Blâmont, trois pour Badonviller, huit pour Cirey, cinq pour Leintrey, six pour Ogéviller. Plus de croix sur les tombes des cimetières; on s'obstine à préférer le dimanche au décadi; on ne s'attache pas aux fêtes républicaines, malgré les amendes et les poursuites (178).
Cependant les Théophilanthropes s'étaient mis en frais. Pour remplacer le culte de la Raison et de l'Etre suprême, déjà démodé, ils avaient imaginé des fêtes sentimentales, comme celles des fleurs, des époux, de l'agriculture, etc.. Blâmont, peut-être par dépit, resta dans une sage réserve; mais Ogéviller et Leintrey eurent des manifestations exubérantes, où se retrouve certainement le génie inventif de ses deux agents nationaux. Pour célébrer la Souveraineté du peuple (3 ventôse, an III), voici ce qui se fait à Leintrey. A 11 heures, la Garde nationale se met sous les armes, au son de la cloche; à midi, les autorités entrent à la mairie, puis un cortège s'ébranle vers l'église. En tête, marchent des garçons revêtus d'emblèmes symbolisant l'agriculture et l'industrie; un autre groupe porte les tables de la Constitution et les insignes de la Liberté ; les autorités suivent en uniforme, enfin le peuple s'avance, encadré par les gardes nationaux. Sur l'autel de la Patrie, Les emblèmes sont disposés en faisceaux harmonieux ; le recueillement est peint sur les physionomies. Alors, le plus âgé donne au maire la formule à lire; c'est une exhortation à répudier tout préjugé, source d'esclavage, et un discours concis explique le texte ; le peuple applaudit, une symphonie se fait entendre, puis un cantique républicain; puis le cortège s'ébranle à nouveau pour revenir à la mairie. La soirée est consacrée aux réjouissances et à la danse.
La même fête, un an après, donna l'occasion à Gley, agent national d'Ogéviller, de tonner contre les royalistes et les anarchistes «  qui ne songent qu'à rouvrir les cachots et à relever les échafauds. Qu'avons-nous besoin des hommes aux numéros 18 et 93 ? Alors apparaît un défenseur de la. Patrie, marqué de cicatrices glorieuses, qui chante d'une voix vibrante les couplets nationaux; l'assistance est émue; les gardes tirent une salve de boîtes » (179). A Blâmont, tout est plus simple : «  On a planté un arbre de la Liberté; ce fut une belle fête, agrémentée de deux mariages, célébrés sous cet arbre. »
L'impression causée par ces démonstrations étranges a pu incliner pour un temps les esprits vers l'impiété, mais un tel fatras ne réussit pas à déraciner les traditions catholiques, et Bonaparte fut acclamé, quand il proposa sa constitution de l'an VIII (15 décembre 1799). Les proscriptions cessèrent en 1800; le Concordat rétablit la vie chrétienne en 1801 ; la France allait changer de face.

3° Conséquences de la Guerre et réformes sous le Directoire

L'état de guerre, prolongé jusqu'en 1809, causa au pays des-souffrances sans nombre. Après l'hiver de 1795, les denrées atteignirent clés prix exorbitants, par suite de la disette et de la dépréciation des assignats. La simple façon d'une paire de bottes était payée 300 francs et le cordonnier n'y trouvait pas son compte. Une estampe allemande, où la haine a mis, sans doute, un peu d'exagération, représente une revue militaire à Mannheim ; l'accoutrement des soldats est sordide et leur tenue révèle la dernière misère. Après l'armistice signé par Pichegru, le 31 décembre, l'état des camps était réellement lamentable; aussi les désertions se produisaient en masse. Pendant six mois on vit alors déboucher des Vosges, vers Cirey ou vers Badonviller, des bandes en haillons, qui s'échappaient de Strasbourg. Les gendarmes leur donnaient la chasse, mais, disent leurs rapports, ils ne pouvaient les atteindre, parce que les paysans les cachaient par pitié ou leur donnaient de quoi se réconforter.
Avec le temps, la conscription entra dans les moeurs et on écrit de Blâmont, en décembre 1796 : «  Les soldats désignés se soumettent aux lois et prennent leur poste avec exactitude. » Ce qui n'empêche pas Potier de signaler sept évasions sur trente-quatre inscrits pour le canton

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LE GÉNÉRAL COMTE KLEIN
D'après un portrait appartenant à Mme O. Elie, née Phulpin son arrière-petite-fille

de Leintrey, et, chose étrange, quatre de ces évadés sont des habitants de sa paroisse. Un peu plus tard, Bonaparte institua un contrôle pour le conseil de révision; cette mesure acheva de faire accepter le service militaire. On ne peut nier que la vie champêtre plaisait plus que le tumulte des camps. Cependant, dit justement Rivarol, «  une fois arrachés à leur foyer et contraints à l'héroïsme, nos paysans devinrent avec leurs camarades les premiers soldats du monde, et ils firent trembler l'Europe, après être venus aux frontières en tremblant ».
Le Blâmontois eut sa phalange de soldats, issus de milieux divers, et plusieurs furent illustres, sous la République ou sous l'Empire. Il faut citer entre autres : Jean-Claude Thouvenin, qui devint juge de paix de 1803 à 1813 ; les deux frères Fromental, dont le dernier, Antoine, mourut à Montreux, vers 1840; les deux Romer, l'un, Auguste, né à Blâmont, grenadier intrépide, tué le 11 septembre 1798, en sautant dans une tranchée anglaise, et ayant assez de courage pour crier en mourant : «  C'en est fait de moi, vos soins sont inutiles, prenez ma place » ; l'autre, Joseph, neveu de Régnier et cousin du précédent, né à Toul, engagé dans l'Armée du Rhin, en 1794, puis, après des actions d'éclat, appelé à la Cour impériale, où il terminera sa glorieuse carrière sous la protection du Grand Juge. D'Amenoncourt sortirent François et Jean Geoffroy. Le premier, parti comme volontaire et devenu capitaine de hussards, continuera sa belle carrière sous l'Empire; nous le retrouverons plus loin. Le second, gendarme à Sarrebourg, resté légendaire pour son intrépidité et son amour de la discipline, fut décoré pour avoir capturé, au risque de sa vie, un brigand qui terrorisait la contrée. Terminons enfin par le plus célèbre de tous, le général Dominique-Louis Klein. Né à Blâmont, en 1761, de Jacques Klein, originaire de Hesse, et de Thérèse Mayeur, il entra dans les armées de la République en 1791, fut adjudant général après Fleurus, se couvrit de gloire dans l'Armée de Sambre-et-Meuse, et fut promu général de division, en 1798, en récompense de ses brillants états de services (180). Nous le retrouverons, plus tard, aux côtés des grands généraux de l'Empire.
Les réquisitions militaires de ces années mémorables ne nous émeuvent plus aujourd'hui. Elles furent alors un véritable fléau pour les lieux où passaient les troupes. Les corps d'armées se mettaient en marche uniquement avec un ordre de route donné par les chefs, et ils devaient se procurer, chemin faisant, tout ce qu'il leur fallait : armes, provisions et bagages. Est-il étonnant qu'à leur approche les paysans aient cherché à éluder leurs ordres de ravitaillement ? Plusieurs enquêtes de la gendarmerie furent faites, pour ce motif, à Xousse, à Cirey, à Hablainyille et dans les villages de la Verdurette. Parfois elles entraînèrent de fortes amendes, assez souvent elles finissaient par une menace comme celle-ci : «  Apprends que ta tête est garante, envers la Nation, de la violation des lois. Quand il s'agit de la Patrie, tout intérêt particulier doit être oublié. » C'était beau comme doctrine, mais difficile à inculquer. On le vit bien quand la Nation aux abois lança sa grande souscription nationale. Si le département fut, en somme, peu généreux, le Blâmontois fut plus que réservé.
Cependant le commerce s'était fort accru, le trafic avait doublé sur les routes, et les marchés portant sur les denrées, le bétail et les immeubles avaient rapporté de beaux deniers. C'est le temps où nous vinrent en bon nombre des Juifs, originaires, comme leur nom l'indique, des principales villes du Rhin, et suivant les mouvements des armées pour contribuer à leur ravitaillement.
Léon Spire apparut un des premiers, vers 1793 ; d'autres le suivirent, comme Herz, Vormus, etc.. Ils s'engageaient à fournir des chevaux, des grains, des fourrages, au risque parfois d'encourir de graves mécomptes avec l'Etat, devenu leur débiteur. On peut citer cet exemple. En 1799, 7.000 chevaux passèrent à Blâmont à une date qui importe peu. Lié par son contrat, Léon Spire s'empressa de fournir toutes les rations nécessaires. Or, après leur départ, le trésor oublia de payer la note, et il fallut plaintes sur plaintes, pour que l'intéressé obtînt enfin satisfaction. On ne dit pas cependant que cet incident l'aît appauvri.
Industrie et commerce se donnent la main d'ordinaire. Dans le Blâmontois, surtout agricole, il convenait de s'appliquer surtout à la fabrication des objets usuels les plus nécessaires. A la place d'ateliers d'armurerie longtemps prospères, Blâmont créa des tanneries, vers le milieu du XVIIIe siècle. On les installa le long d'un petit canal qu'on ouvrit entre la Voise et la Vesouze, au lieudit Moyenpré. Dans ce genre de travail réellement utile excellèrent les familles Vaultrin, Pierron, Kippeurt, Swach, Herz et Marin. Pour utiliser l'abondance de ses bois, Cirey se livra plutôt à la fabrication de la faïence et du fer. Avant 1760 déjà, Voltaire signalait toutes les richesses que l'on devait tirer du minerai de fer, très commun dans les terrains avoisinants. M. de Marinier, gendre du marquis du Chatelet, fit un timide essai en 1762; divers associés agrandirent la forge, en 1770 ; Benjamin Malherbe en fit un établissement qui rendit de réels services à la Nation pendant les guerres de la République. On cherchait le minerai non seulement à la Minière et au Haut-Bois, près de Hattigny, mais encore dans le vallon d'Allemcombe; on y utilisait tout un peuple d'ouvriers réquisitionnés. Dans l'usine, on voyait «  huit tournants sur la rivière, actionnant quatre soufflets, un martinet et deux grands marteaux ». Mais soudain, vers 1796, le travail fut arrêté et les commandes accaparées par des entreprises plus vastes. La forge devint papeterie, puis verrerie; aujourd'hui la glacerie a une réputation mondiale.
Au même moment, Pacotte travaillait le fer d'une autre façon, dans la forge de Saint-Maurice. Il produisait surtout des armes et des outils pour l'armée : baïonnettes, piques, lances, pelles, pioches, etc.. L'atelier, proche de la Blette, comprenait un haut feu, un marteau et un martinet et occupait une douzaine de forgerons. Vers 1820, Louis-François Batelot, fils de Christophe Batelot, bien connu à Blâmont (181), continua et agrandit cette industrie. Les Aubry, de Badonviller, eurent un atelier, où ils fabriquaient des alênes. Les trois frères Pacotte reprirent, après leur père, des usines de faïencerie, qu'ils perfectionnèrent, à Cirey et à Pexonne.
Telle était la remarquable activité du district blâmontais, pareille à celle d'une ruche qui semble plus bourdonnante aux heures d'orage et de calamité.

(Suite)


(126) Florentin, notaire du marquisat de Grandseille, habitait Blâmont depuis 1770. II fut épuré par le représentant du peuple Bar.
(127) Catabel, fermier royal à Badonviller, dès 1769, venu à Blâmont en 1794,
(128) Nicolas Vaultrin, né en 1747, à Blâmont, fut maire de Nancy en 1793, emprisonné jusqu'en 1794. Il eut deux frères : François de Sales et Jean-Baptiste; marié à Charlotte Klein, il en eut Gilbert-Catherine, qui mourut à Blâmont, en 1865.
(129) Il était cousin de Charles Regneault; marié à Françoise de Rambert, en 1772, il séjourna à Blâmont pendant la Révolution, après avoir été procureur à Longwy et maire royal à Saint-Nicolas-de-Port.
(130) Voir Archives départementales, L. 660.
(131) Voir Lepage : Le Département de la Meurthe, I, p. 72.
(132) Vers 1793, plusieurs hameaux perdirent leur titre de commune, tels que : Les Rappes, Ancerviller, Josain, etc... Ces deux derniers furent unis à Couvay. Mais comme les habitants préféraient être du canton de Blâmont, ils décidèrent d'appeler Ancerviller tout le groupe, firent valoir qu'il était plus rapproché de Blâmont que de Badonviller et obtinrent ainsi gain de cause.
(133) Voir Archives départementales, L. 633-634; Pfister : Les Députés de la Meurthe, M.S.A.L., 1911, p. 337.
(134) Voir Duvernoy : Inventaire Archives commun., série E., arrondissement de Lunéville, p. 61.
(135) Voir dans M.S.A.L., 1876, le récit d'une expédition de la Garde nationale de Blâmont, à Turkestein, le 10 septembre 1791, pour aller surprendre, dans les ruines du vieux château, des traîtres avec leurs munitions, Elle ne trouva rien, bien entendu, et se couvrit de ridicule par cette expédition, dont chacun déclina la responsabilité.
Les compagnies de Cirey et de Badonviller, un peu plus nombreuses que celles des simples villages, n'ont à leur actif que d'innocentes équipées à l'occasion des fêtes républicaines.
(136) Antoine Chaurard avait créé cette classe, vers 1780, à Badonviller, alors qu'il était chapelain de Saint-Florent, puis curé de ce lieu.
(137) Arch. départ., L., 154, 628, 633.
(138) II avait une soeur qu'il emmena avec lui, et un frère, résidant à Belcourt (les Rappes de Remoncourt), qui fut guillotiné. Tous leurs biens furent mis en vente, le 28 juin 1794, et adjugés pour 179.100 livres, au lieu de 39.302, prix d'estimation.
(139) Ce fut le dernier seigneur de Cirey. Ses biens furent vendus, le 16 décembre 1793: Pour sauver sa part, sa femme, Félicité Mortal, sollicita le divorce. Tous deux se retrouvèrent à Parux, après la Révolution, et y moururent, l'un, en 1817, l'autre, en 1819.
(140) Ses biens furent vendus, le 4 mars 1793. Il revint en. 1798. Alléguant qu'il n'était pas atteint par la loi contre les Emigrés, puisqu'il était parti en 1789, il essaya d'obtenir la restitution de ses biens, mais il fut débouté de sa demande (L., 2803, 2804).
(141) Son hôtel de Blâmont, plusieurs fois pillé par les armées de passage, allait être vendu en 1794, quand il reparut juste à temps pour s'opposer aux enchères, en démontrant qu'il n'était jamais sorti du territoire de la République.
(142) Les principaux acquéreurs de ses terres furent Cleff et Poirson, de Lcintrey.
(143) Cette ferme fut achetée, en 1795, par Boulanger, de Cirey, au prix de 99.715 livres.
(144) C'est en 1794 qu'il y eut le plus grand nombre de ventes : pour 493.690 francs en avril; 223.127 francs en mai; 179.100 francs en juin; les enchères produisirent presque toujours le double de la mise à prix.
(145) Elles se trouvent aux Archiv. départ., L., 740, 741, 742.
(146) Ce sont : Thiriet (Barbas), Gabriel (Domèvre), Uriot (Frémonville), Dieudonné (Harbouey), Le Duc (Leintrey), Marchal (Blémerey), Maire (Chazelles), Beaulieu (Reillon), tous chanoines réguliers; Parmentier (Bréménil), de Mirbeck (Vacqueville), Bastien (Neufmaisons), Potier (Saint-Martin), Le Paige (Xousse), Grosdy (Reclonville), Conroux (Mignéville), Delorme (Gondrexange), David (Ibigny) et tous les curés du canton de Cirey.
(147) Cet sont : Guillon et ses vicaires, Litaize et L'Hommée (Blâmont), Guise (Gogney), Garry (Repaix), Chaurand (Badonviller), Latasse (Fenneviller), Pierron (Neuviller), Desjardins (Pexonne), Barbiche (Montreux), Pierre et son vicaire Kippeurt (Sainte-Pôle), Lacour (Amenoncourt), Laforge (Autrepierre), Rondeau (Remoncourf), Cordier, Carel et Garosse, vicaires (Ogéviller), Laurent (Brouville), Claude (Herbéviller), Mandel (Merviller), Laurent (Montigny), Malnory (Avricourt), Mena (Foulcrey), Claude (Moussey).
(148) Ce sont : Laurent (Verdenal), Richard (Hablainville), Zuibel (Igney), Cherrier (Réchicourt).
(149) Voir Abbé Constantin : L'Election de l'Evêque constitutionnel de la Meurthe
(150) Voir Cuissard : Notes pour servir à l'Histoire de Cirey, p. 256.
(151) Dominique Gley, ordonné à Nancy, le 17 février 1790, émigra quelque temps après son curé, puis, de retour, fut incarcéré à Nancy, en 1793, et élargi, en 1795 ; mais il changea, de sentiments, se maria, et devint, comme agent national du canton d'Ogéviller, un zélé partisan de la Révolution. Il mourut sans avoir fait régulariser son mariage.
(152) Archives départementales, L., 744, 745.
(153) Ce furent : Guillot, Litaize, l'Hommée, les deux Laurent, Oury, de Gogney, ordonne prêtre à Saint-Dié, le 19 mars 1790, et mort peu après en exil; Garry, Richard, Barbiche, Chaurand, Desjardins, Delorme, Claude, Gley, Latasse, Mena, Malnory, Guise, mort en exil, Cherrier. La plupart ne revinrent qu'en 1802.
(154) Louis Fromental, né à Blâmont, neveu du procureur, fut ordonné prêtre par Lalande, en 1792; il déposa ses lettres de prêtrise, en 1793, et acheva sa vie laïquement à Frémonville (L., 134, 617).
(155) Il mourut à-Domèvre le 1er février 1795, dans une misère profonde, paralysé depuis 1793, abandonné de tous, et tellement déconsidéré qu'à ses funérailles on ne vit que son unique domestique et son chien.
(156) On trouvera tous les noms faisant partie de ce personnel religieux dans les pièces d'archives (L., 635, 742, 746.).
(157) Le P. Georgel Jean-Damascène, dernier gardien du couvent, émigra en Allemagne; le P. Thomas, retiré à Bar-le-Duc, fut déporté et mourut sur les pontons de Rochefort, en 1794; le P. Masson revint se cacher à Barbas, où une dénonciation le fit arrêter en 1794, et emprisonner à Nancy, jusqu'en; 1795; le P. Sacré se retira à Vignot; le P. Cholay, à Charmes; le P. Saintin, à Pont-à-Mousson ; le P. Oury, de Blâmont, jureur, devint curé intrus à Avricourt et autres lieux; réconcilié au concordat, il fut curé de Nonhigny jusqu'à sa mort, en 1824.
(158) Ce mémoire, trop long pour être même analysé ici, contient des détails curieux sur la vie municipale d'alors, et laisse apercevoir, dans les deux camps, un arbitraire, qui pouvait justifier bien des critiques. Arch. départ., L., 662.
(159) On trouve son nom, écrit par lui, avec un C ou un G, indistinctement, et souvent terminé par un t.
(160) Les présidents furent : Laplante, puis Lombard, puis Didier Florentin. Les secrétaires : Aubert, Marcel, Chanel.
(161) Legrand, de Remoncourt, a dit qu'il aimerait mieux donner son blé aux cochons que de le laisser aux réquisitions militaires. Laurent, de Blâmont, garde national, de service à la fête du 10 août, a refusé de présenter les armes devant l'autel de la Patrie, en disant qu'il n'adorait pas les idoles, il a plaisanté l'officiant Voinot et les filles présentes à la cérémonie. Germain, de Rechicourt, a entendu dire à un homme ; «  Je voudrais être l'assassin de Marat », mais on ne put le retrouver.
(162) Louis-André de Laugier, propriétaire de Belcourt (Remoncourt) et de la censé de Milbert, savant naturaliste, auteur d'un traité de pharmacie, frère de l'abbé de Laugier. (Michel : Biographies lorraines, p. 300; Arch. départ.,, L., 3161.).
(163) Le registre des décès porte seulement : exécution de Louis Laugier, âgé de 68 ans, rentier, demeurant à Belcourt, condamné à mort pour avoir entretenu une correspondance criminelle avec les ennemis de la République et fait passer de l'argent aux Emigrés, acte dressé le 8 ventôse, an II (28 décembre 1793); aimable communication de M. Denis, archiviste municipal de Nancy.
(164) Voir Mangenot : Les Ecclésiastiques de la Meurthe, p. 41, 47.
(165) Arch. départ., L., 609, 617, 744.
(166) Conroux, de Mignéville, refusa cet acte d'apostasie par ces nobles paroles, rapportées par Chatrian : «  Si on me guillotine, tant mieux,; je l'ai mérité. » E. Martin : Histoire du diocèse de Tout, III, p. 149.
(167) Arch. départ. M.-et-M., L., 611.
(168) C'étaient les curés de Cirey, Bertrambois, Ibigny, Saint-Georges, Mattigny, Frémonville et Domèvre. Après enquête, on reconnut qu'il fallait mettre Tanconville, au lieu de Frémonville (L., 609, 717, 744).
(169) Pélissier, Gley, Henry et Uriot. Ce dernier prit peur, en se voyant en bulle aux tracasseries de Lacoste, et il s'unit à sa paroissienne, l'exaltée Catherine de Pindray. Il est mort à Saint-Maurice, cinq ans après, en 1799. Chatrian en écrit, en 1802 : «  Nous ignorons si Uriot a mis un emplâtre sur ses maux, il est plus vraisemblable qu'il n'est pas revenu sur ses pas. »
(170) Maldidier, Parmentier, Marchal, Rollin.
(171) Duc (69), Collot (69), Laforge (67), Gary (63), Thiriot (61).
(172) Le Paige, Baccarat; Thirion, Steige (Alsace); Didelot et Christophe, Lunéville; Feuillette, Barbas; Gary, Fromental et Marin furent favorisés, en restant à Repaix, Frémonville et Belcourt.
(173) C'est en sortant de la prison de Strasbourg, que la R. M. Viart, supérieure générale de la Congrégation de Saint-Charles, trouva la mort, dans un accident de diligence, un peu au dessus de Blâmont. Recueillie par les deux Soeurs de l'Hospice, elle fut inhumée provisoirement à Blâmont, puis transportée plus tard à Nancy, Pfister : Histoire de Nancy, II p. 1019, note 2.
(174) A Blâmont ; président, Thouvenin ; commissaire, Fromental. A Leintrey : Paulus et Potier, curé de Saint-Martin. A Ogéviller : Bailly et Gley. A Cirey : Cambas et Dumont, sorti de Blâmont. A Badonviller : Lâchasse et Boulangier. Les juges de paix ne furent pas changés.
(175) Archiv. départ., L., 629, 174.
(176) Cherrier resta à peine deux mois, il était déjà reparti en septembre, il mourut en 1800, on ne sait où. Rondeau fut d'abord assez mal reçu; une veuve consentit à le loger; ses vertus touchèrent enfin tous les coeurs et on ne le laissa pas repartir. Le prêtre intrus, vivant aux Rappes, était en bons termes avec lui. La police-feignit de l'ignorer et il vécut là jusqu'à la fin de la tourmente. Claude, revenu, le 5 août, sur l'invitation d'un habitant, fut mal reçu; Gley, l'ami d'autrefois, ameuta les gens contre lui et il n'eut même pas la joie de célébrer la messe; il repartit en Allemagne. Pierron revint de Florence en avril, et y repartit en octobre.
(177) Voir Mangenot ; Les Ecclésiastiques de la Meurthe, p. 424.
(178) Voir L., 172, 183, 184.
(179) Voir L., 162, 172, 182.
(180) Il avait épousé, en 1783, Marie-Agathe Pierron, d'Herbeviller, et en avait eu : Marie-Arsène-Edouard, né en 1784, et Charles-Joseph, né en 1786, à Blâmont.
(181) Christophe Batelot vint de Saint-Georges, vers 1780, fut l'un des principaux de Blâmont pendant la Révolution, maire de 1805 à 1816 et de 1826 à 1829; mort à Blâmont en 1829. Marié à Louise Laurent, il en eut : Marie-Jacques, né en 1785 à Blâmont, maître de forges à Abreschviller, puis fondateur de la forge de Blâmont, au Moulin-des-Champs, mort prématurément en 1829, et Louis-François, maître de forges à Saint-Maurice, mort en ce lieu en 1835.

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